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05/04/2011 | FRANCE | N°08MA04373

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 2ème chambre - formation à 3, 05 avril 2011, 08MA04373


Vu la requête, enregistrée le 2 octobre 2008, présentée pour M. David A élisant domicile ..., par Me Barthélémy, avocat ;

M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0607745 en date du 9 septembre 2008 par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à la condamnation de l'Assistance publique des hôpitaux de Marseille à lui verser la somme de 16 700 euros au titre des préjudices subis du fait d'une infection nosocomiale contractée au cours de son hospitalisation à l'hôpital de la Timone en 2003 ;

2°) de condamner

l'Assistance publique des hôpitaux de Marseille à lui verser la somme de 16 700 euro...

Vu la requête, enregistrée le 2 octobre 2008, présentée pour M. David A élisant domicile ..., par Me Barthélémy, avocat ;

M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0607745 en date du 9 septembre 2008 par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à la condamnation de l'Assistance publique des hôpitaux de Marseille à lui verser la somme de 16 700 euros au titre des préjudices subis du fait d'une infection nosocomiale contractée au cours de son hospitalisation à l'hôpital de la Timone en 2003 ;

2°) de condamner l'Assistance publique des hôpitaux de Marseille à lui verser la somme de 16 700 euros au titre de ses préjudices ;

3°) de mettre à la charge de l'Assistance publique des hôpitaux de Marseille la somme de 2 000 euros au titre des frais d'instance ;

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Vu le code de la santé publique et le code de la sécurité sociale ;

Vu le code de justice administrative ;

Vu le décret n° 2009-14 du 7 janvier 2009 relatif au rapporteur public des juridictions administratives et au déroulement de l'audience devant ces juridictions ;

Vu l'arrêté du vice-président du Conseil d'Etat en date du 27 janvier 2009 fixant la liste des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel autorisés à appliquer, à titre exceptionnel, les dispositions de l'article 2 du décret n° 2009-14 du 7 janvier 2009 ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 18 janvier 2011,

- le rapport de Mme Massé-Degois, rapporteur,

- les conclusions de Mme Fedi, rapporteur public,

- et les observations de Me Martinasso, du cabinet d'avocats Barthélémy, pour M. A ;

Considérant que M. A a subi le 26 septembre 2003 à l'hôpital de la Timone une intervention chirurgicale en raison d'une lombosciatique aiguë ; qu'après avoir quitté l'établissement de soins le 1er octobre suivant, il a été à nouveau hospitalisé pour la prise en charge d'une infection sur la plaie opératoire ; que M. A relève appel du jugement du

9 septembre 2008 par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à obtenir la condamnation de l'Assistance publique des hôpitaux de Marseille à lui verser la somme de 16 700 euros au titre des préjudices subis qu'il impute à l'infection nosocomiale qu'il allègue avoir contractée au cours de son hospitalisation en 2003 ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 1142-1 du code de la santé publique applicable aux faits en litige : I. - Hors le cas où leur responsabilité est encourue en raison d'un défaut d'un produit de santé, les professionnels de santé mentionnés à la quatrième partie du présent code, ainsi que tout établissement, service ou organisme dans lesquels sont réalisés des actes individuels de prévention, de diagnostic ou de soins ne sont responsables des conséquences dommageables d'actes de prévention, de diagnostic ou de soins qu'en cas de faute. / Les établissements, services et organismes susmentionnés sont responsables des dommages résultant d'infections nosocomiales, sauf s'ils rapportent la preuve d'une cause étrangère (...) ; qu'il résulte de ces dispositions que, pour s'exonérer de sa responsabilité en cas de survenue d'une infection nosocomiale, il incombe au centre hospitalier de rapporter la preuve d'une cause étrangère ;

Sur la responsabilité :

