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22/05/2014 | FRANCE | N°12LY24533

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 2ème chambre - formation à 3, 22 mai 2014, 12LY24533


Vu l'ordonnance du président de la section du contentieux du Conseil d'Etat, en date du 4 décembre 2013, attribuant le jugement de la requête à la Cour administrative d'appel de Lyon, en application de l'article R. 351-8 du code de justice administrative ;

Vu la requête, enregistrée le 29 novembre 2012 au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille, présentée pour M. et MmeB..., domiciliés Les Lones Chemin de la Boulade à Cedenat (84160) ;

M. et Mme B...demandent à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n°1102301 du 27 septembre 2012 par lequel le Tribu

nal administratif de Nîmes a rejeté leur demande tendant à la décharge et, à t...

Vu l'ordonnance du président de la section du contentieux du Conseil d'Etat, en date du 4 décembre 2013, attribuant le jugement de la requête à la Cour administrative d'appel de Lyon, en application de l'article R. 351-8 du code de justice administrative ;

Vu la requête, enregistrée le 29 novembre 2012 au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille, présentée pour M. et MmeB..., domiciliés Les Lones Chemin de la Boulade à Cedenat (84160) ;

M. et Mme B...demandent à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n°1102301 du 27 septembre 2012 par lequel le Tribunal administratif de Nîmes a rejeté leur demande tendant à la décharge et, à titre subsidiaire, à la réduction des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu, des contributions sociales et des pénalités y afférentes auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2006 et 2007 ;

2°) de prononcer la décharge des impositions contestées et des pénalités y afférentes ;

3°) à titre subsidiaire, de réformer le jugement attaqué et de prononcer la réduction des impositions contestées et des pénalités y afférentes ;

Les requérants soutiennent :

- que la procédure d'imposition est entachée d'irrégularité en l'absence de communication par l'administration fiscale de la proposition de rectification adressée à la société Spilfer sise au Luxembourg, malgré leur demande expresse dans le cadre de leur lettre d'observations sur la proposition de rectification, en date du 18 décembre 2009 ; qu'en l'absence de mention de la procédure de redressement suivie à leur égard dans la notification de redressement du 8 octobre 2009, la procédure est entachée d'une irrégularité substantielle ;

- que l'administration n'établit ni le désinvestissement des bénéfices regardés comme distribués, ni l'appréhension par eux des sommes réputées désinvesties de la société Spilfer ; que l'administration ne leur a pas notifié de revenus d'origine indéterminée à la suite de l'examen de leurs comptes personnels ; qu'elle n'établit donc pas l'appréhension des sommes en cause ; qu'en ce qui concerne la somme de 165 945 euros qui fait partie des bénéfices reconstitués, utilisée par la société pour l'achat, non contesté, d'un véhicule Ferrari, constitutif d'un actif professionnel de la société ensuite mis à la disposition de Mme B... par un contrat de location du 14 mars 2007, ils apportent la preuve que cette somme n'a pas été désinvestie, mais convertie en actif immobilisé, par la production du bon de commande du véhicule, de la facture et de la carte grise provisoire, tous établis au nom de la société Spilfer qui en est propriétaire, ainsi que cela ressort du relevé du compte bancaire de la société auprès de Dexia qui établit l'existence d'un virement à la société vendeuse en paiement dudit véhicule ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 23 juillet 2013, présenté par le ministre chargé du budget, qui conclut au rejet de la requête ;

Il expose :

