La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

18/03/2021 | FRANCE | N°19LY00446

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 3ème chambre, 18 mars 2021, 19LY00446


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

L'association " Chazelle l'écho environnement ", l'association Les amis de Saint-Thibault-en-Auxois, la Société pour la protection des paysages et de l'esthétique de la France (SPPEF), la commune de Charny, la commune de Mont-Saint-Jean, la communauté de communes de Saulieu, M. et Mme B... H... et M. et Mme A... I... ont demandé au tribunal administratif de Dijon d'annuler les arrêtés du 17 mars 2017 par lesquels la préfète de la Côte-d'Or a accordé à la société SNC MET Mont-Ernault des permis de const

ruire trois éoliennes (E1, E2 et E7) et trois postes de transformation sur le...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

L'association " Chazelle l'écho environnement ", l'association Les amis de Saint-Thibault-en-Auxois, la Société pour la protection des paysages et de l'esthétique de la France (SPPEF), la commune de Charny, la commune de Mont-Saint-Jean, la communauté de communes de Saulieu, M. et Mme B... H... et M. et Mme A... I... ont demandé au tribunal administratif de Dijon d'annuler les arrêtés du 17 mars 2017 par lesquels la préfète de la Côte-d'Or a accordé à la société SNC MET Mont-Ernault des permis de construire trois éoliennes (E1, E2 et E7) et trois postes de transformation sur le territoire des communes de Missery et de Noidan, ensemble la décision implicite du 17 juillet 2017 portant rejet de leur recours gracieux.

Par un jugement n° 1702263 du 27 novembre 2018, le tribunal administratif de Dijon a rejeté la demande de l'association " Chazelle l'écho environnement " et autres.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 4 février 2019 et un mémoire, enregistré le 30 octobre 2020 (non communiqué), l'association " Chazelle l'écho environnement ", l'association les amis de Saint-Thibault-en-Auxois, la Société pour la protection des paysages et de l'esthétique de la France (SPPEF), la commune de Charny, la commune de Mont-Saint-Jean, la communauté de communes de Saulieu, M. et Mme B... H... et M. et Mme A... I..., représentés par Me C..., demandent à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Dijon du 27 novembre 2018 et les arrêtés du 17 mars 2017 par lesquels le préfet de Côte-d'Or a délivré à la SNC MET Mont-Ernault des permis de construire trois éoliennes et trois postes de transformation semi-enterrés sur le territoire des commune de Missery et de Noidan, ainsi que la décision du 17 juillet 2017 par laquelle cette même autorité a refusé de retirer ces arrêtés du 17 mars 2017 ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat de la SNC MET Mont-Ernault la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- les permis de construire méconnaissent les dispositions du XI de l'article 90 de la du 12 juillet 2010 ;

- en méconnaissance de l'article R. 111-15 du code de l'urbanisme, et L. 110-1 et L. 110-2 du code de l'environnement, le projet porte atteinte à l'avifaune notamment au Milan royal et à la Cigogne noire ainsi qu'à d'autres espèces d'oiseaux.

Par un mémoire en défense, enregistré le 24 septembre 2019, la SNC MET Mont-Ernault, représentée par Me F..., conclut au rejet de la requête et demande que soit mise à la charge de l'association " Chazelle l'écho environnement " et autres la somme de 4 000 euros au titre des frais non compris dans les dépens.

Elle soutient que :

- les requérants n'ont pas intérêt à agir ;

- les moyens soulevés par l'association " Chazelle l'écho environnement " et autres ne sont pas fondés.

Par un mémoire en défense, enregistré le 21 octobre 2020, la ministre de la transition écologique et solidaire conclut au rejet de la requête.

Elle soutient que :

- les requérants n'ont pas intérêt à agir ;

- les moyens soulevés par l'association " Chazelle l'écho environnement " et autres ne sont pas fondés.

Par ordonnance du 23 juillet 2020, la clôture d'instruction a été fixée au 30 octobre 2020.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n° 2010-788 du 12 juillet 2010 portant engagement national pour l'environnement ;

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience.

