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15/03/2016 | FRANCE | N°14LY03455

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 2ème chambre - formation à 3, 15 mars 2016, 14LY03455


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...B...a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler les décisions du 1er avril 2014 par lesquelles la préfète de la Loire a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai d'un mois et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 1404972 du 24 septembre 2014, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 13 novembre 2014, M. B..., représent

é par Me C..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Lyon du...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...B...a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler les décisions du 1er avril 2014 par lesquelles la préfète de la Loire a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai d'un mois et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 1404972 du 24 septembre 2014, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 13 novembre 2014, M. B..., représenté par Me C..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Lyon du 24 septembre 2014 ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, les décisions du 1er avril 2014 par lesquelles la préfète de la Loire a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Loire, à titre principal, de lui délivrer un titre de séjour mention " vie privée et familiale " sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter du prononcé de l'arrêt, ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation dans le même délai ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

M. B... soutient que :

- le refus de titre de séjour n'est pas suffisamment motivé, en méconnaissance de l'article 3 de la loi du 11 juillet 1979, puisque, d'une part, la préfète n'a pas exposé les raisons pour lesquelles elle estimait qu'il ne faisait pas état de considérations humanitaires ou des circonstances exceptionnelles au sens de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et, d'autre part, qu'il n'a pas précisé les motifs du refus de la DIRECCTE saisie sur le fondement de sa demande d'admission exceptionnelle ; la préfète n'a pas procédé à un examen particulier de sa demande d'admission exceptionnelle au séjour puisqu'elle n'a pas pris en compte les promesses d'embauche qu'il a eues, sa durée de présence en France, sa formation ; la préfète a commis une erreur manifeste d'appréciation en refusant de lui délivrer un titre de séjour sur le fondement des dispositions de l'article L. 313-15 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile alors qu'il justifiait, à la date de sa demande, qu'il poursuivait une formation destinée à lui apporter une qualification professionnelle, que ce n'est que la durée de l'instruction de sa demande qui a fait échec à sa formation, puis à la réalisation d'un stage d'expérience professionnelle et qu'il est sans nouvelle des membres de sa famille depuis son départ de République Démocratique du Congo à la suite d'un massacre dans son village ; que la préfète a commis une erreur manifeste d'appréciation en ne régularisant pas sa situation sur le fondement de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en lui délivrant un titre de séjour en qualité de salarié, alors que la société Lalucons-elec91 lui a renouvelé à deux reprises une promesse d'embauche ce qui démontre qu'il dispose des compétences et des qualifications nécessaires pour y travailler, qu'il est parfaitement intégré et que ni l'établissement AFEP, ni la MIFE Loire Sud n'avaient de doute quant à ses capacités d'insertion notamment professionnelle ; le refus de titre de séjour porte une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale en méconnaissance de l'article L. 313-11 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'obligation de quitter le territoire méconnait l'article L. 511-4 10° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile car il souffre d'une profonde dépression, qui nécessite un traitement, dont le défaut aurait des conséquences d'une exceptionnelle gravité et qui n'est pas disponible dans son pays, ainsi qu'en atteste un certificat médical ; elle méconnait l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Par un mémoire en défense, enregistré le 9 décembre 2015, le préfet de la Loire conclut au rejet de la requête.

Il s'en remet à ses écritures de première instance.

Par une ordonnance du 1er décembre 2015 la clôture d'instruction a été fixée au 22 décembre 2015, en application des articles R. 613-1 et R. 613-3 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

A été entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Duguit-Larcher, premier conseiller.

1. Considérant que M. B..., ressortissant de République démocratique du Congo, né le 25 mai 1993, est entré en France, selon ses déclarations, le 7 avril 2010, alors qu'il était mineur ; qu'il a été confié aux services de l'aide sociale à l'enfance de la Loire ; que par un jugement du 12 septembre 2013, devenu définitif, le tribunal administratif de Lyon a annulé, pour défaut d'examen attentif de sa situation, les décisions du 24 avril 2013 par lesquelles la préfète de la Loire avait refusé de lui délivrer un titre de séjour et l'avait obligé à quitter le territoire français ; qu'à la suite de cette annulation, M. B...a, par courrier en date du 4 novembre 2013, renouvelé sa demande de titre de séjour présentée sur le fondement du 7° de l'article L. 313-11, de l'article L. 313-14 et de l'article L. 313-15 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que M. B... relève appel du jugement en date du 24 septembre 2014, par lequel le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions du 1er avril 2014 par lesquelles la préfète de la Loire a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination ;

2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée au 1° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 311-7. (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 313-10 du même code : " La carte de séjour temporaire autorisant l'exercice d'une activité professionnelle est délivrée : / 1° A l'étranger titulaire d'un contrat de travail visé conformément aux dispositions de l'article L. 341-2 du code du travail. (...). Pour l'exercice d'une activité professionnelle salariée dans un métier et une zone géographique caractérisés par des difficultés de recrutement et figurant sur une liste établie au plan national par l'autorité administrative, après consultation des organisations syndicales d'employeurs et de salariés représentatives, l'étranger se voit délivrer cette carte sans que lui soit opposable la situation de l'emploi sur le fondement du même article L. 341-2. / La carte porte la mention "salarié" lorsque l'activité est exercée pour une durée supérieure ou égale à douze mois. Elle porte la mention "travailleur temporaire" lorsque l'activité est exercée pour une durée déterminée inférieure à douze mois. (...). " ;

