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18/06/2020 | FRANCE | N°18LY01106

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 3ème chambre, 18 juin 2020, 18LY01106


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Mme F... E... a demandé au tribunal administratif de Dijon :

1°) d'annuler la décision du 30 mars 2017 par laquelle le président de la communauté de communes Terres de Bresse l'a mutée au poste de gestionnaire du personnel administratif et technique et a modifié son temps de travail ;

2°) d'annuler l'arrêté du 11 juillet 2017 par lequel le président de la communauté de communes Terres de Bresse l'a mutée au poste de responsable de la gestion administrative du personnel.

Par un jugem

ent n° 1701350-1702205 du 1er février 2018, le tribunal administratif de Dijon a rejeté ses d...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Mme F... E... a demandé au tribunal administratif de Dijon :

1°) d'annuler la décision du 30 mars 2017 par laquelle le président de la communauté de communes Terres de Bresse l'a mutée au poste de gestionnaire du personnel administratif et technique et a modifié son temps de travail ;

2°) d'annuler l'arrêté du 11 juillet 2017 par lequel le président de la communauté de communes Terres de Bresse l'a mutée au poste de responsable de la gestion administrative du personnel.

Par un jugement n° 1701350-1702205 du 1er février 2018, le tribunal administratif de Dijon a rejeté ses demandes.

Procédure devant la cour

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 22 mars et 20 juillet 2018, Mme E..., représentée par Me B..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Dijon du 1er février 2018 ;

2°) d'annuler la décision du 30 mars 2017 précitée du président de la communauté de communes Terres de Bresse ;

3°) d'annuler l'arrêté du 11 juillet 2017 précité du président de la communauté de communes Terres de Bresse ;

4°) de mettre à la charge de la communauté de communes Terres de Bresse une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

En ce qui concerne la légalité de la décision du 30 mars 2017 :

- la décision du 30 mars 2017 n'est pas une décision confirmative ;

- elle a fait l'objet d'une mutation portant modification de sa situation ;

- la commission administrative paritaire en application des dispositions de l'article 52 de la loi du 26 janvier 1984 aurait dû être saisie ;

- cette décision constitue une sanction disciplinaire déguisée ;

- elle n'est pas prévue par les dispositions de l'article 89 de la loi du 26 janvier 1984 et a été prise à l'issue d'une procédure irrégulière ;

- cette décision est entachée d'un détournement de pouvoir et de procédure ;

En ce qui concerne la légalité de la décision du 11 juillet 2017 :

- l'arrêté a été pris à l'issue d'une procédure irrégulière dès lors qu'elle n'a pas été en mesure de consulter son dossier ni l'avis de la commission administrative paritaire ;

- elle n'occupait pas un emploi fonctionnel et était donc soumise aux dispositions de l'article 52 de la loi du 26 janvier 1984 ;

- cette décision constitue une sanction disciplinaire déguisée ;

- elle est entachée d'un détournement de pouvoir et de procédure.

Par des mémoires en défense, enregistrés les 21 juin et 23 octobre 2018, la communauté de communes Terres de Bresse, représentée par Me D..., conclut au rejet de la requête, à ce que soit mise à la charge de Mme E... la somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et à la condamnation de celle-ci aux entiers dépens.

Elle fait valoir que les moyens présentés par la requérante ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984

- la loi du 22 avril 1905 ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme G..., présidente-assesseure,

- les conclusions de M. Deliancourt, rapporteur public,

- et les observations de Me D... pour la communauté de communes Terres de Bresse ;

Considérant ce qui suit :

1. Mme E..., attaché territorial, exerçait depuis le 1er octobre 2007 les fonctions de directrice générale des services de la communauté de communes des Portes de la Bresse. Le 1er janvier 2017, elle a été transférée au sein de la communauté de communes Terres de Bresse, née de la fusion de la communauté de communes des Portes de la Bresse avec la communauté de communes Saône, Seille, Sâne. Elle a demandé au tribunal administratif de Dijon l'annulation de la décision du 30 mars 2017 par laquelle le président de la communauté de communes Terres de Bresse l'a " mutée au poste de gestionnaire du personnel administratif et technique et a modifié son temps de travail " et l'arrêté du 11 juillet 2017 portant mutation sur le poste de responsable de la gestion administrative du personnel. Mme E... relève appel du jugement du tribunal administratif de Dijon du 1er février 2018 qui a rejeté ses demandes.

