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08/06/2004 | FRANCE | N°00MA00569

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 2eme chambre - formation a 3, 08 juin 2004, 00MA00569


Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille le 22 mars 2000, sous le n° 00MA00569, présentée pour M. Sylvain X, demeurant ... par Me BIZET, avocat ;

M. X demande à la Cour :

1°/ d'annuler le jugement, en date du 18 janvier 2000 par lequel le Tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande tendant à la condamnation de l'ordre national des médecins à lui verser une somme de 1.425.000 F au titre du manque à gagner, une somme de 60.068 F par an au titre des régimes de retraite, et une somme de 300.000 F au titre du préjudice mo

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2°/ de condamner l'ordre national des médecins à lui verser une so...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille le 22 mars 2000, sous le n° 00MA00569, présentée pour M. Sylvain X, demeurant ... par Me BIZET, avocat ;

M. X demande à la Cour :

1°/ d'annuler le jugement, en date du 18 janvier 2000 par lequel le Tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande tendant à la condamnation de l'ordre national des médecins à lui verser une somme de 1.425.000 F au titre du manque à gagner, une somme de 60.068 F par an au titre des régimes de retraite, et une somme de 300.000 F au titre du préjudice moral ;

2°/ de condamner l'ordre national des médecins à lui verser une somme équivalant au montant total des rémunérations qu'il aurait perçues en qualité de médecin traitant employé à mi-temps au sein du centre de convalescence La Brise ;

Il soutient :

- que l'avis du conseil départemental de l'ordre des médecins a été annulé au vu de l'arrêt du conseil d'Etat annulant la décision du conseil national de l'ordre des médecins rejetant son recours gracieux ;

- qu'en présence de cet avis contraire, le Dr X n'avait pu exercer au sein du centre de convalescence l'activité salariée comme il le voulait et n'a donc perçu aucune rémunération salariée, ses fonctions de président-directeur général de la société gestionnaire étant exercées à titre gratuit ;

- que M. X demandait au conseil départemental de l'ordre de lui fournir un modèle de contrat de travail ;

- qu'il n'a jamais rédigé de contrat définitif en raison de la réponse du conseil départemental ;

- que le préjudice correspond aux années 1990 à 1994 ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire, enregistré le 8 juin 2000, présenté par le conseil national de l'ordre des médecins et le conseil départemental de l'ordre des médecins des Alpes-Maritimes, qui conclut au rejet de la requête et, en outre, à la condamnation du Dr X à leur verser à chacun la somme de 30.000 F au titre de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;

Ils soutiennent :

- que le préjudice ne peut être évalué en additionnant les salaires et honoraires de trois praticiens, alors que M. X exerçait déjà les fonctions de P.D.G. de la société ;

- que la communication d'un avis contenant une réserve n'est pas de nature à ouvrir droit à réparation au profit de M. X ; que seule la décision d'interdiction de refus d'inscription, si elle était illégale, serait susceptible de donner lieu au versement d'indemnités ;

Vu les mémoires, enregistrés les 3 juillet et 28 août 2000, présentés pour M. X, qui persiste dans ses conclusions, et fixe le montant de l'indemnité réclamée à 450.000 F au titre de la réparation du préjudice financier, 100.000 F au titre de la perte des points de retraite, et 50.000 F en application de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;

Il soutient :

- qu'en exigeant l'existence d'un contrat de travail, le tribunal administratif exige l'impossible ;

- que les décisions du conseil départemental et du conseil national de l'ordre ont bien eu un caractère contraignant ;

- que le conseil d'Etat a annulé une décision, et que cette décision faisait grief ;

- que le Dr X avait fermement l'intention de travailler au sein de la maison de convalescence La Brise ;

- que le préjudice demandé est le préjudice direct indiscutable ;

Vu les nouveaux mémoires, enregistrés les 21 août et 26 septembre 2000, présentés pour le conseil national de l'ordre des médecins et le conseil départemental des Alpes-Maritimes de l'ordre des médecins, qui persistent dans leurs conclusions ;

Ils soutiennent :

