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16/12/2014 | FRANCE | N°13LY02824

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 1ère chambre - formation à 3, 16 décembre 2014, 13LY02824


Vu la requête, enregistrée le 28 octobre 2013, présentée pour M. D...C..., domicilié ...;

M. C...demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1204885 du 1er octobre 2013 par lequel le Tribunal administratif de Grenoble a annulé, à la demande de l'association " Les amis de Mirmande ", l'arrêté en date du 13 mai 2011 par lequel le maire de la commune de Mirmande, agissant au nom de l'Etat, lui a délivré un permis de construire ;

2°) de rejeter la demande de l'association " Les Amis de Mirmande " devant le tribunal ou, subsidiairement, de n'annuler que par

tiellement cet arrêté en ce qu'il porte sur le pigeonnier et/ou la terrasse et l...

Vu la requête, enregistrée le 28 octobre 2013, présentée pour M. D...C..., domicilié ...;

M. C...demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1204885 du 1er octobre 2013 par lequel le Tribunal administratif de Grenoble a annulé, à la demande de l'association " Les amis de Mirmande ", l'arrêté en date du 13 mai 2011 par lequel le maire de la commune de Mirmande, agissant au nom de l'Etat, lui a délivré un permis de construire ;

2°) de rejeter la demande de l'association " Les Amis de Mirmande " devant le tribunal ou, subsidiairement, de n'annuler que partiellement cet arrêté en ce qu'il porte sur le pigeonnier et/ou la terrasse et le patio couvert ;

3°) de mettre à la charge de l'association " Les amis de Mirmande " une somme de 3 000 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;

Il soutient que, à la date de l'affichage en mairie de la demande du pétitionnaire, soit le 18 février 2011, l'association n'avait pas, en application de l'article L. 600-1-1 du code de l'urbanisme, intérêt à contester l'arrêté, son champ d'action étant strictement limité au périmètre de protection de l'église Sainte Foy fixé par arrêté du 18 juin 1946, alors que le projet est situé en dehors de ce périmètre ; que le président de l'association n'était pas régulièrement habilité à agir au nom de l'association, la décision ayant été prise par l'assemblée générale ; qu'il a déposé une demande de permis de démolir conformément aux dispositions de l'article R. 431-21 du code de l'urbanisme ; que l'illégalité de l'avis de l'architecte des bâtiments de France n'altère pas la régularité du permis ; que la référence dans cet avis à un zonage C au lieu de B procède d'une simple erreur de plume ; que c'est demeuré sans incidence compte tenu du caractère identique des dispositions en cause ; que la covisibilité avec l'église n'a pas lieu de s'appliquer et n'avait donc pas à être visée ; que rien ne faisait obstacle à l'extension de la maison d'habitation ; que la partie traditionnelle de l'habitation n'est pas affectée dans son volume notamment ; que l'article B 1.2 de la ZPPAUP relative à la hauteur ne concerne que les constructions neuves ; que le bâtiment est en harmonie avec les constructions avoisinantes ; qu'il n'y a pas de construction nouvelle en violation du règlement de la zone N de la carte communale ; que les trois ouvrages en litige sont distincts et divisibles de telle sorte que seule était justifiée une annulation partielle du permis en application de l'article L. 600-5 du code de l'urbanisme ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire, enregistré le 20 janvier 2014, présenté pour l'association " Les Amis de Mirmande " qui conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 4 000 euros soit mise à la charge de M. C...au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle expose que la requête, qui est la retranscription littérale des écritures de première instance, est irrecevable ; qu'elle pouvait modifier ses statuts sans qu'aucune incidence en résulte sur la recevabilité de sa demande ; que les dispositions de l'article L. 600-3 du code de l'urbanisme sont inapplicables ; qu'elle avait intérêt à agir au regard de ses statuts en vigueur au 17 février 2011 qui concernent l'ensemble du village alors que le projet litigieux, compte tenu de sa situation, est visible du village et de son site protégé ; que la présidente était habilitée à déposer le recours ; que faute de permis de démolir avant la délivrance du permis de construire, ce dernier était irrégulier ; que le maire était tenu de refuser le permis de construire ; que faute de concerner une activité économique ou agricole, l'extension contestée, qui ne porte pas sur une activité existante au sens de l'article B.1.1 du règlement, n'était pas possible ; qu'il s'agit bien d'édifier une construction neuve ; que le rez-de-chaussée de la construction est commun à l'ensemble du projet et indivisible, de telle sorte qu'il ne peut y avoir lieu à application de l'article L. 600-5 du code de l'urbanisme ; que l'avis de l'architecte des bâtiments de France est irrégulier ; que les règles de la zone N de la carte communale ont été méconnues ;

