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06/06/2013 | FRANCE | N°12LY01408

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 4ème chambre - formation à 3, 06 juin 2013, 12LY01408


Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 4 juin 2012, présentée pour la société AIA, atelier de la Rize, dont le siège est 15 rue de la Rivaudière à Saint Herblain Cedex (44805), la SCP d'architecture Arnaud et Poingt, dont le siège est 123 rue Garibaldi à Chambéry (73000), la société CERA ingénierie, dont le siège est 15 rue Olympe de Gouges à Saint Herblain (44800), la société AGIBAT MTI ingénierie, dont le siège 20 chemin Louis Chirpaz à Ecully (69130) ; elles demandent à la Cour :

1°) à titre principal, d'annuler le jugement n° 0704175 du 5 avril

2012 par lequel le Tribunal administratif de Grenoble les a condamnées solidair...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 4 juin 2012, présentée pour la société AIA, atelier de la Rize, dont le siège est 15 rue de la Rivaudière à Saint Herblain Cedex (44805), la SCP d'architecture Arnaud et Poingt, dont le siège est 123 rue Garibaldi à Chambéry (73000), la société CERA ingénierie, dont le siège est 15 rue Olympe de Gouges à Saint Herblain (44800), la société AGIBAT MTI ingénierie, dont le siège 20 chemin Louis Chirpaz à Ecully (69130) ; elles demandent à la Cour :

1°) à titre principal, d'annuler le jugement n° 0704175 du 5 avril 2012 par lequel le Tribunal administratif de Grenoble les a condamnées solidairement à verser au centre hospitalier de Chambéry la somme de 180 732,58 euros toutes taxes comprises avec intérêts, et à supporter les dépens ;

2°) à titre subsidiaire, de condamner la société des parkings de Savoie, in solidum avec la société GFC à les garantir entièrement de toutes condamnations qui pourraient être prononcées à leur encontre ;

