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17/02/2015 | FRANCE | N°14LY01896

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 1ère chambre - formation à 3, 17 février 2015, 14LY01896


Vu la requête, enregistrée le 20 juin 2014, présentée par le préfet de la Haute-Savoie, qui demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1306535 du 30 avril 2014 par lequel le tribunal administratif de Grenoble a annulé son arrêté du 12 novembre 2013 obligeant Mme C... à quitter le territoire français et fixant le pays à destination duquel elle pourra être reconduite d'office ;

2°) de rejeter la demande présentée par Mme B...devant le tribunal administratif de Grenoble ;

Il soutient que son arrêté ne porte pas une atteinte disproportionnée à la v

ie privée et familiale de MmeB... ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire, enregistr...

Vu la requête, enregistrée le 20 juin 2014, présentée par le préfet de la Haute-Savoie, qui demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1306535 du 30 avril 2014 par lequel le tribunal administratif de Grenoble a annulé son arrêté du 12 novembre 2013 obligeant Mme C... à quitter le territoire français et fixant le pays à destination duquel elle pourra être reconduite d'office ;

2°) de rejeter la demande présentée par Mme B...devant le tribunal administratif de Grenoble ;

Il soutient que son arrêté ne porte pas une atteinte disproportionnée à la vie privée et familiale de MmeB... ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire, enregistré le 28 novembre 2014, présenté pour MmeB..., domiciliée..., qui conclut au rejet de la requête, à ce qu'il soit enjoint au préfet de la Haute-Savoie sous astreinte de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour jusqu'à ce qu'il soit statué sur son droit à un titre de séjour et à ce que la somme de 1 500 euros soit mise à la charge de l'Etat en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle fait valoir que l'arrêté du préfet porte une atteinte excessive à sa vie privée et familiale ; qu'il n'est pas suffisamment motivé ; qu'elle n'a pas été informée de ce qu'elle était susceptible de faire l'objet d'une mesure d'obligation de quitter le territoire français ; que l'obligation de quitter le territoire français est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ; que la fixation du délai de départ volontaire à trente jours n'est pas motivée ; que la décision fixant le pays de destination n'est pas motivée ; qu'elle encourt des risques en cas de retour à Cuba, où elle sera privée de tous ses droits ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 20 janvier 2015 :

- le rapport de Mme Vaccaro-Planchet, premier conseiller,

- les conclusions de M. Vallecchia, rapporteur public,

- les observations de Me Lasfargeas, avocat de MmeB... ;

1. Considérant que, par un jugement du 30 avril 2014, le tribunal administratif de Grenoble a annulé l'arrêté du préfet de la Haute-Savoie 12 novembre 2013 obligeant Mme B... à quitter le territoire français et fixant le pays à destination duquel elle pourra être reconduite d'office ; que le préfet de la Haute-Savoie relève appel de ce jugement ;

2. Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ;

3. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que MmeB..., ressortissante cubaine née le 24 octobre 1988, est entrée régulièrement sur le territoire national le 9 octobre 2011 afin de rejoindre sa mère, son beau-père ainsi que ses deux demi-frères, tous de nationalité française et chez lesquels elle vit depuis son arrivée en France ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier qu'elle disposerait dans son pays d'origine d'autres attaches que sa grand-mère, qui l'a élevée, mais qui est atteinte de la maladie d'Alzheimer, à un stade avancé, hospitalisée et ne la reconnait plus ; qu'ainsi, dans les circonstances particulières de l'espèce, eu égard notamment à l'absence d'attaches familiales et à la précarité de ses conditions de vie dans son pays d'origine, la décision attaquée par laquelle le préfet de la Haute-Savoie a obligé Mme B... à quitter le territoire français porte une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale, alors même qu'elle a vécu à cuba jusqu'à l'âge de 23 ans, qu'elle s'est maintenue sur le territoire national au-delà de la durée de validité de son visa touristique et qu'elle a voyagé à destination de l'Espagne afin de suivre des formations en vue de pouvoir intégrer une école d'aide-soignante en France, et de l'Italie afin de rendre visite à sa cousine ; que, par suite, cette décision méconnaît les stipulations précitées de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que la décision fixant le pays de destination se trouve privée de fondement légal ;

4. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le préfet de la Haute-Savoie n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Grenoble a annulé l'arrêté en litige ;

5. Considérant que le présent arrêt n'implique pas d'autres mesures d'exécution que celles prescrites par le jugement attaqué ; que, dès lors, les conclusions à fin d'injonction présentées par Mme B...ne peuvent qu'être rejetées ;

6. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 000 euros à verser à Mme B...au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : La requête du préfet de la Haute-Savoie est rejetée.

Article 2 : L'Etat versera la somme de 1000 euros à Mme B...au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le surplus des conclusions de Mme B...est rejeté.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C...et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet de la Haute-Savoie.

Délibéré après l'audience du 20 janvier 2015, à laquelle siégeaient :

M. Picard, président de la formation de jugement,

M. A...et Mme Vaccaro-Planchet, premiers conseillers.

Lu en audience publique, le 17 février 2015.

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N° 14LY01896

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 14LY01896
Date de la décision : 17/02/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : M. PICARD
Rapporteur ?: Mme Véronique VACCARO-PLANCHET
Rapporteur public ?: M. VALLECCHIA
Avocat(s) : LASFARGEAS

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2015-02-17;14ly01896 ?
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