Vu le mémoire, enregistré le 19 juin 2014, présenté pour M. C...qui persiste dans ses précédents moyens et conclusions, soutenant en outre que sa requête est motivée ; que l'assiette du projet n'est pas comprise dans le champ géographique de l'association ; que l'article L. 600-1-3 du code de l'urbanisme trouve à s'appliquer ;

Vu l'ordonnance en date du 19 juin 2014 fixant la clôture d'instruction au 9 juillet 2014, en application de l'article R. 613-1 du code de justice administrative ;

Vu le mémoire, enregistré le 24 juin 2014, présenté pour l'association " Les Amis de Mirmande " qui conclut aux mêmes fins précédemment par les mêmes moyens, portant à 5 000 euros la somme demandée au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et exposant également que les dispositions de l'article L. 600-1-3 du code de l'urbanisme ne sont applicables qu'aux permis délivrés depuis le 19 août 2013 ;

Vu le mémoire, enregistré le 30 juin 2014, présenté pour l'association " Les Amis de Mirmande " qui maintient ses précédents moyens et conclusions, indiquant par ailleurs que le Conseil d'Etat a confirmé, par un avis n° 376113, que l'article L. 600-1-3 du code de l'urbanisme n'était pas applicable ici ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de l'urbanisme ;

Vu l'ordonnance n° 2013-368 du 18 juillet 2013 relative au contentieux de l'urbanisme ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 25 novembre 2014 :

- le rapport de M. Picard, président-assesseur,

- les conclusions de M. Vallecchia, rapporteur public,

- et les observations de Me B...représentant SIGMA Avocats, avocat de M. C..., et celles de Me A...représentant CDMF-Avocats affaires publiques, avocat de l'association " Les Amis de Mirmande " ;

1. Considérant que M. C...relève appel d'un jugement du 1er octobre 2013 par lequel le Tribunal administratif de Grenoble a annulé, à la demande de l'association " Les Amis de Mirmande ", l'arrêté en date du 13 mai 2011 par lequel le maire de la commune de Mirmande, agissant au nom de l'Etat, lui a délivré un permis de construire pour l'aménagement et l'extension de la partie centrale d'un bâtiment ainsi que la création d'une cour intérieure, d'un passage couvert et d'un pigeonnier sur l'emprise d'un hangar et d'une chambre froide existants ;

Sur la recevabilité de la demande devant le tribunal :

2. Considérant qu'aux termes de l'article L.600-1-1 du code de l'urbanisme, alors applicable : " Une association n'est recevable à agir contre une décision relative à l'occupation ou l'utilisation des sols que si le dépôt des statuts de l'association en préfecture est intervenu antérieurement à l'affichage en mairie de la demande du pétitionnaire " ; qu'il ressort des pièces du dossier que les statuts de l'association " Les Amis de Mirmande ", dans leur version datant de sa création en 1948, tels qu'ils ont été déposés en préfecture antérieurement à l'affichage en mairie de Mirmande, le 17 février 2011, de la demande de permis présentée par M. C..., prévoient, en particulier, comme objectifs " de protéger le village de Mirmande, son site, et son environnement, contre les atteintes du temps et les entreprises menées en violation de l'arrêté du 18 juin 1946 ; d'aider à la restauration de l'église Sainte Foy qui couronne l'ensemble du site, de veiller à ce que les souvenirs du passé, les plus vieilles et les plus modestes demeures, soient protégés ; de sauvegarder le caractère local en obtenant de tous que le style des rues et des vieilles maisons, de leurs toitures, de leurs cheminées, de leur fenêtres, soit respecté (...) " ; qu'ils assignent ainsi à l'association de protéger le site et de sauvegarder le patrimoine communal bâti notamment, sans que cette mission soit, contrairement à ce que soutient M. C..., strictement restreinte aux effets éventuels, sur l'église Sainte Foy et sur le haut du village, des seuls aménagements envisagés au sein du périmètre défini par l'arrêté du 18 juin 1946 portant inscription " sur l'inventaire des sites pittoresques de la Drôme le village de Mirmande et ses abords immédiats ", en dehors duquel se situe le projet contesté ; qu'il s'ensuit que l'association justifie d'un intérêt lui donnant qualité pour agir contre cette autorisation ;

