La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

10/02/2022 | FRANCE | N°20LY00298

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 5ème chambre, 10 février 2022, 20LY00298


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

La société civile immobilière (SCI) Entreprise Travaux Revente a demandé au tribunal administratif de Lyon la décharge, ou à défaut la réduction, des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés mises à sa charge au titre des exercices clos le 30 juin 2009, le 30 juin 2010 et le 30 juin 2011, ainsi que des intérêts de retard, majorations et amendes correspondantes.

Par un jugement n° 1720584 du 12 novembre 2019, le tribunal administratif de Lyon a, dans un article 1er, constaté un non

-lieu à statuer sur les conclusions de la demande portant sur les intérêts de retard ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

La société civile immobilière (SCI) Entreprise Travaux Revente a demandé au tribunal administratif de Lyon la décharge, ou à défaut la réduction, des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés mises à sa charge au titre des exercices clos le 30 juin 2009, le 30 juin 2010 et le 30 juin 2011, ainsi que des intérêts de retard, majorations et amendes correspondantes.

Par un jugement n° 1720584 du 12 novembre 2019, le tribunal administratif de Lyon a, dans un article 1er, constaté un non-lieu à statuer sur les conclusions de la demande portant sur les intérêts de retard appliqués aux cotisations supplémentaires des impositions litigieuses, dans un article 2, déchargé la SCI Entreprise travaux revente de la majoration de 40% appliquée aux cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés mise à sa charge du fait de la réintégration de la provision pour risque comptabilisée à hauteur de 120 000 euros et, dans un article 3, rejeté le surplus de la demande.

Procédure devant la cour

Par une requête, enregistrée le 17 janvier 2020, la SCI Entreprise Travaux Revente, représentée par Me Rouget, doit être regardée comme demandant à la cour :

1°) d'annuler l'article 3 de ce jugement du tribunal administratif de Lyon du 12 novembre 2019 et lui accorder la décharge des suppléments d'impôt sur les sociétés restant en litige en droits, pénalités et amende et, à titre subsidiaire, lui accorder la réduction de l'amende prévue à l'article 1759 du code général des impôts ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

La SCI Entreprise Travaux Revente soutient que :

- la majoration de la provision pour risque était justifiée au regard du montant du préjudice invoqué en justice par l'URSSAF ;

- la provision pour dépréciation de stocks, liée au retournement du marché consécutivement à la crise financière de 2008 et à la vétusté des biens en cause, est justifiée dans son principe comme dans son montant ;

- l'avantage accordé à la SCS Tina répond à l'intérêt de l'exploitation puisqu'il lui a permis de céder en totalité l'immeuble en cause et qu'il ne peut donc être qualifié d'acte anormal de gestion ;

- la majoration pour manquement délibéré n'est pas justifiée s'agissant de la provision pour dépréciation de stocks et l'avantage accordé à la SCS Tina ;

- l'administration ne peut lui infliger une amende sur le fondement de l'article 117 du code général des impôts dès lors qu'elle était en mesure de connaître le bénéficiaire de la distribution litigieuse laquelle était inscrite au crédit du compte courant de l'associé concerné ;

- à titre subsidiaire, le taux de cette amende doit être ramené à 75 % dès lors que la somme sur laquelle elle porte figurait dans sa déclaration de résultat ;

- l'amende visée à l'article 1759 du code général des impôts ne peut se cumuler avec les majorations pour manquement délibéré et les intérêts de retard.

Par un mémoire, enregistré le 7 septembre 2020, le ministre de l'économie, des finances et de la relance conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que les moyens ne sont pas fondés.

Une ordonnance du 30 juin 2021 a fixé la clôture de l'instruction au 30 juillet 2021.