- que la procédure d'imposition n'est pas entachée d'irrégularité, la proposition de rectification adressée à la société Spilfer ayant été reprise en totalité dans la proposition de rectification adressée le 8 octobre 2009 aux épouxB..., ainsi que cela ressort de la réponse aux observations des contribuables du 4 février 2010 ; que le pli contenant une copie de la proposition de rectification envoyée au siège social de la société Spilfer au Luxembourg le 8 octobre 2009 a été retiré le 12 octobre 2009, et que M. B..., en sa qualité d'administrateur, seul dirigeant de la société, disposant, de par ses fonctions, des plus larges pouvoirs à l'égard de celle-ci, en a donc nécessairement eu connaissance ; que, par les motifs indiqués dans la proposition de rectification, les requérants ont été mis en mesure de connaître les raisons pour lesquelles l'administration a estimé devoir rehausser leurs bases imposables au titre de l'impôt sur le revenu et des contributions sociales des années 2006 et 2007 et ont pu présenter des observations auxquelles l'administration a répondu le 4 février 2010 ; que, compte tenu de l'indépendance des procédures entre la vérification de comptabilité de la société Spilfer et l'examen contradictoire de leur situation fiscale personnelle, l'administration n'était pas tenue de communiquer aux épouxB..., avant la mise en recouvrement des impositions litigieuses, une copie de la proposition de rectification adressée à la société, dans la mesure où tous les éléments à l'origine des revenus redressés étaient repris dans la proposition de rectification qui leur a été adressée à titre personnel ;

- que le défaut de mention expresse du caractère contradictoire de la procédure d'imposition suivie à leur égard n'est pas de nature à entacher celle-ci d'une irrégularité substantielle dès lors que les contribuables n'ont été privés d'aucune des garanties dont ils étaient en droit de bénéficier ;

- que les impositions litigeuses sont fondées ; qu'en sa qualité d'administrateur de la société Spilfer au cours de la période vérifiée, M. B... était le seul maître de l'affaire et pouvait disposer sans contrôle des fonds sociaux ; qu'ainsi l'administration était fondée à considérer que les bénéfices occultes réalisés par la société Spilfer au cours des exercices vérifiés, constituaient des revenus distribués à son profit ; que l'achat d'un véhicule de marque Ferrari en mars 2007 par cette société, laquelle n'a pas justifié de son inscription à l'actif de son bilan de l'exercice 2007, n'est pas de nature à remettre en cause utilement le caractère de revenus distribués des bénéfices reconstitués au titre de l'exercice de 2007, ni, à supposer que lesdits bénéfices aient servi à l'achat dudit véhicule, ne suffit pas à démontrer que les sommes ainsi utilisées auraient été, du fait de cette affectation, mises en réserve au sens de l'article 109-1 du code général des impôts ; qu'ainsi les circonstances invoquées par les requérants, à les supposer établies, ne font pas obstacle à ce que les bénéfices correspondants, résultant de recettes non comptabilisées et non déclarées, soient regardés comme distribués ; que compte tenu de la minoration du bilan social induite par le défaut de comptabilisation des valeurs correspondant aux créances de la société Spilfer sur la société Technica, il a eu nécessairement appréhension de ces valeurs et distributions de celles-ci au bénéfice de M. B..., seul maître de l'affaire ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts ;

Vu le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 22 avril 2014 :

- le rapport de Mme Terrade, premier conseiller,

- et les conclusions de M. Lévy Ben Cheton, rapporteur public ;

