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17/06/2021 | FRANCE | N°20LY01444

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 7eme chambre - formation a 3, 17 juin 2021, 20LY01444


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Clermont-Ferrand d'annuler l'arrêté du 4 octobre 2019 par lequel la préfète du Puy-de-Dôme a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par jugement n° 1902321 lu le 24 décembre 2019, le magistrat désigné du tribunal, renvoyant la demande dirigée contre le refus de titre de séjour devant la formation collégiale, a rejeté la demande

dirigée contre les mesures d'éloignement.

Procédure devant la cour

Par une requête et u...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Clermont-Ferrand d'annuler l'arrêté du 4 octobre 2019 par lequel la préfète du Puy-de-Dôme a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par jugement n° 1902321 lu le 24 décembre 2019, le magistrat désigné du tribunal, renvoyant la demande dirigée contre le refus de titre de séjour devant la formation collégiale, a rejeté la demande dirigée contre les mesures d'éloignement.

Procédure devant la cour

Par une requête et un mémoire enregistrés les 14 mai 2020 et 20 mai 2021, M. A..., représenté par Me C... F..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Clermont-Ferrand et l'arrêté litigieux du 4 octobre 2019 ;

2°) d'enjoindre au préfet du Puy-de-Dôme, dans le délai de huit jours à compter de l'arrêt et sous astreinte de 150 euros par jour de retard, de lui délivrer une carte de séjour temporaire " vie privée et familiale ", subsidiairement, de réexaminer sa situation après remise d'un récépissé valant autorisation de travailler ;

3°) de mettre à la charge de l'État le versement d'une somme de 1 500 euros au titre des frais irrépétibles et le versement à son conseil d'une somme de 3 000 euros sur le fondement des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- l'obligation de quitter le territoire est illégale en raison de l'illégalité du refus de séjour, lui-même, insuffisamment motivé, pris sans consultation de la commission du titre de séjour, en méconnaissance des 7° et 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, entaché d'erreur manifeste d'appréciation, et sans que son auteur ait épuisé sa compétence ;

- elle méconnaît, en outre, directement le 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, et est entachée d'erreur manifeste d'appréciation ;

- la fixation du pays de destination est illégale en raison de l'illégalité du refus de séjour et de l'obligation de quitter le territoire ; elle méconnaît directement les articles 3 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, et est entachée d'erreur manifeste d'appréciation.

Par mémoire enregistré le 3 août 2020, le préfet du Puy-de-Dôme conclut au rejet de la requête de M. A... en soutenant que les moyens invoqués ne sont pas fondés.

M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par décision du 26 février 2020.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Le président de la formation de jugement ayant dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Le rapport de Mme E..., première conseillère, ayant été entendu au cours de l'audience publique ;

Considérant ce qui suit :

1. M. A..., de nationalité guinéenne, entré irrégulièrement sur le territoire français le 3 janvier 2012, a été pris en charge par les services de l'aide sociale à l'enfance du 14 février 2013 au 30 juin 2013, compte tenu de sa minorité. Par un arrêté du 4 octobre 2019, la préfète du Puy-de-Dôme a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixé le pays à destination duquel il pourra être renvoyé d'office. Par un arrêté du 21 novembre 2019, M. A... a été assigné à résidence pour une durée de quarante-cinq jours. Par jugement n° 1902321 lu le 24 décembre 2019, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Clermont-Ferrand, renvoyant l'examen de la demande dirigée contre le refus de séjour devant la formation collégiale, a rejeté le surplus de la demande de M. A.... Ce dernier doit être regardé comme relevant appel de ce jugement en tant qu'il a rejeté ses conclusions contre la mesure d'éloignement dans le délai de trente jours et la fixation du pays de destination.

2. Aux termes des dispositions alors codifiées à l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 11° À l'étranger résidant habituellement en France, si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié (...) ". Aux termes des dispositions alors codifiées à l'article R. 313-22 du même code : " (...) L'avis est émis (...) au vu (...) des informations disponibles sur les possibilités de bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans le pays d'origine de l'intéressé (...) ".