3°) de mettre à la charge du centre hospitalier de Chambéry une somme de 8 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Les sociétés requérantes font valoir que le projet de construction dont la maîtrise d'oeuvre a été confiée au groupement qu'elles constituaient par marché du 12 octobre 1999, comprenait la construction du bâtiment " pôle femme, mère, enfant ", du bloc opératoire et de la stérilisation centrale, ainsi que la réalisation d'un parc de stationnement souterrain situé sous la partie bloc opératoire et stérilisation ; que le Tribunal a commis une erreur d'interprétation au sujet du rôle confié aux membres du groupement de maîtrise d'oeuvre et notamment des stipulations de l'avenant du 3 octobre 2003 en estimant que la responsabilité du groupement pouvait être engagée par le fait que l'entreprise GFC chargée des terrassements du parking a, pour des raisons qui lui sont propres, remplacé la paroi berlinoise de soutien des terres prévue dans l'APD par une paroi cloutée qu'il a fallu détruire car implantée dans l'emprise du bâtiment femme, mère, enfant, venant en superstructure ; qu'en effet la mission initiale du groupement pour la réalisation du pôle femme, mère, enfant, du bloc opératoire et de la stérilisation centrale a été complétée par 7 avenants dont 2 spécifiques, en date du 1er août 2000, prenant en compte les missions APS et ESQ pour le parking, et du 5 juillet 2002 prévoyant deux missions complémentaires, à savoir un APS partiel et un APD complet à l'exclusion de toute autre prestation ; que la construction et l'exploitation du parc de stationnement ayant été concédée par l'hôpital par contrat du 15 octobre 2002 à la société Q-Park aux droits de laquelle se trouve la société des parkings de Savoie, il y a eu finalement deux équipes de constructeurs qui ont été chargées de deux ouvrages distincts : le bâtiment réalisé sous la maîtrise d'oeuvre du groupement, et le parking souterrain réalisé par le concessionnaire et confié par lui à l'entreprise GFC en dehors du groupement de maîtrise d'oeuvre du bâtiment ; que leur mission s'est trouvée modifiée par l'avenant du 3 octobre 2003 au marché de maîtrise d'oeuvre mettant fin à la mission du groupement pour la définition du parking lors du dépôt de la demande de permis de construire au stade APD, et stipulant que cette mission d'assistance " n'induit aucune responsabilité de maîtrise d'oeuvre pour la construction du parc de stationnement sous-terrain, laquelle est incluse dans la DSP confiée à Q-Park. " ; qu'à la date de signature de l'avenant la paroi provisoire, objet du contentieux, était déjà réalisée par la société GFC depuis le mois de mai 2003, sans aucune intervention du groupement de maîtrise d'oeuvre du " pôle femme, mère, enfant " ; que le contrat de concession et cet avenant n'ont fait que régulariser et officialiser une situation et des dispositions arrêtées et mises en place bien avant ; que si le groupement a bien établi l'APD, d'une part il avait prévu des ouvrages provisoires de soutènement des talus pouvant rester en place mais à condition que leur côte supérieure se situe à un mètre en dessous du niveau des terres du projet définitif, d'autre part il n'a pas été maître d'oeuvre du parking mais seulement chargé d'une mission de conseil et d'assistance au titre de l'interface afin que la réalisation des structures du parking soient exécutées dans les conditions de l'APD pour permettre la réalisation de la superstructure du " pôle femme, mère, enfant " ; que la paroi ne figure sur aucun plan y compris de l'entreprise telle que réalisée effectivement par cette dernière ; que le groupement, dont la mission d'interface ne comprend en aucune façon des réunions ou visites de chantier, ne pouvait que prendre en compte les documents graphiques qui lui étaient remis qui montraient tous que le soutènement était provisoire puisqu'il ne figurait plus sur les plans de terrassement après travaux, remis par l'entreprise ; que le Tribunal n'a pas pris en compte le fait que la paroi cloutée était un ouvrage provisoire défini par les plans d'atelier et de chantier de l'entreprise GFC ; à titre subsidiaire, qu'étant un tiers par rapport au concessionnaire du parking, le groupement de maîtrise d'oeuvre doit être garanti entièrement sur le fondement quasi délictuel par ce dernier qui, selon les termes du contrat de concession, assurait la maîtrise d'ouvrage du parking et devait assumer