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22/03/2011 | FRANCE | N°09MA02258

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 2ème chambre - formation à 3, 22 mars 2011, 09MA02258


Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 26 juin 2009 par télécopie sous le n° 09MA02258, régularisée le 30 juin 2009, présentée par Me El Kolli, avocat, pour Mme Latifa A demeurant ... ;

Mme Latifa A, de nationalité marocaine, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0701973 du 8 avril 2009, notifié le 27 avril 2009, par lequel le tribunal administratif de Montpellier a rejeté ses demandes tendant :

- à l'annulation de la décision du préfet de l'Hérault du 19 janvier 2006 refusant de renouveler son titre de séjour, ensemble la décis

ion implicite rejetant son recours hiérarchique du 9 mars 2006,

- à ce qu'il soit enj...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 26 juin 2009 par télécopie sous le n° 09MA02258, régularisée le 30 juin 2009, présentée par Me El Kolli, avocat, pour Mme Latifa A demeurant ... ;

Mme Latifa A, de nationalité marocaine, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0701973 du 8 avril 2009, notifié le 27 avril 2009, par lequel le tribunal administratif de Montpellier a rejeté ses demandes tendant :

- à l'annulation de la décision du préfet de l'Hérault du 19 janvier 2006 refusant de renouveler son titre de séjour, ensemble la décision implicite rejetant son recours hiérarchique du 9 mars 2006,

- à ce qu'il soit enjoint sous astreinte à cette autorité administrative, à titre principal, de lui délivrer le titre de séjour demandé, à titre subsidiaire, et de réexaminer sa demande d'admission au séjour,

- à ce que soit mise à la charge de l'Etat la somme de 1 000 euros au titre de

l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir la décision en litige du préfet de l'Hérault du 19 janvier 2006, ensemble la décision implicite rejetant son recours hiérarchique du 9 mars 2006 ;

3°) d'enjoindre sous astreinte de 500 euros par jour de retard au préfet de l'Hérault, à titre principal, de lui délivrer le titre de séjour demandé, à titre subsidiaire, de réexaminer sa demande d'admission au séjour, dans un délai d'un mois à compter de la notification de la décision à intervenir ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

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Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;

Vu l'arrêté du 8 juillet 1999 relatif aux conditions d'établissement des avis médicaux concernant les étrangers malades prévus à l'article 7-5 du décret n° 46-1574 du 30 juin 1946 modifié ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Vu le décret n° 2009-14 du 7 janvier 2009 relatif au rapporteur public des juridictions administratives et au déroulement de l'audience devant ces juridictions ;

Vu l'arrêté du vice-président du Conseil d'Etat, en date du 27 janvier 2009, fixant la liste des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel autorisés à appliquer, à titre expérimental, les dispositions de l'article 2 du décret n° 2009-14 du 7 janvier 2009 ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 15 février 2011 :

- le rapport de M. Brossier, rapporteur,

- et les conclusions de Mme Fedi, rapporteur public ;

Considérant que Mme A, née de 1961, de nationalité marocaine, entrée en France en décembre 2001, a alors obtenu un premier titre de séjour temporaire portant la mention étranger malade afin de faire soigner son oeil droit après la perte de son oeil gauche ; que le préfet de l'Hérault a ensuite renouvelé par trois fois la délivrance de ce titre de séjour, jusqu'en septembre 2005, avant de refuser un quatrième renouvellement par la décision attaquée du 19 janvier 2006 ; que par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté la demande en annulation de cette décision, ensemble la décision implicite rejetant le recours hiérarchique reçu le 9 mars 2006 ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-11(11°) du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, qui codifie l'ancien article 12 bis (11°) de l'ordonnance n°45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée : Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention vie privée et familiale est délivrée de plein droit : (...) 11° A l'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve qu'il ne puisse effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans le pays dont il est originaire. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative, après avis du médecin inspecteur de santé publique compétent au regard du lieu de résidence de l'intéressé ou, à Paris, du médecin, chef du service médical de la préfecture de police. Le médecin inspecteur ou le médecin chef peut convoquer le demandeur pour une consultation médicale devant une commission médicale régionale dont la composition est fixée par décret en Conseil d'Etat. ; et qu'aux termes de l'article 1er de l'arrêté du 8 juillet 1999, pris pour l'application de ces dispositions : L'étranger qui a déposé une demande de délivrance ou de renouvellement de carte de séjour temporaire en application de l'article 12 bis (11°) ou qui invoque les dispositions de l'article 25 (8°) de l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 est tenu de faire établir un rapport médical relatif à son état de santé par un médecin agréé ou un praticien hospitalier. ; qu'aux termes de l'article 3 du même arrêté : (...) le médecin agréé ou le praticien hospitalier établit un rapport précisant le diagnostic des pathologies en cours, le traitement suivi et sa durée prévisible ainsi que les perspectives d'évolution et, éventuellement, la possibilité de traitement dans le pays d'origine. Ce rapport médical est transmis, sous pli confidentiel, au médecin inspecteur de santé publique de la direction départementale des affaires sanitaires et sociales dont relève la résidence de l'intéressé ; que l'article 4 du même arrêté prévoit que : Au vu de ce rapport médical et des informations dont il dispose, le médecin inspecteur de santé publique de la direction départementale des affaires sanitaires et sociales émet un avis précisant : / - si l'état de santé de l'étranger nécessite ou non une prise en charge médicale ; / - si le défaut de cette prise en charge peut ou non entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur son état de santé ; / - si l'intéressé peut effectivement ou non bénéficier d'un traitement approprié dans le pays dont il est originaire ; / - et la durée prévisible du traitement. / Il indique, en outre, si l'état de santé de l'étranger lui permet de voyager sans risque vers son pays de renvoi. /. Cet avis est transmis au préfet par le directeur départemental des affaires sanitaires et sociales. ;

