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05/07/2011 | FRANCE | N°10MA04099

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 2ème chambre - formation à 3, 05 juillet 2011, 10MA04099


Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 13 novembre 2010 et régularisée le 19 novembre 2010, présentée pour Mme A, élisant domicile B, par Me Chninif, avocat ;

Mme A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1003381 rendu le 28 octobre 2010 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision en date du 14 juin 2010 par laquelle le préfet des Pyrénées-Orientales a rejeté sa demande de titre de séjour, a assorti ce refus d'une obligation de quitter le territoire français et fixé le Maro

c comme pays de renvoi ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, ladite décision...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 13 novembre 2010 et régularisée le 19 novembre 2010, présentée pour Mme A, élisant domicile B, par Me Chninif, avocat ;

Mme A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1003381 rendu le 28 octobre 2010 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision en date du 14 juin 2010 par laquelle le préfet des Pyrénées-Orientales a rejeté sa demande de titre de séjour, a assorti ce refus d'une obligation de quitter le territoire français et fixé le Maroc comme pays de renvoi ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, ladite décision ;

3°) à titre principal d'enjoindre le préfet des Pyrénées-Orientales de lui accorder un titre de séjour sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter de la notification de la décision ;

4°) à titre subsidiaire d'enjoindre le préfet des Pyrénées-Orientales de réexaminer sa demande de titre de séjour ;

5°) de condamner l'Etat à lui verser une somme de 2000 euros au titre de

l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

6°) d'autoriser son conseil, en application des articles 37 et 75 de la loi du 10 juillet 1991, à recouvrir à son profit la somme allouée au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sous réserve du renoncement par celui-ci de la somme allouée au titre de l'aide juridictionnelle ;

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Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 sur la motivation des actes administratifs ;

Vu la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec l'administration ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Vu le décret n° 2009-14 du 7 janvier 2009 relatif au rapporteur public des juridictions administratives et au déroulement de l'audience devant ces juridictions ;

Vu l'arrêté du vice-président du Conseil d'Etat, en date du 27 janvier 2009, fixant la liste des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel autorisés à appliquer, à titre expérimental, les dispositions de l'article 2 du décret n° 2009-14 du 7 janvier 2009 ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 24 mai 2011 :

- le rapport de M. Gonzales, président-rapporteur,

- les conclusions de Mme Fedi, rapporteur public,

- et les observations de Me Chninif pour Mme A ;

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

Sur la légalité externe de la décision attaquée :

Considérant que la délégation de compétence accordée par le préfet des Pyrénées-Orientales à M. Nicolas par arrêté du 14 septembre 2009, en vertu de laquelle ce dernier a signé la décision litigieuse a été régulièrement publiée le même jour au numéro spécial n° 82 du recueil des actes administratifs de la préfecture des Pyrénées-Orientales ; que dès lors, le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur de l'acte résultant d'une publication irrégulière de sa délégation ne peut être accueilli ;

Considérant que la requérante soutient que l'arrêté du 14 juin 2010 en tant qu'il lui fait obligation de quitter le territoire français ne respecte pas les prescriptions procédurales de la loi du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec l'administration ;

Considérant qu'il ressort des dispositions de l'article L. 512-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile que le législateur a entendu déterminer l'ensemble des règles de procédure administrative et contentieuse auxquelles sont soumises l'intervention et l'exécution des décisions par lesquelles l'autorité administrative signifie à l'étranger l'obligation dans laquelle il se trouve de quitter le territoire français ; que dès lors l'article 24 de la loi du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec l'administration, qui fixe les règles générales de procédure applicables aux décisions devant être motivées en vertu de la loi du 11 juillet 1979, ne saurait être utilement invoquée à l'encontre d'une décision portant obligation de quitter le territoire français ; que par suite, le moyen susanalysé ne peut être accueilli ;

Considérant qu'aux termes de l'article 3 de la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public : La motivation exigée par la présente loi doit être écrite et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision ; qu'il ressort des termes de l'arrêté attaqué portant refus de délivrer à Mme A un titre de séjour que cet acte comporte l'énoncé des considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement ; que, contrairement à ce que soutient la requérante, il mentionne les considérations de fait propres à la situation du demandeur et ne se limite pas, ainsi, à une motivation stéréotypée ; que, par suite, le moyen tiré d'une insuffisante motivation de la décision contestée, en tant qu'elle porte refus de délivrance d'un titre de séjour, doit être écarté ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 511-1 alinéa 1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : L'obligation de quitter le territoire français n'a pas à faire l'objet d'une motivation ; que par suite le moyen tiré du défaut de motivation de l'arrêté du

14 juin 2010, qui vise précisément la disposition précitée, en tant qu'il porte obligation de quitter le territoire français, doit être écarté ;