Par courrier du 6 décembre 2021, les parties ont été informées, en application des dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que l'arrêt était susceptible d'être fondé sur un premier moyen relevé d'office tiré de l'irrégularité du jugement de première instance en tant qu'il a, dans l'article 1er, constaté un non-lieu à statuer à hauteur de l'intégralité des intérêts de retard mis à la charge de la SCI Entreprise Travaux Revente alors que la décision de dégrèvement du 17 août 2017 a uniquement porté sur la somme de 1 828 euros correspondant aux intérêts de retard appliqués à la fraction des suppléments d'impôts sur les sociétés afférente aux sommes également soumises à l'amende de l'article 117 du code général des impôts, et sur un second moyen relevé d'office tiré de l'absence d'intérêt pour la SCI Entreprise Travaux Revente à contester l'article 2 du jugement attaqué qui la décharge de la majoration de 40% appliquée aux cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés mise à sa charge du fait de la réintégration de la provision pour risque comptabilisée à hauteur de 120 000 euros.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Rémy-Néris, première conseillère,

- et les conclusions de M. Vallecchia, rapporteur public ;

Considérant ce qui suit :

1. La SCI Entreprise Travaux Revente (ETR) exerce une activité de marchand de biens immobiliers depuis le 15 janvier 2007. Elle a fait l'objet d'une vérification de comptabilité portant sur les exercices clos les 30 juin 2009, 30 juin 2010 et 30 juin 2011, à l'issue de laquelle l'administration a mis à sa charge des suppléments d'impôt sur les sociétés au titre des trois exercices vérifiés ainsi que des intérêts de retard, des majorations pour manquement délibéré et amendes visée à l'article 1759 du code général des impôts. Saisi d'une demande en décharge de ces suppléments d'impôt sur les sociétés par la SCI ETR, le tribunal administratif de Lyon a, par jugement du 12 novembre 2019, dans un article 1er, constaté un non-lieu à statuer sur les conclusions de la demande portant sur les intérêts de retard appliqués aux cotisations supplémentaires des impositions litigieuses, dans un article 2, déchargé la SCI Entreprise travaux revente de la majoration de 40% appliquée aux cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés mise à sa charge du fait de la réintégration de la provision pour risque comptabilisée à hauteur de 120 000 euros et, dans un article 3, rejeté le surplus de la demande. La SCI ETR relève appel de ce jugement.

Sur la régularité du jugement :

2. D'une part, la SCI ETR n'est pas recevable, faute d'intérêt pour agir, à contester l'article 2 du jugement attaqué qui la décharge de la majoration de 40% appliquée aux cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés mises à sa charge du fait de la réintégration de la provision pour risque comptabilisée à hauteur de 120 000 euros. Les conclusions de sa requête d'appel en tant qu'elles sont dirigées contre l'article 2 du jugement attaqué sont irrecevables.

3. D'autre part, il résulte des termes du jugement attaqué que les premiers juges ont, dans les motifs de leur jugement au point 2, constaté qu'il n'y avait plus lieu de statuer sur les conclusions en décharge présentées par la SCI ETR s'agissant des intérêts de retard correspondants à un montant de 1 382 euros au titre de l'année 2009, 161 euros au titre de l'année 2010, et 285 euros au titre de l'année 2011 à la suite d'une décision de dégrèvement du 17 août 2017, intervenue en cours d'instance. Ils ont toutefois dans le dispositif de ce jugement, à l'article 1er, constaté à tort un non-lieu à statuer à hauteur des conclusions de la demande portant sur l'ensemble des intérêts de retard appliqués aux cotisations supplémentaires litigieuses soit un montant total de 7 495 euros. Il y a lieu, par suite, d'annuler partiellement l'article 1er du jugement attaqué en tant qu'il a constaté un non-lieu à statuer à hauteur d'une somme supérieure à 1 828 euros.