1. Considérant qu'il résulte de l'instruction que la société Spilfer, dont le siège social est au Luxembourg, et qui dispose en France d'un établissement stable au lieu de résidence de son administrateur, a fait l'objet en 2008 d'une vérification de comptabilité à l'issue de laquelle l'administration fiscale a constaté que la société s'était abstenue de comptabiliser les créances correspondant aux factures émises à destination de la société Technica Industrie au titre des années 2006 et 2007 pour des prestations fictives ayant néanmoins donné lieu à des recettes encaissées et non déclarées ; que l'administration fiscale a alors procédé à la réintégration de ces créances dans le résultat imposable de la société et au redressement de l'impôt sur les sociétés dû au titre desdits excercices par voie de taxation d'office ; que l'administration a estimé que les bénéfices résultant de la réintégration dans le résultat imposable de la société des recettes non comptabilisées au titre des exercices vérifiés avaient constitué des revenus distribués, taxables dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers, imposables dans les mains de M. et Mme B... en leur qualité d'administrateurs de la société ; qu'elle a ainsi mis à la charge de M. et Mme B...des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales pour les années 2006 et 2007 ; qu'après avoir présenté leurs observations à l'administration fiscale qui a maintenu les redressements notifiés, les époux B...ont contesté les impositions supplémentaires, mises en recouvrement le 30 septembre 2010, par réclamation du 22 novembre 2010, rejetée par l'administration par décision du 18 mai 2011 ; que, par jugement du 27 septembre 2012, le Tribunal administratif de Nîmes a rejeté leur demande tendant à la décharge et subsidiairement à la réduction des impositions mises à leur charge aux motifs que la procédure d'imposition suivie avait été régulière et que les impositions supplémentaires étaient fondées ; que, par la présente requête, M. et Mme B...relèvent appel de ce jugement ;

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales : " L'administration adresse au contribuable une proposition de rectification qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation. (...) " ; qu'aux termes de l'article R. *57-1 du même livre : " La proposition de rectification prévue par l'article L. 57 fait connaître au contribuable la nature et les motifs de la rectification envisagée. L'administration invite, en même temps, le contribuable à faire parvenir son acceptation ou ses observations dans un délai de trente jours à compter de la réception de la proposition, prorogé, le cas échéant, dans les conditions prévues au deuxième alinéa de cet article. " ;

3. Considérant que M et Mme B...soutiennent que la procédure d'imposition est entachée d'irrégularité en l'absence de communication par l'administration fiscale d'une copie de la proposition de rectification adressée à la société Spilfer sise au Luxembourg, en réponse à leur demande expresse formulée dans le cadre de leur lettre d'observations du 18 décembre 2009 ; que, toutefois, il résulte de l'instruction, et notamment de la réponse aux observations des contribuables du 4 février 2010, que la proposition de rectification du 8 octobre 2009 adressée par l'administration fiscale aux époux B...reprend les termes de la proposition de rectification adressée le même jour, à la société Spilfer ; que compte tenu de l'indépendance des procédures suivies à l'égard de la société et des bénéficiaires des revenus distribués, les requérants ne sont pas pas fondés à soutenir qu'en l'absence de communication de la proposition de rectification adressée à la société Spilfer, la proposition de rectification qui leur a été adressée n'était pas régulièrement motivée ;

4. Considérant que lorsque l'administration entend procéder à un redressement, il lui appartient de mentionner, dans la proposition de rectification, la nature de la procédure d'imposition qu'elle entend suivre à cette fin ; que, toutefois, l'omission de cette mention ou l'erreur que cette dernière pourrait comporter n'entache pas d'irrégularité la procédure en cause lorsque cette omission ou erreur n'a pas eu pour effet de priver le contribuable de l'une des garanties de procédures dont il était en droit de bénéficier ;

5. Considérant qu'il résulte de l'instruction que les impositions litigieuses ont été établies à l'issue d'une procédure de rectification contradictoire ; qu'il résulte notamment de l'instruction que les époux B...ont demandé et obtenu le bénéfice de la prorogation du délai de trente jours supplémentaires prévu dans le cadre de cette procédure pour présenter leur observations, comme les y invitait la proposition de rectification du 8 octobre 2009, ce qu'ils ont fait par courrier du 18 décembre 2009, auquel l'administration fiscale a répondu le 4 février 2010, et qu'ils ont pu discuter utilement des redressements proposés ; que le litige concernant l'imposition de revenus de capitaux mobiliers, la commission départementale des impôts et des taxes sur le chiffre d'affaires n'était pas compétente pour rendre un avis ; qu'ainsi les contribuables n'ont été privés d'aucune des garanties dont ils étaient en droit de bénéficier ; que par suite, la seule circonstance que le vérificateur a omis d'indiquer expressément la mise en oeuvre de la procédure contradictoire dans la proposition de rectification n'a entaché celle-ci d'aucune irrégularité ;