3. Considérant que selon l'article L. 600-1-3 du code de l'urbanisme, issu de l'ordonnance visée ci-dessus du 18 juillet 2013 : " Sauf pour le requérant à justifier de circonstances particulières, l'intérêt pour agir contre un permis de construire, de démolir ou d'aménager s'apprécie à la date d'affichage en mairie de la demande du pétitionnaire " ; que s'agissant de dispositions nouvelles qui affectent la substance du droit de former un recours pour excès de pouvoir contre une décision administrative, elles ne sont, en l'absence de dispositions contraires expresses, qu'applicables aux recours formés contre les décisions intervenues après leur entrée en vigueur ; que le permis contesté étant intervenu avant l'entrée en vigueur de ces dispositions, M. C...ne saurait utilement s'en prévaloir ;

4. Considérant qu'il résulte de l'article 8 des statuts de l'association, dans sa version issue de la révision du 2 janvier 2012 que : " le conseil d'administration décide des actions à mener en justice et mandate le président pour représenter l'association en justice " ; qu'il ressort clairement de la délibération du 2 janvier 2012 que, conformément à cette disposition, le conseil d'administration a donné mandat à la présidente de l'association pour agir devant le tribunal ; que, contrairement à ce que soutient M.C..., cette dernière avait bien qualité pour représenter l'association devant le tribunal ;

5. Considérant ainsi qu'aucune des fins de non-recevoir opposées par M. C...ne saurait être retenue ;

Sur le fond :

6. Considérant en premier lieu que, selon l'article L. 421-3 du code de l'urbanisme : " Les démolitions de constructions existantes doivent être précédées de la délivrance d'un permis de démolir lorsque la construction relève d'une protection particulière définie par décret en Conseil d'Etat (...) " ; que selon l'article R. 431-21 du même code : " Lorsque les travaux projetés nécessitent la démolition de bâtiments soumis au régime du permis de démolir, la demande de permis de construire ou d'aménager doit : a) Soit être accompagnée de la justification du dépôt de la demande de permis de démolir ; b) Soit porter à la fois sur la démolition et sur la construction ou l'aménagement. " ; que selon l'article R. 421-28 de ce code : " Doivent en outre être précédés d'un permis de démolir les travaux ayant pour objet de démolir ou de rendre inutilisable tout ou partie d'une construction : (...) c) Située dans le champ de visibilité d'un monument historique défini à l'article L. 621-30 du code du patrimoine dans une zone de protection du patrimoine architectural, urbain et paysager ou dans une aire de mise en valeur de l'architecture et du patrimoine (...) "

7. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que le projet en cause, qui est situé en secteur B d'une zone de protection du patrimoine architectural, urbain et paysager, se trouve dans le champ de visibilité de l'église Sainte Foy, inscrite depuis le 27 janvier 1948 à l'inventaire supplémentaire des monuments historiques et qu'il comporte la démolition d'une partie du bâti existant ; qu'il apparaît et n'est pas contesté que la demande de permis en cause, qui ne porte pas également sur les démolitions exigées par le projet d'aménagement, n'était accompagnée, à sa date de délivrance, d'aucune justification du dépôt d'une demande de permis de démolir ; que par suite, et alors même que le 23 janvier 2012 M. C...a sollicité un permis de démolir, l'autorisation de construire contestée, délivrée antérieurement, était entachée d'illégalité ;