3. Il ressort des pièces du dossier et notamment du certificat établi, le 12 novembre 2019, par un praticien spécialisé dans la pathologie de M. A... que les traitements médicamenteux administrés à ce dernier " ne sont actuellement pas disponibles en Guinée dans son pays d'origine " et que " Les soins médico-psychiatriques médicamentaires et psychothérapeutiques doivent se poursuivre sur le long terme pour une durée minimale estimée à environ deux ans. Enfin, les traitements dont [il] bénéficie actuellement ne sont pas substituables ". M. A... établit, contrairement à ce qu'a retenu le collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dans son avis émis le 21 juin 2018 dont le préfet s'est approprié le contenu, l'indisponibilité de son traitement dans son pays d'origine, l'administration ne produisant aucun élément étayant le bien-fondé du motif tiré d'une accessibilité aux soins en Guinée. Dès lors, M. A... est fondé à exciper de d'illégalité du refus de titre de séjour qui lui a été opposé à l'encontre de la mesure d'éloignement en litige et, par voie de conséquence, à demander l'annulation de l'obligation de quitter le territoire français sous trente jours et de la fixation du pays de renvoi.

4. Il résulte de ce qui précède que M. A... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné du tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande, et à demander l'annulation de ce jugement ainsi que de l'arrêté du 4 octobre 2019 en tant qu'il lui fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et fixe le pays de destination.

5. Le présent arrêt implique nécessairement - mais seulement - que soit enjoint au préfet du Puy-de-Dôme, en application de l'article L. 614-16 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, de munir M. A... d'une autorisation provisoire de séjour jusqu'à ce qu'il ait été à nouveau statué sur sa situation. Il y a lieu de lui adresser une injonction en ce sens et de lui impartir un délai de deux mois à compter de la notification de l'arrêt. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de prononcer d'astreinte.

6. En application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et celles de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, il y a lieu de mettre à la charge de l'État le versement au conseil de M. A... d'une somme de 1 500 euros sous réserve pour cette dernière de renoncer au bénéfice de l'aide juridictionnelle. Par ailleurs, faute pour M. D..., qui a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale, de justifier des frais engagés dans le cadre de la présente instance, sa demande tendant au versement d'une somme de 1 500 euros à ce titre doit être rejetée.

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement n° 1902321 lu le 24 décembre 2019 du tribunal administratif de Clermont-Ferrand, en tant qu'il a rejeté la demande de M. A... dirigée contre l'arrêté du 4 octobre 2019 de la préfète du Puy-de-Dôme portant obligation de quitter le territoire français sous trente jours et fixation du pays de destination, ensemble l'obligation de quitter le territoire français sous trente jours et la fixation du pays de destination, sont annulés.

Article 2 : Il est enjoint au préfet du Puy-de-Dôme de réexaminer la situation de M. A... dans le délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt, après lui avoir remis une autorisation provisoire de séjour.

Article 3 : L'État versera au conseil de M. A... une somme de 1 500 euros en application des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de M. A... est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A..., et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet du Puy-de-Dôme et au procureur près du tribunal judiciaire de Clermont-Ferrand.

Délibéré après l'audience du 27 mai 2021 à laquelle siégeaient :

M. Arbarétaz, président de chambre ;

M. Seillet, président assesseur ;

Mme E..., première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 17 juin 2021.

N° 20LY01444 2

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 7eme chambre - formation a 3
Numéro d'arrêt : 20LY01444
Date de la décision : 17/06/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Exces de pouvoir

Analyses

335-01 Étrangers. Séjour des étrangers.


Composition du Tribunal
Président : M. ARBARETAZ
Rapporteur ?: Mme Claire BURNICHON
Rapporteur public ?: M. CHASSAGNE
Avocat(s) : FAURE CROMARIAS

Origine de la décision
Date de l'import : 29/06/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2021-06-17;20ly01444 ?
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