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23/12/2014 | FRANCE | N°14LY00807

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 3ème chambre - formation à 3, 23 décembre 2014, 14LY00807


Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés à la Cour par télécopie les 18 mars et 4 avril 2014 et régularisés le 23 avril 2014, présentés pour M. A...F...B..., domicilié... ;

M. B...demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1401009 du 18 février 2014 en tant que, par ce jugement, le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 13 février 2014 par laquelle le préfet de l'Ain a fixé le pays à destination duquel il sera éloigné en exécution

d'une décision judiciaire d'interdiction temporaire du territoire ;

2°) d'annuler ladi...

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés à la Cour par télécopie les 18 mars et 4 avril 2014 et régularisés le 23 avril 2014, présentés pour M. A...F...B..., domicilié... ;

M. B...demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1401009 du 18 février 2014 en tant que, par ce jugement, le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 13 février 2014 par laquelle le préfet de l'Ain a fixé le pays à destination duquel il sera éloigné en exécution d'une décision judiciaire d'interdiction temporaire du territoire ;

2°) d'annuler ladite décision ;

3°) d'enjoindre au préfet de l'Ain de lui délivrer une carte de séjour temporaire en qualité de parent d'enfant français dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 75 euros par jour de retard ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation, dans les mêmes conditions de délai et d'astreinte ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

il soutient que :

- la décision fixant le pays de destination est insuffisamment motivée ; elle est stéréotypée, aucune considération n'a été apportée à sa situation particulière ;

- cette décision méconnaît les stipulations des articles 3-1 et 9 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant dès lors qu'il sera séparé de sa fille de treize mois de nationalité française dont il est proche et au développement de laquelle il participe ;

- elle est entachée d'erreur manifeste d'appréciation, en l'absence de toute menace de trouble à l'ordre public ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et les dispositions de l'article L. 313-11-7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dès lors qu'il réside en France depuis huit années, qu'il contribue dans la mesure de ses moyens à l'entretien et à l'éducation de sa fille par l'intermédiaire de la mère de celle-ci, et que l'éventuel départ concomitant de sa fille priverait la mère de son enfant ; elle est, en outre, entachée d'erreur de droit et d'erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur sa vie privée et familiale ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 11 juillet 2014, présenté par le préfet de l'Ain, qui conclut au rejet de la requête ;

il soutient que :

- le moyen tiré de l'insuffisance de motivation doit être écarté ;

- la décision attaquée n'a pas méconnu les stipulations des articles 3-1 et 9 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant dès lors que la décision de renvoi est prise en application des décisions judiciaires d'interdiction du territoire et qu'en tout état de cause, le requérant n'établit pas qu'il participe à l'entretien de l'enfant ;

- cette décision n'a pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; le requérant ne justifie pas d'une vie privée et familiale stable, intense et ancienne sur le territoire français ;

- elle n'est pas entachée d'erreur manifeste d'appréciation ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code pénal ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Vu la décision par laquelle le président de la formation de jugement, sur proposition du rapporteur public, a dispensé celui-ci d'exposer ses conclusions à l'audience, en application de l'article L. 732-1 du code de justice administrative ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 2 décembre 2014 :

- le rapport de Mme Courret, président-assesseur ;

1. Considérant que M.B..., ressortissant ivoirien né le 18 juillet 1983, a été condamné par un jugement du tribunal correctionnel de Thonon-les-Bains du 4 octobre 2010 à une peine de dix-huit mois d'emprisonnement et à une interdiction du territoire français pour une durée de cinq ans ; que, par décisions du 13 février 2014, le préfet de l'Ain a annulé le récépissé valable jusqu'au 20 mai 2014, qui lui avait été délivré le 21 janvier 2014, a pris à son encontre une décision d'éloignement à destination de la Côte d'Ivoire ou de tout pays vers lequel il apporterait la preuve de son admissibilité, et a ordonné son placement en rétention administrative ; que par un jugement du 18 février 2014, le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Lyon a renvoyé devant une formation collégiale les conclusions de M. B... dirigées contre la décision d'annulation de son récépissé de son titre de séjour et a statué sur celles tendant à l'annulation des décisions du même jour fixant le pays de destination et de placement en rétention ; que M. B...relève appel du jugement du 18 février 2014 en tant que le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision fixant le pays de destination de son éloignement ;

2. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 1er de la loi du 11 juillet 1979 susvisée : " Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. / A cet effet, doivent être motivées les décisions qui : / - restreignent l'exercice des libertés publiques ou, de manière générale, constituent une mesure de police ;(...). " ; qu'aux termes de l'article 3 de cette loi : " La motivation exigée par la présente loi doit être écrite et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision. " ; que la décision fixant le pays de destination est régulièrement motivée en droit par les visas des textes applicables et notamment de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme, de la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 et des articles L. 541-1 et L. 541-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; qu'elle est régulièrement motivée en fait par la mention de l'interdiction du territoire français pour une durée de cinq ans prononcée le 4 octobre 2010 par le tribunal correctionnel de Thonon-les-Bains à l'encontre de M. A...B..., aliasC..., aliasE..., aliasD..., ainsi que par le visa de la réquisition, en date du 18 juillet 2011, du procureur de la République près dudit Tribunal aux fins d'assurer l'exécution de la décision judiciaire susmentionnée ; qu'ainsi, la décision en litige, qui vise les observations émises par l'intéressé, comporte l'énoncé des considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement ; que dès lors le moyen tiré de son insuffisante motivation doit être écarté ;

3. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article L. 541-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La peine d'interdiction du territoire français susceptible d'être prononcée contre un étranger coupable d'un crime ou d'un délit est régie par les dispositions des articles 131-30, 131-30-1 et 131-30-2 du code pénal ci-après reproduites : " Art. 131-30. Lorsqu'elle est prévue par la loi, la peine d'interdiction du territoire français peut être prononcée, à titre définitif ou pour une durée de dix ans au plus, à l'encontre de tout étranger coupable d'un crime ou d'un délit. L'interdiction du territoire entraîne de plein droit la reconduite du condamné à la frontière, le cas échéant, à l'expiration de sa peine d'emprisonnement ou de réclusion (...). " ; et qu'aux termes de l'article L. 541-3 du même code : " Les dispositions de l'article L. 513-2, du premier alinéa de l'article L. 513-3 et de l'article L. 561-1 sont applicables à la reconduite à la frontière des étrangers faisant l'objet d'une interdiction du territoire, prévue au deuxième alinéa de l'article 131-30 du code pénal. " ; qu'aux termes de l'article L. 513-2 de ce code : " L'étranger qui fait l'objet d'une mesure d'éloignement est éloigné : 1° A destination du pays dont il a la nationalité, sauf si l'Office français de protection des réfugiés et apatrides ou la Cour nationale du droit d'asile lui a reconnu le statut de réfugié ou lui a accordé le bénéfice de la protection subsidiaire ou s'il n'a pas encore été statué sur sa demande d'asile ; 2° Ou à destination du pays qui lui a délivré un document de voyage en cours de validité ; 3° Ou à destination d'un autre pays dans lequel il est légalement admissible (...). " ; qu'aux termes du premier alinéa de l'article L. 513-3 du même code : " La décision fixant le pays de renvoi constitue une décision distincte de la mesure d'éloignement elle-même. " ;

4. Considérant qu'il résulte des dispositions de l'article L. 541-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile précité, que l'éloignement de M. B... est la conséquence nécessaire de l'interdiction du territoire français prononcée par le juge pénal le 4 octobre 2010 ; que le requérant ne peut donc utilement invoquer le droit de mener une vie familiale normale en France pour contester la décision préfectorale de mettre à exécution cette interdiction judiciaire du territoire ; qu'ainsi, le moyen tiré de la violation de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, de l'article L. 313-11 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, de l'erreur de droit ainsi que celui tiré de l'erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de la décision sur la situation personnelle de l'intéressé sont inopérants ;

5. Considérant que de même, M. B...ne peut utilement invoquer la circonstance qu'en l'absence de menace à l'ordre public, la décision litigieuse serait entachée d'erreur manifeste d'appréciation ;

6. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes du paragraphe 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait d'institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale. " ;

7. Considérant qu'au soutien du moyen tiré de la méconnaissance par la décision contestée de ces stipulations, M. B...fait seulement valoir qu'il sera séparé de sa fille née le 9 février 2013 ; qu'ainsi exposée, cette circonstance n'est, là encore, que la conséquence nécessaire de l'interdiction du territoire et ne peut, dès lors, être utilement invoquée ;

8. Considérant, en dernier lieu, que M. B...ne peut utilement se prévaloir, pour demander l'annulation de la décision attaquée, des stipulations de l'article 9 de la convention relative aux droits de l'enfant susvisée qui créent seulement des obligations entre Etats sans ouvrir de droits aux intéressés ;

9. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. B...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat délégué du tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande ; que, par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction sous astreinte et de mise à la charge de l'Etat des frais exposés par lui et non compris dans les dépens doivent être rejetées ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. B...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A...F...B...et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de l'Ain.

Délibéré après l'audience du 2 décembre 2014 à laquelle siégeaient :

M. Martin, président de chambre,

Mme Courret, président-assesseur,

Mme Dèche, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 23 décembre 2014.

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N° 14LY00807

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 14LY00807
Date de la décision : 23/12/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. MARTIN
Rapporteur ?: Mme Catherine COURRET
Rapporteur public ?: M. CLEMENT
Avocat(s) : MELIODON

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2014-12-23;14ly00807 ?
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