La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

05/11/2013 | FRANCE | N°13LY00490

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 1ère chambre - formation à 3, 05 novembre 2013, 13LY00490


Vu la requête, enregistrée au greffe de la cour le 22 février 2013 sous le n° 13LY00490, présentée pour l'association Trait d'Union, dont le siège est sis cidex 204, 382 avenue de la résistance à Crolles (38920), représentée par son président en exercice, par Me A...;

L'association Trait d'Union demande à la cour :

1) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Grenoble n° 0904339 du 28 janvier 2013 qui a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision par laquelle le préfet de l'Isère a implicitement refusé d'abroger le plan de prévention des

risques naturels de la commune de Crolles, en tant qu'il classe en zone BP (viol...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la cour le 22 février 2013 sous le n° 13LY00490, présentée pour l'association Trait d'Union, dont le siège est sis cidex 204, 382 avenue de la résistance à Crolles (38920), représentée par son président en exercice, par Me A...;

L'association Trait d'Union demande à la cour :

1) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Grenoble n° 0904339 du 28 janvier 2013 qui a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision par laquelle le préfet de l'Isère a implicitement refusé d'abroger le plan de prévention des risques naturels de la commune de Crolles, en tant qu'il classe en zone BP (violet) un ensemble de terrains situés au lieudit " Fragnès " ;

2°) d'annuler ladite décision ;

3°) de faire injonction au préfet de l'Isère de prévoir pour ces terrains un nouveau classement plus contraignant, dans le délai de trois mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que sa requête est recevable au regard de l'article 1635 bis Q du code général des impôts, des conditions d'intérêt et de qualité pour agir, et du délai d'appel ; que le jugement attaqué, en estimant que le plan de prévention des risques naturels n'entre pas dans les prévisions de la directive communautaire 2001/42/CE du 27 juin 2001 sans soumettre cette question, à titre préjudiciel, à la Cour de justice de l'Union européenne, ainsi que l'exposante l'avait sollicité sur le fondement de l'article 267 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne, a méconnu l'article 6§1 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que, sur le fond, cette même énonciation du jugement attaqué est entachée d'erreur de droit au regard des objectifs et motivations de ladite directive, ainsi que de son article 3 définissant son champ d'application, éclairé par son annexe II définissant les critères d'identification des plans et programmes soumis à la formalité de l'évaluation environnementale ; que l'article 13 de cette directive a fixé au 21 juillet 2004 la date à laquelle les Etats membres devaient en avoir assuré la transposition ; que ses dispositions s'appliquent à tout plan ou programme approuvé postérieurement au 21 juillet 2006, sauf décision d'exclusion résultant d'une procédure applicable au cas par cas ; que les plans de prévention des risques naturels, tels qu'il sont définis par l'article L. 562-1 du code de l'environnement, sont susceptibles d'avoir des incidences sur l'environnement, dès lors qu'ils définissent des zones constructibles où sont imposées des mesures de prévention qui sont elles-mêmes susceptibles de générer de nouveaux risques environnementaux ; qu'ils n'ont pas pour seul objet la protection civile, en raison des travaux qu'ils prescrivent, des contraintes urbaines qu'ils prescrivent et des activités qu'ils régissent ; qu'ils sont d'ailleurs considérés par la jurisprudence comme des plans d'urbanisme ; que la commission européenne a confirmé la distinction entre prévention et protection et engagé une procédure contre la France, en octobre 2009, pour transcription incomplète de la directive ; qu'elle lui a adressé une nouvelle mise en demeure le 24 janvier 2013, le décret du 23 août 2012 étant insuffisant ; qu'en l'espèce, le classement contesté en zone violette rend possible des constructions dans des secteurs naturels protégés, classés par le plan d'occupation des sols en zone ND et couverts par des zones naturelles d'intérêt écologique, faunistique et floristique ; qu'il y prescrit la réalisation d'une digue pare-blocs composé notamment de pneumatiques usagés non réutilisables, qui porte atteinte aux paysages, aux réseaux hydrographiques ainsi qu'à des biotopes fragiles, et crée un risque d'incendie, ces pneumatiques étant très inflammables ; qu'un tel ouvrage est lui-même soumis à la directive 85/337/CEE du 27 juin 1985 concernant l'incidence de certains projets publics et privés sur l'environnement ; que les dispositions du code de l'environnement, en ce qu'elles ne soumettent pas l'élaboration des plans de prévention des risques naturels à l'évaluation environnementale, doivent ainsi être écartées ; que la cour, à tout le moins, ne pourra rejeter le moyen sans en saisir la Cour de justice de l'Union européenne ; que le dossier d'enquête publique était insuffisant quant à la protection assurée par le pare-blocs litigieux, et n'a pu apporter à la population une connaissance complète du sujet ; que cette insuffisance a été source de confusion pour le commissaire-enquêteur et même pour les services de l'Etat eux-mêmes ; que le classement contesté méconnaît le principe de prévention imposé par l'article L. 562-1 du code de l'environnement, dès lors que l'ouvrage en cause ne fait pas disparaître le risque de chutes de blocs rocheux et crée un enjeu supplémentaire ;