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Pierre Thierry, premier conseiller,

- les conclusions de M. Samuel Deliancourt, rapporteur public,

- et les observations de Me C..., représentant l'association " Chazelle l'écho environnement " et autres, et de Me E... représentant la SNC MET Mont-Ernault ;

Considérant ce qui suit :

1. La SNC MET Mont-Ernault a déposé, le 10 décembre 2013, trois demandes de permis de construire pour huit éoliennes, chacune d'une hauteur totale de 150 mètres, et deux postes de livraison sur les territoires des communes de Fontangy (éoliennes E3, E4, E5 et E6), de Missery (éoliennes E1 et E2) et de Noidan (éoliennes E7 et E8) situées dans le département de la Côte-d'Or et formant le parc éolien dit des Genêvres. Par des arrêtés du 15 octobre 2015, le préfet de la Région Bourgogne a autorisé la construction des quatre machines E3, E4, E5 et E6 sur le territoire de la commune de Fontangy et a rejeté les demandes de permis de construire portant sur les autres éoliennes. Consécutivement à l'annulation partielle de ces refus de permis de construire, par le tribunal administratif de Dijon, le préfet de la Côte-d'Or a, par deux arrêtés du 17 mars 2017, autorisé la SNC MET Mont-Ernault à construire les éoliennes E1, E2 sur le territoire de la commune de Missery et l'éolienne E7 sur celui de la commune de Noidan. L'association " Chazelle l'écho environnement " et autres relèvent appel du jugement rendu le 27 novembre 2018 par lequel le tribunal administratif de Dijon a rejeté leur demande d'annulation de ces deux arrêtés du 17 mars 2017.

Sans qu'il soit besoin de se prononcer sur la recevabilité de la requête.

Sur les conclusions à fin d'annulation :

En ce qui concerne l'application de l'article 90 de la loi du 12 juillet 2010 :

2. Aux termes de l'article 90 de la loi du 12 juillet 2010 susvisée : " XI. - Hors des zones de développement de l'éolien définies par le préfet, pour les projets éoliens dont les caractéristiques les soumettent à des autorisations d'urbanisme, les communes et établissements de coopération intercommunale limitrophes du périmètre de ces projets sont consultés pour avis dans le cadre de la procédure d'instruction de la demande d'urbanisme concernée ". L'association " Chazelle l'écho environnement " et autres soutiennent qu'en méconnaissance de ces dispositions l'avis de la commune de Fontangy n'a pas été recueilli préalablement aux deux arrêtés litigieux du 17 mars 2017.

3. Ainsi qu'il a été dit ci-dessus, les autorisations de constructions délivrées par ces arrêtés concernent trois éoliennes qui sont partie intégrante du projet qui a fait l'objet des demandes susmentionnées du 10 décembre 2013 de la SNC MET Mont-Ernault. Il n'est pas contesté que, dans le cadre de l'instruction de ce projet, le maire de la commune de Fontangy, sur le territoire de laquelle le projet prévoyait l'installation de quatre aérogénérateurs, a rendu un avis favorable à celui-ci.

4. Dans ces conditions, les requérants ne sont pas fondés à soutenir que la circonstance que l'avis de la commune de Fontangy n'ait pas été recueilli, une nouvelle fois, dans le cadre de l'instruction des arrêtés du 17 mars 2017, a exercé une influence sur le sens de cette décision et qu'elle les a privés d'une garantie, dès lors que cette commune connaissait parfaitement la nature des constructions dont l'autorisation était demandée et qu'aucune pièce du dossier ne permet de considérer qu'elle aurait rendu un avis défavorable pour les seules éoliennes concernées par les arrêtés en litiges.

5. En tout état de cause, ainsi que l'a jugé à bon droit le tribunal administratif de Dijon, qui a suffisamment motivé son jugement sur ce point, la commune de Fontangy ne saurait être considérée comme une commune limitrophe du périmètre du projet puisqu'elle était partie intégrante de ce périmètre. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions précitées de l'article 90 de la loi du 12 juillet 2010 ne peut qu'être écarté.

