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12/05/2005 | FRANCE | N°02MA01068

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 3eme chambre - formation a 3, 12 mai 2005, 02MA01068


Vu la requête, enregistrée le 7 juin 2002, présentée pour l'ETABLISSEMENT FRANÇAIS DU SANG, dont le siège est ..., par Me X... ; l'ETABLISSEMENT FRANÇAIS DU SANG demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 9801145 en date du 20 mars 2002, par lequel le Tribunal administratif de Montpellier l'a condamné à payer à MM. Christophe et Sébastien C... la somme de 30 500 euros en réparation du préjudice subi par M. Patrice C... né de la contamination par le virus de l'hépatite C à l'occasion d'une intervention chirurgicale pratiquée au centre hospitalier de Nîmes ;


2°) à titre principal, de rejeter la demande présentée par les consorts C......

Vu la requête, enregistrée le 7 juin 2002, présentée pour l'ETABLISSEMENT FRANÇAIS DU SANG, dont le siège est ..., par Me X... ; l'ETABLISSEMENT FRANÇAIS DU SANG demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 9801145 en date du 20 mars 2002, par lequel le Tribunal administratif de Montpellier l'a condamné à payer à MM. Christophe et Sébastien C... la somme de 30 500 euros en réparation du préjudice subi par M. Patrice C... né de la contamination par le virus de l'hépatite C à l'occasion d'une intervention chirurgicale pratiquée au centre hospitalier de Nîmes ;

2°) à titre principal, de rejeter la demande présentée par les consorts C... et de les condamner à lui rembourser les fonds versés en exécution du jugement entrepris, et à titre subsidiaire, réduire l'indemnisation octroyée par les premiers juges ;

3°) de condamner les consorts C... aux entiers dépens et à lui payer la somme de 3 050 euros au titre des frais d'instance ;

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Vu la loi n° 2002-303 du 4 mars 2002 ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 7 avril 2005,

- le rapport de Mme Massé-Degois, rapporteur ;

- les observations de Me Z..., substituant Me Le Prado pour le centre hospitalier de Nîmes ;

- et les conclusions de M. Trottier, commissaire du gouvernement ;

Considérant que le Tribunal administratif de Montpellier a condamné l'ETABLISSEMENT FRANÇAIS DU SANG, venant aux droits du centre départemental de transfusion sanguine du Gard, à verser aux héritiers de M. B... une somme de 30 500 euros en raison des dommages subis par ce dernier du fait de sa contamination par le virus de l'hépatite C lors d'une intervention chirurgicale subie au centre hospitalier de Nîmes le 26 mars 1991 ; que l'ETABLISSEMENT FRANÇAIS DU SANG interjette appel de ce jugement ;

Sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir opposée par l'ETABLISSEMENT FRANÇAIS DU SANG :

Sur la responsabilité :

Considérant qu'aux termes de l'article 102 de la loi susvisée du 4 mars 2002 : « En cas de contestation relative à l'imputabilité d'une contamination par le virus de l'hépatite C antérieure à la date d'entrée en vigueur de la présente loi, le demandeur apporte des éléments qui permettent de présumer que cette contamination a pour origine une transfusion de produits sanguins labiles ou une injection de médicaments dérivés du sang. Au vu de ces éléments, il incombe à la partie défenderesse de prouver que cette transfusion ou cette injection n'est pas à l'origine de la contamination. Le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles. Le doute profite au demandeur. Cette disposition est applicable aux instances en cours n'ayant pas donné lieu à une décision irrévocable. » ;

