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11/02/2021 | FRANCE | N°19LY01975

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 6ème chambre, 11 février 2021, 19LY01975


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... C... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler le titre exécutoire du 1er décembre 2016 mettant à sa charge la somme de 2 860,80 euros et la décision du 7 avril 2017 par laquelle son recours gracieux a été rejeté.

Par un jugement n° 1705217 du 6 décembre 2018, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 23 mai 2019, Mme C..., représentée par Me D..., demande à la cour :

1°) d'ann

uler le jugement du 6 décembre 2018 du tribunal administratif de Lyon ;

2°) d'annuler le titre exécuto...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... C... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler le titre exécutoire du 1er décembre 2016 mettant à sa charge la somme de 2 860,80 euros et la décision du 7 avril 2017 par laquelle son recours gracieux a été rejeté.

Par un jugement n° 1705217 du 6 décembre 2018, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 23 mai 2019, Mme C..., représentée par Me D..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du 6 décembre 2018 du tribunal administratif de Lyon ;

2°) d'annuler le titre exécutoire du 1er décembre 2016 mettant à sa charge la somme de 2 860,80 euros et la décision du 7 avril 2017 par laquelle le recteur de l'académie de Lyon a rejeté son recours gracieux ;

3°) de mettre à la charge du recteur de l'académie de Lyon et du ministre de l'éducation nationale la somme de 1 200 euros en application des dispositions combinées de l'article 37 et 75 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et les entiers dépens.

Elle soutient que :

- le rejet de son recours gracieux est illégal ; durant ses deux années de formation au diplôme du brevet de technicien supérieur, elle a fait preuve de sérieux, de motivation et d'assiduité dès lors qu'elle a suivi les cours, rendu les devoirs demandés et obtenu son diplôme ; la décision est entachée d'une erreur de fait dès lors qu'elle a rendu les devoirs supplémentaires ; les devoirs doivent être rendus en ligne via une plate-forme à laquelle elle n'a désormais plus accès ; parmi les devoirs rendus, deux n'ont jamais été corrigés par le professeur chargé de la correction et un a été mal adressé ; par suite, elle a rempli son obligation d'assiduité ; elle est mère isolée et en recherche d'emploi ;

- le titre exécutoire doit être annulé compte tenu de l'illégalité affectant le rejet de son recours gracieux.

Par un mémoire, enregistré le 19 novembre 2019, le ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse et le ministre de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation concluent au rejet de la requête.

Ils soutiennent que :

- la requête est irrecevable en raison de sa tardiveté dès lors que Mme C... n'établit pas la date de notification du jugement du 8 décembre 2018 de sorte qu'il n'est pas permis de vérifier si la demande d'aide juridictionnelle présentée le 8 février 2019 a été effectuée dans le délai d'appel ;

- elle n'a pas satisfait aux obligations d'assiduité prévues par la circulaire n° 2014-010 du 2 juillet 2014 relative aux modalités d'attribution des bourses de l'enseignement supérieur sur critères sociaux et des aides à la mobilité internationale pour l'année 2014-2015 applicable au moment des faits et qui revêt un caractère réglementaire ; le bulletin annuel pour l'année 2014-2015 fait apparaitre que Mme C... n'a envoyé que 20 des 29 devoirs attendus, soit un taux de production de 69 % ; il ressort du bulletin annuel que les deux devoirs qui n'ont pas fait l'objet d'une correction (relatif à la matière " Anglais 1A ") ont été comptabilisés par le centre national d'enseignement à distance au titre des 20 devoirs rendus ; à la demande de Mme C..., un corrigé-type pour le quatrième devoir dans la matière " préparer E5-1A " lui a été envoyé par le centre national d'enseignement à distance et ce document ne saurait être comptabilisé comme un devoir rendu ; les services du centre national d'enseignement à distance n'ont pas retrouvé de copie supplémentaire déposée par Mme C... sur la plateforme de copies en ligne ; la requérante confirme dans son courrier du 5 janvier 2017 avoir rendu au cours de l'année 2014-2015 une totalité de 21 devoirs, soit un nombre inférieur aux 29 devoirs requis par la formation et inférieur au seuil minimal de 75 % de la totalité des devoirs prévus dans la formation, soit 22 devoirs sur 29 au total ;

- sa situation personnelle et financière est sans incidence sur la légalité de la décision.

