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23/11/2004 | FRANCE | N°00MA00717

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 4eme chambre-formation a 3, 23 novembre 2004, 00MA00717


Vu I, la requête, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille le 7 avril 2000, sous le n° 00MA00717, présentée pour Mme A... , épouse , élisant domicile ...), par Me B..., avocat au barreau de Nice ; Mme demande à la Cour :

1') d'annuler le jugement n° 95-372 en date du 9 décembre 1999 par lequel le Tribunal administratif de Nice a rejeté sa requête tendant à la décharge de la cotisation d'impôt sur le revenu établie à son nom au titre de l'année 1991 sous l'article 80005 ;

2'' de lui accorder la décharge de la cotisation litigieuse ;



3°) de condamner le directeur des services fiscaux à lui verser une indemnit...

Vu I, la requête, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille le 7 avril 2000, sous le n° 00MA00717, présentée pour Mme A... , épouse , élisant domicile ...), par Me B..., avocat au barreau de Nice ; Mme demande à la Cour :

1') d'annuler le jugement n° 95-372 en date du 9 décembre 1999 par lequel le Tribunal administratif de Nice a rejeté sa requête tendant à la décharge de la cotisation d'impôt sur le revenu établie à son nom au titre de l'année 1991 sous l'article 80005 ;

2'' de lui accorder la décharge de la cotisation litigieuse ;

3°) de condamner le directeur des services fiscaux à lui verser une indemnité de 100.000 F au titre de l'article L.8-1du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;

..............................

Vu II, la requête enregistrée au greffe le 25 mai 2000 sous le n° 00MA01117, présentée pour Mme A... par Me B... par laquelle Mme demande le sursis à exécution du jugement du tribunal administratif en date du 9 décembre 1999 susvisé par les moyens que le paiement des impositions contestées entraînerait pour elle des conséquences difficilement réparables et que les moyens invoqués à l'appui de sa demande principale d'annulation sont sérieux ; elle demande également la condamnation de l'Etat à lui payer la somme de 10.000 F au titre des frais irrépétibles ;

................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts ensemble le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 19 octobre 2004,

- le rapport de M. Duchon-Doris, rapporteur ;

- les observations de Me X..., substituant Me Y... pour Mme ;

- et les conclusions de M. BONNET, commissaire du gouvernement ;

Sur la jonction :

Considérant que les requêtes susvisées présentées par le même contribuable et dirigées contre le même jugement ont fait l'objet d'une instruction commune ; qu'il y a lieu de les joindre afin qu'il y soit statué par un même arrêt ;

Considérant que pour demander le sursis à l'exécution et l'annulation du jugement du tribunal administratif en date du 9 décembre 1999 qui a rejeté sa demande en décharge de la cotisation d'impôt sur le revenu établie à son nom au titre de l'année 1991 sous l'article 80005, Mme soutient d'une part que le jugement est irrégulier pour s'être fondé à tort sur la non-production de certaines pièces, d'autre part qu'elle apporte la preuve de l'exagération de l'imposition mise à sa charge ;

Sur la régularité du jugement :

Considérant d'une part qu'aux termes de l'article R.611-10 du code de justice administrative : Sous l'autorité du président de la formation de jugement à laquelle il appartient, le rapporteur fixe, eu égard aux circonstances de l'affaire, le délai accordé aux parties pour produire leurs mémoires. Il peut demander aux parties, pour être jointes à la procédure contradictoire, toutes pièces ou tous documents utiles à la solution du litige ; d'autre part qu'aux termes de l'article L.193 du livre des procédures fiscales : Dans tous les cas où une imposition a été établie d'office, la charge de la preuve incombe au contribuable qui demande la décharge ou la réduction de l'imposition et qu'aux termes de l'article R.193-1 du même livre : Dans tous les cas prévus à l'article L. 193 le contribuable peut obtenir la décharge ou la réduction de l'imposition mise à sa charge en démontrant son caractère exagéré ;

Considérant que Mme soutient que le jugement attaqué serait irrégulier dès lors que les premiers juges auraient assis leur décision sur le constat de la non-production au dossier du contrat de prêt en date du 9 août 1991 et de la reconnaissance de dette du