Sur la recevabilité de la demande tendant à l'annulation de la décision du 30 mars 2017 :

2. Il ressort des termes du courrier du 30 mars 2017 du président de la communauté de communes Terres de Bresse que ce dernier formalise la cessation des fonctions de Mme E... en qualité de directeur général des services et son affectation sur le poste de gestionnaire des ressources humaines. Le courrier du 6 mars 2017 du président de la communauté de communes Terres de Bresse se bornait à affecter Mme E... provisoirement sur un poste aux ressources humaines. Ainsi, ce courrier du 30 mars 2017 doit être regardé comme une décision formalisant l'affectation de Mme E... sur le poste de ressources humaines, et actant de la diminution de son volume horaire de travail. Par suite, c'est tort que les premiers juges ont estimé que le courrier du 30 mars 2017 ne faisait pas grief à Mme E... et ont rejeté sur ce motif les conclusions dirigées contre la décision du 30 mars 2017.

3. Par suite, il y a lieu d'évoquer dans cette mesure et de statuer immédiatement sur les conclusions de Mme E... devant le tribunal administratif de Dijon tendant à l'annulation de la décision du 30 mars 2017, et de statuer par l'effet dévolutif de l'appel sur ses conclusions dirigées contre la décision du 11 juillet 2017.

4. Aux termes de l'article 52 de la loi du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale : " L'autorité territoriale procède aux mouvements des fonctionnaires au sein de la collectivité ou de l'établissement ; seules les mutations comportant changement de résidence ou modification de la situation des intéressés sont soumises à l'avis des commissions administratives paritaires. / Dans le cas où il s'agit de remplir une vacance d'emploi compromettant le fonctionnement du service et à laquelle il n'est pas possible de pourvoir par un autre moyen, même provisoirement, la mutation peut être prononcée sous réserve d'examen ultérieur par la commission compétente. ".

5. La communauté de communes Terres de Besse ne peut se prévaloir des dispositions de l'article 53 de la loi du 26 janvier 1984 relatives à la fin de fonction sur emploi fonctionnel pourvu par détachement, dès lors qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que Mme E... ait fait l'objet d'un détachement pour occuper l'emploi de directeur général des services. La communauté de communes a d'ailleurs saisi la commission administrative paritaire qui a rendu son avis le 4 juillet 2017.

6. Il est constant que la commission administrative paritaire n'a été consultée que postérieurement à la décision du 30 mars 2017, soit le 4 juillet 2017 sur la mutation envisagée. Il ressort des pièces du dossier que la nomination de Mme E... à de nouvelles fonctions induisait une modification de sa situation et que sa nouvelle affectation n'a pas été décidée pour remplir une vacance d'emploi compromettant le fonctionnement du service au sens des dispositions précitées. Par suite, cette omission de la consultation préalable de la commission administrative paritaire a privé Mme E... d'une garantie et constitue ainsi une irrégularité de nature à entacher d'illégalité la décision litigieuse qui doit dès lors être annulée sur ce motif sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens soulevés.

Sur les conclusions tendant à l'annulation de la décision du 11 juillet 2017 :

7. En premier lieu, il résulte de l'article 65 de la loi du 22 avril 1905 qu'un agent public faisant l'objet d'une mesure prise en considération de sa personne, qu'elle soit ou non justifiée par l'intérêt du service, doit être mis à même de demander la communication de son dossier.

8. Il ressort des termes du courrier du 6 mars 2017 que Mme E... a été informée lors de l'entretien du 1er mars 2017 de la décision du président de la communauté de communes de l'affecter au service des ressources humaines puis par la décision précitée du 30 mars 2017. Dans ces conditions, la requérante, qui a été informée dans un délai suffisant de son changement de fonctions, a été mise à même de demander la communication de son dossier.