En ce qui concerne l'application de l'article R. 111-15 du code de l'urbanisme :

6. L'article R. 111-15 du code de l'urbanisme, dans la version applicable aux faits de l'espèce dispose : " Le permis (...) doit respecter les préoccupations d'environnement définies aux articles L. 110-1 et L. 110-2 du code de l'environnement. Le projet peut n'être accepté que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales si, par son importance, sa situation ou sa destination, il est de nature à avoir des conséquences dommageables pour l'environnement. ". L'article L. 110-1 du code de l'environnement prévoit que : " I. Les espaces, ressources et milieux naturels, les sites et paysages, la qualité de l'air, les espèces animales et végétales, la diversité et les équilibres biologiques auxquels ils participent font partie du patrimoine commun de la nation. II. - Leur protection, leur mise en valeur, leur restauration, leur remise en état et leur gestion sont d'intérêt général et concourent à l'objectif de développement durable qui vise à satisfaire les besoins de développement et la santé des générations présentes sans compromettre la capacité des générations futures à répondre aux leurs. (...) ".

7. Les appelants soutiennent que, faute pour le préfet de la région Bourgogne d'avoir assorti son arrêté d'autorisation de construction des éoliennes de mesures compensatoires destinées à limiter les conséquences dommageables des installations sur plusieurs espèces d'oiseaux, celui-ci méconnaît les dispositions citées au point précédent.

S'agissant du Milan royal :

8. Les requérants exposent que des études menées en Allemagne démontrent l'exposition particulière de ce rapace, dont l'espèce est en déclin au niveau européen et au nombre des espèces vulnérables en France, à une surmortalité liée au mouvement des pales des éoliennes. Si la présence de couples nicheurs de cette espèce dans la région de l'Auxois, lieu d'implantation du parc éolien litigieux, est avérée, les requérants ne produisent pas d'éléments propres à contredire les indications contenues dans l'étude d'impact présente au dossier selon lesquelles les constats opérés en Allemagne ne sont pas convenablement transposables à la situation en cause dès lors que, à la différence de la pratique habituellement observée dans ce pays qui consiste à laisser se développer un couvert végétal au pied des aérogénérateurs propre à attirer les proies du Milan royal, les zones de levage des machines du projet débattu, situées, en outre, en zone de culture, seront stabilisées avec un support minéral conduisant à un risque faible de collision et de perte de territoire de chasse du Milan royal.

9. Il résulte par ailleurs des indications non contredites de l'Etat, confirmées par les pièces du dossier, notamment une documentation élaborée par la ligue de protection des oiseaux (LPO) que le nombre de couples de Milans royaux en Bourgogne suit une dynamique d'augmentation non démentie depuis 2006 et au moins jusqu'à la date de la décision attaquée.

10. Il résulte des indications de la SNC MET Mont-Ernault que le cumul d'effets lié à la construction d'autres installations de parcs éoliens, dans un rayon de plus de quinze kilomètres du parc des Genêvres, n'est pas significatif pour le Milan royal dès lors que, si celui-ci peut se déplacer jusqu'à 15 kilomètres de son nid, sa zone d'activité majeure reste contenue dans un rayon de 1 kilomètre à 1,5 kilomètres autour du nid. Les requérants ne produisent aucun élément de nature à contredire ces indications.

11. Enfin, la circonstance que le préfet de la Côte-d'Or a refusé, par un arrêté du 17 septembre 2019, de délivrer une autorisation environnementale pour un parc éolien dont l'implantation était prévue à proximité de couples nicheurs de Milans royaux est sans influence sur la légalité des arrêtés en litige qui ne portent pas sur le même projet, distant de plusieurs kilomètres, lequel a d'ailleurs été refusé pour plusieurs autres motifs étrangers à la préservation de l'avifaune.

