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17/06/2013 | FRANCE | N°11MA00384

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 2ème chambre - formation à 3, 17 juin 2013, 11MA00384


Vu la requête, enregistrée le 3 février 2011, présentée pour la SARL BD immobilier, dont le siège est 13 Résidence Les Granges d'Eyne à Eyne (66800), prise en la personne de son gérant, par la SCP d'Avocats Becque - Monestier - Dahan - Pons-Serradeil ;

la SARL BD immobilier demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0902773 du 3 décembre 2010 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande tendant notamment à l'annulation de la décision implicite par laquelle Electricité Réseau Distribution France (ERDF) a rejeté sa demande en dat

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Vu la requête, enregistrée le 3 février 2011, présentée pour la SARL BD immobilier, dont le siège est 13 Résidence Les Granges d'Eyne à Eyne (66800), prise en la personne de son gérant, par la SCP d'Avocats Becque - Monestier - Dahan - Pons-Serradeil ;

la SARL BD immobilier demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0902773 du 3 décembre 2010 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande tendant notamment à l'annulation de la décision implicite par laquelle Electricité Réseau Distribution France (ERDF) a rejeté sa demande en date du 18 février 2009 tendant à ce que le transformateur électrique implanté sur sa propriété soit retiré et à ce qu'il soit enjoint à ERDF, sous astreinte de 100 euros par jour de retard à l'expiration d'un délai de quinze jours à compter de la décision à intervenir, de procéder à l'enlèvement du transformateur électrique ;

2°) de déclarer la délibération prise le 4 août 1988 inexistante ;

3°) d'annuler la décision implicite de refus d'ERDF ;

4°) d'enjoindre à ERDF de retirer l'ouvrage litigieux dans un délai de 30 jours sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

5°) de mettre la somme de 3 000 euros à la charge d'ERDF au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

.......................................

Vu le jugement et la décision attaqués ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 18 juillet 2011, présenté pour la commune d'Eyne, prise en la personne de son maire, par MeA..., de la SCP A...Pech de Laclause Escale Knoepffler ; la commune conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 1 500 euros soit mise à la charge, respectivement, de la SARL BD immobilier et d'ERDF ;

.........................................

Vu la mise en demeure adressée le 27 novembre 2012 à ERDF, en application de l'article R. 612-3 du code de justice administrative, et l'avis de réception de cette mise en demeure ;

Vu le mémoire, enregistré le 24 février 2013, présenté pour la SARL BD immobilier, qui maintient ses conclusions précédentes, par les mêmes moyens ;

...........................

Vu le mémoire, enregistré le 18 avril 2013, présenté pour la SARL BD immobilier, qui maintient ses conclusions précédentes, par les mêmes moyens ;

.............................

Vu le mémoire enregistré le 18 avril 2013, présenté pour la commune d'Eyne, qui précise que les circonstances de fait sont demeurées inchangées ;

Vu le mémoire, enregistré le 19 avril 2013, présenté pour la SARL BD immobilier, portant communication d'une pièce ;

Vu le mémoire, enregistré le 22 mai 2013, présenté pour la commune d'Eyne, qui maintient ses conclusions précédentes ;

....................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi n° 2000-108 du 10 février 2000 ;

Vu la loi n° 2004-803 du 9 août 2004 ;

Vu le code civil ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 27 mai 2013 :

- le rapport de Mme Menasseyre, rapporteure,

- les conclusions de Mme Fedi, rapporteure publique,

- et les observations de MeC..., pour la SARL BD Immobilier et de MeB..., de la SCP A...Pech de Laclause Escale Knoepffler pour la commune d'Eyne ;

1. Considérant que la SARL BD immobilier a acquis, le 20 octobre 2004, deux parcelles de terrain auprès de la SARL Balcere-Roque-Goude ; qu'elle a obtenu un permis de construire pour la réalisation de garages en vue de leur vente ; qu'estimant que la présence d'un transformateur électrique appartenant à Electricité de France en surplomb des fondations des garages qu'elle avait entrepris de construire présentait, en raison de l'instabilité de cet ouvrage, un danger, elle a mis en demeure EDF de déplacer le transformateur et de remettre en état la parcelle ; qu'elle a, après que le juge judiciaire se fut déclaré incompétent, demandé le 18 février 2009 à ERDF de retirer ce transformateur ; que la société relève appel du jugement du 3 décembre 2010 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande tendant notamment à l'annulation de la décision implicite par laquelle ERDF a rejeté sa demande tendant à ce que le transformateur électrique implanté sur sa propriété soit retiré et à ce qu'il soit enjoint à ERDF, sous astreinte, de procéder à l'enlèvement du transformateur électrique ;

Sur la compétence de la juridiction administrative :

2. Considérant que la commune d'Eyne fait valoir que la société ERDF est une société de droit privé et soutient que le transformateur dont la SARL BD immobilier demande le déplacement ne saurait être qualifié d'ouvrage public à défaut d'être la propriété d'une personne publique ;

3. Considérant toutefois que les postes de transformation qui appartenaient à l'établissement public EDF avant la loi du 9 août 2004 transformant cet établissement en société avaient le caractère d'ouvrage public ; qu'étant directement affectés au service public de distribution électrique dont la société ERDF a désormais la charge, ils conservent leur caractère d'ouvrage public ;