4. Il y a lieu pour la Cour d'évoquer et de statuer immédiatement sur les conclusions relatives aux intérêts de retard pour une somme supérieure à 1 828 euros et de statuer par la voie de l'effet dévolutif sur le surplus des conclusions de la requête.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

En ce qui concerne les suppléments d'impôts sur les sociétés en litige :

5. En premier lieu, aux termes de l'article 39 du code général des impôts : " 1. Le bénéfice net est établi sous déduction de toutes charges, celles-ci comprenant, sous réserve des dispositions du 5, notamment : (...) 5° Les provisions constituées en vue de faire face à des pertes ou charges nettement précisées et que des événements en cours rendent probables, à condition qu'elles aient été effectivement constatées dans les écritures de l'exercice ". Il n'appartient pas au juge de l'impôt, pour apprécier la déductibilité d'une provision constituée pour faire face à un risque contentieux, d'apprécier les chances de succès de l'action contentieuse.

6. En vertu des règles gouvernant l'attribution de la charge de la preuve devant le juge administratif, applicables sauf loi contraire, s'il incombe, en principe, à chaque partie d'établir les faits nécessaires au succès de sa prétention, les éléments de preuve qu'une partie est seule en mesure de détenir ne sauraient être réclamés qu'à celle-ci. Il appartient, dès lors, au contribuable, pour l'application des dispositions précitées du code général des impôts, de justifier tant du montant des créances de tiers, amortissements, provisions et charges qu'il entend déduire du bénéfice net que de la correction de leur inscription en comptabilité, c'est-à-dire du principe même de leur déductibilité et que ce n'est que lorsqu'il apporte cette justification par la production de tous éléments suffisamment précis, qu'il incombe ensuite au service, s'il s'y croit fondé, d'apporter la preuve contraire, le juge de l'impôt devant alors apprécier la valeur des explications respectivement fournies par le contribuable et par l'administration.

7. Il ressort de la proposition de rectification adressée à la SCI ETR le 29 octobre 2012 que cette dernière a comptabilisé une provision pour risque dans le cadre d'un litige judiciaire l'opposant à l'URSSAF de Haute-Savoie à hauteur de 200 000 euros à la clôture de l'exercice 2008/2009, provision qu'elle a portée à 320 000 euros à la clôture de l'exercice 2009/2010. La SCI ETR soutient que le contentieux engagé devant le tribunal de grande instance (TGI) d'Annecy par l'URSSAF de Haute-Savoie concernait l'application de la clause pénale incluse dans une promesse de vente que la société ETR n'avait pas honorée en sollicitant sa condamnation au versement d'une somme de 200 000 euros. Si elle a comptabilisé cette somme en tant que provision pour risques pour l'exercice 2008/2009, elle a également comptabilisé un supplément de 120 000 euros au titre de l'exercice 2009/2010 en raison de l'évolution des demandes de l'URSSAF au cours de l'instance devant le TGI, celle-ci ayant réclamé la somme de 650 000 euros. Toutefois, s'il est constant que la provision pour risques comptabilisée à hauteur de la somme de 200 000 euros était bien déductible au titre de l'exercice 2009/2010 en raison de l'engagement de la procédure contentieuse par l'URSSAF de Haute-Savoie, il ressort des conclusions présentées par cet organisme dans l'instance judiciaire, produites par la SCI ETR, qu'il s'est borné à solliciter la condamnation de la SCI ETR à hauteur de la somme de 200 000 euros et qu'il s'est uniquement prévalu de l'estimation du bien en litige par le service des domaines pour démontrer que son préjudice était supérieur à la clause pénale stipulée dans la promesse de vente. Par suite, c'est à bon droit que l'administration a, sur le fondement des dispositions précitées du 5° du 1 de l'article 39 du code général des impôts, remis en cause le supplément de provision pour risques comptabilisé par la SCI ETR à hauteur de la somme de 120 000 euros en raison de ce contentieux.

8. En deuxième lieu, il résulte du 5° du 1. de l'article 39 du code général des impôts et du 3 de l'article 38 du même code que, lorsqu'une entreprise constate que l'ensemble des matières ou produits qu'elle possède en stock ou une catégorie déterminée d'entre eux a, à la date de clôture de l'exercice, une valeur probable de réalisation inférieure au prix de revient, elle est en droit de constituer, à concurrence de l'écart constaté, une provision pour dépréciation. Une telle provision ne peut cependant être admise que si l'entreprise est en mesure de justifier de la réalité de cet écart et d'en déterminer le montant avec une approximation suffisante.