seul la responsabilité de tous dommages causés par l'exécution de travaux tant envers le concédant qu'envers les tiers ; qu'il en est de même de la société GFC qui a toujours laissé penser que l'ouvrage de soutènement était un ouvrage provisoire ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire, enregistré le 16 août 2012, présenté pour la société GFC construction, qui conclut : à titre principal à l'annulation de l'article 4 du jugement la condamnant à garantir la maîtrise d'oeuvre à hauteur de 50 %, et à ce que soit mise à la charge des sociétés requérantes une somme de 5 000 euros au titre des frais non compris dans les dépens ; à titre subsidiaire à ce que le montant du préjudice soit limité à la somme de 7 712 euros hors taxe et que la somme de 26 649,40 euros pour la mise à niveau de la plateforme ne soit pas mise à sa charge et que sa garantie soit limitée à 50 % ; elle soutient que, comme l'a justement relevé l'expert, le groupement de maîtrise d'oeuvre avait un devoir de coordination entre les deux chantiers et que le manque de synthèse est seul responsable de la découverte tardive du problème ; que le groupement était parfaitement informé de la réalisation de la paroi litigieuse et a eu tous les documents nécessaires pour connaître la position et l'altimétrie de cette paroi spécialement " le plan rectificatif parois projetées " du 19 mars 2003 qu'elle a transmis au groupement le 25 mars 2003 ; que ce dernier a pu visualiser l'ouvrage lui-même de nombreux mois avant que se poursuive le chantier du " pôle femme, mère, enfant " ; que l'avenant n° 5 au marché du groupement précisait que la mission de maîtrise d'oeuvre comportait la participation à des réunions, la prise de connaissance et/ou vérification de certains documents préparés par GFC avec émission de remarques et/ou validation dès lors que cela concernait des interfaces avec le " pôle femme, mère, enfant " ; que le groupement a participé aux réunions de chantier et était destinataire des comptes-rendus ; que, plusieurs mois après l'achèvement de la paroi, la maîtrise d'oeuvre n'avait toujours émis aucune observation et a attendu les opérations préalables à la réception pour " découvrir " la position de la paroi cloutée ; qu'ainsi, les désordres étant imputables au groupement de maîtrise d'oeuvre, elle ne saurait être appelée en garantie et l'article 4 du jugement devra être annulé ; que d'ailleurs, contrairement à ce qu'a estimé le Tribunal, le dossier APD ne faisait pas partie des pièces contractuelles énumérées par la convention de contractant général passée avec la société Parko France le 15 octobre 2002 pour la construction du parking ; que l'emprise du chantier lui était contractuellement imposée de sorte qu'il était nécessaire de retenir les terres par un soutènement adéquat, peu important sa nature, alors que la décision de positionner la paroi de soutènement au-delà de l'emprise du chantier aurait nécessité des déplacements de réseaux et une modification de l'accès au bâtiment maternité existant, ce qui ne pouvait être décidé que par la maîtrise d'oeuvre avec l'accord du maître d'ouvrage, mais n'a à aucun moment été évoqué par les concepteurs du projet ; qu'alors que les plans qu'elle a transmis mentionnaient les contours de l'emprise du chantier, il ne lui a jamais été demandé de tenir compte pour ses terrassements des ouvrages à venir et donc de terrasser au-delà de ce qui était strictement nécessaire pour la réalisation du parking ; qu'en tout état de cause sa responsabilité ne pourrait qu'être minime, certains postes ne pouvant être mis à sa charge, telle la suppression et la reconstitution de la paroi cloutée pour un montant de 152 462 euros hors taxe alors que celle-ci n'avait contractuellement vocation qu'à retenir les terres pour la construction du seul parking et pas pour la construction, au-delà de cette limite, de l'ouvrage dû par l'entreprise Léon Grosse ; que tout au plus pourrait être mise à sa charge la démolition partielle de la paroi pour la somme de 7 712 euros hors taxe ; que de même, en aucun cas ne sauraient être mis à sa charge deux postes de 13 498 et 13 151,40 euros pour des terrassements en déblai, étrangers au litige, néanmoins retenus par l'expert au vu de documents APD qui ne la liaient du reste pas, alors qu'elle a livré une plate-forme remblayée à la côte 280,76 NGF comme le prévoyait les pièces contractuelles la liant à la société Q Park ;

