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04/06/2013 | FRANCE | N°12MA03110

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 8ème chambre - formation à 3, 04 juin 2013, 12MA03110


Vu l'arrêt n° 06MA01628 du 17 mars 2009 par lequel la cour administrative d'appel de Marseille a, d'une part, annulé à la demande de M. D...B...la décision implicite par laquelle la société France Télécom a refusé de lui communiquer les documents mentionnés aux points 1) à 9) de l'avis de la commission d'accès aux documents administratifs en date du

1er octobre 2004, d'autre part enjoint à France Télécom de lui communiquer lesdits documents dans le délai de deux mois à compter de la notification de son arrêt, et, enfin, condamné France Télécom à lui verser la som

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Vu l'arrêt n° 06MA01628 du 17 mars 2009 par lequel la cour administrative d'appel de Marseille a, d'une part, annulé à la demande de M. D...B...la décision implicite par laquelle la société France Télécom a refusé de lui communiquer les documents mentionnés aux points 1) à 9) de l'avis de la commission d'accès aux documents administratifs en date du

1er octobre 2004, d'autre part enjoint à France Télécom de lui communiquer lesdits documents dans le délai de deux mois à compter de la notification de son arrêt, et, enfin, condamné France Télécom à lui verser la somme de 2 000 euros en réparation de son préjudice moral et de ses troubles dans les conditions d'existence ;

Vu l'arrêt n° 11MA01298 du 11 juillet 2011 par lequel la Cour a, après avoir prononcé un non-lieu, s'agissant de la demande d'exécution de l'arrêt précité en ce qui concerne la condamnation à verser la somme de 2 000 euros, enjoint à nouveau à France Télécom de communiquer à M. B...les documents mentionnés aux points 1) à 9) de l'avis de la commission d'accès aux documents administratifs en date du 1er octobre 2004 et a assorti cette injonction d'une astreinte de 100 euros par jour de retard ;

Vu la requête, enregistrée sous le n° 12MA03110 le 19 juin 2012 et le mémoire

en régularisation enregistré le 26 octobre 2012, présentés par le cabinet d'avocats Le Bars-

VanC..., par lesquels M. B...demande à la Cour de liquider l'astreinte prononcée le

11 juillet 2011 en condamnant France Télécom à lui verser la somme de 30 400 euros, portée le 26 octobre 2012 à la somme de 44 100 euros, et de mettre à la charge de cette société la somme de 3 500 euros au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi n° 78-753 du 17 juillet 1978 modifiée ;

Vu la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 modifiée ;

Vu la loi n° 90-568 du 2 juillet 1990 modifiée ;

Vu la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 30 avril 2013 :

- le rapport de M. Renouf, rapporteur,

- les conclusions de Mme Hogedez, rapporteur public,

- et les observations de Me A...C...pour M. B...;

1. Considérant que, par arrêt du 17 mars 2009 devenu définitif, la Cour de céans a, d'une part, annulé à la demande de M. B...la décision implicite par laquelle la société France Télécom a refusé de lui communiquer les documents mentionnés aux points 1) à 9) de l'avis de la commission d'accès aux documents administratifs en date du 1er octobre 2004, d'autre part, enjoint à France Télécom de lui communiquer lesdits documents dans le délai de deux mois à compter de la notification de son arrêt, et, enfin, condamné France Télécom à verser à l'intéressé la somme de 2 000 euros en réparation de son préjudice moral et de ses troubles dans les conditions d'existence ; que France Télécom s'étant bornée dans le cadre de l'instance n° 11MA01298 à justifier du versement de la somme de 2 000 euros, la Cour a, après avoir prononcé un non-lieu s'agissant de la demande d'exécution de l'arrêt précité sur ce point, enjoint à nouveau à France Télécom, par arrêt du 11 juillet 2011, de communiquer à M. B...les documents mentionnés aux points 1) à 9) de l'avis de la commission d'accès aux documents administratifs en date du 1er octobre 2004 et a assorti cette injonction d'une astreinte de 100 euros par jour de retard ; que France Télécom, qui ne soutient pas avoir communiqué à l'intéressé quelque document que ce soit postérieurement à ces arrêts, soutient pour la première fois depuis la demande d'accès aux documents en cause que M. B...lui a adressée le 6 juillet 2004, que les documents en cause ne sont pas communicables, ne sont pas identifiables et en tout état de cause n'existent pas ; qu'elle demande en outre la condamnation de M. B...à une amende pour résistance abusive ;

2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 911-7 du même code : "En cas d'inexécution totale ou partielle ou d'exécution tardive, la juridiction procède à la liquidation de l'astreinte qu'elle avait prononcée. / Sauf s'il est établi que l'inexécution de la décision provient d'un cas fortuit ou de force majeure, la juridiction ne peut modifier le taux de l'astreinte définitive lors de sa liquidation. / Elle peut modérer ou supprimer l'astreinte provisoire, même en cas d'inexécution constatée" ;