8. Considérant en deuxième lieu que, selon l'article B 1.1 du règlement de la zone de protection du patrimoine architectural, urbain et paysager, relatif à " l'implantation et la constructibilité " : " les constructions d'habitations sont interdites à l'exception des constructions liées à l'usage agricole, y compris le logement s'y rapportant. Les bâtiments d'élevage, de silos et les serres fixes sont toutefois interdits. Seules les extensions d'activités existantes sont autorisées. " ; que les constructions destinées à l'habitation ne sauraient être regardées comme des constructions à usage d'activités au sens de cette disposition ; que ces dispositions, qui n'admettent que les extensions d'activités existantes, faisaient ainsi obstacle au projet de M. C...qui porte à la fois sur le réaménagement et l'agrandissement d'une ancienne maison d'habitation, sans modification de son affectation, et la réalisation de dépendances ; que l'intéressé ne saurait utilement se prévaloir de ce que des projets comparables auraient été autorisés à proximité ou de ce que l'administration se serait montrée favorable à son projet ; que le permis en litige est donc, également pour ce motif, entaché d'illégalité ;

9. Considérant en dernier lieu que l'article B 1.2 du même règlement, qui porte sur " l'architecture ", prescrit la " conservation des volumes des bâtiments traditionnels existants " ; qu'il ressort des pièces du dossier, et en particulier des plans relatifs au rez-de-chaussée et à l'étage de la construction de M.C..., ainsi que de la notice explicative, que le projet litigieux prévoit l'extension du bâtiment ancien existant, et donc la modification de son volume ; qu'il n'est ainsi pas conforme à cette disposition ;

10. Considérant qu'aux termes de l'article L. 600-5 du code de l'urbanisme : " Le juge administratif qui, saisi de conclusions dirigées contre un permis de construire, de démolir ou d'aménager, estime, après avoir constaté que les autres moyens ne sont pas fondés, qu'un vice n'affectant qu'une partie du projet peut être régularisé par un permis modificatif, peut limiter à cette partie la portée de l'annulation qu'il prononce et, le cas échéant, fixer le délai dans lequel le titulaire du permis pourra en demander la régularisation. " ; que la régularisation doit, pour pouvoir faire légalement l'objet d'un permis modificatif, impliquer des modifications de caractère limité et ne pas remettre en cause la conception générale ni l'implantation des constructions ;

11. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la méconnaissance des articles B 1.1 et B 1.2 du règlement de la zone de protection du patrimoine architectural, urbain et paysager tient à l'agrandissement de l'habitation existante mais également au complet réaménagement des annexes, de leur agencement et de leur affectation ; que, eu égard à l'ampleur des modifications qu'impliquerait une éventuelle régularisation, la seule délivrance d'un permis de construire modificatif ne serait pas légalement possible ; qu'en conséquence, et comme l'a jugé le tribunal, l'annulation partielle de l'arrêté contesté n'est pas possible en l'espèce ;

12. Considérant qu'il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir opposée par l'association " Les Amis de Mirmande " à la requête en appel de M.C..., que ce dernier n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Grenoble a annulé le permis de construire contesté ; que les conclusions qu'il a présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent donc qu'être rejetées ; qu'il y a lieu, en l'espèce, de mettre à la charge de M.C..., le paiement à l'association " Les Amis de Mirmande " d'une somme de 1 500 euros sur ce même fondement ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. C...est rejetée.

Article 2 : M. C...versera à l'association " Les Amis de Mirmande ", une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. D...C...et à l'association " Les Amis de Mirmande ".

Délibéré après l'audience du 25 novembre 2014, à laquelle siégeaient :

M. Picard, président de la formation de jugement,

M. Chenevey, premier conseiller,

Mme Vaccaro-Planchet, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 16 décembre 2014.

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N° 13LY02824

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 13LY02824
Date de la décision : 16/12/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

68-03 Urbanisme et aménagement du territoire. Permis de construire.


Composition du Tribunal
Président : M. PICARD
Rapporteur ?: M. Vincent-Marie PICARD
Rapporteur public ?: M. VALLECCHIA
Avocat(s) : SIGMA AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2014-12-16;13ly02824 ?
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