Sur le bien-fondé de l'imposition :

6. Considérant qu'aux termes de l'article 109 du code général des impôts : " 1. Sont considérés comme revenus distribués : 1° Tous les bénéfices ou produits qui ne sont pas mis en réserve ou incorporés au capital ; (...) " ; qu'aux termes de l'article 110 du même code : " Pour l'application du 1° du 1 de l'article 109 les bénéfices s'entendent de ceux qui ont été retenus pour l'assiette de l'impôt sur les sociétés (...) " ; que sont présumées distribuées toutes les sommes qui n'ont pas été mises en réserve ou immobilisées au capital social ;

7. Considérant que la charge de la preuve quant à l'appréhension des sommes réputées distribuées par la personne morale et quant à leur réalité ou leur montant dépend de la procédure d'imposition ; qu'en l'espèce, les requérants n'ayant pas accepté les redressements notifiés selon la procédure contradictoire, la charge de la preuve incombe à l'administration ;

8. Considérant qu'il résulte de l'instruction qu'à l'issue de la vérification de comptabilité de la société Spilfer, administrée par M. et MmeB..., le vérificateur a réintégré dans les résultats de cette société des recettes encaissées et non comptabilisées en produits d'exploitation, correspondant aux factures émises à destination de la société Technica Industrie au titre des années 2006 et 2007 pour des prestations fictives ; que les sommes correspondantes ont été regardées par l'administration fiscale comme des bénéfices désinvestis et distribués et ont été imposées entre les mains des épouxB..., regardés comme bénéficiaires ; que les requérants soutiennent que l'administration ne démontre ni la distribution, ni l'appréhension par eux desdites sommes ;

9. Considérant, toutefois, qu'il résulte de l'instruction que les opérations de vérification de comptabilité conduites auprès de la société Spilfer ont révélé que celle-ci avait délibérément omis de comptabiliser les créances correspondant aux factures émises à l'égard de sa cliente pour des prestations fictives ; que ces recettes non déclarées, et non comptabilisées par la société au titre des exercices vérifiés, ont été encaissées sur les comptes bancaires des épouxB..., sans que ce soit à l'insu de la société dont ils étaient, en leur qualité d'administrateurs, maîtres de l'affaire, M. B... disposant, ainsi que cela résulte de l'instruction, de tous les pouvoirs nécessaires pour engager la société dont il assurait la gestion quotidienne, détenant la signature sur ses comptes bancaires et pouvant disposer sans contrôle des fonds sociaux ; que si, pour démontrer l'absence de désinvestissement et donc de distribution desdites sommes, les contribuables se prévalent de l'achat en 2007 par la société, pour une somme de 165 945 euros, d'un véhicule de marque Ferrari ensuite mis à disposition de son administratrice, Mme B..., par un contrat de location, il ne résulte pas de l'instruction que ce véhicule aurait donné lieu à une inscription à l'actif immobilisé de la société ; que, dans ces conditions, nonobstant la circonstance que l'existence de revenus d'origine indéterminée n'a pas été relevée par l'administration fiscale, celle-ci apporte la preuve qui lui incombe de la réalité et du montant des distributions litigieuses correspondant aux bénéfices non déclarés réalisés par la société Spilfer au cours des exercices vérifiés et de leur appréhension par les épouxB..., qui ont personnellement encaissé ces sommes imposables dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers ;

10. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme B...ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Nîmes a rejeté leur demande ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. et Mme B...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme A...B...et au ministre des finances et des comptes publics.

Délibéré après l'audience du 22 avril 2014 à laquelle siégeaient :

M. Bourrachot, président de chambre,

Mme Samson, président-assesseur,

Mme Terrade, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 22 mai 2014.

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