Vu le mémoire, enregistré le 3 septembre 2012, présenté pour la société des parkings de Savoie, qui conclut, à titre principal, à l'annulation du jugement du Tribunal administratif en ce qu'il l'a condamnée vis-à-vis du centre hospitalier de Chambéry ou, à tout le moins, en ce qu'il n'a pas fait droit intégralement à son appel en garantie contre la société AIA, atelier de la Rize, la société CERA ingénierie et la société AGIBAT MTI ingénierie, et à la condamnation de la ou des parties succombantes à lui payer la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, et à titre subsidiaire à la confirmation du jugement ; elle soutient que, contrairement à ce qu'ont estimé les premiers juges, le centre hospitalier de Chambéry a bien commis une faute qui est pour elle exonératoire de responsabilité en ce qu'il a manqué à son devoir de coordination entre les deux opérations de construction, devoir qui ressort des stipulations des articles 3.1 et 9 de la convention de délégation de service public du 15 octobre 2002 et en raison duquel il a régularisé un avenant n° 5 le 3 octobre 2003 avec le groupement de maîtrise d'oeuvre du " pôle femme, mère, enfant " ; qu'il ressort des comptes-rendus des réunions de chantier du parking à la plupart desquelles ont participé le centre hospitalier et la maîtrise d'oeuvre, que cette action de coordination avait été mise en place bien avant le 3 octobre 2003 ; que, s'agissant de la paroi cloutée, le centre hospitalier et le groupement de maîtrise d'oeuvre l'assistant pour la coordination, étaient informés depuis le compte-rendu de la réunion du 12 février 2003 des dispositions techniques que la société GFC entendait prendre pour le soutènement des terres alors qu'ils n'ont pas manifesté d'observations et de recommandations avant la réunion du 3 décembre 2003 ; que cette faute du centre hospitalier est totalement exonératoire pour elle alors même qu'elle s'était engagée par l'article 10 alinéa 5 de la convention de concession, à assumer seule la responsabilité des dommages pouvant résulter de l'exécution des travaux du parking ; que l'appel du groupement de maîtrise d'oeuvre tendant à se voir garantir entièrement par elle et par la société GFC sera rejeté au regard de la défaillance de ses membres dans la mission d'assistance aux actions de coordination du centre hospitalier ; qu'ils ont vu la société réaliser la paroi cloutée litigieuse dont ils précisent d'ailleurs qu'elle a été construite en mai 2003 ; qu'ils ne pouvaient sérieusement imaginer qu'avant la réception du parc de stationnement GFC démolirait cette paroi moulée et reconstruirait une paroi berlinoise de façon à ne pas gêner la construction du " pôle femme, mère, enfant " ; que n'étant pas à l'origine du dommage dès lors que le centre hospitalier et la maîtrise d'oeuvre ne lui ont pas formulé la moindre observation sur cette paroi cloutée, sa responsabilité ne peut être engagée sur le fondement de l'article 10 de la convention de concession du parking ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 8 octobre 2012, présenté pour le centre Hospitalier de Chambéry qui conclut au rejet de la requête, au rejet de l'appel incident de la société des parkings de Savoie, à ce que la société GFC construction soit condamnée solidairement avec les sociétés de maîtrise d'oeuvre et la société des parkings de Savoie à lui payer la somme de 180 732,58 euros mise à la charge de ces dernières par le Tribunal, à la condamnation des sociétés de maîtrise d'oeuvre, de la société des parkings de Savoie et de la société GFC construction à lui verser la somme de 5 000 euros en réparation de ses préjudices financiers et d'exploitation, ainsi qu'une somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, et à ce que le point de départ des intérêts sur la condamnation de 180 732,58 euros soit fixée au 23 août 2005 ; il fait valoir que la démolition et la reconstruction, à ses frais avancés, de la paroi litigieuse a été jugée nécessaire par l'expert comme étant la conséquence d'un défaut d'implantation ; que l'expert a été formel pour retenir la responsabilité de l'équipe de maîtrise d'oeuvre ainsi que celle de la société GFC ; que l'appel provoqué de la société des parkings de Savoie devra être rejeté dans la mesure où sa situation ne sera pas aggravée dès lors que la requête doit être rejetée ; que la Cour ne pourra que confirmer la condamnation de la société des parkings de Savoie sur le fondement de l'article 10 de la convention de concession et aussi parce qu'il appartient au concessionnaire de répondre vis-à-vis du concédant de la responsabilité de son cocontractant, la société GFC construction ; que comme l'a justement estimé le Tribunal il n'a commis aucune faute exonératoire de la responsabilité de la société des parkings de Savoie ; qu'en effet il ne résulte pas de l'article 9 de la convention de concession qui prévoyait que le concessionnaire lui transmettrait les plans et projets détaillés du parking en vue de leur approbation, qu'il ait eu un rôle de coordination alors même qu'il a pu participer à quelques réunions de chantier ; que la responsabilité à son égard des membres de l'équipe de maîtrise d'oeuvre est établie par l'expert au regard des missions complémentaires qui leur ont été confiées, notamment de coordination des deux chantiers ; que la construction de la paroi cloutée a été abordée au cours des réunions de chantier auxquelles devait participer le groupement de maîtrise d'oeuvre qui recevait l'ensemble des comptes-rendus et devait dès lors s'inquiéter des éventuelles conséquences de cet ouvrage ; que, comme l'a mis en évidence le rapport d'expertise, la société GFC construction a commis des fautes dans la conception de la protection du talus et aurait dû s'apercevoir de l'impossibilité de conserver la paroi à cette position ; que, contrairement à ce qu'a estimé le Tribunal, dont le jugement sera réformé sur ce point, ces fautes engagent la responsabilité quasi délictuelle de la société ; que la société GFC doit réparation de l'intégralité du préjudice résultant des travaux formellement jugés nécessaires par l'expert de démolition et de reconstruction de la paroi, pour un coût de 180 732,58 euros retenu par le Tribunal, et ne peut dès lors faire subsidiairement valoir qu'elle ne serait tenue qu'au seul coût d'une démolition partielle ; que la somme précitée qu'elle a avancée et dont elle a effectué le dernier règlement le 21 septembre 2004 doit porter intérêt à la date du dépôt du rapport de l'expert le 23 août 2005 et non à la date du mémoire introductif d'instance comme l'a jugé le Tribunal ; que contrairement à ce qu'a estimé le Tribunal, la réalité de ses préjudices financiers et d'exploitation est incontestable dès lors que cette dépense a grevé son budget et sa trésorerie et que le sinistre a mobilisé ses services ;

