La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

18/11/2005 | FRANCE | N°01MA01483

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 6eme chambre - formation a 3, 18 novembre 2005, 01MA01483


Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 4 juillet 2001, présenté par la SOCIETE ANONYME COOPERATIVE DU NOUVEAU PORT DE PLAISANCE DE CAVALAIRE (S.A.C.N.P.P.C.), dont le siège social est bureau du port privé à Cavalaire-sur-mer (83240) ;

Elle demande à la Cour :

1) de réformer le jugement du 10 avril 2001 par lequel de Tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande tendant a) à l'annulation de l'avenant du 12 novembre 1985 au contrat de sous-traitance du 10 novembre 1972, b) à la condamnation de la commune de Cavalaire-sur-Mer à lui verser, avec les int

érêts au taux légal, la somme de 2.527.545,14 F en réparation du préjudi...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 4 juillet 2001, présenté par la SOCIETE ANONYME COOPERATIVE DU NOUVEAU PORT DE PLAISANCE DE CAVALAIRE (S.A.C.N.P.P.C.), dont le siège social est bureau du port privé à Cavalaire-sur-mer (83240) ;

Elle demande à la Cour :

1) de réformer le jugement du 10 avril 2001 par lequel de Tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande tendant a) à l'annulation de l'avenant du 12 novembre 1985 au contrat de sous-traitance du 10 novembre 1972, b) à la condamnation de la commune de Cavalaire-sur-Mer à lui verser, avec les intérêts au taux légal, la somme de 2.527.545,14 F en réparation du préjudice qu'elle estime avoir subi du fait des versements indus à ladite commune d'une redevance domaniale au titre des années 1984 à 1994 ;

2) d'annuler l'avenant susmentionné ;

3) de condamner la commune de Cavalaire-sur-mer à lui rembourser, avec les intérêts au taux légal à compter de leur paiement, les sommes indûment versées à compter de l'année 1984 en application de cet avenant et qui s'élèvent au montant total de 3.349.408, 74 francs au titre des années 1984 à 1997 ;

4) d'enjoindre à ladite commune d'exécuter la chose jugée dans le délai d'un an, sous astreinte de 10.000 francs par jour de retard à compter de l'expiration de ce délai ;

5) de condamner ladite commune à lui verser la somme de 70.000 francs au titre de ses frais exposés et non compris dans les dépens ;

……………….

………………..

…………………

Vu le jugement attaqué ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi n°83-663 complétant la loi n°83-8 du 7 janvier 1983 relative à la répartition des compétences entre les communes, les départements, les régions et l'Etat ;

Vu le décret n°84-941 du 24 octobre 1984 relatif à l'utilisation du domaine public portuaire mis à la disposition des départements et des communes ;

Vu le code du domaine de l'Etat ;

Vu le code des ports maritimes ;

Vu le code civil ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 17 octobre 2005 :

- le rapport de M. Brossier, premier conseiller,

- les observations de M. Y..., administrateur de la société appelante, et de Me X... pour la commune intimée,

- et les conclusions de M. Dubois, commissaire du gouvernement ;

Considérant que par arrêté interministériel du 29 novembre 1967, l'Etat a concédé à la commune de Cavalaire-sur-Mer une partie du domaine public maritime en vue de l'établissement et de l'exploitation d'un port de plaisance moyennant le paiement d'une redevance annuelle ; que ladite commune a sous-traité la construction et l'exploitation de l'extension du port de plaisance par une convention signée le 10 novembre 1972 avec la SOCIETE ANONYME COOPERATIVE DU NOUVEAU PORT DE PLAISANCE DE CAVALAIRE (S.A.C.N.P.P.C.) ; qu'en application des lois susvisées n°83-8 du 7 janvier 1983 et 83-663 du 22 juillet 1983, la gestion du port de plaisance a été transférée à la commune de Cavalaire-sur-Mer par arrêté préfectoral du 5 janvier 1984, avec mise à sa disposition gratuite des biens meubles et immeubles nécessaires à l'exercice des compétences transférées et appartenant au domaine public de l'Etat, par procès-verbal du 2 septembre 1985 ; qu'un avenant n°1 au sous-traité du 10 novembre 1972 a été signé le 12 novembre 1985 entre la commune de Cavalaire-sur-Mer et la société appelante, en vue de définir les nouvelles conditions d'application du sous-traité compte tenu des modification législatives et réglementaires intervenues dans le cadre des transferts de compétences susmentionnés ;

Sur les conclusions à fin d'annulation de l'avenant n°1 du 12 novembre 1985 :

Considérant que l'appelante invoque l'irrégularité du jugement attaqué au motif qu'elle n'aurait pas été avisée du moyen d'ordre public tiré de l'irrecevabilité de telles conclusions en annulation devant le juge du contrat, qui a été soulevé d'office et visé par les premiers juges ; qu'il ne résulte pas de l'instruction que l'appelante a reçu la lettre du 16 octobre 2000 l'informant que le Tribunal était susceptible de soulever un tel moyen ; que, dans ces conditions, la S.A.C.N.P.P.C. est fondée à demander l'annulation du jugement en tant qu'il rejette ses conclusions à fin d'annulation de l'avenant n°1 du 12 novembre 1985 ; qu'il y a lieu, pour la Cour, de procéder à l'évocation desdites conclusions en excès de pouvoir et d'y statuer ;