- que les décisions des conseils de l'ordre n'ont jamais eu de pouvoir contraignant à l'encontre du Dr X ;

- que la loi du 24 juillet 1966 interdit aux administrateurs de cumuler leurs fonctions avec un contrat de travail dans la société ;

- que le préjudice financier allégué est sans fondement ;

Vu les nouveaux mémoires, enregistrés les 12 septembre, 2 octobre et 27 octobre 2000, présentés pour M. Sylvain X, qui persiste dans ses conclusions ;

Il soutient en outre :

- que les conseils de l'ordre auraient sanctionné le Dr X s'il était passé outre à leurs avis ;

- que le Dr X n'était pas dans la même situation que les autres médecins salariés de la maison de convalescence ;

- que si les conseils de l'ordre avaient indiqué comme motif de leur opposition l'impossiblité pour un P.D.G. de souscrire un contrat de travail, le Dr X aurait démissionné de ses fonctions de P.D.G. ou transformé la forme sociale de la société anonyme La Brise ;

Vu le nouveau mémoire, enregistré le 23 octobre 2000, présenté pour le conseil national de l'ordre des médecins et le conseil départemental des Alpes-Maritimes de l'ordre des médecins, qui persistent dans leurs conclusions ;

Ils soutiennent en outre que la loi du 24 juillet 1966 n'a été évoquée que pour démontrer l'absence du préjudice réel et sérieux et l'absence de sérieux du projet de M. X ;

Vu le nouveau mémoire, enregistré le 17 mai 2004, présenté pour le conseil national de l'ordre des médecins et le conseil départemental des Alpes-Maritimes de l'ordre des médecins, qui persiste dans ses conclusions ;

Vu le nouveau mémoire, enregistré le 18 et le 19 mai 2004, présenté pour M. Sylvain X, qui persiste dans ses conclusions, et fixe le montant des sommes demandées à 68.602 euros au titre de la réparation au préjudice financier, 15.245 euros au titre de la perte des points de retraite, et 7.622 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de la santé publique ;

Vu le code de commerce, notamment son article L.225-44 ;

Vu le décret n° 79-505 du 28 juin 1979 portant code de déontologie médicale ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 25 mai 2004 :

- le rapport de M. ZIMMERMANN, premier conseiller ;

- et les conclusions de M. BOCQUET, premier conseiller ;

Considérant que M. Sylvain X, actionnaire et président-directeur général d'une société anonyme gestionnaire de la maison de convalescence La Brise , à Grasse, a demandé, par lettre du 13 décembre 1989, au conseil départemental de l'ordre des médecins des Alpes-Maritimes de lui faire connaître les modalités pratiques et l'éventuel contrat proposé par l'ordre pour reprendre, au sein de cette maison de convalescence, une activité médicale comme médecin salarié ; que le conseil départemental de l'ordre a répondu en février 1990 qu'il ne paraissait pas possible d'avoir une double activité, d'une part commerciale en tant que P.D.G. de la S.A. La Brise , d'autre part médicale en tant que salarié de cette société, même si cette activité, comme le disait l'intéressé, devait rester très secondaire ; que le conseil national de l'ordre des médecins a, par décision du 27 octobre 1990, rejeté le recours hiérarchique de M. X formé contre cet avis, au motif que le cumul de deux activités au sein de la société anonyme serait contraire au principe affirmé par l'article 10 du code de déontologie selon lequel le médecin ne peut aliéner son indépendance sous quelque forme que ce soit ; que, par arrêt du 13 mai 1994, le conseil d'Etat statuant au contentieux a annulé la décision du 27 octobre 1990 du conseil national de l'ordre des médecins ; que, par une nouvelle décision en date du 24 juin 1994, le conseil national de l'ordre des médecins a annulé l'avis du 14 février 1990 du conseil départemental des Alpes-Maritimes ; que M. X a demandé au conseil départemental des Alpes-Maritimes et au conseil national de l'ordre des médecins l'indemnisation du préjudice résultant, selon lui, de l'illégalité des avis du conseil départemental et de la décision du conseil national de l'ordre ; qu'il fait appel du jugement par lequel le Tribunal administratif Nice a rejeté sa demande ;

