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08/08/2022 | FRANCE | N°21LY01979

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 5ème chambre, 08 août 2022, 21LY01979


Vu la procédure suivante :

Par une requête et un mémoire enregistrés le 15 juin 2021 et le 4 avril 2022, la société par actions simplifiée (SAS) Sodimont, représentée par Me Courrech, avocat, demande à la cour d'annuler la décision de la Commission nationale d'aménagement commercial du 15 avril 2021 autorisant la société EIC Transactions à procéder à la création d'un ensemble commercial à Montceau-les-Mines par régularisation de la transformation d'une jardinerie à l'enseigne " Jardiland " d'une surface de vente de 5 988 m², en un ensemble commercial d'une surface

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Vu la procédure suivante :

Par une requête et un mémoire enregistrés le 15 juin 2021 et le 4 avril 2022, la société par actions simplifiée (SAS) Sodimont, représentée par Me Courrech, avocat, demande à la cour d'annuler la décision de la Commission nationale d'aménagement commercial du 15 avril 2021 autorisant la société EIC Transactions à procéder à la création d'un ensemble commercial à Montceau-les-Mines par régularisation de la transformation d'une jardinerie à l'enseigne " Jardiland " d'une surface de vente de 5 988 m², en un ensemble commercial d'une surface de vente totale de 5 988 m², composé d'une jardinerie " Jardiland ", de 2 974 m² de surface de vente, d'un magasin " Darty ", de 620 m² de surface de vente, d'un caviste " VetB ", de 240 m² de surface de vente, d'un magasin de secteur 2, spécialisé dans l'équipement de la personne ou de la maison, de 1 200 m² de surface de vente, d'un magasin " FNAC ", de 754 m² de surface de vente et d'une boutique " Cuisines Schmidt ", de 200 m² de surface de vente.

Elle soutient que :

- elle dispose d'un intérêt à agir et sa requête est recevable ;

- la Commission nationale émet un " avis " alors qu'elle a été saisie dans le cadre d'une demande autonome étrangère à un permis de construire ;

- la décision qui a été signée par M. B..., alors que c'est Mme A... qui a présidé la séance, est entachée d'un vice d'incompétence ;

- le pétitionnaire a illégalement tronçonné ses demandes et alors qu'il avait l'intention d'implanter une surface alimentaire, sans donner aucune information sur ce projet à la Commission nationale ; ainsi, l'impact effectif du projet n'est pas connu ;

- c'est à tort que la Commission nationale a estimé que les surfaces concernées par le projet n'auraient pas trouvé leur place dans le centre-ville ;

- les enseignes " Darty " et " Cuisines Schmidt " sont déjà situées à l'intérieur d'une zone commerciale qui est définie par les documents d'urbanisme comme un site préférentiel pour le développement du commerce ; le projet vient en contradiction avec l'orientation d'aménagement et de programmation (OAP) Commerce ;

- le projet est incompatible avec le schéma de cohérence territoriale ;

- il ne contribuera pas à la revitalisation du tissu commercial ;

- aucune étude de trafic ne vient analyser véritablement la capacité des voiries à absorber les nouveaux flux ;

- la voie destinée à servir d'accès aux véhicules de livraison à l'arrière du projet est inadaptée.

Par un mémoire enregistré le 3 décembre 2021, la Commission nationale d'aménagement commercial conclut au rejet de la requête.

Elle soutient que :

- elle a rendu un avis, qui constitue un acte préparatoire à la délivrance d'un permis de construire et qui n'est pas susceptible de recours ;

- l'avis a été signé par M. B..., par erreur matérielle qui a été corrigée ;

- contrairement à ce que soutient la requérante, le projet est bien situé à proximité du centre-ville ;

- le dossier n'avait pas à comporter d'information concernant l'implantation d'une future surface alimentaire, sur laquelle il ne porte pas ;

- le projet se situe à proximité immédiate du centre-ville et propose l'implantation de moyennes surfaces qui ne peuvent trouver à s'y installer ;

- le projet n'est pas incompatible avec le schéma de cohérence territoriale ;

- il va contribuer à la revitalisation du tissu commercial et à la préservation des centres urbains ;

- il aura un faible impact sur le trafic routier.

Par un mémoire enregistré le 19 avril 2022, la société EIC Transactions, représentée par Me Renaux, avocate, conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 8 000 euros soit mise à la charge de la requérante en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que la requête est manifestement irrecevable car elle est dirigée contre un simple avis qui constitue un acte préparatoire.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de commerce ;

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Dèche, présidente assesseure ;

- les conclusions de M. Vallecchia, rapporteur public ;

- et les observations de Me Abel, représentant la SAS Sodimont, et Me De Cirugedo, représentant la société EIC Transactions ;

Considérant ce qui suit :

1. Le 3 novembre 2020, la société EIC Transactions a déposé auprès de la mairie de Montceau-les-Mines une demande de permis de construire modificatif valant autorisation d'exploitation commerciale en vue de la création d'un ensemble commercial par régularisation de la transformation d'une jardinerie à l'enseigne " Jardiland " d'une surface de vente de 5 988 m², en un ensemble commercial d'une surface de vente totale de 5 988 m², composé de plusieurs magasins de différentes enseignes. Saisie d'un recours contre l'avis favorable rendu par la commission départementale d'aménagement commercial de Saône-et-Loire, le 1er décembre 2020, la Commission nationale d'aménagement commercial a rejeté, le 15 avril 2021, ce recours et par un arrêté du 20 mai 2021, le maire de Montceau-les-Mines a délivré à la société EIC Transactions, un permis de construire modificatif valant autorisation d'exploitation commerciale. La SAS Sodimont qui exploite dans la zone de chalandise du projet un magasin à l'enseigne " E. Leclerc ", demande l'annulation de cet avis qu'elle qualifie de " décision ".

