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12/10/2022 | FRANCE | N°20LY02493

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 3ème chambre, 12 octobre 2022, 20LY02493


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Dijon : 1°) d'annuler la décision du 18 décembre 2018 rejetant sa demande de paiement d'heures supplémentaires, ainsi que la décision implicite de rejet de son recours gracieux ; 2°) de condamner la commune de Saint-Marcel à lui payer la somme de 11 933,55 euros au titre d'heures effectivement réalisées et la somme de 22 469,84 euros au titre d'heures supplémentaires, assorties des intérêts au taux légal à compter du 16 mai 2018 ; 3°) de mettre à la

charge de cette commune la somme de 3 000 euros en application de l'article L....

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Dijon : 1°) d'annuler la décision du 18 décembre 2018 rejetant sa demande de paiement d'heures supplémentaires, ainsi que la décision implicite de rejet de son recours gracieux ; 2°) de condamner la commune de Saint-Marcel à lui payer la somme de 11 933,55 euros au titre d'heures effectivement réalisées et la somme de 22 469,84 euros au titre d'heures supplémentaires, assorties des intérêts au taux légal à compter du 16 mai 2018 ; 3°) de mettre à la charge de cette commune la somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 2000995 du 30 juin 2020, le tribunal administratif de Dijon a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour

Par une requête et un mémoire en réplique, enregistrés les 27 août 2020 et 1er septembre 2021, M. A..., représenté par Me N'Diaye, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Dijon du 30 juin 2020 ;

2°) d'annuler la décision du 18 décembre 2018, ainsi que la décision implicite de rejet de son recours gracieux ;

3°) de condamner la commune de Saint-Marcel à lui payer la somme de 11 933,55 euros au titre d'heures effectivement réalisées et la somme de 22 469,84 euros au titre d'heures supplémentaires, assorties des intérêts au taux légal à compter du 16 mai 2018 ;

3°) de mettre à la charge de la commune de Saint-Marcel la somme de 2 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- à défaut d'avis du comité technique et de délibération du conseil municipal quant à l'encadrement des heures supplémentaires des fonctionnaires de catégorie C, la commune doit être condamnée à lui régler les sommes réclamées au titre des heures effectives et des heures supplémentaires effectuées lors des séjours de 2014 à 2018 ;

- c'est à tort que le tribunal a fait reposer exclusivement la charge de la preuve sur le demandeur ; il produit un décompte quotidien de la durée de sa journée de travail étayant sa demande ; il appartenait en conséquence à la commune, employeur, de fournir en réponse des éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés.

Par un mémoire en défense, enregistré le 17 novembre 2020, la commune de Saint-Marcel, représentée par Me Cottignies, conclut au rejet de la requête et demande qu'une somme de 1 500 euros soit mise à la charge du requérant en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la demande était irrecevable pour constituer une requête collective ;

- la demande était irrecevable faute d'être dirigée contre une décision ;

- le seul fait de ne pas avoir délibéré sur le temps de travail des adjoints territoriaux d'animation pendant les séjours ne constitue pas une illégalité ; la demande repose sur les propres déclarations de l'intéressé ; les heures supplémentaires n'ont pas été réalisées à la demande de l'autorité territoriale, ni avec son consentement ; le requérant avait la charge d'organiser les séjours en veillant à respecter les règles en matière de temps de travail ;

- les heures supplémentaires ne pouvaient faire l'objet d'une rémunération dès lors qu'elles faisaient déjà l'objet d'un repos compensateur ; le principe était l'annualisation du temps de travail.

Par ordonnance du 17 juin 2021, la clôture de l'instruction a été fixée au 16 septembre 2021.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires ;

- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale ;

- le décret n° 2001-623 du 12 juillet 2001 pris pour l'application de l'article 7-1 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 et relatif à l'aménagement et à la réduction du temps de travail dans la fonction publique territoriale ;

- le décret n° 2000-815 du 25 août 2000 relatif à l'aménagement et à la réduction du temps de travail dans la fonction publique de l'Etat et dans la magistrature ;

- le décret n° 2002-60 du 14 janvier 2002 relatif aux indemnités horaires pour travaux supplémentaires ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Bénédicte Lordonné, première conseillère ;

- les conclusions de M. Samuel Deliancourt, rapporteur public ;

- les observations de Me Sovet pour la commune de Saint-Marcel.

Considérant ce qui suit :

1. M. A..., adjoint territorial d'animation principal de 2ème classe en poste au " pôle jeunesse " de la commune de Saint-Marcel, depuis le 17 juin 2003, relève appel du jugement du 30 juin 2020 par lequel le tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande tendant à la condamnation de cette commune à lui payer la somme de 11 933,55 euros au titre d'heures de travail effectivement réalisées et la somme de 22 469,84 euros au titre d'heures supplémentaires, assorties des intérêts au taux légal à compter du 16 mai 2018.