Considérant que, si le fait de prendre une décision illégale ou de fournir des renseignements erronés est de nature à engager la responsabilité de l'autorité administrative qui a commis une telle erreur, la personne responsable ne peut être condamnée qu'à réparer le préjudice qui en est la conséquence directe et certaine ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que M. X, qui avait été pendant vingt-cinq ans président-directeur général d'une clinique, rémunéré à ce titre, et chirurgien dans cette même clinique, percevant à ce titre des honoraires, avant de prendre en 1989 sa retraite de l'exercice libéral de la médecine, et d'acquérir les actions de la S.A. La Brise, se borne à soutenir, pour établir l'existence et le montant du préjudice dont il demande réparation, que seuls les avis défavorables des conseils de l'ordre l'ont empêché de reprendre une activité salariée et qu'il lui aurait été possible pour exercer une activité médicale salariée de démissionner de ses fonctions de président-directeur général de la société anonyme, ou, pour cumuler les fonctions d'administrateur et de salarié de l'entreprise, nonobstant les dispositions des articles 93 et 107 de la loi n° 66-537 du 24 juillet 1996 alors en vigueur, de transformer la société anonyme en société à responsabilité limitée, ou en société d'exercice libéral ; qu'il n'établit cependant pas, ni même n'allègue, que l'une de ces solutions aurait été pour lui plus avantageuse que l'exercice de la seule fonction de président-directeur général de la société anonyme ; qu'il n'établit pas davantage, alors qu'il ne conteste ni que la société anonyme salariait déjà des médecins, ni qu'il n'aurait pu exercer la fonction de médecin salarié qu'à temps partiel, que l'exercice d'une activité salariée dans la maison de convalescence lui aurait procuré des ressources supplémentaires par rapport à celles que lui procurait sa situation d'actionnaire et de président-directeur général de la société, ou aurait pu lui permettre de majorer ses droits à pension de retraite ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. X n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Nice a rejeté sa requête tendant à la condamnation du conseil départemental et du conseil national de l'ordre des médecins à l'indemniser du préjudice invoqué ;

Sur l'application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que le conseil départemental des Alpes-Maritimes, et le conseil national de l'ordre des médecins, qui ne sont pas, dans la présente instance, la partie perdante, soient condamnés à verser à M. X la somme qu'il demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de condamner M. X à verser cinq cents euros au conseil national de l'ordre des médecins, et autant au conseil départemental des Alpes-Maritimes de l'ordre des médecins ;

DECIDE :

Article 1er : La requête susvisée de M. X est rejetée.

Article 2 : M. Sylvain X versera une somme de 500 (cinq cents) euros au conseil départemental de l'ordre des médecins des Alpes-Maritimes et une somme de 500 euros au conseil national de l'ordre des médecins.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. Sylvain X, au conseil national de l'ordre des médecins, au conseil départemental de l'ordre des médecins des Alpes-Maritimes et au ministre de la santé et de la protection sociale.

Délibéré à l'issue de l'audience du 25 mai 2004, où siégeaient :

M. LAPORTE, président de chambre,

Mme LORANT, présidente assesseur,

M. ZIMMERMANN, premier conseiller,

assistés de Mme LOMBARD, greffier ;

Prononcé à Marseille, en audience publique le 8 juin 2004.

Le président, Le rapporteur,

Signé Signé

Guy LAPORTE Franck ZIMMERMANN

Le greffier,

Signé

Marie-Claire LOMBARD

La République mande et ordonne au ministre de la santé et de la protection sociale en ce qui le concerne et à tous les huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

Le greffier,

Classement CNIJ : 60-04-01-02-01

C

2

N° 00MA00569


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 2eme chambre - formation a 3
Numéro d'arrêt : 00MA00569
Date de la décision : 08/06/2004
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. LAPORTE
Rapporteur ?: M. Franck ZIMMERMANN
Rapporteur public ?: M. BOCQUET
Avocat(s) : BIZET ET ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2004-06-08;00ma00569 ?
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