S'agissant de la Cigogne noire :

12. Les requérants exposent que la présence de la Cigogne noire a été détectée à plusieurs reprises à proximité du site prévu pour l'implantation du parc éolien des Genêvres en litige. A supposer que la présence récurrente de ces oiseaux à proximité du site d'implantation soit établie par les attestations produites, signées de personnes dont la compétence en la matière n'est pas connue, ainsi que par une étude de la LPO invoquée, et que cette présence soit de nature à révéler l'installation d'un couple nicheur, qui n'est au demeurant, avancée qu'à titre d'hypothèse probable, cette circonstance n'est pas de nature à révéler une erreur manifeste d'appréciation du préfet. Il ne ressort pas, en effet, des pièces du dossier que les cigognes noires soient inféodées à des zones comparables à celles prévues pour l'implantation des machines en cause, alors que les requérants indiquent eux-mêmes que les individus de cette espèce ont été observés à proximités de cours d'eau, dont les sites en cause sont dépourvus et que l'exposition au risque de collision est connue pour être liée au fonctionnement des aérogénérateurs, lequel relève de l'autorisation d'exploitation, et non de leur seule édification. Par suite, le moyen tiré de ce que le préfet s'est abstenu, en méconnaissance des textes mentionnés au point 6, de prescrire des mesures propres à mieux protéger cette espèce doit être écarté.

S'agissant des autres espèces :

13. Les appelants soutiennent que des oiseaux appartenant à des espèces telles que le Faucon pèlerin, la Grue cendrée, la Cigogne blanche, l'Aigle botté et le Circaète Jean le Blanc sont également menacés par le projet qui devait faire l'objet de mesures de nature à prévenir leur exposition au risque lié à la présence des machines en litige. Toutefois, si la présence d'un couple de faucons pèlerins a été relevée à un kilomètre de l'une des futures machines et deux autres dans un rayon de vingt kilomètres, la présence régulière de couples nicheurs des autres espèces à proximité du projet n'est pas établie par les pièces du dossier, non plus que la sensibilité particulière de toutes ces espèces à la seule présence des machines. Le moyen doit par suite être écarté.

14. Il résulte de tout ce qui précède que l'association " Chazelle l'écho environnement " et autres ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par son jugement attaqué, le tribunal administratif de Dijon a rejeté leur demande.

Sur les conclusions relatives aux frais non compris dans les dépens :

15. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative faisant obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat et de la SNC MET Mont-Ernault, qui ne sont pas les parties perdantes, une somme à ce titre, les conclusions de l'association " Chazelle l'écho environnement " et autres en ce sens doivent être rejetées.

16. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, en application de ces mêmes dispositions, de mettre à la charge solidaire de l'association " Chazelle l'écho environnement " et autres une somme de 2 000 euros qu'ils paieront à la SNC MET Mont-Ernault, au titre des frais non compris dans les dépens que cette dernière a exposés.

DECIDE :

Article 1er : La requête de l'association " Chazelle l'écho environnement ", l'association Les amis de Saint-Thibault-en-Auxois, la Société pour la protection des paysages et de l'esthétique de la France, la commune de Charny, la commune de Mont-Saint-Jean, la communauté de communes de Saulieu, M. et Mme B... H... et M. et Mme A... I... est rejetée.

Article 2 : Les requérants verseront solidairement à la SNC MET Mont-Ernault une somme globale de 2 000 euros (deux mille euros) en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à l'association " Chazelle l'écho environnement ", l'association les amis de Saint-Thibault-en-Auxois, la Société pour la protection des paysages et de l'esthétique de la France, la commune de Charny, la commune de Mont-Saint-Jean, la communauté de communes de Saulieu, M. et Mme B... H... et M. et Mme A... I..., à la SNC MET Mont-Ernault et à la ministre de la transition écologique et solidaire.

Copie en sera délivrée au préfet de la Côte-d'Or.

Délibéré après l'audience du 2 mars 2020, à laquelle siégeaient :

M. Gilles Fédi, président-assesseur, assurant la présidence de la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative,

M. Pierre Thierry, premier conseiller,

Mme D... G..., première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 18 mars 2021.

No 19LY004462


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 19LY00446
Date de la décision : 18/03/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

44-02-02-005-02-01 Nature et environnement. Installations classées pour la protection de l'environnement. Régime juridique. Actes affectant le régime juridique des installations. Première mise en service.


Composition du Tribunal
Président : M. FEDI
Rapporteur ?: M. Pierre THIERRY
Rapporteur public ?: M. DELIANCOURT
Avocat(s) : SELARL ENCKELL AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 04/05/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2021-03-18;19ly00446 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award