15 juillet 1991 dont elle se prévalait, sans demander au préalable le dépôt de ces pièces ; qu'il résulte toutefois des dispositions précitées de l'article R.611-10 du code de justice administrative que la demande de production de pièces utiles à la solution du litige constitue une simple faculté pour le juge ; qu'il appartenait à Mme qui ne conteste pas avoir été régulièrement taxée d'office sur le fondement des dispositions combinées des articles L.66-1 et L.67 du livre des procédures fiscales et supportait en conséquence, sur le fondement des dispositions précitées des articles L.193 et R.193-1 du même livre, la charge de la preuve de l'exagération des impositions, de fournir spontanément au juge tous éléments de nature à étayer ses conclusions et ses moyens ; qu'en relevant que le tribunal ne dispose d'aucun renseignement sur le contenu desdits documents qui n'ont pas été produits à l'instance et qui ne peuvent, dès lors, justifier les allégations de la requérante , les premiers juges n'ont méconnu aucune règle de procédure contentieuse ni porté atteinte au principe du contradictoire ; que par suite, Mme n'est pas fondée à soutenir que le jugement encourt, pour ce motif, l'annulation ;

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

Considérant, en premier lieu, que Mme ne conteste pas en appel que, par application des dispositions des articles 170 et 170 bis du code général des impôts, elle était tenue au titre de l'année 1991 au dépôt d'une déclaration de revenus et qu'elle n'a pas souscrit ladite déclaration dans les trente jours des mises en demeure qui lui ont été adressées les

17 décembre 1992 et 12 mars 1993 ; que par suite, c'est à bon droit qu'elle a été imposée d'office à l'impôt sur le revenu de l'année 1991, sur le fondement combiné des articles L.66-1 et L.67 du livre des procédures fiscales, sans que puisse y faire obstacle la circonstance qu'elle ait remis à l'administration fiscale le 10 juin 1993 sa déclaration fiscale de 1991 ;

Considérant, en second lieu, qu'en cas de taxation d'office fondée sur les dispositions de l'article L.66-1 du livre des procédures fiscales, l'administration n'est pas tenue, lorsque l'origine des revenus n'est pas identifiée, de rattacher à une catégorie particulière de revenus les sommes qu'elle retient comme base d'imposition ; qu'eu égard aux éléments incomplets fournis au service par Mme et du dépôt tardif de sa déclaration, laquelle au demeurant ne permettait pas d'identifier l'origine des sommes que l'administration entendait imposer à l'impôt sur le revenu, c'est à bon droit que l'administration a procédé à la taxation d'office desdites sommes dans la catégorie des revenus d'origine indéterminée ; que par suite,

Mme n'est pas fondée à soutenir tant sur le terrain de la loi fiscale que sur le terrain de la doctrine qu'elle invoque et qui ne rajoute rien à la loi, qu'à défaut de rattacher les sommes en cause à une catégorie particulière de revenus, l'administration aurait commis une irrégularité ou un détournement de procédure ; que par suite son argumentation sur ce point doit être rejetée ;

Sur le bien-fondé des impositions :

Considérant qu'ainsi qu'il a été dit ci-dessus Mme a été régulièrement imposée d'office, sur un montant de revenus d'origine inexpliquée de 5.818.000 F correspondant d'une part, à concurrence de 4.324.255 F, aux fonds ayant permis à l'intéressée de procéder, en 1991, à l'acquisition de propriétés immobilières et de véhicules de tourisme, d'autre part, pour un total de 1.493.745 F à diverses sommes inscrites, en juin 1991, au crédit du compte ouvert à son nom au Crédit Foncier de Monaco ; que, par application des dispositions précitées des articles L.193 et R.193-1 du même livre, il lui appartient d'apporter la preuve du caractère exagéré de l'imposition mises à sa charge au titre de l'année 1991 ;

Considérant, en premier lieu, que pour apporter la preuve de l'origine des fonds lui ayant permis d'acquérir un bien immobilier sis ...,

Mme soutient qu'elle a bénéficié d'un prêt qui lui a été consenti par M. Y pour un montant de 1.418.000 F versés en deux chèques sur la Barclay's Bank de Monaco ; qu'elle produit à cet effet une reconnaissance de dette signée par elle le 15 juillet 1991, soumise à la formalité de l'enregistrement le 18 juillet 1991 et qui fait expressément référence aux modalités de versement par chèques de la somme empruntée ; qu'il résulte par ailleurs des pièces du dossier que les deux chèques dont s'agit de 130.000 F et de 1.288.000 F, signés par M. Y les 4 et 15 juillet 1991 ont été remis au notaire dans le cadre de l'acquisition dont s'agit ; que dans ces circonstances, Mme doit être regardée comme apportant la preuve qu'à hauteur de la somme mentionnée dans l'acte de 1.418.000 F les fonds lui ayant permis d'acquérir le bien immobilier rue de la Colle revêtent le caractère d'un prêt et ne peuvent dès lors être retenus au titre de revenus d'origine indéterminée dans les bases de la taxation d'office de l'année 1991 ;