3. Considérant que si le juge de l'exécution saisi, sur le fondement des dispositions citées plus haut de l'article L. 911-7 du code de justice administrative, aux fins de liquidation d'une astreinte précédemment prononcée, peut la modérer ou la supprimer, même en cas d'inexécution constatée, compte-tenu notamment des diligences accomplies par l'administration en vue de procéder à l'exécution de la chose jugée, il n'a pas le pouvoir de remettre en cause les mesures décidées par le dispositif de la décision juridictionnelle dont l'exécution est demandée ; qu'ainsi, il n'appartient pas au juge de l'exécution de remettre en cause le bien-fondé de l'arrêt par lequel les documents dont la communication est en litige ont été jugés communicables au regard des dispositions de la loi susvisée du 11 juillet 1978 ; qu'en revanche, le défendeur est en droit, pour éviter la liquidation d'une astreinte, de se prévaloir de l'impossibilité dans laquelle il se trouverait d'exécuter l'injonction qui lui été adressée ; qu'en l'espèce, France Télécom est recevable, pour établir l'impossibilité qu'elle invoque de communiquer les documents dont la communication est exigée par l'injonction sous astreinte, à soutenir, d'une part, que lesdits documents ne peuvent être identifiés, et d'autre part qu'ils n'existent pas ;

S'agissant de l'impossibilité d'identifier les documents dont la communication est exigée :

4. Considérant, en premier lieu, que si la désignation des documents en cause comporte des imprécisions en raison de l'absence de toute date dans l'avis rendu par la CADA auquel les arrêts de la Cour renvoient, France Télécom, qui est l'employeur de M. B...ne saurait prétendre ne pouvoir identifier aucun des documents dont la communication est en litige dès lors que les documents en cause portent soit sur le déroulement de carrière de l'intéressé, soit sur la gestion des agents de France Télécom ; qu'ainsi, à titre d'exemple, les documents visés par le premier des 9 points de l'avis de la CADA portent sur les "documents portant notification de changement de fonctions et date de prise d'effet" ; que M. B...avait dressé, dans la demande qu'il a adressée à la Commission d'accès aux documents administratifs et que ladite commission a transmise à France Télécom en 2004, la liste de 12 fonctions exercées du 19 août 1996 au 1er novembre 2003 ; que, d'une part, France Télécom est en mesure de se reporter à la demande de M.B..., dont copie est au demeurant à nouveau produite dans le cadre de la présente instance, pour déterminer le contenu de l'avis faisant droit à cette demande et, par suite, le contenu de l'obligation de communication qui pèse sur elle ; que, d'autre part, France Télécom n'ignore pas les changements de fonctions qui ont été imposés à M. B...entre ces deux dates ; qu'enfin, France Télécom est la mieux à même de connaître le type de documents qu'elle adresse à un agent quand il change de fonctions ainsi que les cas dans lesquels il n'est dressé par principe aucun document ; que, de plus en l'espèce, s'agissant du déroulement de carrière de M.B..., les nombreuses requêtes de l'intéressé devant le tribunal administratif de Marseille rendent non vraisemblable le fait que France Télécom soit dans l'impossibilité de faire le point sur les documents dont elle dispose s'agissant des changements de fonctions de l'intéressé, comme sur ceux qui, éventuellement, n'ont pas été établis lors desdits changements de fonction ; que la circonstance que plusieurs documents relatifs aux changement de fonctions de M. B...ont été produits dans le cadre des instances ayant opposé France Télécom à l'intéressé n'est pas de nature à dispenser France Télécom de donner suite à l'injonction prononcée le 17 mars 2009 par la Cour s'agissant de ces quelques documents, ni à plus forte raison s'agissant des documents ayant le même objet mais n'ayant été produits dans aucune de ces instances ; qu'ainsi, l'allégation de principe selon laquelle l'absence de date des documents dont la communication est exigée rendrait impossible l'identification de ces documents et, par suite, leur communication n'est pas fondée et ne peut justifier l'inexécution des arrêts susvisés ;

5. Considérant, en second lieu, que si France Télécom soutient qu'elle est dans l'impossibilité d'identifier les documents visés aux points 2 et 5 de l'avis de la CADA, faute pour cet avis d'avoir défini leur objet, ledit objet peut être en l'espèce suffisamment déterminé par France Télécom en sa qualité d'employeur de M. B...en rapprochant cet avis de la demande à laquelle il donne satisfaction ; qu'au demeurant, à titre de simple exemple, si France Télécom soutient devant la Cour que "nul ne sait ce qu'est le document "5" dont la communication est réclamée : "code fonction référençant la fonction", M. B...a notamment produit le 8 juin 2008 dans le cadre de l'instance n° 06MA01628 qui a conduit à l'arrêt dont l'exécution est recherchée, un document dont il n'est pas contesté qu'il émane de France Télécom faisant apparaître un code pour chacune des fonctions qui y est visée ; qu'en communiquant ce type de document permettant pour chacune des fonctions exercées par M. B... pendant la période considérée d'identifier le code correspondant à ces fonctions, par ex LF02d pour "graphiste", France Télécom exécuterait sur ce point l'arrêt susvisé et rendrait sans objet l'injonction sous astreinte qui pèse sur elle ; que l'argument tiré d'une impossibilité d'identifier ce qui est demandé doit être écarté et ne peut, dès lors, justifier l'inexécution des arrêts susvisés ;