Mme C... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 27 février 2019.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de l'éducation ;

- la circulaire n° 2014-010 du 2 juillet 2014, relative aux modalités d'attribution des bourses d'enseignement supérieur sur critères sociaux et des aides au mérite et à la mobilité internationale pour l'année 2014-2015 ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme A...,

- les conclusions de Mme Cottier, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. En 2014, Mme B... C..., née le 12 janvier 1993, s'est inscrite en première année de formation au brevet de technicien supérieur (BTS) " Management des unités commerciales " dans le cadre d'une formation continue et à distance assurée par le centre national d'enseignement à distance (CNED). Elle a bénéficié d'une bourse de l'enseignement supérieur d'un montant annuel de 4 291,20 euros. Pour l'année universitaire 2015-2016, elle a suivi la seconde année et obtenu son diplôme de brevet de technicien supérieur dans le cadre du groupement d'établissements pour la formation continue (GRETA) de Montpellier. Par lettre du 1er décembre 2016, à la demande du directeur du centre régional des oeuvres universitaires et scolaires (CROUS) de Lyon-Saint-Etienne, la direction générale des finances publiques de l'Hérault a émis à son encontre un titre exécutoire d'un montant de 2 860,80 euros au motif qu'elle n'avait pas respecté l'obligation d'assiduité lui imposant de rendre un certain nombre de devoirs entre janvier et juin 2015, laquelle conditionne le versement d'une bourse d'enseignement supérieur sur critères sociaux. Le 5 janvier 2017, elle a formé un recours gracieux en demandant l'effacement de sa dette qui a été rejeté le 7 avril 2017 par le recteur de l'académie de Lyon. Mme C... relève appel du jugement du 6 décembre 2018 par lequel le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation du titre exécutoire du 5 janvier 2017 et de la décision du 7 avril 2017 du recteur de l'académie de Lyon rejetant son recours gracieux.

Sur la recevabilité de l'appel formé par Mme C... :

2. Aux termes de l'article R. 811-2 du code de justice administrative : " Sauf disposition contraire, le délai d'appel est de deux mois. Il court contre toute partie à l'instance à compter du jour où la notification a été faite à cette partie dans les conditions prévues aux articles R. 751-3 à R. 751-4-1. "

3. Le jugement du 6 décembre 2018 a été notifié à Mme C... le 13 décembre 2018, date à laquelle a commencé à courir le délai d'appel. Mme C... établit avoir demandé le bénéfice de l'aide juridictionnelle le 8 février 2019, soit dans le délai d'appel de deux mois qui lui était imparti. Mme C... a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du bureau d'aide juridictionnelle du 27 février 2019 notifiée le 29 mars 2019. Par suite, sa requête d'appel enregistrée le 23 mai 2019 est recevable. Par conséquent, la fin de non-recevoir opposée par le ministre en charge de l'éducation nationale et de la jeunesse et de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation doit être écartée.

Sur les conclusions dirigées contre le titre de perception du 1er décembre 2016 et la décision du 7 avril 2017 rejetant le recours gracieux de Mme C... :

4. Mme C... doit être regardée comme demandant d'une part l'annulation du titre exécutoire du 1er décembre 2016 et de la décision de rejet de son recours gracieux et d'autre part à ce qu'elle soit déchargée de payer la somme de 2 860,80 euros mise à sa charge par ce titre exécutoire.