Considérant, d'une part, que les dispositions précitées de l'arrêté du 8 juillet 1999 imposent notamment au médecin inspecteur de santé publique d'émettre, au vu d'un rapport médical établi par un médecin agréé ou un praticien hospitalier, un avis indiquant si l'état de santé de l'étranger lui permet de voyager sans risque vers le pays de renvoi ; qu'en se fondant sur un avis rendu par le médecin inspecteur de santé publique, qui ne comportait pas d'indication sur la possibilité pour l'appelante de voyager sans risque vers son pays d'origine, les décisions attaquées ont été prises suivant une procédure irrégulière et sont, par suite, entachées d'illégalité externe ;

Considérant, d'autre part, que la décision explicite de rejet en litige du 19 janvier 2009 est motivée par référence à l'avis du médecin inspecteur de santé publique qui a estimé que si l'état de santé de l'intéressée nécessitait une prise en charge, ce défaut de prise en charge ne devrait pas entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité et que l'intéressée pouvait en tout état de cause bénéficier d'un traitement approprié dans son pays d'origine ; qu'il ressort toutefois des pièces du dossier que l'intéressée, qui a déjà perdu la vision par son oeil gauche, souffre à son oeil droit d'une vision très limitée en raison d'une pathologie dégénérative grave susceptible de conduire à terme à une totale cécité en l'absence de soin régulier et de surveillance adéquate ; que, dans ces conditions, en s'appropriant l'avis du médecin inspecteur concluant à l'absence de conséquences d'une exceptionnelle gravité à défaut de prise en charge, alors que l'intéressée est susceptible de perdre définitivement la vue, le préfet de l'Hérault a méconnu les dispositions de l'article L. 313-11(11°) précitées ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que l'appelante est fondée à demander à la Cour d'annuler le jugement attaqué et, par l'effet dévolutif de l'appel, d'annuler les décisions attaquées ;

Sur les conclusions aux fins d'injonction :

Considérant que l'article L. 911-1 du code de justice administrative dispose que : Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public (...) prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure, assortie, le cas échéant d'un délai d'exécution ;

Considérant que le présent arrêt, qui accueille les conclusions à fin d'annulation présentées par l'appelante, implique nécessairement la délivrance à l'intéressée d'un titre de séjour temporaire vie privée et familiale, sans qu'il y ait lieu de prononcer l'astreinte demandée ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'aux termes des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation ;

Considérant que l'appelante a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle ; que, par suite, son avocat peut se prévaloir des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme réclamée de 1 000 euros, à verser à Me El Kolli, avocat , sous réserve de sa renonciation à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat ;

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement n° 0701973 du tribunal administratif de Montpellier du 8 avril 2009 et les décisions attaquées susvisées sont annulées.

Article 2 : Il est enjoint sans astreinte au préfet intimé de délivrer à l'appelante un titre de séjour temporaire vie privée et familiale.

Article 3 : L'Etat versera à Me El Kolli, avocat, la somme de 1 000 (mille) euros en application du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve que cet avocat renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à Mme Latifa A, au préfet de l'Hérault et ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration.

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N° 09MA022582


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 2ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 09MA02258
Date de la décision : 22/03/2011
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-02-04 Étrangers. Séjour des étrangers. Autorisation de séjour. Refus de renouvellement.


Composition du Tribunal
Président : M. GONZALES
Rapporteur ?: M. Jean-Baptiste BROSSIER
Rapporteur public ?: Mme FEDI
Avocat(s) : SELARL COLLARD et ASSOCIÉS

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2011-03-22;09ma02258 ?
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