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05/12/2011 | FRANCE | N°09MA03887

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 2ème chambre - formation à 3, 05 décembre 2011, 09MA03887


Vu la requête, enregistrée le 2 novembre 2009, présentée pour M. Azanmassou A demeurant ... (34070), par la SCP Dessalces-Ruffel ; M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0903069 en date du 6 octobre 2009 par lequel le Tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 8 juin 2009 du préfet de l'Hérault lui refusant la délivrance d'un titre de séjour et l'obligeant à quitter le territoire français dans un délai d'un mois ;

2°) d'annuler ledit arrêté ;

3°) d'enjoindre au préfet de l'Hérault

, à titre principal, de lui délivrer un titre de séjour sous astreinte de 100 euros à com...

Vu la requête, enregistrée le 2 novembre 2009, présentée pour M. Azanmassou A demeurant ... (34070), par la SCP Dessalces-Ruffel ; M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0903069 en date du 6 octobre 2009 par lequel le Tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 8 juin 2009 du préfet de l'Hérault lui refusant la délivrance d'un titre de séjour et l'obligeant à quitter le territoire français dans un délai d'un mois ;

2°) d'annuler ledit arrêté ;

3°) d'enjoindre au préfet de l'Hérault, à titre principal, de lui délivrer un titre de séjour sous astreinte de 100 euros à compter de la décision à intervenir, à titre subsidiaire, de réexaminer sa demande dans un délai de deux mois, sous astreinte de 100 euros par jour de retard passé ce délai ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 196 euros à verser, soit à son conseil en cas d'octroi de l'aide juridictionnelle en application des articles 37 et 75 de la loi du 10 juillet 1991, soit à lui-même en cas de non-obtention de cette aide juridictionnelle, en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

................................

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire, enregistré le 2 avril 2010, présenté par le préfet de l'Hérault qui conclut au rejet de la requête ;

.................................

Vu la décision du bureau d'aide juridictionnelle du Tribunal de grande instance de Marseille, en date du 10 mars 2010, admettant M. A au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu la loi du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Vu l'arrêté du vice-président du Conseil d'Etat en date du 27 janvier 2009 fixant la liste des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel autorisés à appliquer, à titre exceptionnel, les dispositions de l'article 2 du décret n°2009-14 du 7 janvier 2009 ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 7 novembre 2011,

- le rapport de Mme Massé-Degois, premier conseillère ;

- et les conclusions de Mme Fedi, rapporteure publique ;

Considérant que M. A, de nationalité tchadienne, relève appel du jugement du 6 octobre 2009 par lequel le Tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 8 juin 2009 du préfet de l'Hérault lui refusant la délivrance d'un titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire français dans un délai d'un mois et fixant le Tchad comme pays de destination ;

Sur le refus du titre de séjour et l'obligation de quitter le territoire français :

Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 1er de la loi du 11 juillet 1979 susvisée : Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent (...) ; qu'aux termes de l'article 3 de cette même loi : La motivation exigée par la présente loi doit être écrite et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision. ; qu'aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile susvisé dans sa rédaction applicable au litige : L'obligation de quitter le territoire français n'a pas à faire l'objet d'une motivation. ;

Considérant, d'une part, que la décision par laquelle le préfet de l'Hérault a refusé de lui délivrer un titre de séjour vise les textes dont il est fait application ainsi que l'arrêt de la cour de céans en date du 23 juin 2008 enjoignant le réexamen de sa situation ; que cette décision précise, en outre, que M. A, de nationalité tchadienne, n'apporte pas la preuve qu'il est entré en France en 2002, qu'il ne peut bénéficier du renouvellement de son titre de séjour en qualité d'étranger malade au regard de l'avis émis par le médecin inspecteur le 3 février 2009, qu'il est célibataire et sans charge de famille, qu'il ne justifie pas du visa de long séjour prévu à l'article L. 311-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et qu'il n'allègue pas, enfin, encourir de risques pour sa vie en cas de retour dans son pays d'origine ; que le préfet de l'Hérault a, par ailleurs, rappelé dans sa décision attaquée que M. A avait vu sa demande d'asile rejetée par l'OFPRA le 30 septembre 2003 et par la commission de recours des réfugiés le 12 mai 2005 et estimé qu'il ne remplissait aucune des conditions pour bénéficier d'une admission au séjour ; qu'ainsi, contrairement à ce que M. A allègue, il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet n'aurait pas procédé à l'examen particulier de sa situation personnelle ou aurait méconnu son pouvoir de régularisation ; que, par suite, les moyens tirés de l'absence d'examen de la situation personnelle du requérant et du caractère insuffisant ou stéréotypé de la motivation de cette décision doivent être écartés ;