9. Il résulte de l'instruction que la SCI ETR a acquis le 18 octobre 2007 trente lots au sein d'une résidence de tourisme. Elle en a revendu quinze et en a conservé quinze pour les mettre en location qu'elle a comptabilisés dans ses stocks pour la somme de 563 142,98 euros. A la clôture de l'exercice 2008/2009, elle a comptabilisé une provision pour dépréciation de stocks à hauteur de 20% de ces quinze lots soit une somme de 112 600 euros en estimant qu'ils avaient perdu de leur valeur en raison de leur vétusté et d'importants travaux de rénovation à venir au niveau des parties communes et de la baisse du volume des ventes liée à la crise financière de 2008. Toutefois, la SCI ETR, qui se borne à évoquer des attestations du syndic de copropriété établissant des appels de fonds pour des travaux de rénovation à hauteur de 38 533,75 euros et 8 220,33 euros, n'apporte aucun élément pertinent de nature à justifier du principe et du montant du taux de décote appliqué à ce stock et ainsi de la déductibilité de la provision pour dépréciation de stocks ainsi comptabilisée. Il s'en suit que c'est à bon droit que l'administration a remis en cause la provision constituée à ce titre.

10. En troisième lieu, en vertu des dispositions combinées des articles 38 et 209 du code général des impôts, le bénéfice imposable à l'impôt sur les sociétés est celui qui provient des opérations de toute nature faites par l'entreprise, à l'exception de celles qui, en raison de leur objet ou de leurs modalités, sont étrangères à une gestion commerciale normale. Les prêts sans intérêt ou l'abandon de créances accordés par une entreprise au profit d'un tiers ne relèvent pas, en règle générale, d'une gestion commerciale normale, sauf s'il apparaît qu'en consentant de tels avantages l'entreprise a agi dans son propre intérêt. S'il appartient à l'administration d'apporter la preuve des faits sur lesquels elle se fonde pour estimer qu'un abandon de créances ou d'intérêts consenti par une entreprise à un tiers constitue un acte anormal de gestion, elle est réputée apporter cette preuve dès lors que cette entreprise n'est pas en mesure de justifier qu'elle a bénéficié en retour de contreparties.

11. Au cours de la vérification de comptabilité de la SCI ETR, l'administration a constaté que celle-ci avait cédé à la SCS Tina un ensemble de seize lots à usage commercial le 28 février 2008 pour un montant de 511 730 euros sans toutefois que le prix de cession ne soit réglé à la SCI ETR à l'issue de la période vérifiée ni que la SCI ETR n'ait cherché à recouvrer sa créance. Alors que l'administration a estimé que la SCI ETR avait ainsi consenti un prêt sans intérêt à la SCS Tina, constitutif d'un acte anormal de gestion justifiant la réintégration au résultat de la société des intérêts du prêt qu'elle aurait dû percevoir, la SCI ETR ne justifie pas avoir bénéficié en retour de contreparties en se bornant à soutenir que cette contrepartie consisterait pour elle à céder l'immeuble dans sa totalité et à se dégager des risques commerciaux et financiers liés à l'opération. Par suite, l'administration est réputée avoir rapporté la preuve que le prêt sans intérêts consenti par la SCI ETR à la SCS Tina constitue un acte anormal de gestion. Ainsi, c'est par une exacte application des principes rappelés ci-dessus que le service a réintégré au résultat de la société les intérêts du prêt qu'elle aurait dû percevoir sur l'ensemble de la période vérifiée.

En ce qui concerne les majorations pour manquement délibéré restant en litige :

12. La SCI ETR réitère en appel le moyen tiré de ce que la majoration pour manquement délibéré n'est pas justifiée s'agissant de la provision pour dépréciation de stocks et l'avantage accordé à la SCS Tina sans apporter aucun élément nouveau de fait ou de droit à l'appui de celui-ci. Il y a lieu pour la Cour d'écarter ce moyen par adoption des motifs retenus à bon droit par les premiers juges aux points 10 et 11 de leur jugement.

