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14/02/2006 | FRANCE | N°05MA00243

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 2eme chambre - formation a 3, 14 février 2006, 05MA00243


Vu, I, le recours, enregistré le 9 février 2005, présenté par le MINISTRE DE L'INTERIEUR, DE LA SECURITE INTERIEURE ET DES LIBERTES LOCALES ;

Il demande à la Cour d'annuler le jugement n° 0004738 du 1er décembre 2004 par lequel le Tribunal administratif de Nice a annulé sa décision du 30 août 2000 rejetant la demande d'indemnité de M. X, a condamné l'Etat à lui payer une somme de 3.000 euros au titre du préjudice moral et des troubles dans les conditions d'existence ainsi que la totalité de l'indemnité relative à la première période d'éviction, du 20 octobre 1995 au

10 juillet 2000, augmentée des intérêts de droit à compter du 23 juin 20...

Vu, I, le recours, enregistré le 9 février 2005, présenté par le MINISTRE DE L'INTERIEUR, DE LA SECURITE INTERIEURE ET DES LIBERTES LOCALES ;

Il demande à la Cour d'annuler le jugement n° 0004738 du 1er décembre 2004 par lequel le Tribunal administratif de Nice a annulé sa décision du 30 août 2000 rejetant la demande d'indemnité de M. X, a condamné l'Etat à lui payer une somme de 3.000 euros au titre du préjudice moral et des troubles dans les conditions d'existence ainsi que la totalité de l'indemnité relative à la première période d'éviction, du 20 octobre 1995 au 10 juillet 2000, augmentée des intérêts de droit à compter du 23 juin 2000 et la somme de 1.000 euros au titre de l'article

L.761-1 du code de justice administrative ;

…………………………………………………..

Vu, II, la requête, enregistrée le 22 février 2005, présentée pour M. Charles X, élisant domicile ..., par Me Gaulmin, avocat ;

M.X demande à la Cour :

1°) de réformer le jugement du Tribunal administratif de Nice du 1er décembre 2004 ;

2°) de condamner l'Etat à lui payer une somme de 70.000 euros au titre du préjudice matériel, la somme de 152.450 euros au titre du préjudice moral et des troubles dans les conditions d'existence et la somme de 3.000 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;

………………………………………………

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;

Vu le code des pensions civiles et militaires de retraite ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 17 janvier 2006,

- le rapport de Mme Steck-Andrez, rapporteur ;

- les observations de Me Gaulmin pour le MINISTRE DE L'INTERIEUR ;

- et les conclusions de M. Dubois, commissaire du gouvernement ;

Considérant que le recours du MINISTRE DE L'INTERIEUR, DE LA SECURITE INTERIEURE ET DES LIBERTES LOCALES et le recours incident de M. X, enregistrés sous le n° 05MA00243, la requête de M. X ainsi que le recours incident du ministre, enregistrés sous le n° 05MA00457, sont dirigés contre le même jugement ; qu'il y a lieu de les joindre pour y être statué par un seul arrêt ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

Considérant que M. X qui soutient, d'une part, que le tribunal n'a pas statué sur le mode de calcul des intérêts qui, selon lui, auraient dû être comptabilisés mois par mois, d'autre part, qu'il a omis de se prononcer sur la méthode de calcul de l'indemnité représentative du préjudice matériel, a entendu critiquer la régularité du jugement attaqué ;

Considérant que le tribunal, qui a indiqué dans son jugement que l'indemnité correspondant à la première période d'éviction de M. X de ses fonctions, du

20 octobre 1995 au 10 juillet 2000, était augmentée des intérêts de droit à compter du

23 juin 2000, date de sa réclamation préalable, a statué sur le mode de calcul de ces intérêts ;

Considérant, toutefois, que le tribunal, qui s'est borné à renvoyer M. X devant l'administration pour le calcul de l'indemnité représentative du préjudice matériel, sans en préciser les bases de liquidation, n'a pas épuisé sa compétence sur l'ensemble du litige dont il a été saisi ; que, dès lors, le jugement doit être annulé dans cette mesure ; qu'il y a lieu pour la Cour de se prononcer, par voie d'évocation, sur la demande d'indemnisation du préjudice matériel et, sur les autres conclusions, par l'effet dévolutif de l'appel ;

Sur l'indemnité représentative du préjudice matériel :

Considérant qu'il résulte de l'instruction que l'administration a versé à M. X, dont la révocation a été annulée par le juge de l'excès de pouvoir, une indemnité représentative de son préjudice matériel du fait de son éviction illégale du service au cours de la période du

20 octobre 1995 au 10 juillet 2000 d'un montant de 52.350,94 euros, majoré de la somme de 4.847,26 euros au titre des intérêts ; que M. X conteste le montant de cette indemnité ainsi que le montant des intérêts ;

Considérant, en premier lieu, que M. X, s'est trouvé irrégulièrement écarté du service du 20 octobre 1995 au 10 juillet 2000 ; que, toutefois, la seule circonstance qu'il ait fait l'objet d'une révocation illégale est sans influence sur la légalité de la mesure de suspension prise à son égard, et qui a donné lieu à une décision distincte de la décision de révocation ; que, par suite, la période pendant laquelle il a été suspendu de ses fonctions à demi-traitement ne saurait être prise en compte dans la période d'éviction illégale ;

