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05/05/2015 | FRANCE | N°14LY00763

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 2ème chambre - formation à 3, 05 mai 2015, 14LY00763


Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 13 mars 2014, présentée pour Mme A...B..., domiciliée ...rue Berthe de Boissieux BP 285 à Grenoble (38000) ;

Mme B...demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1304830 du 19 décembre 2013 par lequel le Tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions du 6 mars 2013 par lesquelles le préfet de l'Isère a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français et a fixé le pays de destination ;

2°) d'annuler, pour excès

de pouvoir, lesdites décisions ;

3°) d'enjoindre au préfet de l'Isère de lui délivrer u...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 13 mars 2014, présentée pour Mme A...B..., domiciliée ...rue Berthe de Boissieux BP 285 à Grenoble (38000) ;

Mme B...demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1304830 du 19 décembre 2013 par lequel le Tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions du 6 mars 2013 par lesquelles le préfet de l'Isère a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français et a fixé le pays de destination ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, lesdites décisions ;

3°) d'enjoindre au préfet de l'Isère de lui délivrer un titre de séjour temporaire portant la mention vie privée et familiale sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter du prononcé de l'arrêt ou à défaut de réexaminer sa situation dans un délai d'un mois à compter du prononcé de l'arrêt et de lui délivrer, dans 1'attente, une autorisation provisoire de séjour 1'autorisant à travailler ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat, à payer à son conseil, la somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, à charge pour ce dernier de renoncer à percevoir la part contributive de l'Etat à la mission d'aide juridictionnelle qui lui a été confiée ;

Mme B...soutient :

- que le refus de titre de séjour méconnait l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; qu'il méconnait l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ; que les conséquences que le refus de titre de séjour a sur sa situation personnelle sont manifestement excessives eu égard aux buts poursuivis par cette mesure ; que le préfet, en refusant de lui délivrer un titre de séjour sur le fondement de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile a commis une erreur manifeste d'appréciation ;

- que, pour les mêmes motifs que ceux invoqués contre le refus de titre de séjour, l'obligation de quitter le territoire méconnait l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant et est entachée d'erreur manifeste d'appréciation ;

- que la décision fixant le pays de destination méconnait l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu la décision du 5 février 2014 par laquelle le bureau d'aide juridictionnelle (section administrative d'appel) a accordé le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale à Mme B...;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention internationale relative aux droits de 1'enfant, signée à New-York le 26 janvier 1990 ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Sur sa proposition, le rapporteur public a été dispensé de prononcer des conclusions à l'audience en application de l'article R. 732-1-1 du code de justice administrative par le président de la formation de jugement ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 7 avril 2015 :

- le rapport de Mme Duguit-Larcher, premier conseiller ;

1. Considérant que Mme A...B..., née le 17 novembre 1985, de nationalité serbe, déclare être entrée en France le 8 octobre 2009 ; qu'elle a présenté une demande d'asile qui a été rejetée au fond par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides le 21 janvier 2010, puis, pour tardiveté, par la Cour nationale du droit d'asile le 18 février 2011 ; que Mme B...a présenté une demande de carte de séjour portant la mention " vie privée et familiale " à titre humanitaire et exceptionnel, sur le fondement des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que par un premier arrêté du 30 mai 2011, annulé par un jugement du 22 novembre 2011 du Tribunal administratif de Grenoble au motif que le préfet n'avait pas examiné sa demande sur ce fondement, le préfet de 1'Isère a refusé de lui délivrer un titre de séjour et a assorti cette décision d'une obligation de quitter le territoire français ; que le préfet de l'Isère a, de nouveau, par arrêté du 6 mars 2013, refusé de lui délivrer un titre de séjour, et a assorti ce refus d'une obligation de quitter le territoire français dans un délai d'un mois en fixant le pays à destination duquel elle pourra être reconduite à l'expiration de ce délai ; que Mme B...relève appel du jugement du 19 décembre 2013 par lequel le Tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à l'annulation de ces décisions ;

Sur le refus de titre de séjour :

2. Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : "Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ;