5. Aux termes de l'article L. 821-1 du code de l'éducation, " La collectivité nationale accorde aux étudiants, dans les conditions déterminées par voie réglementaire, des prestations qui sont dispensées notamment par le réseau des oeuvres universitaires mentionné à l'article L. 822-1 où les étudiants élisent leurs représentants sans distinction de nationalité et où les collectivités territoriales sont représentées dans les conditions et selon des modalités fixées par décret. Elle privilégie l'aide servie à l'étudiant sous condition de ressources afin de réduire les inégalités sociales. "

6. L'article D. 821-1 du code de l'éducation dispose que : " Les bourses d'enseignement supérieur sur critères sociaux et les aides au mérite sont attribuées aux étudiants selon des conditions d'études, d'âge, de diplôme, de nationalité, de ressources ou de mérite fixées par le ministre chargé de l'enseignement supérieur. Si l'étudiant ne remplit pas les conditions générales de scolarité et d'assiduité auxquelles est subordonné son droit à la bourse, il est tenu au reversement des sommes indûment perçues. ".

7. Aux termes du 2 de l'annexe 4 de la circulaire n° 2014-010 du 2 juillet 2014, relative aux modalités d'attribution des bourses d'enseignement supérieur sur critères sociaux et des aides au mérite et à la mobilité internationale pour l'année 2014-2015, pris par le ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche, et qui revêt un caractère réglementaire : " En application des dispositions du décret n° 51-445 du 16 avril 1951, l'étudiant bénéficiaire d'une bourse doit être inscrit et assidu aux cours, travaux pratiques ou dirigés et réaliser les stages obligatoires intégrés à la formation. De même, notamment dans le cadre d'un enseignement à distance, l'étudiant doit être inscrit et assidu aux activités relevant de sa formation et rendre tous les devoirs prévus. En ce qui concerne la présence aux examens, le candidat titulaire d'une bourse d'enseignement supérieur sur critères sociaux doit se présenter aux examens et concours correspondant à ses études. / Le non-respect de l'une des obligations précitées entraîne le reversement des sommes indûment perçues. ". Le 2.1 du même texte, relatif aux contrôles et sanctions, indique : " Les contrôles afférents à l'assiduité aux cours et à la présence aux examens sont conduits sous la responsabilité des présidents d'université, des directeurs d'école et des chefs d'établissement. Ceux-ci doivent apporter toute leur coopération en fournissant aux services du Crous les documents ou fichiers relatifs à l'assiduité des étudiants et à leur présence aux examens, accompagnés des justificatifs d'absence. À défaut, le Crous peut les demander directement à l'étudiant. Dans le cas où ces pièces ne sont pas communiquées dans les délais fixés, le Crous suspend le versement de la bourse. Cette suspension est également opérée lorsque l'étudiant ne se présente pas à la session d'examen qui se déroule à la fin du 1er semestre. Si, à la suite d'une relance du Crous, les justificatifs ne sont toujours pas fournis, une procédure d'émission d'un ordre de reversement d'une partie ou de la totalité de la bourse est mise en oeuvre. ".

8. Mme C... fait valoir que les décisions sont entachées d'une erreur de fait dès lors que des copies remises n'ont pas été prises en compte.

