La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

07/12/2017 | FRANCE | N°15LY02820

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 4ème chambre - formation à 3, 07 décembre 2017, 15LY02820


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Mme A...B...a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler la décision du 20 décembre 2013 et l'arrêté du 20 janvier 2014 par lesquels le président de l'université Joseph Fourier de Grenoble l'a licenciée pour insuffisance professionnelle et de condamner cette université à lui verser la somme de 60 000 euros en réparation des préjudices qu'elle a subis du fait de son licenciement, assortie des intérêts et de leur capitalisation.

Par un jugement n° 1403638 du 17 juin 2015, le tribunal

administratif de Grenoble a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Mme A...B...a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler la décision du 20 décembre 2013 et l'arrêté du 20 janvier 2014 par lesquels le président de l'université Joseph Fourier de Grenoble l'a licenciée pour insuffisance professionnelle et de condamner cette université à lui verser la somme de 60 000 euros en réparation des préjudices qu'elle a subis du fait de son licenciement, assortie des intérêts et de leur capitalisation.

Par un jugement n° 1403638 du 17 juin 2015, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 12 août 2015, Mme A...B..., représentée par Me C..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler les décisions contestées ;

3°) de condamner l'université Joseph Fourier de Grenoble à lui verser la somme de 60 000 euros en réparation des préjudices qu'elle a subis du fait de son licenciement, assortie des intérêts et de leur capitalisation ;

4°) de mettre à la charge de l'université Joseph Fourier de Grenoble la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- son licenciement a été prononcé à l'issue d'une procédure irrégulière en ce que les membres de la commission consultative paritaire des agents non titulaires convoqués à la séance du 18 décembre 2013 pour émettre un avis sur son licenciement ne sont pas ceux mentionnés par un arrêté du 8 juin 2012 ; si le tribunal a écarté ce moyen au motif que la composition de cette commission résultait d'un arrêté du 13 juin 2013 du président de l'université Joseph Fourier de Grenoble, cet arrêté ne peut pas se substituer à l'arrêté ministériel du 8 avril 2008 ; par ailleurs, le dossier concernant sa situation personnelle remis aux membres de la commission était incomplet et ne comportait aucun fait précis, objectif et circonstancié ou vérifiable permettant de justifier son licenciement, de sorte qu'ils n'ont pu valablement émettre un avis sur la décision de la licencier ; c'est à tort que les premiers juges lui ont fait supporter la charge de la preuve du caractère incomplet de ce dossier ;

- le dossier qui lui a été communiqué préalablement à son licenciement était incomplet dès lors qu'il ne contenait aucun élément laissant supposer une insuffisance professionnelle ; qu'elle n'a donc pas été en mesure de se défendre ;

- la rupture de son contrat de travail lui a été notifiée le 31 octobre 2013 préalablement à sa convocation à l'entretien préalable par courrier du 18 novembre 2013 et avait été décidée avant la tenue de cet entretien, ainsi qu'en atteste ce courrier lui annonçant par ailleurs que la responsabilité de deux services lui était retirée et sa mise à l'écart d'une réunion relative au fonctionnement du service de la commande publique ; le tribunal n'a pas appliqué les dispositions du décret du 17 janvier 1986 portant dispositions générales applicables aux agents non titulaires de l'Etat ;

- les faits qui ont fondé son licenciement sont matériellement inexacts ;

- son licenciement est entaché d'erreur d'appréciation ;

- il est entaché de détournement de pouvoir ;

- elle subit un préjudice économique et financier qu'elle évalue à la somme de 60 00 euros, correspondant à douze mois de salaire brut.

Par des mémoires en défense enregistrés le 18 décembre 2015, l'université Joseph Fourier de Grenoble, aux droits de laquelle est venue l'université Grenoble-Alpes, représentée par MeE..., conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 3 000 euros soit mise à la charge de Mme B...au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que :

- la requête d'appel de Mme B...est irrecevable en ce qu'elle reproduit littéralement sa demande de première instance ;

- les moyens soulevés par Mme B...ne sont pas fondés ;

- Mme B...ne justifie d'aucun préjudice direct et certain consécutif à son licenciement.

Par ordonnance du 5 avril 2016, l'instruction a été close au 22 avril 2016.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;

- le décret n° 86-83 du 17 janvier 1986 ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Michel ;

- les conclusions de M.D... ;

- et les observations de Me F...substituant MeC..., représentant MmeB..., et de MeE..., représentant l'université Grenoble-Alpes ;

1. Considérant que Mme B...a été employée par l'université Joseph Fourier de Grenoble en qualité de directrice des affaires financières à compter du 9 janvier 2012 dans le cadre d'un contrat à durée indéterminée ; que, par lettre du 20 décembre 2013, le président de l'université l'a informée de son licenciement pour insuffisance professionnelle et qu'elle disposait d'un préavis d'un mois à compter de la réception de ce courrier, intervenue le 21 décembre 2013 ; que, par, un arrêté du 20 janvier 2014, il a été mis fin aux fonctions de Mme B... à compter du 21 janvier 2014 ; que, par lettre reçue le 17 février 2014, elle a formé un recours gracieux contre cet arrêté et demandé le versement de la somme de 60 000 euros en réparation de ses préjudices économique et financier ; qu'elle relève appel, par une requête qui est suffisamment motivée et n'est pas la reprise littérale de ses écritures de première instance, du jugement du 17 juin 2015 du tribunal administratif de Grenoble rejetant sa demande d'annulation de la décision du 20 décembre 2013 et de l'arrêté du 20 janvier 2014, ainsi que ses conclusions indemnitaires dirigées contre l'université Joseph Fourier de Grenoble, aux droits de laquelle est venue l'université Grenoble-Alpes ;