Considérant, en deuxième lieu, que pour apporter la preuve de ce que les fonds lui ayant permis d'acquérir les autres biens relevés par l'administration revêtent également le caractère d'un prêt consenti par M. Y, Mme produit un contrat de prêt en date du 9 août 1991 ; qu'il résulte toutefois de l'examen de ce document qu'il a été établi sous seing privé sans être soumis à la formalité de l'enregistrement et, dès lors, est dépourvu de valeur probante ; que si la requérante produit par ailleurs d'une part plusieurs reçus de

M. Y du 16 décembre 1993 pour 800.000 F, du 2 février 1994 pour 200.000 F, du

2 mars 1994 pour 900.000 F, du 16 mai 1994 pour 300.000 F et du 17 décembre 1994 pour 2.000.000 F, d'autre part un bordereau de retrait de 2.000.000 F en espèces effectué le

16 décembre 1993, une attestation de la Société Générale de Monaco du 20 octobre 1994 certifiant que M. a retiré en espèces 3.430.005 F du 24 décembre 1992 au

17 octobre 1994, enfin une correspondance de la BNP à Monaco du 27 octobre 1997 précisant que le montant des retraits pour la période du 29 mai 1992 au 13 mai 1995 sur un compte

n° 03312412 s'élève à 1.266.100 F, ces éléments, ainsi que l'ont relevé les premiers juges, s'ils sont de nature à établir que d'importantes relations financières existaient à l'époque entre

M. Y, M. et Mme ne peuvent, en tout état de cause, être regardés comme de nature à apporter la preuve de ce que les chèques signés par M. Y et remis en règlement des acquisitions effectuées par Mme au cours de l'année 1991, correspondaient, hormis le cas susmentionné du bien immobilier sis ..., à un prêt consenti à Mme ;

Considérant, en troisième lieu, que si Mme fait valoir que les liquidités versées sur son compte au Crédit Foncier de Monaco pour un montant de 1.493.745 F proviennent de virements bancaires à partir du compte de M. Y et produit à cet effet plusieurs virements bancaires mentionnant le versement d'une somme totale de 1.490.315,06 F, cette circonstance, à la supposer totalement établie, n'est pas de nature à démontrer, comme Mme en a la charge, la nature des sommes en cause ; que par suite, elle n'est pas fondée à contester la prise en compte, en tant que revenus d'origine indéterminée, de la somme dont s'agit dans les bases de la taxation d'office de l'année 1991 ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme est seulement fondée à demander l'annulation du jugement du Tribunal administratif de Nice susvisé en tant qu'il n'a pas fait droit à son argumentation relative à la somme de 1.418.000 F mentionnée dans la reconnaissance de dette du 15 juillet 1991 ;

Sur les conclusions relatives au versement de frais irrépétibles :

Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu, par application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative, de condamner l'Etat à payer à Mme la somme de 1.000 euros au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

Par ces motifs,

DECIDE :

Article 1er : La base de l'impôt sur le revenu assignée à Mme A... au titre de l'année 1991 est réduite de la somme de 1.418.000 F (un million quatre cent dix-huit mille francs), soit 216.172,71 euros (deux cent seize mille cent soixante-douze euros et soixante et onze centimes).

Article 2 : Mme A... est déchargée des droits et pénalités correspondant à la réduction de base d'imposition définie à l'article 1er.

Article 3 : Le jugement du Tribunal administratif de Nice du 9 décembre 1999 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 4 : L'Etat est condamné à payer à Z... Nicole la somme de 1.000 euros (mille euros) au titre des frais irrépétibles.

Article 5 : Le surplus des conclusions des requêtes de Mme A... est rejeté.

Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... et au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

N° 00MA00717, 00MA01117 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 4eme chambre-formation a 3
Numéro d'arrêt : 00MA00717
Date de la décision : 23/11/2004
Sens de l'arrêt : Satisfaction partielle
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Autres

Composition du Tribunal
Président : M. RICHER
Rapporteur ?: M. Jean-Christophe DUCHON-DORIS
Rapporteur public ?: M. BONNET
Avocat(s) : SOULEM

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2004-11-23;00ma00717 ?
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