Vu l'ordonnance du 3 avril 2013 prise en application de l'article R. 613-1 du code de justice administrative, fixant au 14 mai 2013 la date de clôture de l'instruction ;

Vu l'ordonnance en date du 15 mai 2013 reportant, en application de l'article R. 613-1 du code de justice administrative, au 5 juin 2013 la date de clôture de l'instruction ;

Vu le mémoire, enregistré le 13 juin 2013, présenté pour le ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie, concluant au rejet de la requête ;

Il soutient que, comme l'indique la jurisprudence de la cour européenne des droits de l'homme elle-même, l'article 6§1 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ne confère pas un droit inconditionnel au renvoi d'une affaire à titre préjudiciel devant une autre juridiction, même supranationale ; que le tribunal, auquel il appartenait d'apprécier la nécessité de saisir la cour de justice de l'union européenne, n'a commis aucune irrégularité en s'abstenant de le faire ; qu'aucune des dispositions de transposition de la directive 2001/42/CE concernant l'évaluation de l'incidence de certains projet publics et privés sur l'environnement, dans leur rédaction applicable au litige, n'incluait les plans de prévention des risques naturels au nombre des documents devant faire l'objet d'une évaluation environnementale ; que cette transposition n'était nullement incomplète, la directive excluant de son champ d'application, à l'article 3§8, les plans et programmes destinés uniquement à des fins de protection civile, et laissant à tout le moins aux Etats membres un large pouvoir d'appréciation pour déterminer les documents devant être soumis à la formalité de l'évaluation environnementale ; que la requérante n'explique pas en quoi le décret du 2 mai 2012 traduirait l'insuffisance du dispositif antérieur, alors que la matière est évolutive ; que le dossier d'enquête publique était complet ; que les articles R. 123-6 et R. 562-3 du code de l'environnement n'imposent pas d'y faire figurer l'ensemble des études techniques ayant présidé à l'élaboration du plan de prévention, non plus que la carte des enjeux, document d'ailleurs informatif qui ne saurait être aussi précis que la carte réglementaire dudit plan ; que, pour le surplus, il est renvoyé au mémoire en défense du préfet de l'Isère en première instance ;

Vu l'ordonnance du 13 juin 2013 portant réouverture de l'instruction en application de l'article R. 613-4 du code de justice administrative ;

Vu le mémoire, enregistré le 25 juin 2013, présenté pour l'association Trait d'Union, concluant aux mêmes fins que la requête, par les mêmes moyens ;

