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01/06/2023 | FRANCE | N°21LY02841

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 5ème chambre, 01 juin 2023, 21LY02841


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. B... A... et autres ont demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler la délibération n° 2020-008 du 29 juillet 2020 par laquelle le conseil municipal de la commune de Viviers (Ardèche) a fixé le taux des indemnités de fonctions attribuées au maire, aux adjoints et aux conseillers municipaux délégués.

Par un jugement n° 2006981 du 24 juin 2021, le tribunal administratif de Lyon a, dans un article 1er, annulé la délibération n° 2020-008 du 29 juillet 2020 du conseil municipal de la com

mune de Viviers en tant qu'elle attribue une indemnité de fonctions à huit adjoints ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. B... A... et autres ont demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler la délibération n° 2020-008 du 29 juillet 2020 par laquelle le conseil municipal de la commune de Viviers (Ardèche) a fixé le taux des indemnités de fonctions attribuées au maire, aux adjoints et aux conseillers municipaux délégués.

Par un jugement n° 2006981 du 24 juin 2021, le tribunal administratif de Lyon a, dans un article 1er, annulé la délibération n° 2020-008 du 29 juillet 2020 du conseil municipal de la commune de Viviers en tant qu'elle attribue une indemnité de fonctions à huit adjoints et onze conseillers municipaux et, dans un article 2, rejeté le surplus des conclusions de la demande.

Procédure devant la cour

Par une requête et trois mémoires, enregistrés les 23 août 2021, 6 mai 2022, 12 mai 2022 et 13 juin 2022, la commune de Viviers, représentée par Me Blanc, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 24 juin 2021 ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. A... et autres devant le tribunal ;

3°) de mettre à la charge des intimés à titre solidaire la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- elle produit les délégations de fonctions aux adjoints et conseillers municipaux du 26 août 2020 qu'elle n'a pas été en mesure de produire devant le tribunal ;

- les dispositions des articles L. 2122-18 et L. 2123-20 du code général des collectivités territoriales n'impliquent pas que les délégations de fonctions aux adjoints et conseillers municipaux soient édictées antérieurement à la délibération portant indemnités de fonctions ;

- en tout état de cause, la délibération litigieuse ne doit être annulée qu'en tant qu'elle fixe le taux de l'indemnité à verser aux élus pour la période du 31 juillet 2020 (date de la transmission de la délibération au contrôle de légalité) au 26 août 2020 (date des arrêtés de délégation de fonctions) ;

- les autres moyens soulevés devant le tribunal par les intimés ne sont pas fondés.

Par deux mémoires, enregistrés les 5 novembre 2021 et 9 juin 2022, M. A... et autres, représentés par Me Gaspar, concluent au rejet de la requête et demandent à la cour de mettre à la charge de l'appelante la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils font valoir que :

- c'est à bon droit que le tribunal a annulé la délibération litigieuse dès lors que les délégations de fonctions doivent être préalables à la délibération fixant le taux des indemnités ;

- ils prennent acte de ce que le tableau annexé à la délibération en litige a été transmis à la préfecture ;

- la délibération fixant le taux des indemnités est illégale en raison de l'illégalité des délégations édictées ; en accordant une délégation permanente à l'ensemble des conseillers municipaux de la majorité qui ne sont pas adjoints, la maire a commis une erreur de droit et certaines délégations accordées aux conseillers municipaux de la majorité sont redondantes par rapport aux délégations accordées aux adjoints sans que ne soit prévu un ordre de priorité et dans des domaines de compétences non précisément définis ;

- en prévoyant d'indemniser tous les élus de la majorité sans prévoir d'indemnisation pour les élus d'opposition, la maire a introduit une discrimination entre élus contraire à l'article L. 2123-24-1 du code général des collectivités territoriales.

