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27/01/2005 | FRANCE | N°00MA02734

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 1ère chambre - formation à 3, 27 janvier 2005, 00MA02734


Vu la requête, enregistrée le 8 décembre 2000 présentée pour la commune de MONTBRUN - DES - CORBIERES, représentée par son maire en exercice à ce dûment habilité par délibération en date du 20 octobre 2000, par le S.C.P Pech de Laclause - Goni - Guillemin, avocats,

La commune de MONTBRUN - DES - CORBIERES demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 98-4427 / 98-4428 / 98-4696 / 98-4699 / 00-1531 / 00-1533 en date du 5 octobre 2000 par lequel le Tribunal administratif de Montpellier a rejeté ses demandes dirigées contre les arrêtés en date du 4 septembre 1

998 par lesquels le préfet de l'Aude a délivré à la société Jeumont industrie ...

Vu la requête, enregistrée le 8 décembre 2000 présentée pour la commune de MONTBRUN - DES - CORBIERES, représentée par son maire en exercice à ce dûment habilité par délibération en date du 20 octobre 2000, par le S.C.P Pech de Laclause - Goni - Guillemin, avocats,

La commune de MONTBRUN - DES - CORBIERES demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 98-4427 / 98-4428 / 98-4696 / 98-4699 / 00-1531 / 00-1533 en date du 5 octobre 2000 par lequel le Tribunal administratif de Montpellier a rejeté ses demandes dirigées contre les arrêtés en date du 4 septembre 1998 par lesquels le préfet de l'Aude a délivré à la société Jeumont industrie deux permis de construire en vue d'édifier deux centrales éoliennes, d'une part, sur le territoire de la commune d'Escales au lieu dit « La Garrigue » et, d'autre part, sur le territoire de la commune de Conilhac-Corbières au lieu dit «Marrou » ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, lesdites décisions;

3°) de condamner la société Jeumont industrie à lui verser la somme de 12 000 francs au titre de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel;

…………………

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de l'environnement ;

Vu le code de l'urbanisme ;

Vu le décret n°77-1141 du 12 octobre 1977 ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 13 janvier 2005,

- le rapport de M. Laffet, rapporteur ;

- les observations de Me Begue de la SCP Pech de Laclause-Goni-Guillemin pour la COMMUNE DE MONTBRUN ;

- les observations de Me Marty pour la société Jeumont industrie ;

et les conclusions de M. Cherrier, commissaire du gouvernement ;

Considérant que, par jugement en date du 5 octobre 2000, le Tribunal administratif de Montpellier a rejeté les demandes présentées par la commune de MONTBRUN - DES - CORBIERES dirigées contre les arrêtés en date du 4 septembre 1998 par lesquels le préfet de l'Aude a délivré à la société Jeumont industrie deux permis de construire en vue de réaliser une centrale éolienne située sur les territoires respectifs des communes d'Escales et de Conilhac-Corbières ; que la commune de MONTBRUN - DES - CORBIERES relève appel de ce jugement ;

Sur la fin de non recevoir opposée à la requête d'appel par le ministre de l'équipement, des transports et du logement :

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que la commune de MONTBRUN - DES - CORBIERES a régulièrement notifié sa requête d'appel, enregistrée au greffe de la cour administrative d'appel le 8 décembre 2000, au préfet de l'Aude, auteur des permis de construire attaqués et à la société Jeumont industrie, pétitionnaire, par courriers recommandés avec avis de réception postal déposés le 7 décembre 2000 ; qu'elle s'est donc soumise aux formalités de notification du recours exigées par l'article L.600-3 du code de l'urbanisme, alors applicable ; que la fin de non-recevoir opposée par le ministre doit, en conséquence, être écartée ;

Sur les fins de non-recevoir opposées aux demandes de première instance par la société Jeumont industrie :

Considérant, d'une part, que la société Jeumont industrie conteste l'intérêt à agir de la commune de MONTBRUN - DES - CORBIERES ; que, cependant, si le projet de ferme éolienne est situé en dehors du territoire communal de MONTBRUN - DES - CORBIERES, il se trouve à équidistance des villages d'Escales, de Conilhac-Corbières et de MONTBRUN-DES-CORBIERES alors qu'il ressort de la notice paysagère annexée aux demandes de permis de construire qu'il est visible depuis cette dernière commune ; qu'ainsi, la commune de MONTBRUN - DES - CORBIERES a intérêt à demander l'annulation de ces permis de construire ;

Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'article L.600-3 du code de l'urbanisme, en vigueur à la date de l'introduction des demandes de première instance : « En cas de déféré du préfet ou de recours contentieux à l'encontre d'un document d'urbanisme ou d'une décision relative à l'occupation ou l'utilisation du sol régie par le présent code, le préfet ou l'auteur du recours est tenu, à peine d'irrecevabilité, de notifier son recours à l'auteur de la décision et, s'il y a lieu au titulaire de l'autorisation (…).- La notification prévue au précédent alinéa doit intervenir par lettre recommandée avec accusé de réception, dans un délai de quinze jours francs, à compter du dépôt du déféré ou du recours (…) ; qu'il ressort des pièces du dossier que la commune de MONTBRUN - DES - CORBIERES a procédé à la notification prévue par ces dispositions, le 12 novembre 1998, tant en ce qui concerne la demande dirigée contre le permis de construire délivré sur la commune d'Escales, enregistrée au greffe du tribunal administratif de Montpellier le 16 novembre 1998 que pour ce qui est de la demande dirigée contre le permis de construire délivré sur la commune de Conilhac, enregistrée au greffe de cette même juridiction le 17 novembre 1998 ; qu'ainsi, alors même que la notification de ces demandes a été adressée au préfet de l'Aude et à la société Jeumont industrie avant l'enregistrement de celle-ci au greffe du tribunal, la société Jeumont industrie n'est pas fondée à soutenir que la commune de MONTBRUN - DES - CORBIERES a méconnu les dispositions précitées et que, par suite, ces demandes seraient irrecevables ;

Considérant, enfin, qu'aux termes de l'article R.421-39 du code de l'urbanisme : « Mention du permis de construire doit être affichée sur le terrain de manière visible de l'extérieur, par les soins de son bénéficiaire, dès la notification de la décision d'octroi et pendant toute la durée du chantier (…) - En outre, dans les huit jours de la délivrance expresse ou tacite du permis de construire, un extrait du permis (…) est publié par voie d'affichage à la mairie pendant deux mois » ;qu'aux termes de l'article R.490-7 du code de l'urbanisme : « Le délai de recours contentieux à l'encontre d'un permis de construire court à l'égard des tiers à compter de la plus tardive des deux dates suivantes :

a) le premier jour d'une période continue de deux mois d'affichage sur le terrain des pièces mentionnées, selon le cas, au premier ou au deuxième alinéa de l'article R.421-39 ; b) le premier jour d'une période continue d'affichage en mairie des pièces mentionnées au troisième alinéa de l'article R.421-39» ;

Considérant qu'il résulte du constat dressé par un huissier de justice et des clichés photographiques qui y sont annexés que ces deux permis de construire ont fait l'objet d'un affichage sur le terrain au plus tard le 11 septembre 1998, date de ce constat, indiquant notamment la nature des travaux, la superficie du terrain et celle du plancher, la hauteur des éoliennes et les mairies où les dossiers des permis de construire avaient été déposés ; que, toutefois, la commune de MONTBRUN -DES-CORBIERES a produit six attestations émanant de riverains précisant que les panneaux réglementaires n'étaient pas visibles depuis la voie publique ; qu'en outre, il n'est pas établi, comme le soutient la commune requérante, que l'affichage ait été continu pendant une période de deux mois ; qu'ainsi, la société Jeumont industrie ne rapporte pas la preuve, qui lui incombe, que la publicité de ces permis de construire a été régulière au regard des dispositions sus-rappelées des articles R.421-39 et R.490-7 du code de l'urbanisme ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la société Jeumont industrie n'est pas fondée à soutenir que les demandes formées devant le tribunal administratif de Montpellier par la commune de MONTBRUN-DES-CORBIERES étaient irrecevables ;

Sur la légalité des permis de construire attaqués :

Considérant qu'aux termes de l'article 2 du décret du 12 octobre 1977 : « Le contenu de l'étude d'impact doit être en relation avec l'importance des travaux et aménagements projetés et avec leurs incidences prévisibles sur l'environnement.- L'étude d'impact présente successivement : (…)4°) les mesures envisagées par le maître de l'ouvrage ou le pétitionnaire pour supprimer, réduire et, si possible, compenser les conséquences dommageables du projet sur l'environnement, ainsi que l'estimation des dépenses correspondantes ; 5°) une analyse des méthodes utilisées pour évaluer les effets du projet sur l' environnement mentionnant les difficultés éventuelles de nature technique ou scientifique rencontrées pour établir cette évaluation. - Afin de faciliter la prise de connaissance par le public des informations contenues dans l'étude, celle-ci fera l'objet d'un résumé non technique » ;