Elle ajoute que le défaut de saisine de la Cour de justice de l'Union européenne porte atteinte au droit de voir sa cause entendue dans un délai raisonnable ; qu'en soulignant que le plan de prévention des risques naturels a pour fonction d'arrêter la croissance de la vulnérabilité des biens et activités exposés, le ministre démontre lui-même leur assujettissement à la directive 2001/42/CE ; qu'en admettant même que cet assujettissement ne soit pas automatique en vertu du paragraphe 2 de l'article 3 de cette directive, il devait faire l'objet d'un examen au cas par cas, suivant le paragraphe 5 du même article ; qu'il n'a pas été procédé à cet examen ; que la Cour de justice de l'Union européenne vient de rappeler le strict encadrement du pouvoir d'appréciation des Etats en la matière ; que le préfet de l'Isère a d'ailleurs récemment soumis à évaluation environnementale la révision d'un simple arrêté de délimitation de terrains exposés à un risque naturel, pris au titre de l'ancien article R. 111-3 ;

Vu l'ordonnance du 20 août 2013 prise en application de l'article R. 613-1 du code de justice administrative, fixant au 6 septembre 2013 la date de clôture de l'instruction ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu la directive 85/337/CEE du Conseil du 27 juin 1985 concernant l'évaluation de l'incidence de certains projets publics et privés sur l'environnement ;

Vu la directive 2001/42/CE du Parlement européen et du Conseil du 27 juin 2001 relative à l'évaluation des incidences de certains plans et programmes sur l'environnement ;

Vu le code de l'environnement ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 8 octobre 2013 :

- le rapport de M. Picard, président-assesseur ;

- les conclusions de M. Vallecchia, rapporteur public ;

- les observations de M.B..., représentant l'association requérante ;

1. Considérant que l'association Trait d'Union relève appel du jugement, en date du 28 janvier 2013, par lequel le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande dirigée contre la décision du préfet de l'Isère portant implicitement refus d'abroger le plan de prévention des risques naturels de la commune de Crolles, en tant qu'il classe en zone BP (violet) un ensemble de terrains situés au lieudit " Fragnès " ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Considérant qu'il appartient au juge de l'excès de pouvoir, saisi d'un moyen tiré de la méconnaissance d'une directive communautaire, d'apprécier, conformément aux stipulations de l'article 267 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne, si la validité ou l'interprétation de celle-ci présente une difficulté de nature à justifier qu'elle soit soumise, à titre préjudiciel, à la Cour de justice de l'Union européenne ; que son refus de mettre en oeuvre cette procédure ne méconnaît pas, par lui-même, nonobstant la présentation de conclusions en ce sens, le droit à un procès équitable et le droit à voir sa cause entendue dans un délai raisonnable, garantis notamment par l'article 6§1 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que l'erreur éventuellement commise par le tribunal en écartant ainsi le moyen tiré de la méconnaissance de la directive susvisée 2001/42/CE du 27 juin 2001, sans en saisir préalablement la Cour de justice de l'Union européenne, serait susceptible d'affecter, non pas la régularité de son jugement, mais uniquement son bien fondé ;

Sur le fond :

3. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 3 de la directive susvisée 2001/42/CE : " 1. Une évaluation environnementale est effectuée, conformément aux articles 4 à 9, pour les plans et programmes visés aux paragraphes 2, 3 et 4 susceptibles d'avoir des incidences notables sur l'environnement. / 2. Sous réserve du paragraphe 3, une évaluation environnementale est effectuée pour tous les plans et programmes : a) qui sont élaborés pour les secteurs de l'agriculture, de la sylviculture, de la pêche, de l'énergie, de l'industrie, des transports, de la gestion des déchets, de la gestion de l'eau, des télécommunications, du tourisme, de l'aménagement du territoire urbain et rural ou de l'affectation des sols et qui définissent le cadre dans lequel la mise en oeuvre des projets énumérés aux annexes I et II de la directive 85/337/CEE pourra être autorisée à l'avenir (...) / 4. Pour les plans et programmes, autres que ceux visés au paragraphe 2, qui définissent le cadre dans lequel la mise en oeuvre des projets pourra être autorisée à l'avenir, les États membres déterminent s'ils sont susceptibles d'avoir des incidences notables sur l'environnement. / 5. Les États membres déterminent si les plans ou programmes visés aux paragraphes 3 et 4 sont susceptibles d'avoir des incidences notables sur l'environnement, soit en procédant à un examen au cas par cas, soit en déterminant des types de plans et programmes ou en combinant ces deux approches. À cette fin, les États membres tiennent compte, en tout état de cause, des critères pertinents fixés à l'annexe II, afin de faire en sorte que les plans et programmes susceptibles d'avoir des incidences notables sur l'environnement soient couverts par la présente directive. / (...) 8. Les plans et programmes suivants ne sont pas couverts par la présente directive : - les plans et programmes destinés uniquement à des fins de défense nationale et de protection civile (...) " ; que l'annexe II de la directive énumère les " critères permettant de déterminer l'ampleur probable des incidences visées à l'article 3, paragraphe 5 ", et retient ainsi, au titre de ceux qui ont trait aux caractéristiques des plans et programmes : " - la mesure dans laquelle le plan ou programme concerné définit un cadre pour d'autres projets ou activités, en ce qui concerne la localisation, la nature, la taille et les conditions de fonctionnement ou par une allocation de ressources, - la mesure dans laquelle un plan ou un programme influence d'autres plans ou programmes, y compris ceux qui font partie d'un ensemble hiérarchisé, - l'adéquation entre le plan ou le programme et l'intégration des considérations environnementales, en vue, notamment de promouvoir un développement durable, - les problèmes environnementaux liés au plan ou au programme, - l'adéquation entre le plan ou le programme et la mise en oeuvre de la législation communautaire relative à l'environnement (par exemple les plans et programmes touchant à la gestion des déchets et à la protection de l'eau) " ; que cette annexe détermine par ailleurs différents critères liés aux " caractéristiques des incidences et de la zone susceptible d'être touchée ", tels " la probabilité, la durée, la fréquence et le caractère réversible des incidences ", " le caractère cumulatif des incidences ", " les risques pour la santé humaine ou pour l'environnement ", " la magnitude et l'étendue spatiale géographique des incidences ", " la valeur et la vulnérabilité de la zone susceptible d'être touchée ", ou encore " les incidences pour des zones ou des paysages jouissant d'un statut de protection reconnu au niveau national, communautaire ou international " ; que l'article 13 de la même directive assigne aux Etats membres l'obligation d'en transcrire les objectifs avant le 21 juillet 2004 ;

4. Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article L. 122-4 du code de l'environnement, dans sa rédaction en vigueur à la date d'approbation du plan de prévention des risques naturels contesté : " I. - Les plans, schémas, programmes et autres documents de planification figurant sur une liste établie par décret en Conseil d'Etat qui, sans autoriser par eux-mêmes la réalisation de travaux ou prescrire des projets d'aménagement, sont applicables à la réalisation de tels travaux ou projets doivent faire l'objet d'une évaluation environnementale dans les conditions prévues par la présente section. / Doivent comporter une telle évaluation : 1° Les plans, schémas, programmes et autres documents de planification adoptés par l'Etat, les collectivités territoriales ou leurs groupements et les établissements publics en dépendant, relatifs à l'agriculture, à la sylviculture, à la pêche, à l'énergie ou à l'industrie, aux transports, à la gestion des déchets ou à la gestion de l'eau, aux télécommunications, au tourisme ou à l'aménagement du territoire qui ont pour objet de fixer des prescriptions ou des orientations avec lesquelles doivent être compatibles les travaux et projets d'aménagement entrant dans le champ d'application de l'étude d'impact en application de l'article L. 122-1 ; 2° Les plans, schémas, programmes et autres documents de planification adoptés par l'Etat, les collectivités territoriales ou leurs groupements et les établissements publics en dépendant, autres que ceux mentionnés au 1° du présent article, qui ont pour objet de fixer des prescriptions ou des orientations avec lesquelles doivent être compatibles des travaux ou projets d'aménagement s'ils sont susceptibles d'avoir des incidences notables sur l'environnement. / La liste des documents mentionnés au 2° est établie en prenant en compte la nature des travaux ou projets auxquels ils sont applicables et la sensibilité du milieu dans lequel ceux-ci doivent être réalisés " ; que, dans sa rédaction applicable au litige, l'article R. 122-17 fixe la liste des plans, schémas, programmes et autres documents de planification soumis à la formalité de l'évaluation environnementale, sans y faire figurer les plans de prévention des risques naturels prévisibles ;

5. Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'article L. 562-1 du code de l'environnement : " I. - L'Etat élabore et met en application des plans de prévention des risques naturels prévisibles tels que les inondations, les mouvements de terrain, les avalanches, les incendies de forêt, les séismes, les éruptions volcaniques, les tempêtes ou les cyclones. / II. - Ces plans ont pour objet, en tant que de besoin : 1° De délimiter les zones exposées aux risques, dites "zones de danger", en tenant compte de la nature et de l'intensité du risque encouru, d'y interdire tout type de construction, d'ouvrage, d'aménagement ou d'exploitation agricole, forestière, artisanale, commerciale ou industrielle ou, dans le cas où des constructions, ouvrages, aménagements ou exploitations agricoles, forestières, artisanales, commerciales ou industrielles pourraient y être autorisés, prescrire les conditions dans lesquelles ils doivent être réalisés, utilisés ou exploités ; 2° De délimiter les zones, dites "zones de précaution", qui ne sont pas directement exposées aux risques mais où des constructions, des ouvrages, des aménagements ou des exploitations agricoles, forestières, artisanales, commerciales ou industrielles pourraient aggraver des risques ou en provoquer de nouveaux et y prévoir des mesures d'interdiction ou des prescriptions telles que prévues au 1° ; 3° De définir les mesures de prévention, de protection et de sauvegarde qui doivent être prises, dans les zones mentionnées au 1° et au 2°, par les collectivités publiques dans le cadre de leurs compétences, ainsi que celles qui peuvent incomber aux particuliers (...) / III. - La réalisation des mesures prévues aux 3° et 4° du II peut être rendue obligatoire en fonction de la nature et de l'intensité du risque dans un délai de cinq ans, pouvant être réduit en cas d'urgence " ;

6. Considérant que, si les plans de prévention des risques naturels prévisibles peuvent contenir, ainsi qu'il résulte des dispositions précitées de l'article L. 532-1 du code de l'environnement, des prescriptions relatives aux mesures de prévention, de protection et de sauvegarde qui doivent être prises, notamment par les collectivités publiques, dans les " zones de danger " et les " zones de protection ", et s'ils peuvent subordonner la constructibilité de terrains à la mise en oeuvre de telles mesures, ils n'ont pas par eux-mêmes pour fonction de planifier l'aménagement du territoire et ont pour seul objet de fixer, dans un strict objectif de protection des biens et des personnes, les restrictions imposées à l'utilisation des sols par la juste évaluation des risques naturels auxquels sont soumis les territoires concernés ; qu'ils sont ainsi uniquement destinés à des fins de protection civile, au sens de l'article 3 précité de la directive du 27 juin 2001 ; qu'il résulte dès lors clairement des dispositions de cette directive, sans qu'il soit besoin d'en soumettre l'interprétation, à titre préjudiciel, à la Cour de justice de l'Union européenne, que de tels plans n'entrent pas dans son champ d'application, quand bien même ils conditionneraient l'utilisation des sols à la réalisation d'ouvrages par ailleurs potentiellement soumis à la directive 85/337/CEE du 27 juin 1985 concernant l'incidence de certains projets publics et privés sur l'environnement ; que, par suite, les dispositions des articles L. 122-4 et R. 122-17 du code de l'environnement, en tant qu'ils ne font pas figurer les plans de prévention des risques naturels prévisibles au nombre des documents soumis, même sur examen au cas par cas, à la formalité de l'évaluation environnementale, ne peuvent être regardées comme incompatibles avec le droit communautaire ; que le moyen tiré de la méconnaissance de la directive 2001/42/CE a donc été à bon droit écarté par les premiers juges ;

7. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article R. 562-8 du code de l'environnement : " Le projet de plan est soumis par le préfet à une enquête publique dans les formes prévues par les articles R. 123-6 à R. 123-23 (...) " ; qu'aucune des dispositions auxquelles il est ainsi renvoyé ne fait obligation au préfet de joindre au dossier d'enquête publique les études sur la base desquelles le projet de plan de prévention des risques naturels prévisibles a été élaboré ; qu'au surplus, le plan de prévention litigieux ne prescrit nullement, par lui-même, la réalisation de digues " pare-blocs " sur les coteaux dominant le lieudit " Fragnès ", mais se borne à subordonner à la réalisation de tels ouvrages, en les localisant sur son document graphique, la constructibilité des terrains exposés au risque d'éboulement ; que le moyen tiré de ce que le dossier d'enquête publique était incomplet en ce qu'il ne comportait pas diverses études techniques réalisées depuis 2002 en vue de définir les caractéristiques de ces merlons ne saurait donc être accueilli ; que le rapport de présentation, qui figurait parmi les pièces de ce dossier, comporte par ailleurs une description et une évaluation précises du risque de chute de blocs rocheux, ainsi que la justification du zonage y afférent ; que l'association Trait d'Union n'apporte aucun élément de nature à étayer son allégation selon laquelle les informations ainsi données au public auraient été lacunaires ou propres à semer la confusion ;

8. Considérant, en troisième lieu, que les dispositions précitées de l'article L. 562-1 du code de l'environnement ne font pas obstacle à ce que, dans le cas où un secteur exposé à un risque naturel peut être artificiellement soustrait à ce risque par la construction d'ouvrages de protection appropriés, le plan de prévention des risques naturels prévisibles, tout en rendant ce secteur inconstructible en l'état, envisage, par un classement spécifique, l'assouplissement ultérieur de cette servitude, au vu de la réalisation de tels ouvrages et après validation de ceux-ci selon des modalités qu'il détermine ; que le classement du secteur de " Fragnès " en zone violette, inconstructible en l'état mais potentiellement constructible dans l'avenir, sous de multiples conditions, " à l'aval d'un merlon par-blocs surdimensionné ", n'est donc pas entaché d'erreur de droit ;

9. Considérant, en dernier lieu , que le plan de prévention contesté n'ayant pas pour objet, ainsi qu'il a été dit, de prescrire l'édification de cet ouvrage, dont il ne définit d'ailleurs pas les caractéristiques techniques, les allégations de l'association requérante selon laquelle le projet d'ores et déjà conçu par la commune de Crolles serait susceptible d'entraîner des effets dommageables pour l'environnement, du fait notamment de l'emploi de pneumatiques usagés non réutilisables, ne sauraient faire regarder le classement critiqué comme entaché d'une erreur manifeste d'appréciation ;

10. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que l'association Trait d'Union n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

11. Considérant que le présent arrêt, qui rejette la requête de l'association Trait d'Union, n'appelle aucune mesure d'exécution au sens des articles L. 911-1 et suivants du code de justice administrative ; que les conclusions présentées à ce titre ne peuvent dès lors qu'être rejetées ;

Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

12. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, soit condamné à verser à l'association Trait d'Union la somme qu'elle réclame en remboursement des frais exposés et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de l'association Trait d'Union est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à l'association Trait d'Union et au ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie.

Copie en sera adressée au préfet de l'Isère.

Délibéré après l'audience du 8 octobre 2013, à laquelle siégeaient :

M. Riquin, président de chambre,

M. Bézard, président,

M. Picard, président-assesseur.

Lu en audience publique, le 5 novembre 2013.

''

''

''

''

1

2

N° 13LY00490


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 13LY00490
Date de la décision : 05/11/2013
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Communautés européennes et Union européenne - Portée des règles du droit de l'Union européenne - Directives.

Urbanisme et aménagement du territoire - Plans d'aménagement et d'urbanisme.


Composition du Tribunal
Président : M. RIQUIN
Rapporteur ?: M. Vincent-Marie PICARD
Rapporteur public ?: M. VALLECCHIA
Avocat(s) : GLEIZE

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2013-11-05;13ly00490 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award