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25/05/2012 | FRANCE | N°11LY01284

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 3ème chambre - formation à 3, 25 mai 2012, 11LY01284


Vu la requête, enregistrée le 23 mai 2011, présentée pour M. Jean-Georges A, domicilié ... ;

M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1001173 du 10 février 2011 par lequel le Tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande tendant à condamner la chambre de commerce et d'industrie de Brioude à lui payer une somme globale de 150 281,61 euros, avec intérêts à taux légal à compter de la notification du licenciement ;

2°) de condamner la chambre de commerce et d'industrie de Brioude à lui payer ladite somme de 150 281,61 euros, av

ec les intérêts susmentionnés, et une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. ...

Vu la requête, enregistrée le 23 mai 2011, présentée pour M. Jean-Georges A, domicilié ... ;

M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1001173 du 10 février 2011 par lequel le Tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande tendant à condamner la chambre de commerce et d'industrie de Brioude à lui payer une somme globale de 150 281,61 euros, avec intérêts à taux légal à compter de la notification du licenciement ;

2°) de condamner la chambre de commerce et d'industrie de Brioude à lui payer ladite somme de 150 281,61 euros, avec les intérêts susmentionnés, et une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Il soutient que ;

- le Tribunal a commis une erreur de droit en estimant inopérants les moyens de légalité externe, tirés de l'insuffisance de motivation et du défaut de consultation de l'autorité de tutelle, qu'il invoquait à l'encontre de son licenciement ;

- le Tribunal a commis une erreur d'appréciation quant au caractère fautif du licenciement, qui n'est pas motivé ;

- la chambre de commerce et d'industrie de Brioude n'a pas respecté la procédure applicable aux salariés protégés, M. A exerçant les fonctions de conseiller prud'homal à la date du licenciement, le 1er octobre 2008, les élections prud'homales ayant eu lieu en décembre 2008 ;

- en application de l'article 38 du statut du personnel de l'assemblée des chambres de commerce et d'industrie, des chambres régionales de commerce et d'industrie et des groupements interconsulaires il conservait son statut de salarié ;

- le statut de conseiller prud'homal n'est pas incompatible avec son statut d'agent de droit public, directeur général de la chambre, et le défaut d'autorisation du licenciement par le préfet constitue une irrégularité substantielle de nature à engager la responsabilité de la chambre ;

- l'article R. 712-2 du code du commerce prévoit que le préfet assure la tutelle de la chambre de commerce et d'industrie, établissement public administratif en vertu de la loi du 2 août 2005, et il sollicite une indemnité de 35 444 euros pour méconnaissance de la procédure de licenciement applicable aux salariés protégés ;

- le licenciement n'est pas fondé ;

- le licenciement crée un différentiel de 126 jours au regard de la prise en charge des droits à la retraite, et ainsi un préjudice qui s'élève à 11 362,68 euros ;

- le licenciement a aussi créé un préjudice en raison de la cessation anticipée du versement, par la chambre de commerce et d'industrie de Brioude, des cotisations, préjudice évalué à 20 838 euros ;

- écarté du processus de décision par le nouveau président, le licenciement étant entaché d'erreur d'appréciation et de détournement de pouvoir et de procédure, car décidé depuis longtemps, il a connu une dépression, l'ensemble constituant un préjudice moral évalué à 20 000 euros ;

- le calcul de l'indemnité de licenciement a méconnu le statut du personnel administratif des chambres de commerce et d'industrie et la convention d'embauche en ne retenant pas ses services antérieurs, le différentiel dû s'élevant à 55 873, 43 euros ;

- le différé d'indemnisation de 75 jours est erroné, occasionnant un préjudice de 6 763,50 euros ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire, enregistré le 22 septembre 2011, présenté pour la chambre de commerce et d'industrie de Brioude, qui conclut au rejet de la requête, et à la condamnation du requérant à lui verser une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

La chambre soutient que :

- la motivation du licenciement est suffisante ;

- la demande indemnitaire fondée sur l'absence d'autorisation par le préfet n'ayant pas fait l'objet d'une réclamation préalable est irrecevable ;

- à titre subsidiaire, le code du travail sur lequel s'appuie une telle demande est inapplicable en l'espèce, M. A étant devenu agent de droit public ;

- la convention d'embauche qui prévoit la prise en compte, pour la rémunération, des services antérieurs, ne la prévoit pas expressément au titre de l'indemnité de licenciement ;

- le différé d'indemnisation de 75 jours n'est pas erroné ;