En ce qui concerne l'amende infligée à la SCI ETR en application de l'article 1759 du code général des impôts sur les trois exercices vérifiés :

13. D'une part, aux termes de l'article 117 du code général des impôts : " Au cas où la masse des revenus distribués excède le montant total des distributions tel qu'il résulte des déclarations de la personne morale visées à l'article 116, celle-ci est invitée à fournir à l'administration, dans un délai de trente jours, toutes indications complémentaires sur les bénéficiaires de l'excédent de distribution. / En cas de refus ou à défaut de réponse dans ce délai, les sommes correspondantes donnent lieu à l'application de la pénalité prévue à l'article 1759. ". Aux termes de l'article 1759 du même code : " Les sociétés et les autres personnes morales passibles de l'impôt sur les sociétés qui versent ou distribuent, directement ou par l'intermédiaire de tiers, des revenus à des personnes dont, contrairement aux dispositions des articles 117 et 240, elles ne révèlent pas l'identité, sont soumises à une amende égale à 100 % des sommes versées ou distribuées. Lorsque l'entreprise a spontanément fait figurer dans sa déclaration de résultat le montant des sommes en cause, le taux de l'amende est ramené à 75 %. ".

14. Il résulte de ces dispositions que la circonstance que l'administration connaisse ou soit susceptible de connaître les bénéficiaires de sommes regardées comme des revenus réputés distribués n'est pas de nature à lui interdire d'inviter la société distributrice à désigner l'identité et l'adresse des bénéficiaires dans un délai de trente jours, dans les conditions prévues par l'article 117 du code général des impôts, et ne fait obstacle ni à ce qu'elle applique à cette société, à défaut de toute réponse, l'amende prévue par l'article 1759 du même code, ni à ce qu'une réponse tardive ou manifestement incomplète ou insuffisante soit assimilée à un défaut de réponse.

15. La proposition de rectification du 29 octobre 2012 adressée à la SCI ETR comportait une demande de désignation des bénéficiaires des distributions occultes constatées par l'administration sur le fondement de l'article 111 c) du code général des impôts au titre de profits non comptabilisés, d'un passif injustifié et du prêt consenti sans intérêts à la SCS Tina. D'une part, la SCI ETR ne conteste pas, ainsi que l'a relevé le tribunal, n'avoir jamais répondu à la demande de l'administration ni n'avoir déclaré les sommes en cause en ce qui concerne les profits non comptabilisés et le prêt sans intérêt. D'autre part, si elle conteste l'amende mise à sa charge concernant le passif injustifié concernant une somme inscrite au crédit du compte courant d'associé de M. A..., également gérant de la société, elle ne saurait faire grief à l'administration, eu égard à ce qui a été dit au point 14, d'avoir mis en œuvre la procédure de désignation prévue par l'article 117 du code général des impôts au motif que cette dernière aurait eu connaissance du bénéficiaire des revenus distribués. Il appartenait en conséquence à la société requérante de répondre à la demande du service, l'invitant à faire connaître dans un délai de trente jours l'identité complète et l'adresse du bénéficiaire final et réel des distributions.

16. En outre, si elle se prévaut, sur le fondement de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, de la documentation administrative 4 J-1212 n° 72 et 73 reprise au BOI-RPPM-RCM-10-20-20-40 n° 100, aux termes de laquelle " le service doit s'abstenir de recourir à la procédure de l'article 117 du code général des impôts lorsque la société lui a déjà fait connaître, avec précisions à l'appui, le nom des bénéficiaires des revenus ; dans ce cas, en effet, le défaut de réponse de la société à une demande qui lui aurait été néanmoins adressée, n'entraîne aucune conséquence ", la société concernée n'a pas fait connaître au service " avec précisions à l'appui, le nom des bénéficiaires des revenus " et n'entre pas, dès lors, dans les prévisions de cette doctrine.