Considérant, d'une part, que l'étude d'impact présentée par la société Jeumont industrie au mois de mars 1998 à l'appui de ces demandes de permis de construire en vue de réaliser une centrale éolienne avec raccordement au réseau 63 kV sur le territoire des communes d'Escales et de Conilhac-Corbières ne comporte pas l'analyse des méthodes utilisées pour évaluer les effets du projet sur l'environnement, comme le prévoient les dispositions du 5°) de l'article 2 du décret du 12 octobre 1977 ; que cette étude se limite, en effet, sur ce point, à faire état en quelques lignes dans d'autres chapitres des expériences issues de la mise en oeuvre de projets de même nature à l'étranger ou sur le territoire national sans les mettre en corrélation avec la réalité du projet en cause ; que, d'autre part, si conformément aux dispositions du 4°) de l'article 2 de ce même décret, l'étude d'impact comprend un chapitre sur les mesures compensatoires destinées à minimiser les impacts négatifs du projet sur le milieu physique, le milieu humain, le milieu naturel et les paysages, elle ne comporte aucune estimation des dépenses correspondantes ;

Considérant que, compte tenu de l'importance et en particulier de la hauteur des constructions projetées et donc de leur incidence directe sur les paysages et l' environnement, ces insuffisances revêtent un caractère substantiel ; que, dès lors, l'étude d'impact ne peut être regardée comme satisfaisant aux conditions posées par les dispositions réglementaires précitées ; que l'insuffisance de cette étude, est en conséquence, de nature à vicier la légalité des permis de construire délivrés par le préfet de l'Aude, le 4 septembre 1998, à la société Jeumont industrie ; que, par suite, la commune de MONTBRUN-DES-CORBIERES est fondée à soutenir que lesdits permis sont entachés d'illégalité ;

Considérant qu'aucun autre moyen, en l'état du dossier soumis à la cour, n'est de nature à entraîner l'annulation de ces permis de construire ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la commune de MONTBRUN-DES-CORBIERES est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Montpellier a rejeté ses demandes dirigées contre les arrêtés en date du

4 septembre 1998 par lesquels le préfet de l'Aude a délivré à la société Jeumont industrie deux permis de construire en vue de réaliser une centrale éolienne sur le territoire des communes d'Escales et de Conilhac-Corbières ; que, dès lors, ledit jugement et lesdits permis de construire doivent être annulés ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'en application de l'article L.761-1 du code de justice administrative, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de condamner la société Jeumont industrie à payer à la commune de MONTBRUN-DES-CORBIERES une somme de 1000 euros au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

Considérant, en revanche, que ces mêmes dispositions font obstacle à ce que la commune de MONTBRUN-DES-CORBIERES, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, soit condamnée à payer à la société Jeumont industrie la somme qu'elle demande au titre des frais de même nature qu'elle a exposés ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement n° 98-4427/98-4428/98-4696/98-4699/00-1531/00-1533 en date du 5 octobre 2000 du Tribunal administratif de Montpellier est annulé.

Article 2 : Les arrêtés en date du 4 septembre 1998 par lesquels le préfet de l'Aude a délivré deux permis de construire à la société Jeumont industrie en vue de réaliser une centrale éolienne sur le territoire des communes d'Escales et de Conilhac-Cobières sont annulés.

Article3 : La société Jeumont industrie versera à la commune de MONTBRUN-DES-CORBIERES une somme de 1000 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Les conclusions de la société Jeumont industrie tendant à l'application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 5 :Le présent arrêt sera notifié à la commune de MONTBRUN-DES-CORBIERES, à là Société Jeumont industrie et au ministre de l'équipement, des transports, de l'aménagement du territoire, du tourisme et de la mer.

Copie en sera adressée au préfet de l'Aude et au procureur de la République près le tribunal de grande instance de Narbonne.

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N° 00MA02734

dd


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 00MA02734
Date de la décision : 27/01/2005
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. ROUSTAN
Rapporteur ?: M. Bernard LAFFET
Rapporteur public ?: M. CHERRIER
Avocat(s) : SCP PECH DE LA CLAUSE GONI GUILLEMIN

Origine de la décision
Date de l'import : 05/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2005-01-27;00ma02734 ?
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