Vu le mémoire, enregistré le 5 novembre 2012, présenté pour la société GFC construction qui conclut aux mêmes fins que précédemment par les mêmes moyens et au rejet de l'appel provoqué du centre hospitalier à son encontre ; elle fait en outre valoir que cet appel provoqué ne peut qu'être rejeté comme l'a jugé le Tribunal dès lors que la condamnation solidaire demandée ne pourrait résulter que d'un rapport contractuel, inexistant en l'espèce entre elle et le centre hospitalier, lequel recherche d'ailleurs sa responsabilité quasi délictuelle qui est sans fondement en l'absence de cause extérieure ;

Vu le mémoire, enregistré le 15 novembre 2012, présenté pour la société des parkings de Savoie qui conclut aux mêmes fins que précédemment par les mêmes moyens et en outre à ce que l'appel provoqué du centre hospitalier à son égard soit rejeté ; elle fait valoir que l'appel provoqué du centre hospitalier à son endroit concernant le point de départ des intérêts et une demande indemnitaire de 5 000 euros ne sera recevable que si la Cour fait droit à l'appel principal de la maîtrise d'oeuvre ; que cet appel provoqué est en tout cas mal fondé dès lors que ce n'est que par demande introductive de première instance enregistrée le 24 août 2007 que le centre hospitalier a sollicité la somme de 180 344,55 euros et que les préjudices évalués à 5 000 euros n'ont jamais été démontrés ni même allégués en cours d'expertise alors que l'expert devait donner son avis sur les préjudices de toute nature causés au maître de l'ouvrage ; que son propre appel provoqué contre le centre hospitalier sera recevable si l'appel principal des sociétés de maîtrise d'oeuvre est accueilli ce qui aggraverait sa situation ; que cet appel provoqué serait fondé, le centre hospitalier ne pouvant de manière contradictoire d'un côté soutenir qu'il n'avait pas de rôle de coordination entre les deux opérations et de l'autre confier une mission spécifique à la maîtrise d'oeuvre pour se faire assister dans ce rôle ; que, cette dernière ayant à cet égard été défaillante, l'appel incident formé à son égard est tout autant fondé ;

Vu le mémoire, enregistré le 14 janvier 2013, présenté pour le centre hospitalier de Chambéry qui conclut aux mêmes fins que précédemment par les mêmes moyens ; il fait en outre valoir que la société des parkings de Savoie ne peut, pour lui imputer un rôle de coordination, invoquer les missions qu'il a confiées à la maîtrise d'oeuvre lesquelles ne définissent pas ses obligations à l'égard de la société des parkings de Savoie qui sont uniquement régies par la convention de concession ; qu'aux termes de cette convention c'est le concessionnaire qui assume seul la responsabilité envers le concédant des dommages causés par l'exécution des travaux qu'il réalise sous son entière responsabilité ;

Vu l'ordonnance en date du 15 janvier 2013 fixant la clôture d'instruction au 1er février 2013, en application des articles R. 613-1 et R. 613-3 du code de justice administra-tive ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code civil ;

Vu le code des marchés publics ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 16 mai 2013 :

- le rapport de M. Dursapt,

- les conclusions de Mme Vinet, rapporteur public ;

- et les observations de MeC..., représentant le centre hospitalier de Chambéry, et de MeA..., représentant la société GFC construction ;

1. Considérant que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Grenoble a condamné les sociétés AIA atelier de la Rize, la SCP d'architecture Arnaud et Poingt, la société CERA ingénierie, la société AGIBAT MTI ingénierie, solidairement avec la société des Parkings de Savoie, à verser au centre hospitalier de Chambéry la somme de 180 732,58 euros TTC avec intérêts depuis le 24 août 2007, capitalisés ensuite ; qu'il a également mis les frais de l'expertise à leur charge solidaire et mis à leur charge une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; qu'il a par ailleurs condamné, d'une part les sociétés AIA atelier de la Rize, CERA ingénierie et AGIBAT MTI ingénierie à garantir à hauteur de 50 % la société des parkings de Savoie de ces condamnations, d'autre part la société GFC construction à en garantir à hauteur de 50 % les sociétés AIA atelier de la Rize, la SCP d'architecture Arnaud et Poingt, la société CERA ingénierie et la société AGIBAT MTI ingénierie ;

Sur les conclusions des sociétés requérantes et les conclusions incidentes du centre hospitalier :