Considérant que la décision par laquelle le préfet fixe le pays de destination auprès duquel sera reconduit l'étranger s'il ne satisfait pas à l'obligation de quitter le territoire français constitue une mesure de police qui doit, en principe, être motivée en fait comme en droit en vertu des dispositions de l'article 1er de la loi susvisée du 11 juillet 1979 ; que si la motivation de fait de la décision fixant le pays de destination ne se confond pas nécessairement avec celle obligeant l'étranger à quitter le territoire, la motivation en droit de ces deux décisions est identique et résulte des termes mêmes de l'article L. 511-1 sus rappelés ; que le législateur ayant décidé par l'article 41 de la loi n° 2007-1631 du 20 novembre 2007 de dispenser l'administration de viser la disposition législative qui fonde l'obligation de quitter le territoire, cette dispense s'attache, dans la même mesure, à la décision fixant le pays de destination fondée sur la même disposition législative ; que néanmoins en l'espèce le préfet a visé cet article ; que sa décision en tant qu'elle fixe le pays de destination est suffisamment motivée en droit ; que d'autre part le préfet a énoncé les motifs de faits au soutien de sa décision ; que par suite, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de la décision fixant le pays de renvoi doit être écarté ;

Sur la légalité interne :

Considérant en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, la carte de séjour temporaire portant la mention vie privée et familiale est délivrée de plein droit, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public : (...) 4° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, marié à un ressortissant de nationalité française, à condition que la communauté de vie n'ait pas cessé depuis le mariage, que le conjoint ait conservé la nationalité française et, lorsque le mariage a été célébré à l'étranger, qu'il ait été transcrit préalablement sur les registres de l'état civil français (...) ;

Considérant que la décision litigieuse du 14 juin 2010 par laquelle le préfet des

Pyrénées-Orientales a rejeté la demande de titre de séjour présentée par Mme A est motivée d'une part, par le fait que l'intéressée avait obtenu frauduleusement son visa d'installation en cachant délibérément son divorce à l'administration et en l'absence d'éléments faisant état d'un remariage, d'autre part, par l'absence de caractère effectif de la communauté de vie entre l'intéressé, Mme Naïma A et M. Abdelkrim C ;

Considérant que même en admettant que Mme A, qui s'est mariée le

1er janvier 2002 avec M. Abdelkrim C, ait conservé, malgré sa répudiation prononcée au Maroc en 2003, son statut conjugal au regard du droit civil français jusqu'à la date de la décision attaquée, il résulte cependant des pièces du dossier que M. C a reconnu, lors d'une enquête diligentée à la demande du consulat de France au Maroc, ne l'avoir épousée qu'afin de lui permettre d'obtenir un titre de séjour en France ; que par ailleurs, M. C et

Mme Fatima D, ayant un enfant ensemble, ont, le 12 novembre 2004, acheté en commun une maison qu'ils n'ont revendue que le 13 janvier 2010, alors même que pendant presque la totalité de cette période, Mme A se trouvait en France sur le fondement d'un titre de séjour obtenu en sa qualité de conjointe de ressortissant français ; qu'une promesse de vente authentique datée du 5 juillet 2004 certifie par ailleurs que lorsque M. C et

Mme D effectuaient les demandes en vue de l'acquisition de leur maison, ils vivaient ensemble ; qu'ainsi le second motif de la décision attaquée, non sérieusement contesté par la requérante, tiré de l'absence de caractère effectif de la communauté de vie entre les époux, doit être regardé comme établi ; qu'il résulte de l'instruction qu'en retenant ce seul motif, de nature à justifier le refus de renouvellement de titre contesté, le préfet aurait pris la même décision ;

Considérant en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2. Il ne peut y avoir d'ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que Mme A n'établit pas partager avec M. A une communauté de vie ; qu'ainsi elle ne prouve pas que le centre de ses intérêts familiaux est en France ; que si l'un de ses fils bénéficie d'un titre de séjour sur le territoire français, ses deux autres enfants résident toujours au Maroc, pays dans lequel la requérante a vécu jusqu'en 2005 ; qu'ainsi elle ne prouve pas être dans l'impossibilité de mener une vie familiale normale dans son pays d'origine ; que la décision attaquée ne porte pas à sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée et ne méconnaît dès lors pas les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Considérant enfin qu'aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou des traitements inhumains ou dégradants ;

Considérant que si Mme A invoque la méconnaissance de cette disposition par le préfet, elle n'a cependant pas assorti ce moyen d'éléments suffisants permettant d'en apprécier le bien fondé ; qu'il doit dès lors être rejeté ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme A n'est pas fondée à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions aux fins d'injonction :

Considérant que le présent arrêt, qui rejette les conclusions de Mme A tendant à l'annulation de l'arrêté du 14 juin 2010 qui lui a été opposé par le préfet des Pyrénées-Orientales, n'appelle aucune mesure d'exécution ; que les conclusions présentées par Mme A aux fins d'injonction doivent dès lors être rejetées ;

Sur l'application de l'article L.761-1 du code de justice administrative :

Considérant, qu'en vertu des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, la Cour ne peut pas faire bénéficier la partie tenue aux dépens ou la partie perdante du paiement par l'autre partie des frais qu'elle a exposés à l'occasion du litige soumis au juge ; que les conclusions présentées à ce titre par Mme A doivent dès lors être rejetées ; que par suite les conclusions tendant à autoriser son conseil à recouvrer cette somme à son profit doivent être rejetées ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme A est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme Naïma A et au ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration.

Copie en sera adressée au préfet des Pyrénées-Orientales.

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N° 10MA040994


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 2ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 10MA04099
Date de la décision : 05/07/2011
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : M. GONZALES
Rapporteur ?: M. Serge GONZALES
Rapporteur public ?: Mme FEDI
Avocat(s) : CHNINIF

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2011-07-05;10ma04099 ?
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