Considérant qu'il résulte de ces dispositions qu'il appartient au demandeur, non pas seulement de faire état d'une éventualité selon laquelle sa contamination par le virus de l'hépatite C provient d'une transfusion, mais d'apporter un faisceau d'éléments conférant à cette hypothèse, compte tenu de toutes les données disponibles, un degré suffisamment élevé de vraisemblance ; que si tel est le cas, la charge de la preuve contraire repose sur le défendeur ; que ce n'est qu'au stade où le juge, au vu des éléments produits successivement par ces parties, forme sa conviction que le doute profite au demandeur ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que M. Patrice C..., né en 1952, était atteint d'un syndrome de Gardner découvert à l'âge de 16 ans ; qu'il a subi une première intervention chirurgicale en 1968 pour ostéome de la mandibule et a été opéré le 12 juin 1980 à Montpellier d'une colectomie totale avec section de la dernière anse grêle pour une polypose diffuse au cours de laquelle il a été transfusé ; qu'il a également subi une dilatation cholédocienne en 1986 puis une duodéno-pancréatectomie céphalique en raison de nombreux polypes duodénaux en voie de dégénérescence le 26 mars 1991 au centre hospitalier de Nîmes ; qu'à l'occasion de ce dernier acte chirurgical, quatre poches de sang ont été commandées et livrées à l'hôpital ; que les éléments contenus dans le courrier daté du 5 août 1997 d'un médecin du centre hospitalier de Nîmes faisant état de ce que M. Patrice C... présentait un taux de transaminase élevé en août 1987 et que le résultat de la ponction biopsie du foie effectuée en novembre 1987 posait le diagnostic d'une « hépatite sub-aiguë non spécifique » ne se trouvent corroborés par aucune pièce médicale en raison de la perte du dossier par le centre hospitalier de M. C... pour la période 1987 à 1991 ; qu'en revanche, si la seule affirmation du caractère systématique, depuis le 1er mars 1990, du dépistage du virus de l'hépatite C ne suffit pas à établir l'innocuité des produits sanguins transfusés, l'établissement requérant produit cependant en appel les résultats des tests de dépistage des quatre lots sanguins n° 1010011, 0012482, 2010055 et 4010054 commandés par le centre hospitalier en vue de l'intervention chirurgicale de M. C... du 26 mars 1991 qui se sont révélés « négatif » ; qu'il résulte enfin du rapport d'expertise que M. Patrice C..., décédé le 4 décembre 2000, « était porteur d'une hépatite C qui a pu être transmise par des transfusions antérieures à celles de 1991 » et que cette hépatite C « n'est donc pas formellement imputable aux transfusions réalisées par le centre hospitalier de Nîmes lors de l'intervention de 1991 » ; qu'ainsi, et en admettant même que M. Patrice C... ait été transfusé à l'occasion de son intervention chirurgicale du 26 mars 1991 lors de son hospitalisation à Nîmes, celui-ci n'apporte cependant pas les éléments suffisants permettant de présumer l'imputabilité de sa contamination par le virus de l'hépatite C à ce geste transfusionnel compte-tenu de ses antécédents médicaux, des autres facteurs de risque et des résultats des tests de dépistage ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que l'ETABLISSEMENT FRANÇAIS DU SANG est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué le Tribunal administratif de Montpellier l'a déclaré responsable des conséquences dommageables de la contamination par le virus de l'hépatite C de M. Patrice C... ;

Sur l'appel incident de MM. C... :

Considérant que M. Christophe C... et M. Sébastien C... demandent, par la voie du recours incident, de condamner le centre hospitalier de Nîmes à leur verser la somme de 15 000 euros en réparation du dommage subi par M. Patrice C... du fait de la perte du dossier médical et de la non-information de sa séropositivité en 1992 ; que ces demandes, fondées sur une cause juridique distincte, sont présentées pour la première fois en appel ; que ces conclusions sont dès lors irrecevables et ne peuvent qu'être rejetées ;

Sur les frais d'expertise :

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'ETABLISSEMENT FRANÇAIS DU SANG les frais d'expertise qui s'élèvent à la somme de 457,35 euros ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'ETABLISSEMENT FRANÇAIS DU SANG, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, soit condamné à payer à M. Y... et M. Sébastien C... la somme de 3 050 euros qu'ils demandent au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

Considérant qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, en application des dispositions du même article L.761-1 du code de justice administrative, de condamner M. Christophe C... et M. Sébastien C... à payer à l'ETABLISSEMENT FRANÇAIS DU SANG la somme de 3 050 euros qu'il demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement n° 9801145 en date du 20 mars 2002 du Tribunal administratif de Montpellier est annulé.

Article 2 : Les frais d'expertise sont mis à la charge de l'ETABLISSEMENT FRANÇAIS DU SANG.

Article 3 : Les conclusions présentées en appel par M. Y... et M. Sébastien C... sont rejetées.

Article 4 : Les conclusions présentées par l'ETABLISSEMENT FRANÇAIS DU SANG sur le fondement des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à l'ETABLISSEMENT FRANÇAIS DU SANG, M. Christophe C..., à M. Sébastien C..., au Centre hospitalier régional de Nîmes, au ministre des solidarités, de la santé et de la famille et à la caisse primaire d'assurance maladie du Gard.

Copie en sera adressée à Me X..., à Me A..., à Me Le Prado, au préfet d'Ile-de-France, et au préfet de l'Hérault.

N° 0201068 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 3eme chambre - formation a 3
Numéro d'arrêt : 02MA01068
Date de la décision : 12/05/2005
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. DARRIEUTORT
Rapporteur ?: Mme Christine MASSE-DEGOIS
Rapporteur public ?: M. TROTTIER
Avocat(s) : SCP CHARRIERE BOURNAZEL - CHAMPETIER DE RIBES - SPITZER

Origine de la décision
Date de l'import : 05/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2005-05-12;02ma01068 ?
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