Considérant, d'autre part, qu'il résulte des dispositions qui précèdent que le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de la décision du préfet de l'Hérault l'obligeant à quitter le territoire français est inopérant ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention vie privée et familiale est délivrée de plein droit : (...) 11° A l'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve qu'il ne puisse effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans le pays dont il est originaire, sans que la condition prévue à l'article L. 313-7 soit exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative, après avis du médecin inspecteur de santé publique compétent au regard du lieu de résidence de l'intéressé (...) ; qu'aux termes de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : Ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français (...) : 10° L'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve qu'il puisse effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans le pays de renvoi (...) ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier, notamment de l'avis émis le 3 février 2009 par le médecin inspecteur de santé publique, que l'état de santé de M. A nécessite une prise en charge médicale dont le défaut ne devrait pas entraîner de conséquences d'une exceptionnelle gravité et que l'intéressé peut bénéficier effectivement d'un traitement approprié au Tchad, son pays d'origine ; que si le requérant produit un certificat médical en date du 3 mars 2009 selon lequel il souffre d'un état dépressif sévère réactionnel aux persécutions subies et au décès de son frère assassiné pour l'avoir aidé à fuir le Tchad qui nécessite une prise en charge psychologique et médicale régulière dont il ne pourrait pas bénéficier dans son pays d'origine, cet unique document rédigé par un praticien hospitalier psychiatre exerçant dans l'établissement de soins où est suivi M. A ne contredit pas valablement, en l'absence d'éléments précis et circonstanciés notamment sur l'absence d'offre de soins au Tchad, l'avis du médecin inspecteur de santé publique ; que, par suite, le préfet de l'Hérault n'a ni méconnu les dispositions précitées du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ni commis d'erreur manifeste d'appréciation en refusant le renouvellement à M. A d'un titre de séjour en qualité d'étranger malade ; que le préfet de l'Hérault n'a, pour les mêmes motifs, ni méconnu le 10ème de l'article L. 511-4 du code précité ni commis d'erreur manifeste d'appréciation en obligeant l'intéressé à quitter le territoire français ;

Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : 1 - Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2 - Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ;

Considérant que si M. A soutient avoir établi le centre de ses intérêts privés et familiaux en France, pays dans lequel il déclare résider depuis sept ans, il ressort des pièces du dossier que l'intéressé, à la date de la décision attaquée, est célibataire et sans charge de famille ; qu'il ne justifie pas, en outre, par les pièces qu'il verse avoir établi le centre de ses intérêts privés en France ; qu'il résulte de ce qui précède, et notamment de l'absence d'éléments de nature à justifier qu'il est dépourvu de toutes attaches familiales dans son pays d'origine dans lequel il a vécu la majeure partie de sa vie, que M. A n'est pas fondé à soutenir que la décision portant refus de titre de séjour aurait méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Considérant, en quatrième lieu, que le moyen tiré de la violation de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, en raison des risques encourus par M. A en cas de retour au Tchad, est inopérant à l'encontre de la décision portant obligation de quitter le territoire français, qui ne désigne pas le pays de renvoi ;

Sur la décision fixant le pays de destination :

Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants ;

Considérant, d'une part, que l'article 3 de l'arrêté en litige du 8 juin 2009 prévoit que M. A A l'expiration de ce délai (...) pourra être reconduit d'office à la frontière à destination du pays dont il a la nationalité ou de tout pays pour lequel elle établit être légalement admissible (...) ; que cet article, dans les termes où il est rédigé, doit être regardé comme comportant une décision distincte de renvoi de M. A vers le Tchad dont il a la nationalité ;

Considérant, d'autre part, que si à l'appui des conclusions qu'il a dirigées contre cette décision, M. A soutient encourir des risques en cas de retour dans le pays dont il a la nationalité, en raison notamment du fait qu'il a quitté son pays après avoir été enlevé et torturé par des militaires en tant que membre du mouvement de la démocratie et de la justice au Tchad, il n'apporte cependant pas d'éléments suffisamment circonstanciés permettant d'établir la réalité de ses allégations ainsi d'ailleurs que l'ont relevé tant l'Office français de protection des réfugiés et apatrides le 30 septembre 2003, que la commission de recours des réfugiés le 2 mai 2005 en rejetant sa demande d'asile ; qu'en outre, les avis de recherches produits à l'instance datés du 25 août 2004 et du 28 février 2007 ainsi que l'avis de convocation daté du 8 janvier 2007 ne présentent pas un caractère suffisamment probant et ne sont pas de nature à établir, dans les circonstances de l'espèce, que M. A serait soumis, en cas de retour dans son pays d'origine, à des peines ou des traitements inhumains ou dégradants comme le mentionnent, en des termes très généraux, les attestations rédigées le 22 janvier 2007 par des compatriotes résidant en France ; que, par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 3 de la convention européenne des droits de l'homme et des libertés fondamentales par la décision fixant le pays de destination doit être écarté ;

Considérant, en second lieu, que s'il est allégué par M. A que le Tchad ne l'a pas reconnu comme l'un de ses ressortissants lors de la procédure de reconduite à la frontière dont il a fait l'objet le 17 janvier 2007, cette assertion n'est toutefois pas établie par les pièces du dossier et notamment pas par le relevé informatique de consultation FNE qui se borne à faire apparaître en face de la rubrique APRF PREF 34 LE 17 01 2007 la mention PAS DE REPONSE DU CONSULAT ;

Sur les conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution. ; qu'aux termes de l'article L. 911-2 du même code : Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne à nouveau une décision après une nouvelle instruction, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision juridictionnelle, que cette nouvelle décision doit intervenir dans un délai déterminé ;

Considérant que le présent arrêt n'implique aucune mesure d'exécution ; que, par suite, les conclusions de M. A tendant à ce que la Cour enjoigne sous astreinte au préfet de l'Hérault de lui délivrer un titre de séjour ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa demande de titre de séjour, ne peuvent qu'être rejetées ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué le Tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande ; que ses conclusions présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ne peuvent, dès lors, qu'être rejetées ;

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. A est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. Azanmassou A et au ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration.

Copie en sera adressée au préfet de l'Hérault.

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 2ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 09MA03887
Date de la décision : 05/12/2011
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : M. BENOIT
Rapporteur ?: Mme Christine MASSE-DEGOIS
Rapporteur public ?: Mme FEDI
Avocat(s) : SCP DESSALCES RUFFEL

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2011-12-05;09ma03887 ?
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