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11/10/2010 | FRANCE | N°08MA03463

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 6ème chambre - formation à 3, 11 octobre 2010, 08MA03463


Vu la requête, enregistrée le 22 juillet 2008, sous le n° 08MA03463, au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille, présentée pour Mme Tanzila épouse , demeurant ..., par Me de Clerck ;

Mme Tanzila épouse demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0802774 du 24 juin 2008 par lequel le Tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du préfet des Bouches-du-Rhône en date du 17 mars 2008 lui refusant la délivrance d'un titre de séjour, portant obligation de quitter le territoire français et fixant le p

ays à destination duquel elle doit être renvoyée ;

2°) d'annuler, pour excès...

Vu la requête, enregistrée le 22 juillet 2008, sous le n° 08MA03463, au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille, présentée pour Mme Tanzila épouse , demeurant ..., par Me de Clerck ;

Mme Tanzila épouse demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0802774 du 24 juin 2008 par lequel le Tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du préfet des Bouches-du-Rhône en date du 17 mars 2008 lui refusant la délivrance d'un titre de séjour, portant obligation de quitter le territoire français et fixant le pays à destination duquel elle doit être renvoyée ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, ladite décision ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1.000 euros au titre des frais exposés et non compris dans les dépens dans le cas dans lequel la demande d'aide juridictionnelle aura été rejetée ;

.............

Vu la décision du bureau d'aide juridictionnelle en date du 8 octobre 2008 accordant à Mme épouse le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales ;

Vu la convention internationale des droits de l'enfant signée à New York le 26 janvier 1990 ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le décret n° 2009-14 du 7 janvier 2009 relatif au rapporteur public des juridictions administratives et au déroulement de l'audience devant ces juridictions ;

Vu l'arrêté du vice-président du Conseil d'Etat en date du 27 janvier 2009 fixant la liste des tribunaux administratifs et cours administratives d'appel autorisés à appliquer, à titre expérimental, les dispositions de l'article 2 du décret n° 2009-14 du 7 janvier 2009 ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 13 septembre 2010 :

-le rapport de M. Renouf, rapporteur,

-les conclusions de M. Marcovici, rapporteur public ;

Considérant que Mme épouse fait appel du jugement par lequel le Tribunal administratif de Marseille a rejeté la demande qu'elle avait présentée en vue d'obtenir l'annulation de la décision du préfet des Bouches-du-Rhône prise le 17 mars 2007 lui refusant la délivrance d'un titre de séjour, portant obligation de quitter le territoire français et fixant le pays à destination duquel elle doit être renvoyée ;

Sur la légalité du refus de titre de séjour :

Considérant, en premier lieu, que si la décision attaquée ne détaille pas la situation familiale de l'intéressée, elle est néanmoins suffisamment motivée en faits au regard du fondement de la demande de titre de séjour présentée par l'intéressés et en droit ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et des libertés d'autrui. ; qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans sa rédaction alors en vigueur : Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention vie privée et familiale est délivrée de plein droit : (..) 7º A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée (..). ;

Considérant que Mme épouse soutient être entrée en France le 3 avril 2006 avec sa fille alors âgée de quelques mois et que son époux, M. Martazanov, est entré en France le 5 octobre 2007 avec leur fils alors âgé de près de quatre ans ; qu'à la date de la décision attaquée, si l'époux de Mme épouse avait déposé une demande d'asile, cette demande était alors en cours d'instruction ; qu'ainsi, son époux ne bénéficiait pas à la date de la décision attaquée d'une décision lui accordant le droit de séjourner durablement en France ; que dans l'ensemble des circonstances de l'espèce et eu égard à la brièveté du séjour en France de tous les membres de la famille de la requérante ainsi que du très jeune âge de ses enfants, la décision par laquelle le préfet des Bouches-du-Rhône a refusé de lui accorder un titre de séjour ne porte pas une atteinte excessive à son droit au respect de sa vie privée et familiale protégé par les stipulations et dispositions précitées ;

Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant : Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait d'institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale. ; qu'il résulte de ces stipulations, qui peuvent être utilement invoquées à l'appui d'un recours pour excès de pouvoir, que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant ;

Considérant que si la demande d'asile présentée par l'époux de Mme épouse était en cours d'instruction à la date de la décision attaquée, la décision par laquelle le préfet des Bouches-du-Rhône a refusé le 17 mars 2008 d'accorder à la requérante un titre de séjour n'induit pas en elle-même, quelle que soit l'issue de la demande de M. Martazanov une séparation durable des enfants d'avec l'un ou l'autre de leurs parents ; qu'ainsi, la décision attaquée ne méconnaît pas, dans l'ensemble des circonstances de l'espèce, les stipulations de la convention internationale relative aux droits de l'enfant précitées ;

Considérant, enfin, que la circonstance postérieure que Mme épouse a fait appel le 25 avril 2008 de la décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides lui refusant l'asile est sans incidence sur la légalité de la décision attaquée ; que l'erreur manifeste d'appréciation de la situation d'ensemble de Mme épouse ne ressort par ailleurs pas des pièces du dossier ;

Sur la légalité de l'obligation de quitter le territoire français et la décision fixant le pays de destination :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 511-1 dans sa rédaction en vigueur à la date de la décision du 17 juin 2008 attaquée : I. - L'autorité administrative qui refuse la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour à un étranger ou qui lui retire son titre de séjour, son récépissé de demande de carte de séjour ou son autorisation provisoire de séjour, pour un motif autre que l'existence d'une menace à l'ordre public, peut assortir sa décision d'une obligation de quitter le territoire français, laquelle fixe le pays à destination duquel l'étranger sera renvoyé s'il ne respecte pas le délai de départ volontaire prévu au troisième alinéa. L'obligation de quitter le territoire français n'a pas à faire l'objet d'une motivation. ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que le préfet des Bouches-du-Rhône a délivré le 13 mars 2008 à l'époux de la requérante un récépissé de demande de statut de réfugié valant autorisation de séjour ; qu'à la date du 17 mars 2008 à laquelle ledit préfet a décidé d'obliger Mme épouse à quitter le territoire français, la demande de M. Martazanov n'avait pas fait l'objet d'une décision de rejet ; qu'eu égard à la vie commune des époux à cette date et à la présence avec eux de leurs deux jeunes enfants, le préfet a entaché, dans les circonstances de l'espèce, sa décision d'erreur manifeste d'appréciation en décidant d'obliger Mme épouse à quitter le territoire français ; qu'ainsi, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête dirigés contre cette décision, la décision du 17 mars 2008 portant obligation pour Mme épouse de quitter le territoire français doit être annulée ; que, par voie de conséquence, la décision fixant le pays à destination duquel l'intéressée doit être renvoyée doit également être annulée ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme épouse est seulement fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Marseille a rejeté ses conclusions tendant à l'annulation de la décision du 17 mars 2007 portant obligation de quitter le territoire français et de la décision du même jour fixant le pays à destination duquel elle doit être renvoyée ;

D É C I D E :

Article 1er : Les décisions du 17 mars 2008 par lesquelles le préfet des Bouches-du-Rhône a obligé Mme épouse à quitter le territoire français et a fixé le pays à destination duquel elle doit être renvoyée sont annulées.

Article 2 : Le jugement du Tribunal administratif de Marseille du 24 juin 2008 est annulé en ce qu'il a de contraire à l'article 1er du présent arrêt.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de Mme épouse est rejeté.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à Mme Tanzila épouse et au ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire.

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N° 08MA03463


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 6ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 08MA03463
Date de la décision : 11/10/2010
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. GUERRIVE
Rapporteur ?: M. Philippe RENOUF
Rapporteur public ?: M. MARCOVICI
Avocat(s) : DE CLERCK

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2010-10-11;08ma03463 ?
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