Sur la légalité de la décision du 20 décembre 2013 et de l'arrêté du 20 janvier 2014 :

2. Considérant qu'aux termes de l'article 47 du décret du 17 janvier 1986 relatif aux dispositions générales applicables aux agents non titulaires de l'Etat : " Le licenciement ne peut intervenir qu'à l'issue d'un entretien préalable " ;

3. Considérant que, par une lettre du 31 octobre 2013, le directeur général des services de l'université Joseph Fourier a informé Mme B...qu'il proposait de mettre fin à son contrat dans les conditions réglementaires et qu'elle serait convoquée à cette fin dans les meilleurs délais pour étudier ensemble les conséquences de cette décision ; qu'il ressort des termes de ce courrier que l'employeur de Mme B...a décidé son licenciement avant même son audition à l'entretien préalable du 11 décembre 2013 auquel elle a été convoquée le 18 novembre 2013 ; que cette circonstance a privé cet entretien de toute portée utile et a entaché par conséquence d'irrégularité la procédure préalable au licenciement de Mme B...; qu'elle est dès lors fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande d'annulation de la décision du 20 décembre 2013 et de l'arrêté du 20 janvier 2014 ;

Sur les conclusions indemnitaires :

4. Considérant que si l'intervention d'une décision illégale constitue une faute susceptible d'engager la responsabilité de l'Etat, elle ne saurait donner lieu à réparation si, dans le cas d'une procédure régulière, la même décision aurait pu légalement être prise ;

5. Considérant qu'il résulte de l'instruction que le licenciement de Mme B...a été décidé après le constat de la difficulté qu'elle a rencontrée à occuper pleinement des fonctions de directeur des affaires financières, en ce qui concerne notamment leurs aspects budgétaires et managériaux ; qu'il ressort de la fiche d'activité et d'entretien la concernant pour la période de janvier 2012 à juin 2013 que sur les 5 objectifs professionnels individuels qui lui avaient été fixés, 3 ont été atteints partiellement et les 2 autres non atteints ; que si son évaluateur a convenu de ce qu'elle dispose d'une compétence et d'une expertise financière et comptable, il a relevé sa difficulté à mettre cette expertise au service de l'université et de ses cadres et déploré son impulsivité et sa propension à se positionner en qualité de consultante, avec une vision théorique des dossiers, plutôt qu'en tant que stratège budgétaire et financière et force de proposition constructive ; que dans une lettre du 12 novembre 2013 adressée au président de l'université, le directeur général des services de cet établissement a indiqué avoir constaté que des chantiers essentiels n'avaient pas été engagés, une difficulté d'intégration de l'agent dans le fonctionnement administratif de l'université et une très grande difficulté à se positionner sur un poste de direction ; que Mme B...n'établit ni que le motif tiré de son insuffisance professionnelle repose sur des faits matériellement inexacts ou est entaché d'erreur d'appréciation, ni qu'il est constitutif d'un détournement de pouvoir ; que le licenciement de Mme B...étant ainsi justifié au fond, ses conclusions indemnitaires doivent être rejetées ;

6. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme B...est seulement fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté ses conclusions d'annulation de la décision du 20 décembre 2013 et de l'arrêté du 20 janvier 2014 ; que ce jugement doit être annulé dans cette mesure ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

7. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que la somme demandée à ce titre par l'université Grenoble-Alpes soit mise à la charge de MmeB..., qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance ; qu'en revanche, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, au titre de ces mêmes dispositions, de mettre à la charge de l'université Grenoble-Alpes une somme de 1 500 euros à verser à MmeB... ;

DECIDE :

Article 1er : Le jugement n° 1403638 du tribunal administratif de Grenoble du 17 juin 2015 est annulé en tant qu'il a rejeté les conclusions de Mme B...à fin d'annulation de la décision du 20 décembre 2013 et de l'arrêté du 20 janvier 2014 du président de l'université Joseph Fourier de Grenoble.

Article 2 : La décision du 20 décembre 2013 et l'arrêté du 20 janvier 2014 du président de l'université Joseph Fourier de Grenoble sont annulés.

Article 3 : L'université Grenoble-Alpes versera une somme de 1 500 euros à Mme B...en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A...B...et au président de l'université Grenoble-Alpes.

Délibéré après l'audience du 16 novembre 2017, à laquelle siégeaient :

M. d'Hervé, président,

Mme Michel, président assesseur,

Mme Gondouin, premier conseiller.

Lu en audience publique le 7 décembre 2017.

5

N° 15LY02820


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 4ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 15LY02820
Date de la décision : 07/12/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

36-12-03-01 Fonctionnaires et agents publics. Agents contractuels et temporaires. Fin du contrat. Licenciement.


Composition du Tribunal
Président : M. d'HERVE
Rapporteur ?: Mme Céline MICHEL
Rapporteur public ?: M. DURSAPT
Avocat(s) : SELARL D'AVOCATS FABIENNE MARTIN

Origine de la décision
Date de l'import : 19/12/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2017-12-07;15ly02820 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award