Considérant qu'il résulte de l'instruction et notamment du rapport de l'expertise diligentée devant la juridiction administrative que les suites immédiates de l'intervention chirurgicale subie le 26 septembre 2003 par M. A en raison d'une hernie discale lombaire, ont été simples malgré la constatation six jours après l'opération d'une petite déhiscence des points au niveau supérieur de l'incision ; qu'il résulte des conclusions de l'expert que les soins qui ont été pratiqués envers M. A au cours de son hospitalisation l'ont été selon les règles de l'art ; que les prélèvements effectués le 28 septembre 2003 et le 1er octobre 2003 du liquide qui s'écoulait de la plaie ont révélé une culture de staphylococcus épidermidis sensible à de nombreux antibiotiques ; qu'il résulte de ce même rapport d'expertise, et qu'il n'est d'ailleurs pas contesté par l'intéressé, que M. A a quitté le 1er octobre 2003 le centre hospitalier malgré un avis médical contraire et a fait procéder aux pansements à son domicile ; que l'appelant a été à nouveau admis à l'hôpital le 8 octobre 2003 pour la prise en charge d'une infection développée au niveau de la plaie ; que la ponction du disque et les hémocultures alors pratiquées ont confirmé la présence du germe banal de la peau staphylococcus épidermidis au niveau de l'incision ; que le traitement par antibiothérapie mis en place a permis la disparition complète du syndrome infectieux au cours du mois de mars 2004 ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le germe staphylococcus épidermidis à l'origine de l'infection dont a souffert M. A a été révélé par des prélèvements effectués le 28 septembre et le 1er octobre 2003 avant sa sortie de l'hôpital de la Timone le 1er octobre 2003 ; qu'il n'est pas établi par l'instruction ou même allégué par l'Assistance publique des hôpitaux de Marseille que M. A aurait été porteur d'un foyer infectieux endogène préexistant à son admission à l'hôpital de la Timone le 25 septembre 2003 et à l'intervention qu'il y a subie ; qu'en se bornant à arguer du caractère banal et saprophyte du germe à l'origine de l'infection développée par M. A ainsi que de la sensibilité dudit germe aux antibiotiques, l'Assistance publique des hôpitaux de Marseille n'apporte pas la preuve, comme l'exigent les dispositions

du I de l'article L. 1142-1 du code de la santé publique, pour s'exonérer de sa responsabilité, que cette infection trouverait son origine dans une cause étrangère au fonctionnement et à l'organisation du service de l'hôpital nonobstant la circonstance que l'homme de l'art a indiqué que les soins dispensés au patient étaient exempts de critiques ; que la circonstance non contestée que M. A a quitté l'hôpital pour son domicile contre les recommandations du personnel médical n'est pas de nature à exonérer la responsabilité de l'établissement hospitalier dans la mesure où le patient a pu regagner son domicile le 1er octobre 2003 sans aucune prescription médicamenteuse préventive ou curative alors que le germe à l'origine de l'infection a été révélé par des prélèvements effectués le 28 septembre précédent et que M. A n'a pas été contacté par le service hospitalier en vue de la prescription d'un tel traitement avant sa ré-hospitalisation, à son initiative, le 8 octobre 2003 ;

Sur les préjudices :

En ce qui concerne les dépenses de santé :

Considérant qu'il résulte de l'instruction que le traitement de l'infection subie par

M. A à l'origine de son hospitalisation pour la période du 8 au 21 octobre 2003, a occasionné des frais d'hospitalisation à hauteur de la somme de 20 796 euros et le versement d'indemnités journalières à hauteur de la somme de 3 045 euros sur une période de 150 jours correspondant à la période d'incapacité temporaire totale fixée par l'homme de l'art dans son rapport ; que, dès lors, l'Assistance publique des hôpitaux de Marseille doit être condamnée à verser à la caisse primaire d'assurance maladie des Bouches du Rhône la somme totale, au demeurant non contestée, de 23 841 euros exposée pour son assuré M. A ;

Considérant que la caisse demande, en outre, la condamnation de l'Assistance publique des hôpitaux de Marseille à lui verser l'indemnité forfaitaire de gestion visée à l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale ; qu'il y a lieu de faire droit à cette demande et de condamner l'Assistance publique des hôpitaux de Marseille à lui verser, sur ce fondement, la somme

de 980 euros ;