Une ordonnance du 14 juin 2022 a fixé la clôture de l'instruction au 30 juin 2022.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code général des collectivités territoriales ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Rémy-Néris, première conseillère,

- les conclusions de Mme Le Frapper, rapporteure publique,

- et les observations de Me Breysse pour la commune de Viviers et de Me Jolivet pour M. A... et autres ;

Considérant ce qui suit :

1. Par une délibération n° 2020-008 du 29 juillet 2020, le conseil municipal de la commune de Viviers (Ardèche), a fixé le taux des indemnités de fonction attribuées à la maire, aux adjoints et à certains conseillers municipaux. Il a ainsi attribué à la maire une indemnité de fonction correspondant à 55% de l'indice brut 1027, aux huit adjoints une indemnité de fonction correspondant à 17,05% du même indice brut et à onze conseillers municipaux une indemnité de fonction correspondant à 3,60% du même indice brut. La commune de Viviers relève appel de l'article 1er du jugement par lequel le tribunal administratif de Lyon a annulé la délibération du 29 juillet 2020 en tant qu'elle attribue une indemnité de fonctions à huit adjoints et onze conseillers municipaux.

Sur le moyen d'annulation retenu par le tribunal :

2. Aux termes de l'article L. 2122-18 du code général des collectivités territoriales : " Le maire est seul chargé de l'administration, mais il peut, sous sa surveillance et sa responsabilité, déléguer par arrêté une partie de ses fonctions à un ou plusieurs de ses adjoints et à des membres du conseil municipal ". Aux termes de l'article L. 2123-17 du code général des collectivités territoriales : " Sans préjudice des dispositions du présent chapitre, les fonctions de maire, d'adjoint et de conseiller municipal sont gratuites ". Aux termes du I de l'article L. 2123-20 du même code : " Les indemnités allouées au titre de l'exercice des fonctions de maire et de président de délégation spéciale et les indemnités maximales pour l'exercice effectif des fonctions d'adjoint au maire des communes, de conseiller municipal des communes de 100 000 habitants et plus ou de membre de délégations spéciales qui fait fonction d'adjoint sont fixées par référence au montant du traitement correspondant à l'indice brut terminal de l'échelle indiciaire de la fonction publique ". Aux termes de l'article L. 2123-20-1 du même code : " I. - Lorsque le conseil municipal est renouvelé, les indemnités de ses membres, à l'exception de l'indemnité du maire, sont fixées par délibération. Cette délibération intervient dans les trois mois suivant l'installation du conseil municipal. / II. - Sauf décision contraire de la délégation spéciale, ses membres qui font fonction d'adjoint perçoivent l'indemnité fixée par délibération du conseil municipal pour les adjoints. / III. - Toute délibération du conseil municipal concernant les indemnités de fonction d'un ou de plusieurs de ses membres, à l'exception du maire, est accompagnée d'un tableau annexe récapitulant l'ensemble des indemnités allouées aux autres membres du conseil municipal ".

3. L'article L. 2123-24 du même code prévoit que pour les communes dont la population est comprise entre 2 500 et 9 999 habitants, les indemnités votées par les conseils municipaux pour l'exercice effectif des fonctions d'adjoint au maire et de membre de délégation spéciale faisant fonction d'adjoint au maire sont au maximum égales à 22% du terme de référence mentionné au I de l'article L. 2123-20. L'article L. 2123-24-1 du code précité prévoit que : " (...) II. - Dans les communes de moins de 100 000 habitants, il peut être versé une indemnité pour l'exercice effectif des fonctions de conseiller municipal dans les limites prévues par le II de l'article L. 2123-24. Cette indemnité est au maximum égale à 6 % du terme de référence mentionné au I de l'article L. 2123-20. / (...) / V. En aucun cas l'indemnité versée à un conseiller municipal ne peut dépasser l'indemnité fixée pour le maire de la commune en application des articles L. 2123-22 et L. 2123-23. (...) ".

4. Eu égard au principe de gratuité des fonctions énoncé à l'article L. 2123-17 précité, le versement d'une somme à un élu municipal en raison de ses fonctions ne peut être opéré que sur le fondement d'une disposition législative expresse. En application des dispositions des articles L. 2123-24 et L. 2123-24-1 de ce code, le versement d'indemnités de fonctions à des adjoints ou des conseillers municipaux, qui doit être décidé par le conseil municipal, est subordonné, dans les communes de moins de 100 000 habitants, à la condition que ces adjoints et conseillers aient reçu une délégation de fonctions dans les conditions prévues à l'article L. 2122-18. En outre une telle délégation, pour être régulière, doit porter sur des attributions effectives, identifiées de façon suffisamment précise pour permettre d'en apprécier la consistance.