Sur les conclusions dirigées contre l'avis du 15 avril 2021 de la Commission nationale d'aménagement commercial :

2. Aux termes de l'article L. 425-4 du code de l'urbanisme : " Lorsque le projet est soumis à autorisation d'exploitation commerciale au sens de l'article L. 752-1 du code de commerce, le permis de construire tient lieu d'autorisation dès lors que la demande de permis a fait l'objet d'un avis favorable de la commission départementale d'aménagement commercial ou, le cas échéant, de la Commission nationale d'aménagement commercial (...) A peine d'irrecevabilité, la saisine de la commission nationale par les personnes mentionnées à l'article L. 752-17 du même code est un préalable obligatoire au recours contentieux dirigé contre la décision de l'autorité administrative compétente pour délivrer le permis de construire ".

3. Il résulte de l'article L. 425-4 du code de l'urbanisme que l'avis de la Commission nationale d'aménagement commercial a désormais le caractère d'un acte préparatoire à la décision prise par l'autorité administrative sur la demande de permis de construire valant autorisation d'exploitation commerciale, seule décision susceptible de recours contentieux. Il en va ainsi que l'avis de la Commission nationale d'aménagement commercial soit favorable ou qu'il soit défavorable.

4. En outre, aux termes de l'article R. 351-4 du code de justice administrative : " Lorsque tout ou partie des conclusions dont est saisi un tribunal administratif, une cour administrative d'appel ou le Conseil d'Etat relève de la compétence d'une de ces juridictions administratives, le tribunal administratif, la cour administrative d'appel ou le Conseil d'Etat, selon le cas, est compétent, nonobstant les règles de répartition des compétences entre juridictions administratives, pour rejeter les conclusions entachées d'une irrecevabilité manifeste insusceptible d'être couverte en cours d'instance, pour constater qu'il n'y a pas lieu de statuer sur tout ou partie des conclusions ou pour rejeter la requête en se fondant sur l'irrecevabilité manifeste de la demande de première instance. "

5. En l'espèce, il ressort des pièces que, lors de sa séance du 15 avril 2021, la Commission nationale d'aménagement commercial s'est prononcée sur un projet qui avait fait l'objet d'une demande de permis de construire déposée à la mairie de Montceau-les-Mines, le 3 novembre 2020, qu'elle vise clairement dans l'avis rendu à l'issue de cette séance. Ainsi, le permis de construire délivré au pétitionnaire, le 20 mai 2021, qui mentionne également l'avis rendu par la Commission nationale d'aménagement commercial doit être regardé comme valant autorisation d'exploitation commerciale. Ainsi, contrairement à ce que soutient la requérante, la Commission nationale d'aménagement commercial a rendu un avis et non une décision sur la demande présentée par le pétitionnaire. Dans ces conditions, l'avis rendu par la Commission nationale d'aménagement commercial, le 15 avril 2021 ne constitue pas, en vertu de ce qui a été dit au point 3, un acte susceptible de faire l'objet d'un recours pour excès de pouvoir alors même que le courrier de notification de cet avis indique que " cette décision peut, dans le délai de deux mois, faire l'objet d'un recours pour excès de pouvoir devant la cour administrative d'appel ".

6. La société requérante, qui est au nombre des personnes visées à l'article L. 752-17 du code de commerce, pouvait en revanche présenter un recours pour excès de pouvoir contre le permis de construire délivré par l'autorité compétente valant autorisation d'exploitation commerciale, en excipant le cas échéant de l'illégalité de l'avis rendu par la Commission nationale d'aménagement commercial. Il s'en suit que les conclusions de la société requérante tendant à l'annulation de l'avis rendu par la Commission nationale d'aménagement commercial le 15 avril 2021 sont irrecevables et doivent être rejetées.

7. L'irrecevabilité résultant de la nature de l'avis de la Commission nationale d'aménagement commercial, qui n'est pas susceptible d'être couverte en cours d'instance, présente un caractère manifeste au sens de l'article R. 351-4 du code de justice administrative. Par suite, la cour administrative d'appel de Lyon est compétente, en dépit des règles de répartition des compétences entre juridictions administratives, pour rejeter les conclusions à fin d'annulation de la SAS Sodimont.

Sur les frais liés à l'instance :

8. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la SAS Sodimont le versement d'une somme de 2 000 euros à la société EIC Transactions au titre des frais exposés par elle dans cette instance.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la SAS Sodimont est rejetée.

Article 2 : La SAS Sodimont versera à la société EIC Transactions une somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la SAS Sodimont, à la société EIC Transactions, à la commune de Montceau-les-Mines, à la présidente de la Commission nationale d'aménagement commercial et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.

Délibéré après l'audience du 7 juillet 2022 à laquelle siégeaient :

M. Bourrachot, président de chambre,

Mme Dèche, présidente assesseure,

Mme Le Frapper, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 8 août 2022.

La rapporteure,

P. Dèche Le président,

F. Bourrachot

La greffière,

S. Lassalle

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des Outre-mer, au ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, en ce qui les concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition,

La greffière,

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N° 21LY01979

lc


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 21LY01979
Date de la décision : 08/08/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

14-02-01-05 Commerce, industrie, intervention économique de la puissance publique. - Réglementation des activités économiques. - Activités soumises à réglementation. - Aménagement commercial.


Composition du Tribunal
Président : M. BOURRACHOT
Rapporteur ?: Mme Pascale DECHE
Rapporteur public ?: M. VALLECCHIA
Avocat(s) : SELAS WILHELM ET ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 23/08/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2022-08-08;21ly01979 ?
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