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19/11/2015 | FRANCE | N°15LY00349

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 4ème chambre - formation à 3, 19 novembre 2015, 15LY00349


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A...D...a demandé au tribunal administratif de Dijon d'annuler l'arrêté du 16 avril 2014 par lequel le préfet de la Côte-d'Or lui a enjoint de quitter le territoire français sans délai et a prévu sa reconduite d'office vers l'Arménie.

Par un jugement n° 1401370 du 16 décembre 2014, le tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 29 janvier 2015, Mme A...D..., représentée par MeC..., demande à la cour : r>
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Dijon en date du 16 décembre 2014 ;

2°) d'...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A...D...a demandé au tribunal administratif de Dijon d'annuler l'arrêté du 16 avril 2014 par lequel le préfet de la Côte-d'Or lui a enjoint de quitter le territoire français sans délai et a prévu sa reconduite d'office vers l'Arménie.

Par un jugement n° 1401370 du 16 décembre 2014, le tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 29 janvier 2015, Mme A...D..., représentée par MeC..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Dijon en date du 16 décembre 2014 ;

2°) d'annuler l'arrêté du préfet de Côte-d'Or en date du 16 avril 2014 portant obligation de quitter le territoire français et refusant de lui accorder un délai de départ volontaire.

Elle soutient que :

- le jugement est entaché d'erreur de droit en ce qu'il retient qu'une décision portant obligation de quitter le territoire français, n'assortissant pas un refus de titre de séjour, pouvait être édictée à son encontre alors qu'elle avait formé une demande de titre de séjour et était susceptible de se voir délivrer un titre de séjour sur le fondement du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et qu'il n'appartient pas au juge de décider si sa demande était à même d'aboutir, ce qui dispense l'administration de l'examiner ; c'est en raison d'un oubli des services préfectoraux que Mme D...n'a pas fait l'objet d'un refus de séjour en même temps que son mari ; la mesure d'éloignement est entachée d'erreur de droit et de détournement et de vice de procédure ; le préfet ne peut justifier ce choix procédural par l'existence d'un premier refus de séjour daté de novembre 2012, dont il n'est pas établi qu'il a été porté à sa connaissance et qui ne comporte aucune indication des voies et délais de recours ; au titre de l'exception, ce refus de séjour méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; en toute hypothèse, la remise d'une autorisation provisoire de séjour postérieurement à ce refus de séjour abroge cette décision ; elle ne se trouvait donc pas en situation irrégulière en France et avait tenté de renouveler son récépissé ;

- la décision lui laissant 48 heures pour quitter le territoire français est illégale ; les premiers juges ont estimé à tort qu'elle n'avait pas présenté un dossier complet à l'appui de sa demande de titre alors que cet argument est sans lien avec la question du délai ; ils ont omis de se prononcer au regard de l'existence d'un risque de fuite ; l'administration n'avait pas demandé de pièces complémentaires, elle avait déposé un dossier complet ; il n'existe pas de risque de fuite au regard de sa situation familiale et des démarches accomplies pour régulariser sa situation, l'administration n'ayant d'ailleurs ordonné aucune mesure de contrainte.

Par un mémoire en défense enregistré le 2 avril 2015, le préfet de la Côte-d'Or, représenté par MeB..., conclut au rejet de la requête.

Il soutient que :

- le moyen tiré de l'erreur de droit et du détournement de procédure entachant l'obligation de quitter le territoire français n'est pas fondé, dès lors que son autorisation provisoire de séjour expirait le 17 février 2014, que l'intéressée ne justifie pas s'être présentée personnellement aux services de la préfecture et ne justifie d'aucun récépissé ;

- l'administration n'était pas tenue d'examiner une demande de titre de séjour sur le fondement du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, l'intéressée ne justifiant pas avoir présenté une demande sur ce point ; il n'a pas été commis d'erreur manifeste au regard de son droit au respect de sa vie privée et familiale ;

- le jugement est suffisamment motivé ;

- une obligation de quitter le territoire français pouvait être édictée sans qu'elle soit invitée à présenter de nouvelles pièces à son dossier ; il n'est pas établi que l'administration l'aurait empêchée de faire valoir des éléments à l'appui de sa demande, dont la présentation n'est pas établi, ou que ces éléments étaient de nature à influer sur le sens de la décision litigieuse ;

- la requérante présentait un risque de fuite, s'étant maintenue sur le territoire français plus d'un mois après l'expiration de son autorisation provisoire de séjour.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile,

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

A été entendu au cours de l'audience publique le rapport de Mme Samson-Dye, premier conseiller.

1. Considérant que MmeD..., ressortissante albanaise, relève appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions du préfet de la Côte d'Or du 16 avril 2014 portant obligation de quitter le territoire français sans délai ;

Sur la légalité de l'obligation de quitter le territoire français :

2. Considérant qu'aux termes du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'autorité administrative peut obliger à quitter le territoire français un étranger non ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne, d'un autre Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse et qui n'est pas membre de la famille d'un tel ressortissant au sens des 4° et 5° de l'article L. 121-1, lorsqu'il se trouve dans l'un des cas suivants : 1° Si l'étranger ne peut justifier être entré régulièrement sur le territoire français, à moins qu'il ne soit titulaire d'un titre de séjour en cours de validité (...)";

3. Considérant, en premier lieu, que le seul dépôt d'une demande de titre de séjour ne saurait faire obstacle à l'édiction d'une obligation de quitter le territoire français à l'étranger se trouvant dans l'un des cas mentionnés à l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, y compris si un récépissé ou une autorisation provisoire de séjour a été délivré à l'intéressé pendant la durée d'instruction de cette demande ; qu'il ne saurait en aller autrement que lorsque la loi prescrit, ce qui n'est pas le cas du titre prévu à l'article L. 313-14 du même code, l'attribution de plein droit d'un titre de séjour à l'intéressé ou si celui-ci relève de l'une des catégories d'étrangers ne pouvant être éloignés, mentionnés à l'article L. 511-4 du même code ;

