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03/06/2004 | FRANCE | N°99MA00343

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 1ere chambre - formation a 5, 03 juin 2004, 99MA00343


Vu la requête, enregistrée le 26 février 1999 au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille sous le n° 99MA00343, présentée pour :

- Me VINCENEUX en sa qualité de liquidateur judiciaire des sociétés du groupe Thermoel ;

- M. et Mme X, demeurant ... ;

Les requérants demandent à la Cour :

1°/ d'annuler le jugement en date du 21 décembre 1998 par lequel le Tribunal administratif de Montpellier a rejeté leurs demandes tendant à la condamnation de l'Etat à réparer les préjudices résultant de l'arrêté en date du 14 juin 1994 par lequel le

préfet du Gard a mis la société Thermoel en demeure de remettre en état le site sur lequel ...

Vu la requête, enregistrée le 26 février 1999 au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille sous le n° 99MA00343, présentée pour :

- Me VINCENEUX en sa qualité de liquidateur judiciaire des sociétés du groupe Thermoel ;

- M. et Mme X, demeurant ... ;

Les requérants demandent à la Cour :

1°/ d'annuler le jugement en date du 21 décembre 1998 par lequel le Tribunal administratif de Montpellier a rejeté leurs demandes tendant à la condamnation de l'Etat à réparer les préjudices résultant de l'arrêté en date du 14 juin 1994 par lequel le préfet du Gard a mis la société Thermoel en demeure de remettre en état le site sur lequel elle avait été autorisée à exploiter une usine de production d'énergie électrique et thermique par combustion d'ordures ménagères ;

Classement CNIJ : 44-02-03

C

2°/ de condamner l'Etat à verser la somme de 206.499.819 F à Me VINCENEUX, la somme de 155.588.600 F à M. Pierre X et la somme de 10.800.178 F à Mme Thérèse X ;

3°/ de condamner l'Etat à verser conjointement à l'ensemble des appelants la somme de 25.000 F au titre des frais irrépétibles ;

Ils soutiennent :

- que c'est à tort que les premiers juges ont considéré que la société Thermoel ne pouvait justifier d'un préjudice à l'encontre de l'Etat du seul fait qu'elle aurait été à l'origine de la rupture d'une convention de concession conclue avec le Syndicat Intercommunal de traitement des Ordures Ménagères (SITOM) de la région d'Alès, dès lors que les demandes d'indemnisation sont formulées à l'encontre de l'Etat et non du SITOM ;

- que les premiers juges ont analysé à tort l'article 9 de la convention, relatif aux clauses suspensives, comme une clause résolutoire ;

- que le jugement attaqué écarte sans la moindre motivation les préjudices directement liés aux deux arrêtés préfectoraux incriminés, qui ont été annulés par le Tribunal administratif de Montpellier ; que ces préjudices sont établis ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 29 novembre 1999, présenté par le ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement ; le ministre conclut au rejet de la requête ; il fait valoir :

- que l'administration n'a commis aucune faute ; que, compte tenu des tonnages de déchets nécessaires au fonctionnement de l'unité autorisée le 11 juillet 1991, l'exploitation de cette dernière pouvait être préjudiciable à l'intérêt général ; que la caducité de l'autorisation délivrée le 11 juillet 1991 incombe à son bénéficiaire, qui a démontré tant son incapacité technique que son incapacité financière à mettre en oeuvre cette autorisation ;

- que les requérants ne démontrent pas l'existence d'un lien de causalité entre la faute reprochée et le préjudice allégué ; qu'à aucun moment la société Thermoel et l'ensemble de ses sous-traitants n'ont justifié, d'une part, de la réalité de leur savoir-faire technique et, d'autre part, de la réalité de leur assise financière ;

- que la preuve comptable des préjudices invoqués n'est pas apportée ;

Vu le mémoire en réplique, enregistré le 12 février 2001, présenté par Me VINCENEUX ET AUTRES ; ils concluent aux mêmes fins que la requête ; ils font valoir en outre :

- que la position prise par l'Etat dès le 14 juin 1994, avant même l'expiration du délai de validité de l'autorisation délivrée le 11 juillet 1991, est à l'origine de la décision du SITOM d'Alès de dénoncer la convention signée avec la société Thermoel ;

- que les parties à ladite convention, qui ne prévoit aucune clause de résiliation avant terme, étaient liées pour une durée de 30 ans ;

Vu le mémoire, enregistré au greffe le 29 avril 2004, présenté par M. et Mme X ; ils déclarent abandonner toute prétention en réparation pour tout ce qui les concerne à titre personnel et maintenir leur demande d'allocation d'une somme de 3.811 euros au titre des frais irrépétibles ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi n° 76-663 du 19 juillet 1976 ;

Vu le décret n° 77-1133 du 21 septembre 1977 ;

Vu le code de l'environnement ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 6 mai 2004 :

- le rapport de M. CHERRIER, premier conseiller ;

- et les conclusions de M. HERMITTE, premier conseiller ;

Sans qu'il soit besoin de se prononcer sur la recevabilité des demandes de première instance :