Sur le bien-fondé du jugement :

2. Aux termes de l'article 7-1 de la loi du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale : " Les règles relatives à la définition, à la durée et à l'aménagement du temps de travail des agents des collectivités territoriales (...) sont fixées par la collectivité (...), dans les limites applicables aux agents de l'État, en tenant compte de la spécificité des missions exercées par ces collectivités ou établissements. / Un décret en Conseil d'État détermine les conditions d'application du premier alinéa. (...) ". Aux termes de l'article 1er du décret du 12 juillet 2001 pris pour l'application de l'article 7-1 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 et relatif à l'aménagement et à la réduction du temps de travail dans la fonction publique territoriale : " Les règles relatives à la définition, à la durée et à l'aménagement du temps de travail applicables aux agents des collectivités territoriales sont déterminées dans les conditions prévues par le décret du 25 août 2000 (...) ".

3. L'article 1er du décret du 25 août 2000 relatif à l'aménagement et à la réduction du temps de travail dans la fonction publique de l'État et dans la magistrature dispose que : " La durée du travail effectif est fixée à trente-cinq heures par semaine dans les services et établissements publics administratifs de l'État ainsi que dans les établissements publics locaux d'enseignement. / Le décompte du temps de travail est réalisé sur la base d'une durée annuelle de travail effectif de 1 607 heures maximum, sans préjudice des heures supplémentaires susceptibles d'être effectuées (...) ". Aux termes de l'article 3 du décret du 25 août 2000 susvisé : " I.- L'organisation du travail doit respecter les garanties minimales ci-après définies. La durée hebdomadaire du travail effectif, heures supplémentaires comprises, ne peut excéder ni quarante-huit heures au cours d'une même semaine, ni quarante-quatre heures en moyenne sur une période quelconque de douze semaines consécutives et le repos hebdomadaire, comprenant en principe le dimanche, ne peut être inférieur à trente-cinq heures. La durée quotidienne du travail ne peut excéder dix heures. Les agents bénéficient d'un repos minimum quotidien de onze heures. L'amplitude maximale de la journée de travail est fixée à douze heures. Le travail de nuit comprend au moins la période comprise entre 22 heures et 5 heures ou une autre période de sept heures consécutives comprise entre 22 heures et 7 heures. Aucun temps de travail quotidien ne peut atteindre six heures sans que les agents bénéficient d'un temps de pause d'une durée minimale de vingt minutes. II.- Il ne peut être dérogé aux règles énoncées au I que dans les cas et conditions ci-après : a) Lorsque l'objet même du service public en cause l'exige en permanence, notamment pour la protection des personnes et des biens, par décret en Conseil d'Etat (...) ". Aux termes de l'article 4 du même décret : " Le travail est organisé selon des périodes de référence dénommées cycles de travail. Les horaires de travail sont définis à l'intérieur du cycle, qui peut varier entre le cycle hebdomadaire et le cycle annuel de manière que la durée du travail soit conforme sur l'année au décompte prévu à l'article 1er (...) ", la définition de la durée du travail effectif aux termes de l'article 2 de ce décret devant " s'entendre comme le temps pendant lequel les agents sont à la disposition de leur employeur et doivent se conformer à ses directives sans pouvoir vaquer librement à des occupations personnelles ".

4. Aux termes de l'article 2 du décret n° 2002 60 du 14 janvier 2002 relatif aux indemnités horaires pour travaux supplémentaires : " " I. - 1° Les indemnités horaires pour travaux supplémentaires peuvent être versées, dès lors qu'ils exercent des fonctions ou appartiennent à des corps, grades ou emplois dont les missions impliquent la réalisation effective d'heures supplémentaires, aux fonctionnaires de catégorie C (...) / 2° Le versement des indemnités horaires pour travaux supplémentaires à ces fonctionnaires est subordonné à la mise en œuvre par leur employeur de moyens de contrôle automatisé permettant de comptabiliser de façon exacte les heures supplémentaires qu'ils auront accomplies. S'agissant des personnels exerçant leur activité hors de leurs locaux de rattachement, un décompte déclaratif contrôlable peut remplacer le dispositif de contrôle automatisé (...) ". En vertu de l'article 4 du décret du 14 janvier 2002 relatif aux indemnités horaires pour travaux supplémentaires, " sont considérées comme heures supplémentaires les heures effectuées à la demande du chef de service dès qu'il y a dépassement des bornes horaires définies par le cycle de travail (...) ". Son article 7 prévoit que, à défaut de compensation sous la forme d'un repos compensateur, les heures supplémentaires accomplies sont indemnisées dans les conditions qu'il définit.