4. Considérant qu'il suit de là que, contrairement à ce que soutient la requérante, la seule circonstance qu'elle avait présenté une demande de titre de séjour ne saurait faire obstacle à ce que le préfet édicte à son encontre une obligation de quitter le territoire français ; que, par ailleurs, elle n'est pas fondée à soutenir qu'il n'appartient qu'à l'administration, et non au juge, de statuer sur le caractère bien-fondé de sa demande de titre de séjour ;

5. Considérant, en deuxième lieu, que Mme D...entend exciper de l'illégalité d'un précédent refus de titre de séjour, qui lui avait été opposé par le préfet de la Côte-d'Or le 13 novembre 2012 ; que, cependant, cette décision ne constitue pas la base légale de la mesure d'éloignement en litige, qui n'est pas prise pour l'application de ce refus de séjour ; que, dans ces conditions, le moyen tiré de l'exception d'illégalité du refus de titre de séjour est inopérant ; qu'elle ne peut pas davantage utilement faire valoir que ce refus de titre de séjour avait été abrogé ;

6. Considérant, en troisième lieu, qu'alors même que Mme D...avait antérieurement bénéficié d'autorisations provisoires de séjour, il n'est pas sérieusement contesté que la dernière autorisation provisoire de séjour qui lui avait été délivrée expirait le 17 février 2014 ; qu'elle était donc, à la date de l'arrêté litigieux, dépourvue de titre de séjour en cours de validité ; qu'il n'est pas contesté qu'elle est entrée irrégulièrement sur le territoire français le 15 décembre 2008 ; qu'elle entre, par suite, dans le champ d'application des dispositions précitées ; que le préfet pouvait, dans ces conditions, légalement l'obliger à quitter le territoire français ;

Sur la légalité du refus de délai de départ volontaire :

Sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens de la requête ;

7. Considérant que la décision refusant d'accorder un délai de départ volontaire à Mme D..., qui rappelle qu'elle a été mise en possession d'une autorisation provisoire de séjour valable à compter du 12 novembre 2012, qui a été renouvelée jusqu'au 17 février 2014, en raison des soins nécessités par l'état de santé de son mari, est justifiée par le fait qu'elle a été découverte en situation irrégulière le 16 avril 2014 et qu'elle n'a pas effectué d'autre démarche administrative pour régulariser sa situation en France ; que cette mesure est fondée sur le c) du 3° du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, aux termes duquel : " (...) l'autorité administrative peut, par une décision motivée, décider que l'étranger est obligé de quitter sans délai le territoire français : 3° S'il existe un risque que l'étranger se soustraie à cette obligation. Ce risque est regardé comme établi, sauf circonstance particulière, dans les cas suivants : (...) c) Si l'étranger s'est maintenu sur le territoire français plus d'un mois après l'expiration de son titre de séjour, de son récépissé de demande de carte de séjour ou de son autorisation provisoire de séjour, sans en avoir demandé le renouvellement " ;

8. Considérant que Mme D...justifie avoir envoyé à la préfecture de la Côte d'Or, qui l'a reçu le 11 février 2014, un courrier sollicitant, pour elle-même et son conjoint, la délivrance d'une carte de séjour temporaire sur le fondement du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ou leur admission au séjour au titre de la circulaire du 28 novembre 2012 ; que la circonstance que cette demande ait été présentée par courrier, en méconnaissance de la règle de présentation personnelle en préfecture imposée à l'article R. 311-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, est sans incidence, par elle-même, sur l'existence d'une demande, susceptible notamment de faire naître une décision implicite de rejet ; qu'il en va de même de la circonstance que cette demande n'aurait pas été accompagnée d'un dossier complet, alors qu'il ne ressort pas des pièces du dossier qu'un refus d'enregistrement ou une demande de pièce complémentaire aurait été adressé à MmeD... ; que, dans ces conditions, sa situation ne relevait pas du c) du 3° du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que le préfet de la Côte-d'Or ne sollicite pas de substitution de motif ;

9. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que MmeD... est seulement fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Dijon a rejeté ses conclusions tendant à l'annulation de la décision refusant de lui accorder un délai de départ volontaire ; qu'elle n'est en revanche pas fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif a rejeté ses conclusions dirigées contre les autres décisions litigieuses ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement n° 1401370 du tribunal administratif de Dijon en date du 16 décembre 2014 est annulé en ce qu'il rejette les conclusions de Mme D...tendant à l'annulation de la décision du préfet de la Côte-d'Or du 16 avril 2014 refusant de lui accorder un délai de départ volontaire.

Article 2 : La décision du préfet de la Côte-d'Or du 16 avril 2014 refusant d'accorder un délai de départ volontaire à Mme D...est annulée.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de Mme D...est rejeté.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A...D...et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet de la Côte-d'Or.

Délibéré après l'audience du 22 octobre 2015, où siégeaient :

- Mme Verley-Cheynel, président,

- Mme Gondouin, premier conseiller,

- Mme Samson-Dye, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 19 novembre 2015.

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N° 14LY00768

N° 15LY00349 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 4ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 15LY00349
Date de la décision : 19/11/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : Mme VERLEY-CHEYNEL
Rapporteur ?: Mme Aline SAMSON DYE
Rapporteur public ?: M. DURSAPT
Avocat(s) : CLEMANG

Origine de la décision
Date de l'import : 05/12/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2015-11-19;15ly00349 ?
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