3. Considérant qu'en présence d'une demande de régularisation présentée sur le fondement de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, il appartient à l'autorité administrative de vérifier, dans un premier temps, si l'admission exceptionnelle au séjour par la délivrance d'une carte portant la mention " vie privée et familiale " répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard de motifs exceptionnels, et à défaut, dans un second temps, s'il est fait état de motifs exceptionnels de nature à permettre la délivrance, dans ce cadre, d'une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié " ou " travailleur temporaire " ; que, dans cette hypothèse, il appartient à l'autorité administrative, sous le contrôle du juge, d'examiner, notamment, si la qualification, l'expérience et les diplômes de l'étranger ainsi que les caractéristiques de l'emploi auquel il postule, de même que tout élément de sa situation personnelle dont l'étranger ferait état à l'appui de sa demande, tel que par exemple, l'ancienneté de son séjour en France, peuvent constituer, en l'espèce, des motifs exceptionnels d'admission au séjour ;

4. Considérant que la décision litigieuse, en tant qu'elle statue sur la demande de carte de séjour portant la mention " salarié " présentée sur le fondement de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile se borne à mentionner, d'une part, un contrat de travail, dépourvu de tout visa de la direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi (DIRECCTE), émanant de la société Azur bâtiment qui n'apporte pas la preuve qu'elle n'aurait pas réussi à pourvoir le poste proposé par un demandeur d'emploi et d'autre part, un avis défavorable du 20 février 2014 de la DIRECCTE sur une demande émanant de la société Lalucons 91, sans autre précision, avant d'indiquer que les éléments fournis par l'intéressé ne permettent pas d'identifier des considérations humanitaires ou des motifs exceptionnels lui permettant d'être admis au séjour ; qu'ainsi, alors que M. B...résidait en France depuis plus de quatre ans à la date de la décision attaquée et avait joint à sa demande des éléments et pièces relatifs à sa formation professionnelle et aux différentes démarches qu'il avait entreprises pour travailler, la préfète de la Loire n'a procédé à aucun examen de cette situation professionnelle ; qu'elle a dès lors méconnu l'étendue de ses obligations et a entaché sa décision d'erreur de droit ; qu'il y a lieu d'annuler la décision portant refus de titre de séjour, ainsi que, par voie de conséquence, les décisions portant obligation de quitter le territoire français et fixant son pays de destination ;

5. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. B... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande ;

6. Considérant qu'aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public (...) prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution. " ; qu'aux termes de l'article L. 911-2 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public (...) prenne à nouveau une décision après une nouvelle instruction, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision juridictionnelle, que cette décision doit intervenir dans un délai déterminé " et qu'aux termes de l'article L. 512-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Si l'obligation de quitter le territoire français est annulée, il est immédiatement mis fin aux mesures de surveillance prévues aux articles L. 513-4, L. 551-1, L. 552-4, L. 561-1 et L. 561-2 et l'étranger est muni d'une autorisation provisoire de séjour jusqu'à ce que l'autorité administrative ait à nouveau statué sur son cas. / Si la décision de ne pas accorder de délai de départ volontaire, la décision de placement en rétention ou la décision d'assignation à résidence est annulée, il est immédiatement mis fin aux mesures de surveillance prévues aux articles L. 551-1, L. 552-4, L. 561-1 et L. 561-2 (...) " ;

7. Considérant que le présent arrêt n'implique pas, eu égard au motif sur lequel il se fonde, que le préfet de la Loire délivre une carte de séjour temporaire à M. B...; qu'en revanche, il y a lieu de prescrire au préfet de la Loire de se prononcer à nouveau sur sa situation dans le délai de deux mois suivant la notification du présent arrêt ; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, d'assortir cette injonction d'une astreinte ;

8. Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation " ;

9. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat, partie perdante dans la présente instance, une somme de 1 000 euros à verser à M. B... ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement n° 1404972 du 24 septembre 2014 du tribunal administratif de Lyon et les décisions du 1er avril 2014 par lesquelles la préfète de la Loire a refusé de délivrer à M. B... un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai d'un mois et a fixé son pays de destination sont annulés.

Article 2 : Il est enjoint au préfet de la Loire de se prononcer sur la situation de M. B...dans le délai de deux mois suivant la notification du présent arrêt.

Article 3 : L'Etat versera à M. B...la somme de 1 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B...et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet de la Loire.

Délibéré après l'audience du 16 février 2016, à laquelle siégeaient :

M. Bourrachot, président de chambre,

Mme Mear, président-assesseur,

Mme Duguit-Larcher, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 15 mars 2016.

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N° 14LY03455


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 2ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 14LY03455
Date de la décision : 15/03/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01 Étrangers. Séjour des étrangers.


Composition du Tribunal
Président : M. BOURRACHOT
Rapporteur ?: Mme Agathe DUGUIT-LARCHER
Rapporteur public ?: M. BESSE
Avocat(s) : IVALDI et DE GUEROULT D'AUBLAY

Origine de la décision
Date de l'import : 12/04/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2016-03-15;14ly03455 ?
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