2. Considérant que le centre hospitalier de Chambéry a décidé, à la fin des années 90, de faire construire un nouveau bâtiment dénommé " pôle femme mère enfant " (PFME) comprenant un bâtiment médical surmontant un parc de stationnement souterrain de 260 places ; que la maîtrise d'oeuvre de la réalisation du pôle susmentionné, du bloc aseptique et de la stérilisation centrale a été confiée à un groupement solidaire composé des sociétés AIA Architectes, Arnaud et Poingt, CERA Ingénierie et AGIBAT Ingénierie, par un marché du 12 octobre 1999 comportant une mission complète avec études d'exécution partielles ; que par avenant n° 1 du 1er août 2000 à ce marché ce groupement de maîtrise d'oeuvre s'est vu également confier les missions " études d'esquisse " et " avant-projet sommaire " pour le parc de stationnement souterrain ainsi que, par avenant n° 3 du 5 juillet 2002 la mission " avant-projet détaillé " de ce parc de stationnement ; qu'ultérieurement, le parc de stationnement a fait l'objet d'une délégation de service public, portant sur sa construction et son exploitation, par un contrat du 23 décembre 2002 conclu avec la société Parcofrance, devenue la société Q Park, à laquelle s'est substituée la société des Parkings de Savoie ; que les travaux de construction du bâtiment médicalisé ont été attribués par le centre hospitalier de Chambéry à la société Léon Grosse tandis que la construction du parc de stationnement a été attribuée par la société Parcofrance à la société GFC construction ; que, par un avenant n° 5 au marché de maîtrise d'oeuvre signé le 3 octobre 2003, le groupement de maîtrise d'oeuvre a été chargé par le centre hospitalier d'une mission de coordination des travaux de construction du bâtiment médicalisé et du parc de stationnement comportant notamment la " prise de connaissance et/ou vérification de certains documents préparés par GFC avec émission de remarques et/ou validation dès lors que cela concerne des interfaces avec le pôle femme/mère/enfant " ;

3. Considérant qu'il résulte de l'instruction que tant l'avant-projet détaillé (APD) que l'avant-projet sommaire (APS) établis notamment en août et décembre 2002 par le groupement de maîtrise d'oeuvre pour la construction du parking, prévoyaient le soutien des talus par des ouvrages provisoires de type " paroi berlinoise, tirants ou butons " ; que la notice de l'APD du 2 août 2002 précisait : " ouvrages provisoires de soutènement dus par le concessionnaire : / ensemble des ouvrages de soutènement (parois berlinoises, tirants ou butons) permettant de maintenir le fonctionnement de l'hôpital durant les travaux notamment au droit de .... l'accès à la façade de la maternité. Ces ouvrages devront se situer dans l'emprise du chantier défini sur le plan de masse n° 10 du 2 août 2002. Ces ouvrages pourront rester en place à condition que leur cote supérieure se situe 1 m en dessous du niveau des terres du projet définitif " ; que ces prescriptions étaient par ailleurs illustrées par les plans d'architecte 500 indice 0 et 501 indice 0 du 2 août 2002 ; qu'ainsi, quand bien même l'expert commis en référé par le Tribunal a noté qu'aucune coupe n'était réalisée dans cette zone délicate, il ne résulte pas de l'instruction que le groupement de maîtrise d'oeuvre aurait commis une faute dans la conception ou la description de l'ouvrage ;

4. Considérant qu'il est constant que la société GFC construction n'a pas réalisé l'ouvrage ainsi défini, mais construit à la place, en mai 2003 une paroi cloutée qu'elle a laissée en place et qui, excédant la côte altimétrique prescrite, a dû être démolie et remplacée pour permettre la poursuite des travaux du PFME ; que si, lors d'une réunion de chantier du 12 février 2003 objet d'un compte-rendu diffusé le lendemain, cette entreprise avait informé les autres participants à l'opération de son intention de construire une paroi cloutée, sans d'ailleurs indiquer qu'elle resterait en place et excéderait la côte indiquée dans l'APD, les sociétés de maîtrise d'oeuvre requérantes n'ont quant à elles été investies par le centre hospitalier d'une mission de coordination des travaux impliquant un contrôle de l'exécution conforme à l'APD, que par l'avenant du 3 octobre 2003 à leur marché ; qu'ainsi, et alors même que le problème n'a été soulevé que lors des opérations préalables à la réception du parking le 2 décembre 2003, leur responsabilité contractuelle, que le centre hospitalier ne recherche qu'à raison de préjudices résultant de la nécessité de démolir et reconstruire cette paroi provisoire et non d'un éventuel surcoût affectant l'opération de démolition-reconstruction et résultant d'un retard après la signature de l'avenant à s'apercevoir de la difficulté, ne saurait être engagée par la réalisation d'un ouvrage non conforme à leurs plans avant qu'elles ne soient contractuellement chargées de veiller à cette conformité ;

5. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que les sociétés requérantes sont fondées à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Grenoble les a condamnées, sur le fondement de leur responsabilité contractuelle ;

6. Considérant que, pour les mêmes motifs que ceux indiqués au point 4, les conclusions incidentes du centre hospitalier tendant à la condamnation du groupement de maîtrise d'oeuvre à lui payer une somme de 5 000 euros au titre d'un préjudice financier et d'exploitation doivent être rejetées ;

Sur les conclusions d'appel provoqué présentées par le centre hospitalier :

7. Considérant que le centre hospitalier demande par la voie de l'appel provoqué l'annulation du jugement en tant qu'il a rejeté ses demandes tendant d'une part à la condamnation solidaire de la société GFC construction à lui payer les sommes de 180 732,58 euros au titre de son préjudice résultant de la démolition et de la reconstruction de la paroi de soutènement et de 5 000 euros au titre d'un préjudice financier et d'exploitation, d'autre part à la condamnation solidaire de la société des parkings de Savoie à lui payer une somme de 5 000 euros au titre de préjudices financiers et d'exploitation ;

8. Considérant, en premier lieu, que, comme il a été dit précédemment, la paroi cloutée litigieuse a été construite par la société GFC construction ; que cette société n'était pas liée avec le centre hospitalier par un contrat de louage d'ouvrage, mais était uniquement liée avec la société des parkings de Savoie par un contrat de droit privé ; qu'il ne résulte pas de l'instruction que la société GFC construction aurait commis une faute dissociable des obligations contractuelles résultant de ce contrat ; qu'ainsi les conclusions présentées à son encontre, sur un fondement quasi-délictuel, par le centre hospitalier de Chambéry ne sauraient être accueillies ;

9. Considérant, en second lieu, que le centre hospitalier n'apporte aucun élément de nature à établir la réalité de préjudices financiers et d'exploitation dont il demande réparation par la société des parkings de Savoie ;

10. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que les conclusions d'appel provoqué du centre hospitalier doivent être rejetées ;

Sur les conclusions de la société GFC construction :

11. Considérant que la société GFC demande l'annulation, ou subsidiairement la limitation, de la garantie à laquelle elle a été condamnée en première instance à l'égard des sociétés de maîtrise d'oeuvre requérantes ; que la condamnation de ces dernières étant annulées par le présent arrêt selon ce qui est dit aux points précédents, ladite garantie est sans objet ;

Sur les conclusions de la société des parkings de Savoie :

12. Considérant, en premier lieu, qu'en l'absence de faute des sociétés de maîtrise d'oeuvre, comme il est dit précédemment, les conclusions de la société des parkings de Savoie tendant à ce que la garantie à laquelle elles ont été condamnées en première instance à son égard soit portée à 100 %, ne peuvent qu'être rejetées ;

13. Considérant, en second lieu, que la société des parkings de Savoie soutient également que le centre hospitalier a manqué à son devoir de coordination entre les chantiers du parking et du PFME ; que si en vertu des stipulations de l'article 9 de la convention de concession du parc de stationnement souterrain le centre hospitalier devait recevoir communication des projets et plans techniques du parc de stationnement il ne résulte pas de l'instruction que les plans et documents qui lui ont été transmis aient fait apparaître une paroi cloutée à la place de la paroi berlinoise prévue par les architectes ni qu'ils aient indiqué un dépassement de la hauteur maximale prescrite par l'avant-projet détaillé ; que le centre hospitalier n'a donc pas commis la faute alléguée ; que de surcroît l'article 10 de cette même convention prévoyait que le concessionnaire était seul responsable envers le concédant de tous dommages causés par l'exécution des travaux du parking ; qu'il suit de là que la société des parkings de Savoie qui, comme l'a justement estimé le Tribunal, doit répondre à l'égard du centre hospitalier, des fautes de son locateur d'ouvrage, n'est pas fondée à demander l'annulation de la condamnation prononcée à son encontre par les premiers juges ;

Sur les intérêts :