17. D'autre part, pour les motifs énoncés par le tribunal au point 16 de son jugement, il y a lieu d'écarter le moyen réitéré en appel par la SCI ETR tiré de ce qu'elle serait fondée à prétendre au bénéfice du taux réduit de l'amende prévu à l'article 1759 de ce code.

18. Enfin, la SCI ETR entend contester le cumul de l'amende précitée avec l'intérêt de retard et les majorations pour manquement délibéré restant à sa charge. Toutefois, il résulte de l'instruction que, s'agissant des sommes ayant donné lieu à l'amende visée à l'article 1759 du code général des impôts, l'administration a procédé au dégrèvement en cours d'instance devant le tribunal des intérêts de retard appliqués aux suppléments d'impôt sur les sociétés afférents à la réintégration des mêmes sommes dans ses résultats imposables. En outre, aucune disposition législative ou règlementaire ni aucun principe ne fait obstacle à ce que l'administration inflige au contribuable, d'une part, des majorations pour manquement délibéré sur le fondement de l'article 1729 du code général des impôts, et d'autre part, l'amende prévue par l'article 1759 du même code dès lors que ces majorations et amende ne sanctionnent pas le même comportement du contribuable. La doctrine administrative BOI-RPPM-RCM-10-20-20-40 n°550 dont se prévaut la société ETR précisant que " cette pénalité de l'article 1759 du CGI peut se cumuler avec celles éventuellement appliquées à la réintégration correspondante à l'impôt sur les sociétés. / La pénalité de l'article 1759 du CGI se cumule avec l'amende pour défaut de déclaration des rémunérations prévue par le III de l'article 1736 du CGI. / En ce qui concerne les distributions occultes, le rehaussement à l'impôt sur les sociétés motivé par l'absence de justification de la dépense est, en principe, assorti des majorations prévues à l'article 1729 du CGI applicables lorsque le manquement délibéré du redevable est établi. En revanche, l'intérêt de retard prévu à l'article 1727 du CGI ne se cumule pas avec l'amende prévue à l'article 1759 du CGI. ", n'interdit pas, contrairement à ce que soutient la société appelante, le cumul de l'amende et la majoration susvisée s'agissant de distributions occultes, comme en l'espèce.

19. Il résulte de ce qui précède que les conclusions de la demande afférentes au surplus des intérêts de retard en litige sur lesquelles la Cour statue par la voie de l'évocation et le surplus des conclusions de la requête d'appel de la SCI ETR doivent être rejetés.

Sur les frais liés au litige :

20. Il n'y a pas lieu, en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros demandée par la SCI ETR au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens.

DECIDE :

Article 1er : L'article 1er du jugement n° 1720584 du 12 novembre 2019 du tribunal administratif de Lyon est partiellement annulé en tant qu'il a constaté un non-lieu à statuer à hauteur d'une somme supérieure à 1 828 euros d'intérêts de retard.

Article 2 : La demande relative au surplus des intérêts de retard et les conclusions présentées en appel par la SCI ETR sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la SCI ETR et au ministre de l'économie, des finances et de la relance.

Délibéré après l'audience du 20 janvier 2022 à laquelle siégeaient :

M. Bourrachot, président de chambre,

Mme Dèche, présidente assesseure,

Mme Rémy-Néris, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 10 février 2022.

2

N° 20LY00298


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 20LY00298
Date de la décision : 10/02/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Fiscal

Analyses

19-04-01-04 Contributions et taxes. - Impôts sur les revenus et bénéfices. - Règles générales. - Impôt sur les bénéfices des sociétés et autres personnes morales.


Composition du Tribunal
Président : M. BOURRACHOT
Rapporteur ?: Mme Vanessa REMY-NERIS
Rapporteur public ?: M. VALLECCHIA
Avocat(s) : ROUGET

Origine de la décision
Date de l'import : 22/02/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2022-02-10;20ly00298 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award