9. Il ressort des pièces du dossier que le centre national d'enseignement à distance (CNED) a transmis au centre régional des oeuvres universitaires et scolaires (CROUS) un bulletin annuel permettant d'effectuer un contrôle de l'assiduité de Mme C... et indiquant le nombre de devoirs à faire et le nombre de devoirs reçus. Ce document, qui est suffisamment probant, fait apparaitre que Mme C... a envoyé, pour l'année 2014, au centre national d'enseignement à distance (CNED) 20 des 29 devoirs attendus, se bornant à fournir 2 devoirs à la place de 4 pour " la culture générale et expression ", 2 devoirs à la place de 6 pour " préparer E4-1A ", 4 devoirs à la place de 6 pour " préparer E5-1A " et 3 devoirs en anglais dont 2 étaient en cours de correction à la place de 4. Si Mme C... conteste ce décompte en faisant valoir que le centre national d'enseignement à distance (CNED) a refusé de prendre en compte un devoir, le centre national établit que le devoir remis pour la matière " préparer E5-1A " n'a pas été comptabilisé comme un devoir transmis à la correction eu égard au fait que Mme C... avait demandé à bénéficier du corrigé-type, Mme C... ne pouvant se prévaloir de ce qu'elle n'aurait pas pris connaissance de ce corrigé transmis. Si Mme C... indique encore qu'elle aurait déposé deux copies non corrigées par le professeur en anglais, elle ne l'établit pas et ce alors que le bulletin annuel fait apparaître que trois devoirs dont deux en cours de correction sur 4 attendus ont été comptabilisés et que le centre national d'enseignement à distance (CNED) a précisé, en première instance, sans être sérieusement contesté, que " les services du CNED n'ont pas trace de copies supplémentaires déposées par Mme C... sur la plateforme. (...) Dès qu'une copie est reçue, elle est enregistrée dans le logiciel de gestion de la scolarité du CNED, le document est vérifié avant transmission à l'enseignant-correcteur ". La circonstance qu'elle a validé sa première année de formation au brevet de technicien supérieur et qu'elle a obtenu son diplôme sont sans incidence sur la méconnaissance de son obligation d'assiduité sanctionnée par le reversement d'une partie de la bourse dont elle a bénéficié. Par suite, les décisions contestées ne sont pas entachées d'une erreur de fait.

10. Si Mme C... soutient à l'appui de sa demande qu'elle est mère célibataire et a la charge de ses deux enfants nés le 16 mai 2012 et le 11 janvier 2017, qu'elle est sans emploi et dans une situation de précarité, il est constant qu'elle a été informée des conséquences financières du non-respect de l'obligation d'assiduité lors de la notification de l'attribution de la bourse en vue de sa formation au brevet de technicien supérieur qui précisait " (...) dans le cadre des enseignements à distance, l'étudiant doit être inscrit et assidu aux activités relevant de sa formation et rendre tous les devoirs prévus. (...) Le non-respect de l'une des obligations précitées entraîne le reversement des sommes indûment perçues ". Par ailleurs, elle dispose de la faculté de solliciter un échelonnement de sa dette auprès de la direction générale des finances publiques de l'Hérault. En tout état de cause, la circonstance que Mme C... n'aurait pas les moyens financiers de rembourser la somme en cause est sans incidence sur l'appréciation portée par le recteur sur son assiduité et sur le bien-fondé de la décision de rejet de son recours gracieux.

11. Il résulte de ce qui précède que Mme C... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation du titre exécutoire du 1er décembre 2016 et de la décision rejetant son recours gracieux et à ce qu'elle soit déchargée de payer la somme de 2 860,80 euros mise à sa charge par le titre exécutoire. Par voie de conséquence, ses conclusions tendant à l'application des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 doivent également être rejetées.

DECIDE :

Article 1er : La requête de Mme C... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... C..., au ministre de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation et au ministre de l'éducation nationale, de la jeunesse et des sports.

Délibéré après l'audience du 21 janvier 2021, à laquelle siégeaient :

M. Pourny, président de chambre,

M. Gayrard, président assesseur,

Mme A..., premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 11 février 2021.

2

N° 19LY01975


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 19LY01975
Date de la décision : 11/02/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

30-02-05-07-01 Enseignement et recherche. Questions propres aux différentes catégories d'enseignement. Enseignement supérieur et grandes écoles. Statut des étudiants. Bourses.


Composition du Tribunal
Président : M. POURNY
Rapporteur ?: Mme Rozenn CARAËS
Rapporteur public ?: Mme COTTIER
Avocat(s) : CYRIELLE BONOMO FAY

Origine de la décision
Date de l'import : 25/02/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2021-02-11;19ly01975 ?
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