En ce qui concerne les pertes de revenus et les préjudices personnels de M. A :

Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de l'instruction et notamment du rapport de l'expertise judiciaire, que les complications infectieuses dont M. A a été victime sont à l'origine d'une incapacité temporaire totale de cinq mois et ont provoqué des douleurs spécifiques évaluées à 3 sur une échelle de 1 à 7 ; que, d'une part, si l'homme de l'art a admis l'existence d'une incapacité temporaire totale de cinq mois en lien avec l'infection nosocomiale en litige,

M. A qui a perçu de la caisse primaire d'assurance maladie des Bouches du Rhône des indemnités journalières au titre de cette période, s'abstient toutefois de verser aux débats les documents de nature à établir l'existence d'une perte de revenus ; qu'il ne justifie pas, ainsi, du montant demandé de 6 000 euros ; que, d'autre part, les souffrances qu'il a endurées du fait de cette infection seront justement indemnisées, dans les circonstances de l'espèce, en allouant à l'intéressé la somme de 2 000 euros ;

Considérant, en second lieu, que M. A n'établit pas l'existence d'un préjudice esthétique indemnisable en lien avec l'infection dont s'agit en se bornant, d'une part, à soutenir que l'expert a occulté ce poste de préjudice et, d'autre part, à alléguer que l'infection était située au niveau de la cicatrice dès lors que l'homme de l'art a indiqué, dans son rapport, que l'état local était normal et qu'il n'y avait pas de zone inflammatoire, ni chéloïde au niveau de la cicatrice ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A et la caisse primaire d'assurance maladie des Bouches du Rhône sont respectivement fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a rejeté dans leur intégralité leurs demandes indemnitaires ; qu'il y a lieu, en outre, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Assistance publique des hôpitaux de Marseille les frais de l'expertise liquidés et taxés à la somme de 400 euros ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Assistance publique des hôpitaux de Marseille, le versement à M. A et à la caisse primaire d'assurance maladie des Bouches du Rhône des sommes respectives de 1 500 euros et 800 euros au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

Article 1er : L'Assistance publique des hôpitaux de Marseille est condamnée à verser la somme de 2 000 euros (deux mille euros) à M. A et la somme de 24 821 euros (vingt-quatre mille huit cent vingt et un euros) à la caisse primaire d'assurance maladie des Bouches du Rhône.

Article 2 : L'Assistance publique des hôpitaux de Marseille versera, sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, la somme de 1 500 euros (mille cinq cents euros) à M. A et la somme de 800 euros (huit cents euros) à la caisse primaire d'assurance maladie des Bouches du Rhône.

Article 3 : Les frais d'expertise, liquidés et taxés à la somme de 400 euros (quatre cents euros), sont mis à la charge de l'Assistance publique des hôpitaux de Marseille.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de M. A est rejeté.

Article 5 : Le jugement n° 0607745 du 9 septembre 2008 du tribunal administratif de Marseille est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à M. David A, à l'Assistance publique des hôpitaux de Marseille, à la caisse primaire d'assurance maladie des Bouches du Rhône et au ministre du travail, de l'emploi et de la santé.

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N° 08MA043732


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 2ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 08MA04373
Date de la décision : 05/04/2011
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Responsabilité de la puissance publique - Responsabilité en raison des différentes activités des services publics - Service public de santé - Établissements publics d'hospitalisation - Responsabilité pour faute simple : organisation et fonctionnement du service hospitalier.

Responsabilité de la puissance publique - Réparation - Préjudice - Absence ou existence du préjudice.


Composition du Tribunal
Président : M. GONZALES
Rapporteur ?: Mme Christine MASSE-DEGOIS
Rapporteur public ?: Mme FEDI
Avocat(s) : CABINET BARTHELEMY

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2011-04-05;08ma04373 ?
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