5. Aux termes de l'article 2 du règlement intérieur applicable au agents du service enfance famille : " Pour les agents d'animation / Compte tenu des horaires spécifiques de fonctionnement liés aux différents temps scolaires (temps quotidien, petites vacances, vacances d'été...) les agents pourront fonctionner selon les modalités d'annualisation du temps de travail. (...) / Les horaires de chaque agent sont fixés en accord avec le chef de service. Toutes modifications de ces horaires, à la demande du chef de service ou de l'agent, devront être sollicitées au minimum 15 jours à l'avance. Ces éventuelles modifications seront validées par la Chef de service. / En dehors de ces horaires fixés, les cas exceptionnels pour nécessité de servie sont possibles (modifications du nombre d'enfants accueillis, séjours, manifestations, (...). Ils seront consignés dans la fiche hebdomadaire de l'agent concernés. Il est rappelé que compte tenu des contraintes liées au fonctionnement du service, il existe toujours une nécessaire adaptation des horaires selon les nécessités de service ".

6. M. A... fait valoir qu'au cours des années 2015 à 2018, lors de séjours d'enfants âgés entre 11 et l7 ans, il a exercé des fonctions d'encadrement des jeunes sur des journées complètes, comprenant une surveillance nocturne, et que les heures supplémentaires effectuées, à ce titre, notamment de nuit, des samedis et des dimanches, n'ont pas été payées.

7. En cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, il appartient, en premier lieu, à l'agent d'étayer sa demande par la production d'éléments suffisamment précis quant aux horaires qu'il estime avoir réalisés pour permettre à l'employeur de répondre en fournissant ses propres éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié. Au vu de l'ensemble des éléments produits par les parties, le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles.

8. Il ressort des pièces du dossier de première instance que M. A... a produit un décompte détaillé des heures qu'il estime avoir effectuées pour chacun des séjours concernés, comptabilisant les heures correspondant au travail de jour, le plus souvent de 7 heures à 22 heures, et les heures correspondant au travail de nuit, de 22 heures à 7 heures.

9. La commune de Saint-Marcel, bien que contestant le décompte des heures de travail dressé par M. A..., ne produit aucun élément de nature à le contester utilement, se contentant par principe et forfaitairement de comptabiliser les heures de travail à 10 heures pour la journée et deux heures pour la nuit. Cependant, il ne résulte pas de l'instruction que le conseil municipal de Saint-Marcel aurait adopté une délibération fixant des équivalences en matière de durée du travail ou définissant des modalités particulières de prise en compte du travail de nuit, ou du travail effectué les dimanches et les jours fériés.

10. Toutefois, le décompte détaillé des heures effectuées pour chacun des séjours concernés ne permet pas au requérant d'établir que la durée annualisée de son travail aurait dépassé le total de 1 607 heures. En outre, M. A... ne conteste pas qu'il a bénéficié d'une compensation sous la forme d'un repos compensateur à hauteur de 45 heures par semaine de séjour. Il fait valoir que les repos compensateurs ont été calculés sur le forfait de l0 h. Cependant, s'il soutient qu'il est un agent de catégorie C et qu'il transmet toutes les informations ainsi que ses demandes au chef de service, il n'est pas établi que ces heures supplémentaires auraient été effectuées à la demande du chef de service, ainsi que l'exige l'article 4 du décret du 14 janvier 2002, ni même que ce dernier en aurait été informé. A cet égard, il ressort du courrier du maire du 12 juillet 2018 produit au dossier de première instance et demandant à l'intéressé de respecter l'obligation d'obtenir l'aval de l'adjointe déléguée concernée pour chaque projet demandant du temps de travail supplémentaire, que la commune n'a pas accepté le dépassement du nombre forfaitaire de dix heures imposées par la mairie.

11. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner les fins de non-recevoir opposées par la commune de Saint-Marcel à la demande de première instance, que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande.

Sur les frais liés au litige :

12. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la somme que le requérant demande au titre des frais qu'il a exposés soit mise à la charge de la commune de Saint-Marcel, qui n'est pas partie perdante. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de mettre à la charge du requérant la somme que la commune de Saint-Marcel demande au titre de ses frais non compris dans les dépens sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : Les conclusions de la commune de Saint-Marcel tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et à la commune de Saint-Marcel.

Délibéré après l'audience du 27 septembre 2022 à laquelle siégeaient :

M. Jean-Yves Tallec, président,

M. Gilles Fédi, président-assesseur,

Mme Bénédicte Lordonné, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 12 octobre 2022.

La rapporteure,

Bénédicte LordonnéLe président,

Jean-Yves Tallec

La greffière,

Sandra Bertrand

La République mande et ordonne au préfet de Saône-et-Loire en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition,

La greffière,

2

N° 20LY02493


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 20LY02493
Date de la décision : 12/10/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

36-08-01 Fonctionnaires et agents publics. - Rémunération. - Questions d'ordre général.


Composition du Tribunal
Président : M. TALLEC
Rapporteur ?: Mme Bénédicte LORDONNE
Rapporteur public ?: M. DELIANCOURT
Avocat(s) : N'DIAYE

Origine de la décision
Date de l'import : 23/10/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2022-10-12;20ly02493 ?
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