Considérant que le juge du contrat n'a pas compétence pour prononcer, à la demande de l'une des parties, l'annulation de mesures prises par l'autre partie et qu'il lui appartient seulement de rechercher si ces mesures sont intervenues dans des conditions de nature à ouvrir un droit à indemnité au profit de la requérante ; qu'il n'en va autrement que dans le cas où la décision attaquée a pour objet de mettre fin définitivement aux relations contractuelles ; qu'en l'espèce, l'avenant n°1 du 12 novembre 1985 avait seulement pour objet de modifier l'article 43 du contrat du 10 novembre 1972, en arrêtant les nouvelles modalités de fixation et de paiement de la redevance domaniale ; que, par suite, les conclusions à fin d'annulation de l'avenant n°1 du 12 novembre 1985 sont irrecevables et ne peuvent qu'être rejetées ;

Sur les conclusions susvisées à fin de remboursement et sans qu'il soit besoin de statuer sur leur recevabilité devant le juge d'appel en l'absence de ministère d'avocat :

Considérant que la commune de Cavalaire-sur-mer, titulaire d'une concession d'établissement et d'exploitation d'équipements portuaires en date du 28 novembre 1967, avait confié à la société appelante, par une convention du 10 novembre 1972, la sous-traitance de l'établissement et de l'exploitation du port de plaisance ; qu'ainsi l'appelante a bénéficié d'une autorisation d'occupation privative du domaine public portuaire de l'Etat concédé à la commune ; qu'en contrepartie, l'article 43 du sous-traité prévoyait, dans sa rédaction initiale, que la redevance domaniale due par la commune à l'Etat serait remboursée à la commune par la société bénéficiant de cette occupation privative ; qu'à la suite de l'intervention du législateur les 7 janvier et 22 juillet 1983, ainsi que des mesures d'application susmentionnées transférant à la commune de Cavalaire-sur-Mer la gestion du port de plaisance par une mise à disposition gratuite par l'Etat de son domaine public, l'avenant n°1 du 12 novembre 1985 a supprimé et remplacé cet article 43 ; qu'aux termes dudit article dans sa nouvelle rédaction : « La société devra verser chaque année à la ville une redevance domaniale nécessaire au financement des charges liées à l'exercice par la commune des compétences transférées par l'Etat aux collectivités locales en matière portuaire. Cette redevance est fixée ainsi qu'il suit (…) » ; que la S.A.C.N.P.P.C. a versé à la commune intimée, au titre de cette d'une redevance domaniale sur la période courant de 1984 à 1997, la somme totale de 3.349.408, 74 F dont elle demande le remboursement au motif de son caractère indû ; qu'elle ne soutient pas que la redevance en litige serait disproportionnée ou n'aurait pas été établie sur la seule base des places de la partie du port qui lui a été amodiée, mais conteste le principe même de l'application d'une telle redevance ;

En ce qui concerne les montants versés au titre des années 1984 et 1985 :

Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article 9 de la loi n° 83-663 du 20 juillet 1983 susvisée : « Les dépendances du domaine public visé à la présente section (maritime portuaire) sont mises à disposition des régions, départements ou communes (....) A compter de la date du transfert de compétence, la commune, le département ou la région sont substitués à l'Etat dans les droits et obligations à l'égard des tiers, afférent aux domaines et aux biens transférés (…) » ; que la fixation des redevances pour occupation du domaine public d'une personne morale de droit public fait partie des droits que celle-ci exerce en sa qualité de propriétaire ;

Considérant, d'autre part, qu'en matière d'occupation privative du domaine public par voie de concession, qui n'est pas gratuite, il appartient au juge administratif de substituer à une base légale erronée la base légale justifiant le versement d'une redevance ; qu'en l'espèce, les interventions législatives et réglementaires susmentionnées, transférant à la commune de Cavalaire-sur-Mer la gestion du port de plaisance par une mise à disposition gratuite par l'Etat de son domaine public, ont fait obstacle à la mise en oeuvre des stipulations de l'article 43 du sous-traité du 10 novembre 1972 dans leur rédaction antérieure à l'avenant n°1 du 12 novembre 1985 ; qu'en effet, et en application de l'article 9 précité de la loi n° 83-663 du 20 juillet 1983, la commune, substituée dans les droits et obligations de l'Etat, est devenue compétente pour fixer et recouvrer aux lieu et place de ce dernier la redevance d'occupation des dépendances du domaine public portuaire ; que s'avèrent, dans ces conditions, inopérantes les circonstances invoquées par l'appelante pour contester le principe même du paiement d'une redevance domaniale et qui sont tirées, d'une part, de ce qu'elle a obtenu une amodiation de longue durée d'une partie des installations portuaires, d'autre part, de ce que la commune ne verse plus de redevance à l'Etat ;