S'agissant de l'inexistence des documents dont la communication est exigée :

6. Considérant que l'inexistence des documents dont la communication est exigée n'est véritablement soutenue que pour les documents visés par le point 7 de l'avis de la CADA auquel les arrêts susvisés renvoient ; que la seule circonstance que la réglementation n'impose pas à France Télécom d'établir ces documents n'établit pas que des documents ayant l'objet mentionné dans l'avis ne sont pas établis en fonction de règles et d'usage internes à l'entreprise ; que des formulaires ayant pour objet des "entretiens hebdomadaires ou mensuels" ayant été produits par M.B..., il appartient à France Télécom, par exemple, de délimiter, si elle s'y croit fondée, les cas dans lesquels elle recourt à ces entretiens et les raisons pour lesquelles M. B...était hors de ce cadre, justifiant ainsi l'inexistence alléguée des documents ayant cet objet ; qu'en l'absence de précisions données par France Télécom, celle-ci n'établit pas que les documents visés aux points 7 de l'avis auquel les arrêts susvisés renvoient n'existent pas ; qu'ainsi, elle ne justifie pas être dans l'impossibilité d'exécuter lesdits arrêts sur ce point ;

7. Considérant en revanche que l'inexistence initiale des notations de M. B...pour les années 2003 et 2004 résulte d'arrêts constatant l'illégalité du refus par France Télécom d'établir ces notations ; que si France Télécom était tenue à la suite de ces arrêts de procéder à ces notations, les documents établis alors sont hors du présent litige dès lors qu'ils n'ont pu être établis que postérieurement à la demande de communication de documents de 2004 ; qu'ainsi, l'injonction de communiquer à M. B...les documents visés par l'avis de la CADA du 1er octobre 2004 ne porte pas sur les documents contenant la notation de M. B...pour les années 2003 et 2004 ;

8. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que France Télécom n'a pas exécuté les arrêts susvisés ; qu'il y a lieu, compte tenu de l'ensemble des intérêts en présence et de certaines des difficultés dont France Télécom fait état, et alors que l'arrêt prononçant l'astreinte a été notifié le 18 juillet 2011 à France Télécom qui en a accusé réception le 20 juillet 2011, de limiter à 30 000 euros le montant de la liquidation de l'astreinte pour la période écoulée du

20 août 2011 jusqu'au jour du présent arrêt ; que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu d'affecter un tiers du montant de l'astreinte à l'Etat ;

Sur les conclusions à fin de dommages et intérêts pour procédure abusive :

9. Considérant que, si France Télécom fait preuve depuis 2004 d'une attitude fautive envers M. B...s'agissant de l'accès à divers documents administratifs, il ne peut en revanche être reproché à l'intéressé une quelconque "procédure abusive" s'agissant des requêtes ayant eu pour objet d'obtenir la communication des documents en cause, ni à plus forte raison s'agissant de la présente procédure tendant à l'exécution d'arrêts enjoignant à France Télécom de procéder à cette communication ; qu'ainsi, lesdites conclusions ne peuvent qu'être rejetées ;

Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

10. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de M.B..., qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme que France Télécom demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

11. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de France Télécom la somme de 2 000 euros au titre des frais exposés par M. B...et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : France Télécom est condamnée à verser, d'une part, la somme de 20 000 euros (vingt mille euros) à M.B..., d'autre part la somme de 10 000 euros (dix mille euros) à l'Etat, au titre de la liquidation provisoire de l'astreinte prononcée par l'arrêt de la cour administrative d'appel de Marseille n° 11MA01298 en date du 11 juillet 2011.

Article 2 : France Télécom versera à M. B...la somme de 2 000 euros (deux mille euros) au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Les conclusions de France Télécom sont rejetées.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. D...B..., à France Télécom et au ministre de l'économie et des finances.

Copie en sera adressée au ministère public près la Cour de discipline budgétaire et financière.

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N° 12MA031102


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 8ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 12MA03110
Date de la décision : 04/06/2013
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Action en astreinte

Analyses

54-06-07-01-04 Procédure. Jugements. Exécution des jugements. Astreinte. Liquidation de l'astreinte.


Composition du Tribunal
Président : M. GONZALES
Rapporteur ?: M. Philippe RENOUF
Rapporteur public ?: Mme HOGEDEZ
Avocat(s) : CABINET D'AVOCATS LE BARS - VAN ROBAYS

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2013-06-04;12ma03110 ?
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