- la responsabilité de la chambre de commerce et d'industrie de Brioude ne peut être engagée, aucune faute n'ayant été commise et aucun préjudice anormal et certain n'ayant été occasionné pour la prise en charge des droits à la retraite et le versement des cotisations ;

- le requérant n'établit pas que le nouveau président s'est engagé moralement à le conserver dans ses fonctions, ou qu'il l'aurait écarté du processus de décision ;

- il n'établit pas que le licenciement aurait été décidé depuis longtemps ;

- le statut particulier des directeurs généraux ne permet pas de se prévaloir des bonnes relations avec un précédent président ;

- il ne pouvait prétendre à un reclassement ;

- le lien direct entre l'état de santé de M. A et son licenciement n'est pas établi ;

Vu le mémoire, enregistré le 7 décembre 2011, présenté pour M. A, qui maintient ses conclusions et moyens, et porte à 2 000 euros sa demande présentée au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; le requérant soutient en outre que :

- les demandes indemnitaires ajoutées devant le juge sont recevables ;

- un agent de droit public ne peut être licencié pour seule perte de confiance ;

- en l'espèce les raisons avancées ne peuvent justifier la perte de confiance ;

- la chambre de commerce et d'industrie de Brioude avait l'intention de licencier M. A ;

- la chambre régionale de commerce et d'industrie d'Auvergne (CRCIA) avait donné son accord pour une avance remboursable de 72 000 euros ;

- à le supposer exact, le différé de 75 jours ne fait pas obstacle au règlement plein de l'indemnité statutaire, qui est la contrepartie normale du pouvoir discrétionnaire donné au président de le licencier ;

- le préjudice est anormal et spécial ;

- le préjudice est aussi certain, car M. A n'aurait pas démissionné de son emploi ;

- le caractère stratégique du poste ne fait pas obstacle à l'obligation de motiver le licenciement ;

- son état de santé pouvait être attesté par un certificat médical du 23 avril 2010 ;

- aucune offre de reclassement n'a été présentée ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;

Vu l'arrêté du 25 juillet 1997 relatif au statut du personnel de l'assemblée des chambres de commerce et d'industrie, des chambres régionales de commerce et d'industrie et des groupements interconsulaires ;

Vu le code du travail ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 4 mai 2012 :

- le rapport de M. Rabaté, président ;

- les conclusions de Mme Schmerber, rapporteur public ;

Et les observations de Me Juilles pour M. A et de Me Léon pour la chambre de commerce et d'industrie de Brioude ;

Considérant que M. A, directeur général, a été licencié par courrier en date du 30 septembre 2008 du président de la chambre de commerce et d'industrie de Brioude ; qu'il a demandé au Tribunal administratif de Clermont-Ferrand la réparation des préjudices résultant de ce licenciement ; que par la présente requête, il demande à la Cour d'annuler le jugement du 10 février 2011 par lequel le Tribunal a rejeté sa demande, et de condamner la chambre de commerce et d'industrie de Brioude à lui verser la somme de 150 281,61 euros ;

Sur le bien-fondé du jugement :

Sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non recevoir opposée en défense :

Considérant que la demande présentée par M. A devant le Tribunal administratif de Clermont-Ferrand tendait à la condamnation de la chambre de commerce et d'industrie de Brioude à lui verser diverses indemnités, suite à son licenciement, et du fait de l'illégalité de ce licenciement ; que les premiers juges ont écarté à tort comme inopérants les moyens tirés de l'insuffisance de motivation de la décision de licenciement, et de la méconnaissance, par la chambre, de la procédure d'autorisation du licenciement ; qu'il s'ensuit qu'il y a lieu pour la Cour d'examiner lesdits moyens, ainsi que les autres invoqués par M. A devant le Tribunal administratif de Clermont-Ferrand et devant elle ;

Considérant que la décision de licenciement du 30 septembre 2008 énonce les motifs de fait et de droit qui la fondent ; qu'elle est, par suite, suffisamment motivée ;