Considérant, en deuxième lieu, que M. X, ne peut prétendre au rappel de son traitement en l'absence de service fait, mais qu'il est fondé à demander à l'Etat la réparation du préjudice qu'il a réellement subi du fait de la sanction disciplinaire prise à son encontre dans des conditions irrégulières ; que M. X a ainsi droit à une indemnité représentative du traitement, à l'exclusion des primes liées à l'exercice effectif des fonctions et déduction faite des revenus de remplacement éventuellement perçus ; qu'il convient cependant, pour fixer le montant de cette indemnité, de tenir compte également de l'importance respective des irrégularités entachant l'arrêté annulé et de la faute relevée à sa charge, telle qu'elle résulte de l'instruction ; que l'amnistie d'une condamnation ayant pour seul effet d'enlever aux faits leur caractère délictueux, la circonstance que la condamnation infligée à M. X ait été amnistiée ne fait pas obstacle à ce qu'il soit tenu compte de son comportement pour déterminer le montant de l'indemnité à laquelle il a droit ; que, compte tenu des éléments chiffrés produits par l'administration et qui doivent être tenus pour probants, il sera fait une exacte appréciation des circonstances de la cause en fixant à la somme de 52.350,94 euros l'indemnité due à M. X au titre de la période d'éviction du 20 octobre 1995 au 10 juillet 2000 ;

Considérant, en troisième lieu, que M. X a droit sur la somme de 52.350,94 euros aux intérêts au taux légal à compter du 24 mars 2000, date du jugement du Tribunal administratif de Nice ayant prescrit la reconstitution de sa carrière, jusqu'à la date du paiement effectif intervenu le 11 juillet 2003 ; qu'il ressort de la fiche de calcul produite par le ministre et qui n'appelle aucune critique, que le montant de ces intérêts s'élève à la somme de 4.847,26 euros ;

Considérant, enfin, qu'il appartient à l'Etat de rétablir M. X dans ses droits à pension en procédant à la régularisation des cotisations afférentes aux périodes d'éviction ; que toutefois cette régularisation implique que M. X s'acquitte de la part de cotisations lui incombant à ce titre et qui doit être prélevée par lui sur le montant de l'indemnité représentative de traitements afférente à la période d'éviction du 20 octobre 1995 au 10 juillet 2000 ; qu'il résulte de l'instruction que cette part de cotisations a déjà été prélevée par l'Etat sur l'indemnité relative à la période d'éviction du 9 février 2001 au 9 avril 2003 ;

Sur l'indemnité représentative du préjudice moral et des troubles dans les conditions d'existence :

Considérant que si M. X fait valoir qu'il a été licencié, après enquête auprès de l'administration, par l'entreprise qui l'avait employé pendant son éviction, qu'il a subi, ainsi que sa famille, un traumatisme d'ordre psychologique lié à ses problèmes judiciaires, et un préjudice financier résultant de la vente de sa maison, les éléments ainsi invoqués n'ont pas de lien direct avec la faute commise par l'administration du fait de l'illégalité de sa révocation ; que, toutefois, M. X a subi un préjudice moral et des troubles dans ses conditions d'existence en raison du retard de l'administration à exécuter les jugements du Tribunal administratif de Nice du

24 mars 2000 et du 21 octobre 2002 annulant sa révocation ; que le Tribunal administratif de Nice a fait une juste appréciation de ce chef de préjudice en le fixant à la somme de 3.000 euros ; que, par suite, M. X n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Nice a condamné l'Etat à lui verser cette somme au titre du préjudice moral et des troubles dans les conditions d'existence ; que l'appel du ministre sur ce point et son appel incident doivent être rejetés ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative :

Considérant, en ce qui concerne les frais exposés en première instance, qu'il résulte de ce qui précède que l'Etat demeure, partiellement, la partie perdante ; qu'ainsi, le ministre n'est pas fondé à demander l'annulation du jugement en tant qu'il le condamne à verser à M. X la somme de 1.000 euros au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

Considérant, en ce qui concerne les frais exposés en appel, qu'en vertu des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative, la Cour ne peut pas faire bénéficier la partie perdante du paiement par l'autre partie des frais qu'elle a exposés à l'occasion du litige soumis au juge ; que les conclusions présentées à ce titre par M. X, qui est, pour l'essentiel, partie perdante, doivent, dès lors, être rejetées ;

DÉCIDE :

Article 1er : Les articles 3 et 4 du jugement du Tribunal administratif de Nice du

1er décembre 2004 sont annulés.

Article 2 : L'Etat est condamné à verser à M. X une indemnité 52.350,94 euros (cinquante-deux mille trois cent cinquante euros et quatre-vingt-quatorze centimes) et la somme de 4.847,26 euros (quatre mille huit cent quarante-sept euros et vingt-six centimes) au titre des intérêts.

Article 3 : Le surplus des conclusions du MINISTRE DE L'INTERIEUR ET DE L'AMENAGEMENT DU TERRITOIRE, son appel incident, le surplus des conclusions de

M. X et son appel incident sont rejetés.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié au MINISTRE DE L'INTERIEUR ET DE L'AMENAGEMENT DU TERRITOIRE et à M. Charles X.

N° 05MA00243,05MA00457 4


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 2eme chambre - formation a 3
Numéro d'arrêt : 05MA00243
Date de la décision : 14/02/2006
Sens de l'arrêt : Satisfaction partielle
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. GOTHIER
Rapporteur ?: Mme frederique STECK-ANDREZ
Rapporteur public ?: M. DUBOIS
Avocat(s) : GAULMIN

Origine de la décision
Date de l'import : 04/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2006-02-14;05ma00243 ?
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