3. Considérant que Mme B...fait valoir qu'elle réside en France avec ses deux filles, Kristina, née le 3 novembre 2007, et Anita, née le 22 septembre 2009, depuis octobre 2009 où ses filles sont scolarisées et où elle est bien intégrée, et qu'elle a fui la Serbie où elle subissait des violences de son conjoint ; que, toutefois, s'il ressort effectivement des pièces du dossier, et notamment des nombreux témoignages produits par l'intéressée, que Mme B...est très impliquée dans la scolarité de ses filles qui sont bien intégrées en classe, et qu'elle apprend le français, elle ne vivait en France, à la date de la décision litigieuse, que depuis près de trois ans et demi ; que, par ailleurs, elle n'est pas dépourvue d'attaches familiales dans son pays d'origine dans lequel vivent ses deux enfants aînés ainsi que ses parents ; que, dans ces conditions, et alors qu'elle ne démontre pas qu'elle ne pourrait poursuivre sa vie familiale en Serbie, la décision contestée n'a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée par rapport aux buts en vue desquels elle a été prise ; que, dès lors, la requérante n'est pas fondée à soutenir que la décision litigieuse méconnaîtrait les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que le préfet n'a pas, pour les mêmes raisons, entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation au regard des conséquences de cette décision sur sa situation personnelle ;

4. Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée au 1° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 311-7. " ; que si Mme B...fait valoir qu'elle suit avec assiduité la scolarité de ses filles et cherche à s'intégrer en France, ces circonstances ne caractérisent pas à elles seules des considérations humanitaires ou des motifs exceptionnels propres à justifier la délivrance d'un titre de séjour en application des dispositions précitées ; qu'en refusant de régulariser sa situation sur le fondement de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le préfet de l'Isère n'a pas entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation ;

5. Considérant qu'il y a lieu, par adoption des motifs des premiers juges, d'écarter le moyen, soulevé en première instance et repris en appel, tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant ;

Sur l'obligation de quitter le territoire français :

6. Considérant, qu'aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " I - L'autorité administrative peut obliger à quitter le territoire français un étranger non ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne (...) lorsqu'il se trouve dans l'un des cas suivants : (...) 3° Si la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé à l'étranger ou si le titre de séjour qui lui avait été délivré lui a été retiré " ; que le préfet de l'Isère ayant refusé de délivrer un titre de séjour à MmeB..., elle entrait dans le cas prévu par les dispositions du 3° du I de l'article L. 511-1 précité pour faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français ;

7. Considérant que les moyens tirés de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme, de l'erreur manifeste d'appréciation quant aux conséquences de la décision litigieuse sur la situation personnelle de Mme B...et de la violation de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant, qui reprennent ce qui a été précédemment développé au soutien des conclusions dirigées contre le refus de délivrance d'un titre de séjour, doivent être écartés, par les mêmes motifs que précédemment ;

Sur la décision fixant le pays de destination :

8. Considérant qu'aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : "Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants. " ;

9. Considérant que Mme B...fait valoir qu'elle a fui la Serbie où elle avait subi, en raison de son appartenance à la communauté rom, des brimades et maltraitances et qu'elle aurait notamment, en septembre 2009, été battue par des policiers sur son lieu de travail, puis en octobre 2009, été agressée et violée par deux hommes dans un parc ; que, toutefois, si l'intéressée produit un certificat médical établi en France en 2011 qui indique que les traces de blessures qu'elle porte sur son corps sont concordantes avec son récit, elle ne produit, à l'appui de sa requête, aucun autre élément qui serait de nature à établir la réalité des risques qu'elle allègue encourir en cas de retour en Serbie, alors, au demeurant, que son récit n'a pas été jugé probant par l'Office français de protection des réfugiés et des apatrides dans le cadre de l'examen de sa demande d'asile ; que l'intéressée n'apportant pas d'éléments probants de nature à établir que sa vie ou sa liberté serait menacée personnellement et actuellement en cas de retour en Serbie, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté ;

10. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme B...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande ; que ses conclusions aux fins d'injonction et celles présentées sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 doivent, par voie de conséquence, être rejetées ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme B...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A...B...et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet de l'Isère.

Délibéré après l'audience du 7 avril 2015 à laquelle siégeaient :

M. Bourrachot, président de chambre,

Mme Bouissac, président-assesseur,

Mme Duguit-Larcher, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 5 mai 2015.

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N° 14LY00763

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 2ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 14LY00763
Date de la décision : 05/05/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01 Étrangers. Séjour des étrangers.


Composition du Tribunal
Président : M. BOURRACHOT
Rapporteur ?: Mme Agathe DUGUIT-LARCHER
Rapporteur public ?: M. LEVY BEN CHETON
Avocat(s) : CANS

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2015-05-05;14ly00763 ?
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