9. En deuxième lieu, si Mme E... soutient qu'elle n'aurait pas reçu notification de l'avis de la commission administrative paritaire en date du 4 juillet 2017, aucune disposition législative ou réglementaire ne faisait obligation à l'administration de lui notifier ledit avis.

10. En troisième lieu, une mutation dans l'intérêt du service constitue une sanction déguisée dès lors qu'il est établi que l'auteur de l'acte a eu l'intention de sanctionner l'agent et que la décision a porté atteinte à la situation professionnelle de ce dernier.

11. Il résulte des pièces du dossier que le changement d'affectation est motivé par une perte de confiance du président de la communauté de communes suite à la constatation de plusieurs manquements de Mme E... dans l'exercice de ses fonctions de directeur général des services. Il est relevé des erreurs dans la gestion des arrêts maladie des agents de la communauté de communes, une gestion contestée par le président de la communauté de l'harmonisation des primes des agents des deux communautés de communes fusionnées conduisant à l'absence de maîtrise budgétaire et à ce que cette dernière s'attribue 8 400 euros sur les 24 000 euros versés en supplément. Le président de la communauté de communes estime dans le courrier du 6 mars 2017 que les manquements constatés " ne sont pas à la hauteur des compétences d'une directrice générale des services ayant 10 ans d'expérience et de la confiance que l'exécutif doit pouvoir placer en elle ". Compte tenu du niveau de responsabilité exercée par Mme E... au sein de la communauté de communes, la décision de mutation interne est justifiée par la perte de confiance de l'exécutif de la communauté et ce alors même qu'elle n'a pas occupé un poste fonctionnel. Les faits relevés sont matériellement établis et de nature à fonder la perte de confiance du président de la communauté du service à son égard et l'intérêt du service justifiant cette mesure de changement d'affectation. Par suite, la décision contestée ne peut être regardée commune une sanction déguisée ou un élément permettant de présumer qu'elle était victime d'un harcèlement moral de la part de la communauté de communes.

12. En quatrième lieu, il résulte de ce qui a été dit au point 11 que la décision se justifie par des motifs tirés de l'intérêt du service, et que les moyens tirés du détournement de pouvoir et de procédure allégués ne sont pas établis.

13. Il résulte de tout ce qui précède que Mme E... est seulement fondée à demander l'annulation du jugement du 1er février 2018 du tribunal administratif de Dijon en tant qu'il a rejeté sa demande d'annulation de la décision du 30 mars 2017, et à demander l'annulation de cette décision.

Sur les frais liés au litige :

14. Il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions présentées à ce titre par les parties.

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement n° 1701350-1702205 du 1er février 2018 du tribunal administratif de Dijon est annulé en tant qu'il a rejeté la demande de Mme E... tendant à l'annulation de la décision du 30 mars 2017.

Article 2 : La décision du 30 mars 2017 du président de la communauté de communes Terres de Bresse est annulée.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête d'appel est rejeté.

Article 4 : Les conclusions présentées par la communauté de communes Terres de Bresse tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à Mme F... E... et au président de la communauté de communes Terres de Bresse.

Délibéré après l'audience du 19 mai 2020 à laquelle siégeaient :

Mme C... A..., présidente de chambre,

Mme H..., présidente-assesseure,

M. Pierre Thierry, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 18 juin 2020.

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N° 18LY01106


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 18LY01106
Date de la décision : 18/06/2020
Type d'affaire : Administrative

Analyses

36-05-01-02 Fonctionnaires et agents publics. Positions. Affectation et mutation. Mutation.


Composition du Tribunal
Président : Mme PAIX
Rapporteur ?: Mme Virginie CHEVALIER-AUBERT
Rapporteur public ?: M. DELIANCOURT
Avocat(s) : SELARL TISSOT HOPGOOD DEMONT

Origine de la décision
Date de l'import : 15/07/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2020-06-18;18ly01106 ?
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