14. Considérant qu'alors même qu'il a fait exécuter et financé les travaux de reprise dès le dépôt du rapport d'expertise, le centre hospitalier ne peut avoir droit aux intérêts sur la somme de 180 7332,58 euros au paiement de laquelle reste seule condamnée la société des parkings de Savoie, qu'à compter d'une sommation de payer ; qu'en l'absence d'une telle sommation les intérêts ne peuvent courir qu'à compter de l'introduction de sa demande de première instance ;

Sur les dépens :

15. Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de ce qui précède qu'en l'absence de circonstances particulières les sociétés AIA atelier de la Rize, SCP d'architecture Arnaud et Poingt, CERA ingénierie, et AGIBAT MTI ingénierie sont fondées à demander à être déchargées de leur condamnation à supporter solidairement les dépens ;

16. Considérant, en second lieu, qu'il résulte également de ce qui est dit précédemment, que la société des parkings de Savoie doit supporter la charge des dépens s'élevant aux montants de 2 690,52 euros et 8 477,49 euros ;

Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative:

17. Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation. " ;

18. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge du centre hospitalier de Chambéry une somme de 2 000 euros au titre des frais non compris dans les dépens exposés par la société AIA atelier de la Rize, la SCP d'architecture Arnaud et Poingt, la société CERA ingénierie, et la société AGIBAT MTI ingénierie ;

19. Considérant qu'il y a également lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la société des parkings de Savoie une somme de 2 000 euros au titre des frais non compris dans les dépens exposés par le centre hospitalier de Chambéry.

20. Considérant que les dispositions précitées font obstacle à ce que soient mises à la charge des sociétés AIA atelier de la Rize, SCP d'architecture Arnaud et Poingt, CERA ingénierie, AGIBAT MTI ingénierie, et la société GFC construction, qui ne sont pas dans l'instance parties perdantes à l'égard du centre hospitalier de Chambéry, une somme quelconque au titre des frais non compris dans les dépens supportés celui-ci ;

21. Considérant que les dispositions précitées font également obstacle à ce que les frais non compris dans les dépens supportés par la société des parkings de Savoie laquelle est tenue aux dépens, soient mis à la charge d'une autre partie ;

22. Considérant que ces dispositions font également obstacle à ce que les frais non compris dans les dépens supportés par la société GFC construction soient mis à la charge des sociétés AIA atelier de la Rize, SCP d'architecture Arnaud et Poingt, CERA ingénierie, AGIBAT MTI ingénierie, qui ne sont pas parties perdantes dans l'instance ;

DECIDE :

Article 1er : Les articles 1er , 2, 3, et 5 du jugement n° 0704175 du 5 avril 2012 du Tribunal administratif de Grenoble sont annulés en tant qu'ils condamnent la société AIA atelier de la Rize, la SCP d'architecture Arnaud et Poingt, la société CERA ingénierie, la société AGIBAT MTI ingénierie à verser au centre hospitalier de Chambéry la somme de 180 732,58 euros ainsi qu'une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, à supporter la charge des dépens, et à garantir la société des parkings de Savoie de la condamnation prononcée contre elle.

Article 2 : Le centre hospitalier de Chambéry versera aux sociétés AIA atelier de la Rize, architecture Arnaud et Poingt, CERA ingénierie, et AGIBAT MTI ingénierie, ensemble, une somme globale de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : La société des parkings de Savoie versera au centre hospitalier de Chambéry une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à la société AIA atelier de la Rize, à la SCP d'architecture Arnaud et Poingt, à la société CERA ingénierie, à la société AGIBAT MTI ingénierie, à la société des parkings de Savoie, à la société GFC construction, au centre hospitalier de Chambéry et au ministre des affaires sociales et de la santé.

Délibéré après l'audience du 16 mai 2013, où siégeaient :

- M. du Besset, président de chambre,

- M. Dursapt et MmeB..., premiers conseillers,

Lu en audience publique, le 6 juin 2013.

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N° 12LY01408

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 4ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 12LY01408
Date de la décision : 06/06/2013
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

39-06-01-02 Marchés et contrats administratifs. Rapports entre l'architecte, l'entrepreneur et le maître de l'ouvrage. Responsabilité des constructeurs à l'égard du maître de l'ouvrage. Responsabilité contractuelle.


Composition du Tribunal
Président : M. du BESSET
Rapporteur ?: M. Marc DURSAPT
Rapporteur public ?: Mme VINET
Avocat(s) : MARTIN et ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2013-06-06;12ly01408 ?
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