Considérant que, le 14 juin 1990, le Syndicat Intercommunal de Traitement des Ordures Ménagères (S.I.T.O.M.) de la région d'Alès a passé avec la société Thermoel une convention de concession par laquelle cette dernière s'est engagée à construire à ses frais une usine d'incinération de déchets ménagers apportés par ledit syndicat ; que, par un arrêté en date du 11 juillet 1991, le préfet du Gard a autorisé la société Thermoel à exploiter ladite usine sur le territoire de la commune de Saint-Martin-de-Valgalgues ; que par un arrêté complémentaire en date du 7 juin 1993, le préfet du Gard a autorisé la société Thermoel à exploiter une plate forme d'essais, préparatoire au projet approuvé par l'arrêté du 11 juillet 1991 ; que, par un arrêté en date du 14 juin 1994, fondé sur la circonstance que l'installation initialement autorisée n'avait pas été mise en service dans le délai de trois ans prévu par l'article 24 du décret susvisé du 21 septembre 1977, le préfet du Gard a mis en demeure la société Thermoel de remettre le site dans son état d'origine avant le 12 juillet 1994 ; que cette mise en demeure étant restée sans effet, le préfet du Gard a prescrit, par arrêté en date 3 août 1994, la consignation d'une somme de 1.500.000 F destinée à répondre du coût de la remise en état du site ; que Me VINCENEUX, liquidateur judiciaire des sociétés du groupe Thermoel, ainsi que M. et Mme X, détenteurs de titres et de créances relatifs à ce groupe, demandent la condamnation de l'Etat à réparer les préjudices financiers résultant pour eux des arrêtés préfectoraux des 14 juin et 3 août 1994 ;

Considérant que les requérants soutiennent que ces arrêtés, annulés par jugement du Tribunal administratif de Montpellier en date du 10 février 1995, sont à l'origine de la dénonciation, par délibération de l'assemblée générale du SITOM de la région d'Alès intervenue le 5 juillet 1994, de la convention de concession conclue le 14 juin 1990 ;

Considérant qu'il résulte de l'examen de la lettre en date du 15 juillet 1994 par laquelle le président du SITOM a notifié à la société Thermoel la décision de dénonciation prise le 5 juillet 1994, que celle-ci était motivée essentiellement en premier lieu par l'absence de montage financier sérieux, cohérent, définitif et concret, en deuxième lieu par l'arrivée à échéance, le 11 juillet 1994, de l'autorisation d'exploiter et enfin par la caducité du permis de construire délivré le 12 novembre 1991 ; que ce dernier motif est sans lien avec les arrêtés incriminés ; qu'il ne résulte pas de l'instruction que l'installation projetée aurait pu être mise en service avant l'expiration du délai de validité de l'autorisation accordée le 11 juillet 1991 ; qu'en admettant même que l'établissement financier qui était disposé à financer le projet d'usine ait été amené à renoncer à ses intentions du fait de l'intervention des arrêtés préfectoraux en cause, il résulte de l'instruction que l'accord de financement donné par cet établissement était conditionné par la certitude de la disposition de déchets en quantité suffisante ; qu'il n'est pas démontré que cette condition aurait pu se réaliser, alors surtout qu'il n'est pas sérieusement contesté que, pour assurer la viabilité économique du projet, il aurait fallu acheminer la quasi-totalité des déchets gardois vers le site en question, en contradiction avec l'objectif de valorisation de déchets par le tri sélectif et les principes de gestion contenus dans l'esquisse de plan départemental d'élimination des déchets ; qu'ainsi, le montage financier envisagé par les requérants ne présentait pas, en tout état de cause, un caractère définitif ; que, dans ces conditions, la dénonciation de la convention de concession ne peut être regardée comme la conséquence directe des arrêtés critiqués ;

Considérant que les requérants soutiennent également que leurs préjudices découlent de la privation du financement bancaire qui leur était promis ; que, comme il vient d'être dit, ils ne démontrent pas qu'ils auraient probablement obtenu les fonds nécessaires à la réalisation de leur projet industriel ; qu'ainsi, il n'est pas établi que les arrêtés incriminés auraient aggravé la situation financière des sociétés concernées ; que, dès lors, les préjudices invoqués ne peuvent être regardés comme directement imputables auxdits arrêtés ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que les requérants ne sont pas fondés à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Montpellier a rejeté leurs demandes d'indemnisation ;

Sur l'application de l'article L.761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, soit condamné à verser aux requérants la somme qu'ils réclament au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

Article 1er : La requête susvisée de Me VINCENEUX et autres est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Me VINCENEUX, à M. et Mme X et au ministre de l'écologie et du développement durable.

Délibéré à l'issue de l'audience du 6 mai 2004, où siégeaient :

M. ROUSTAN, président de chambre,

M. CHERRIER, Mme BUCCAFURRI et Mme FERNANDEZ, premiers conseillers,

assistés de Mme EJEA, greffier ;

Prononcé à Marseille, en audience publique le 3 juin 2004.

Le président, Le rapporteur,

Signé Signé

Marc ROUSTAN Philippe CHERRIER

Le greffier,

Signé

Françoise EJEA

La République mande et ordonne au ministre de l'écologie et du développement durable en ce qui le concerne et à tous les huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

Le greffier

N° 99MA00343 3


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 1ere chambre - formation a 5
Numéro d'arrêt : 99MA00343
Date de la décision : 03/06/2004
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. ROUSTAN
Rapporteur ?: M. Philippe CHERRIER
Rapporteur public ?: M. HERMITTE
Avocat(s) : FOURCADE

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2004-06-03;99ma00343 ?
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