Considérant qu'aux termes de l'article D. 1442-18 du code du travail : " Le conseiller prud'homme qui, en cours de mandat, perd la qualité en laquelle il a été élu et en acquiert une autre doit le déclarer au procureur de la République et au président du conseil de prud'hommes. Cette déclaration entraîne sa démission de plein droit.(...) " ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que M. A, nommé directeur général de la chambre de commerce et d'industrie de Brioude au 1er janvier 2005, était devenu un agent public relevant notamment des dispositions de l'arrêté du 25 juillet 1997 relatif au statut du personnel de l'assemblée des chambres de commerce et d'industrie, des chambres régionales de commerce et d'industrie et des groupements interconsulaires ; que s'il se prévaut de son mandat de conseiller prud'homme exercé du 8 janvier 2003 au 31 décembre 2008 pour soutenir que son licenciement aurait dû être autorisé par le préfet, sa nomination à la chambre aurait dû entraîner sa démission de plein droit dudit mandat, en application de l'article D. 1442-18 précité du code du travail ; que, par suite, ce moyen doit être écarté, et l'intéressé n'est pas fondé à demander la réparation du préjudice résultant de l'absence d'autorisation du préfet ;

Considérant qu'aux termes de l'article 43 de l'arrêté du 25 juillet 1997 susmentionné : " La cessation de fonctions du directeur général intervient dans les cas suivants : (...) / 5° Licenciement à la discrétion du Président de la Chambre : / Ce licenciement résulte de la dénonciation de la convention par mesure unilatérale du président, sans que ce dernier invoque un motif tiré de la capacité ou du comportement du directeur général. / Il est soumis à un préavis de six mois ; il ouvre droit à l'indemnité de licenciement prévue à l'article 46 ci-dessous et au revenu de remplacement prévu à l'article 35 bis du présent statut. / Il ne peut être prononcé avant l'expiration d'un délai de huit mois suivant la date des élections à la Chambre de Commerce et d'industrie. " ; que M. A, directeur général, occupait un emploi supérieur mettant en cause la direction stratégique de la chambre ; qu'en conséquence, son licenciement pouvait intervenir pour des raisons tirées de la perte de confiance ; qu'il résulte des termes mêmes de la décision de licenciement qu'étaient reprochées au requérant des divergences avec le président de la chambre sur la stratégie et le mode de fonctionnement de la chambre de commerce et d'industrie (CCI), et une concertation insuffisante avec le président ; qu'il n'est pas démontré que ces motifs reposent sur des faits matériellement inexacts ;

Considérant qu'il n'est pas établi que le requérant aurait subi de la part du nouveau président une mise à l'écart injustifiée ; qu'aucun texte ni aucun principe ne faisait obligation à la chambre de commerce et d'industrie de Brioude, en l'espèce, de procéder au reclassement de M. A ; que le détournement de pouvoir allégué n'est pas établi ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la décision de licenciement ne peut engager la responsabilité de la chambre à l'égard de M. A ; qu'il suit de là que les conclusions à fin de réparation du préjudice moral, non établi en l'espèce, et des préjudices relatifs aux droits à la retraite du requérant ne peuvent qu'être rejetées ;

Considérant que M. A soulève à nouveau, en appel, les moyens déjà soulevés devant le Tribunal administratif de Clermont-Ferrand, tirés de ce que le calcul de son indemnité de licenciement serait erroné, faute d'avoir pris en compte ses services antérieurs, et que le différé du versement de 75 jours de celle-ci ne trouverait pas à s'appliquer ; que ces moyens doivent être écartés pour les motifs retenus par le Tribunal et qu'il convient pour la Cour d'adopter ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. A n'est pas fondé à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande tendant à la condamnation de la chambre de commerce et d'industrie de Brioude à lui verser la somme de 15 0281, 61 euros ;

Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation. " ;

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la chambre de commerce et d'industrie de Brioude, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que M. A demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ; qu'il y a lieu, en revanche, de faire application de ces dispositions et de mettre à la charge de M. A une somme de 1 000 euros au titre des frais exposés par la chambre de commerce et d'industrie de Brioude et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. A est rejetée.

Article 2 : M. A versera à la chambre de commerce et d'industrie de Brioude la somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. Jean-Georges A et à la chambre de commerce et d'industrie de Brioude.

Délibéré après l'audience du 4 mai 2012 à laquelle siégeaient :

M. Rabaté, président de la formation de jugement,

M. Seillet et Mme Dèche, premiers conseillers.

Lu en audience publique, le 25 mai 2012.

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N° 11LY01284


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 11LY01284
Date de la décision : 25/05/2012
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

36-10-06 Fonctionnaires et agents publics. Cessation de fonctions. Licenciement.


Composition du Tribunal
Président : M. RABATE
Rapporteur ?: M. Vincent RABATE
Rapporteur public ?: Mme SCHMERBER
Avocat(s) : DEVES

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2012-05-25;11ly01284 ?
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