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25/09/2014 | FRANCE | N°14LY00251

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 4ème chambre - formation à 3, 25 septembre 2014, 14LY00251


Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 28 janvier 2014, présentée par le préfet de l'Isère ;

Le préfet demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1305236 en date du 30 décembre 2013, par lequel le Tribunal administratif de Grenoble a d'une part annulé, à la demande de M. A...B..., ses décisions du 23 août 2013 par lesquelles il a refusé de délivrer à ce dernier un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai d'un mois et a fixé le pays de renvoi et, d'autre part, lui a fait injonction de délivrer

M. A...B...une carte de séjour temporaire mention " vie privée et familiale " dan...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 28 janvier 2014, présentée par le préfet de l'Isère ;

Le préfet demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1305236 en date du 30 décembre 2013, par lequel le Tribunal administratif de Grenoble a d'une part annulé, à la demande de M. A...B..., ses décisions du 23 août 2013 par lesquelles il a refusé de délivrer à ce dernier un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai d'un mois et a fixé le pays de renvoi et, d'autre part, lui a fait injonction de délivrer à M. A...B...une carte de séjour temporaire mention " vie privée et familiale " dans le délai de deux mois à compter de la notification de ce jugement ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. A... B... devant le Tribunal administratif de Grenoble ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu l'ordonnance en date du 11 avril 2014 fixant la clôture d'instruction au 29 avril 2014, en application de l'article R. 613-1 du code de justice administrative ;

Vu le mémoire présenté le 12 juin 2014 pour M. B...postérieurement à la clôture de l'instruction et non communiqué ;

Vu la décision du 12 mai 2014, par laquelle le bureau d'aide juridictionnelle près le Tribunal de grande instance de Lyon (section administrative d'appel) a accordé le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale à M. B...;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979, modifiée ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Vu la décision du président de la formation de jugement de dispenser le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 11 septembre 2014 le rapport de M. Gazagnes, rapporteur ;

1. Considérant que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Grenoble a annulé, à la demande de M. A...B..., ses décisions du 23 août 2013 par lesquelles il a refusé de délivrer à ce dernier un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai d'un mois et a fixé le pays de renvoi ;

2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : "Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit :... /... / 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République" ; qu'aux termes de l'article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : "1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ;

3. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M.B..., de nationalité turque, est né le 19 juillet 1980 ; qu'il est entré irrégulièrement en France, à la date du 25 novembre 2010, selon ses déclarations, sous couvert d'un visa court séjour délivré par les autorités italiennes ; qu'il s'est marié le 1er avril 2011 avec une ressortissante turque, titulaire d'un titre de séjour valable jusqu'au 24 juillet 2014, avec qui il a eu un enfant né le 2 décembre 2011 ; que cette personne était de nouveau enceinte à la date des décisions contestées ; que toutefois à cette même date, soit le 23 août 2013, M. B...ne pouvait se prévaloir que d'une résidence en France récente et d'une vie commune avec son épouse d'une durée d'à peine deux ans ; que la naissance d'un second enfant postérieurement aux décisions attaquées est sans incidence sur la légalité de ces décisions ; que, dans les circonstances de l'espèce, et compte tenu, notamment, des conditions et de la durée de son séjour en France, de la possibilité de reconstituer la cellule familiale en Turquie ou de déposer une demande au titre du regroupement familial, les décisions contestées n'ont pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elles ont été prises et ne méconnaissent donc pas les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que, dès lors, le préfet de l'Isère est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Grenoble a annulé pour ce motif son arrêté du 23 août 2013 ;

4. Considérant, toutefois, qu'il appartient à la Cour administrative d'appel, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. B... devant le Tribunal administratif de Grenoble ;

Sur la légalité de la décision de refus de titre de séjour :

5. Considérant que la décision préfectorale comporte les éléments de droit et de fait qui la fondent ; que le moyen tiré du défaut de motivation doit être écarté ;

6. Considérant que le préfet a donné à M. Perissat, secrétaire général de la préfecture, délégation de signature le 5 juin 2013 par un arrêté régulièrement publié au recueil des actes administratifs de la préfecture de l'Isère ; que le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur de l'acte manque en fait et doit être écarté ;

7. Considérant que, pour les motifs exposés au point 3, le préfet n'a ni méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ni entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation ;

Sur la légalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français :

8. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que l'exception d'illégalité du refus de titre de séjour soulevée à l'encontre de l'obligation de quitter le territoire français par M. B... doit être écartée ;

9. Considérant que le préfet de l'Isère a, dans un même arrêté, refusé à M. B... la délivrance d'un titre de séjour et fait obligation à ce dernier de quitter le territoire français ; que, d'une part, la décision de refus de séjour dont cette mesure d'éloignement découle nécessairement est régulièrement motivée ; que, d'autre part, l'arrêté contesté vise le I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et mentionne que M. B...ne remplit pas les conditions pour séjourner en France en application du 7° de l'article L. 313-11 du même code, circonstance qui justifie l'application à l'intéressé des dispositions du 3° du I de l'article L. 511-1 qui autorisent le préfet à assortir le refus de titre de séjour d'une obligation de quitter le territoire français ; que, par suite, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de l'obligation de quitter le territoire français en litige doit être écarté ;

10. Considérant que compte tenu des éléments précédemment exposés, la décision portant obligation de quitter le territoire français n'a pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et n'est pas entachée d'une erreur manifeste d'appréciation quant aux conséquences de cette décision sur la situation personnelle de M. B...;

Sur les conclusions relatives à la décision fixant le pays de destination :

11. Considérant que la décision contestée fixant le pays de destination est suffisamment motivée en droit par le visa des dispositions de l'article L. 511-1-I de code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile qui prévoient que la décision portant obligation de quitter le territoire français " fixe le pays à destination duquel l'étranger sera renvoyé s'il ne respecte pas le délai de départ volontaire " et de l'article L. 513-2 du même code ; que cette décision est suffisamment motivée en fait par l'indication que l'intéressé est de nationalité turque, qu'il pourra être reconduit d'office à la frontière du pays dont il a la nationalité ou de tout autre pays où il établit être légalement admissible et qu'il " n'apporte aucun élément suffisamment probant, tendant à démontrer qu'il serait soumis à des risques personnels et réels de tortures ou de traitements inhumains en cas de retour dans son pays d'origine " ;

12. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le préfet de l'Isère est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Grenoble a, d'une part annulé son arrêté du 23 août 2013 refusant la délivrance d'un titre de séjour à M. B..., lui faisant obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de son renvoi et, d'autre part, lui a fait injonction de délivrer à M. B...une carte de séjour temporaire mention " vie privée et familiale " dans le délai de deux mois à compter de la notification de ce jugement ;

DECIDE :

Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif de Grenoble en date du 30 décembre 2013 est annulé.

Article 2 : La demande présentée par M. A...B...devant le Tribunal administratif de Grenoble est rejetée.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au préfet de l'Isère, à M. A...B...et au ministre de l'intérieur.

Délibéré après l'audience du 11 septembre 2014, où siégeaient :

- M. Wyss, président de chambre,

- M. Gazagnes et M. C...D..., présidenst-assesseurs.

Lu en audience publique, le 25 septembre 2014

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N° 14LY00251 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 4ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 14LY00251
Date de la décision : 25/09/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : M. WYSS
Rapporteur ?: M. Philippe GAZAGNES
Rapporteur public ?: M. DURSAPT
Avocat(s) : CLEMENTINE FRANCES ET ELSA GHANASSIA

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2014-09-25;14ly00251 ?
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