En ce qui concerne les redevances relatives aux années 1986 et suivantes :

Considérant, d'une part, que l'appelante invoque un vice du consentement qui entacherait de nullité l'avenant n°1 du 12 novembre 1985 et priverait ainsi de base légale les redevances qu'elle a versées en application de cet avenant ; qu'elle n'apporte toutefois aucun élément suffisamment sérieux de nature à établir cette allégation, alors même que ledit avenant a été appliqué sans contestation pendant plusieurs années ;

Considérant d'autre part que, contrairement à ce soutient l'appelante, la circonstance que la commune n'a plus versé à l'Etat de redevance domaniale à compter de la mise à disposition gratuite par ce dernier d'une partie de son domaine portuaire, ne rend pas illégal l'article 43 dans sa nouvelle rédaction ; que les droits acquis dont l'appelante se prévaut au titre de sa participation au financement de la construction d'extension du port ne s'opposent pas davantage à l'application entre les parties de l'avenant n°1 du 12 novembre 1985 ; qu'ainsi qu'il a été dit, la commune, substituée dans les droits et obligations de l'Etat, est devenue compétente pour fixer et recouvrer aux lieu et place de ce dernier la redevance d'occupation des dépendances du domaine public portuaire et qu'ainsi, les nouvelles stipulations de l'article 43 ne peuvent être regardées comme une base contractuelle erronée, nonobstant la circonstance que la requérante avait obtenu une amodiation de longue durée d'une partie des installations portuaires ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la société appelante n'est pas fondée à soutenir que les sommes qu'elle a versées jusqu'en 1997 à la commune intimée, au titre d'une redevance domaniale et en application des stipulations de l'article 43 précité dans sa rédaction issue de l'avenant n°1 du 12 novembre 1985, auraient été indûment payées pour défaut de base légale, sans qu'il soit besoin d'examiner l'exception de prescription quadriennale soulevée par la commune intimée ; qu'il s'ensuit que la société appelante n'est pas fondée à se plaindre que les premiers juges ont rejeté ses conclusions susanalysées à fin de remboursement ;

Considérant que les conclusions de l'appelante à fin d'injonction doivent être rejetées par voie de conséquence ;

Sur les conclusions à fin de sursis à exécution du jugement attaqué :

Considérant que le présent arrêt statuant sur les conclusions à fin d'annulation et de réformation du jugement attaqué, les conclusions susanalysées tendant au sursis à l'exécution de ce jugement sont devenues sans objet ;

Sur les frais exposés par les parties et non compris dans les dépens :

Considérant qu'en vertu des dispositions de l'article L. 761-1 du Code de justice administrative, la Cour ne peut pas faire bénéficier la partie tenue aux dépens ou la partie perdante du paiement par l'autre partie des frais qu'elle a exposés à l'occasion du litige soumis aux juges ; que les conclusions présentées à ce titre par la société appelante doivent dès lors être rejetées ; qu'il y a lieu en revanche, dans les circonstances de l'espèce, de la condamner à verser à la commune de Cavalaire-sur-Mer la somme de 1.500 € au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

DECIDE

Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions à fin de sursis à exécution susvisées.

Article 2 : Le jugement du Tribunal administratif de Nice du 10 avril 2001 est annulé en tant qu'il rejette les conclusions à fin d'annulation de l'avenant n°1 du 12 novembre 1985.

Article 3 : Les conclusions de la SOCIETE ANONYME COOPERATIVE DU NOUVEAU PORT DE PLAISANCE DE CAVALAIRE (S.A.C.N.P.P.C.) à fin d'annulation de l'avenant n°1 du 12 novembre 1985 sont rejetées.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête n° 01MA1483 de la SOCIETE ANONYME COOPERATIVE DU NOUVEAU PORT DE PLAISANCE DE CAVALAIRE (S.A.C.N.P.P.C.) est rejeté.

Article 5 : La société SOCIETE ANONYME COOPERATIVE DU NOUVEAU PORT DE PLAISANCE DE CAVALAIRE (S.A.C.N.P.P.C.) est condamnée à verser à la commune de Cavalaire-sur-Mer la somme de 1.500 euros au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens.

Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à la société SOCIETE ANONYME COOPERATIVE DU NOUVEAU PORT DE PLAISANCE DE CAVALAIRE (S.A.C.N.P.P.C.), à la commune de Cavalaire-sur-Mer et au ministre des transports, de l'équipement, du tourisme et de la mer.

3

N° 01MA1483


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 6eme chambre - formation a 3
Numéro d'arrêt : 01MA01483
Date de la décision : 18/11/2005
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. GANDREAU
Rapporteur ?: M. Jean-Baptiste BROSSIER
Rapporteur public ?: M. DUBOIS
Avocat(s) : CHATEAUREYNAUD

Origine de la décision
Date de l'import : 05/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2005-11-18;01ma01483 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award