5. En l'espèce, il ressort des pièces du dossier que la délibération du 29 juillet 2020 du conseil municipal de la commune de Viviers a notamment fixé le taux des indemnités de fonction attribuées à huit adjoints et onze conseillers municipaux. Toutefois, et alors que, sauf le cas de suppléance, seul l'adjoint ou le conseiller municipal, titulaire d'une délégation régulière peut justifier de l'exercice de ses fonctions et, par voie de conséquence, percevoir lesdites indemnités de fonction, il est constant que la maire de la commune a pris les arrêtés portant délégations de fonctions à ces cinq adjoints et huit conseillers municipaux uniquement le 26 août 2020 soit postérieurement à la délibération litigieuse fixant le taux des indemnités. Le nombre des adjoints et conseillers municipaux concernés figure également sur le tableau annexé à la délibération litigieuse et transmise au préfet sans que ceux-ci n'aient reçu à cette date les délégations pour exercer ces fonctions et percevoir les indemnités correspondantes. Pour ce motif, la délibération litigieuse est irrégulière. En outre, contrairement à ce que soutient la commune de Viviers, la délibération du 4 juillet 2020 portant nomination et élection des adjoints au maire avec mention de leurs domaines de compétences ne saurait constituer une délégation de fonctions régulière. Enfin, la délibération en litige n'étant pas légale à la date de son édiction en l'absence des arrêtés de délégations aux adjoints et conseillers municipaux, l'annulation prononcée, qui implique que cet acte est réputé n'être jamais intervenu, ne saurait être limitée à la période du 31 juillet 2020, date de la transmission de cette délibération au préfet, au 26 août 2020. Il ne ressort pas à ce titre des pièces du dossier que l'effet rétroactif attaché à l'annulation prononcée est de nature en l'espèce à emporter des conséquences manifestement excessives en raison tant des effets que cet acte a produits et des situations qui ont pu se constituer lorsqu'il était en vigueur, que de l'intérêt général pouvant s'attacher à un maintien temporaire de ses effets.

6. Il résulte de ce qui précède que la commune de Viviers n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par l'article 1er du jugement attaqué, le tribunal a annulé la délibération du 29 juillet 2020 en litige en tant qu'elle fixe l'attribution d'une indemnité de fonctions aux huit adjoints et onze conseillers municipaux.

Sur les frais liés au litige :

7. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que les intimés qui ne sont pas, dans la présente instance, partie perdante, verse à la commune de Viviers la somme qu'elle réclame au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'appelante une somme de 2 000 euros au titre des mêmes dispositions à verser à M. A..., représentant unique.

DECIDE :

Article 1er : La requête de la commune de Viviers est rejetée.

Article 2 : La commune de Viviers versera à M. A..., représentant unique, la somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la commune de Viviers et à M. B... A..., représentant unique.

Délibéré après l'audience du 11 mai 2023 à laquelle siégeaient :

M. Bourrachot, président de chambre,

Mme Dèche, présidente assesseure,

Mme Rémy-Néris, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 1er juin 2023.

La rapporteure,

V. Rémy-NérisLe président,

F. Bourrachot

La greffière,

A-C. Ponnelle

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer et au ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires en ce qui les concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition,

La greffière,

2

N° 21LY02841

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 21LY02841
Date de la décision : 01/06/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

135-02-01-02-03-04 Collectivités territoriales. - Commune. - Organisation de la commune. - Organes de la commune. - Dispositions relatives aux élus municipaux. - Indemnités.


Composition du Tribunal
Président : M. BOURRACHOT
Rapporteur ?: Mme Vanessa REMY-NERIS
Rapporteur public ?: Mme LE FRAPPER
Avocat(s) : SCP CHARREL et ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 11/06/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2023-06-01;21ly02841 ?
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