4. Considérant que des conclusions tendant à ce que soit ordonné le déplacement ou la suppression d'un ouvrage public relèvent par nature de la compétence du juge administratif ; que le juge judiciaire ne saurait, sans s'immiscer dans les opérations administratives et sans empiéter ainsi sur la compétence du juge administratif, prescrire aucune mesure de nature à porter atteinte, sous quelque forme que ce soit, à l'intégrité ou au fonctionnement d'un ouvrage public ; qu'il n'en va autrement que dans l'hypothèse où la réalisation de l'ouvrage procède d'un acte qui est manifestement insusceptible de se rattacher à un pouvoir dont dispose l'autorité administrative et qu'aucune procédure de régularisation appropriée n'a été engagée ;

5. Considérant qu'il résulte de l'instruction que l'ouvrage public litigieux a été construit par EDF en application des pouvoirs qu'elle détient en application des articles 2 et 10 de la loi du 15 juin 1906 sur les distributions d'énergie ; que l'implantation de cet ouvrage, destiné à alimenter un lotissement en énergie électrique, a été autorisée par une délibération du conseil municipal d'Eyne du 4 août 1988 ; que dans ces circonstances, l'implantation de cet ouvrage n'a pas procédé d'un acte manifestement insusceptible de se rattacher à un pouvoir dont dispose l'administration ; que, par suite, les conclusions de la SARL BD immobilier tendant à la suppression ou au déplacement de l'ouvrage public que constitue le poste de transformation construit par EDF sur sa propriété et dont l'implantation ne procède pas d'un acte manifestement insusceptible de se rattacher à un pouvoir dont dispose l'autorité administrative, relèvent de la compétence des juridictions de l'ordre administratif ;

Sur la régularité du jugement :

6. Considérant qu'aux termes de l'article R. 741-2 du code de justice administrative : " La décision (...) contient (...) l'analyse des conclusions (...) " ;

7. Considérant qu'il résulte de l'examen du jugement attaqué que les conclusions de la SARL BD immobilier présentées pour la première fois dans son mémoire enregistré le 13 septembre 2010 et tendant à ce que la délibération prise par la commune d'Eyne le 4 août 1988 soit déclarée nulle et non avenue n'ont été ni analysées ni même visées par le tribunal, qui n'y a pas davantage statué ; que le jugement attaqué encourt dès lors l'annulation en tant qu'il comporte cette omission ;

8. Considérant qu'il appartient à la Cour d'évoquer dans cette mesure et, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par la SARL BD immobilier tant devant le tribunal administratif qu'en appel ;

Sur les conclusions dirigées contre la délibération du 4 août 1998 :

9. Considérant que par délibération du 4 août 1988, la commune d'Eyne a autorisé EDF à implanter un transformateur électrique sur la parcelle B n° 947, postérieurement acquise par la société appelante auprès de la société Balcere-Roque-Goude à laquelle la société EYNE 2600 l'avait cédée ;

10. Considérant, en premier lieu, que la légalité de cette délibération commande la régularité de l'implantation du transformateur litigieux ; que, s'agissant de la légalité du refus de déplacer cet ouvrage public, l'éventuelle irrégularité de son implantation est au nombre des éléments à prendre en compte pour apprécier les inconvénients de la présence de cet ouvrage pour les divers intérêts en présence, au regard des conséquences de son éventuelle démolition pour l'intérêt général ; qu'ainsi la SARL BD Immobilier justifie d'un intérêt pour demander l'annulation de cette délibération ;

11. Considérant, en deuxième lieu, que si ces conclusions ont été présentées pour la première fois par mémoire en réplique enregistré le 13 septembre 2010, elles présentent toutefois un lien suffisant avec la demande initiale de la société pour ne pas constituer des conclusions nouvelles ;

12. Considérant, en troisième lieu, que seule une publicité adéquate était susceptible de faire courir le délai de recours contentieux à l'égard des tiers ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que la délibération contestée ait fait l'objet d'une publication, ni qu'elle ait été notifiée à la société appelante ; que la circonstance que cette dernière ait excipé de l'illégalité de cette délibération devant le juge judiciaire n'a pas eu pour effet de faire courir le délai du recours contentieux qu'elle était susceptible d'exercer contre cette décision ;

13. Considérant, enfin qu'il ressort des pièces du dossier, ainsi que l'ont relevé les premiers juges qu'à la date de la délibération du 4 août 1988, la parcelle en cause n'appartenait plus à la commune d'Eyne, mais à la société EYNE 2600 ; que, par suite, la commune ne pouvait légalement autoriser EDF à implanter un transformateur sur cette parcelle sur laquelle elle n'avait aucun droit ; que cependant, cette grave irrégularité commise par la commune d'Eyne ne rend pas pour autant nulle et non avenue, mais simplement illégale ladite délibération ; que la société est toutefois recevable et fondée à en demander l'annulation ;

Sur les conclusions dirigées contre le refus de démolir le transformateur en cause :

14. Considérant que la commune soutient que le statut de la société ERDF ferait obstacle à ce que le silence gardé sur les demandes qui lui sont adressées puissent donner naissance à une décision implicite, de sorte que les conclusions dirigées contre son refus de déplacer le transformateur litigieux seraient irrecevables ; que, toutefois, aux termes de l'article R. 421-2 du code de justice administrative, " Sauf disposition législative ou réglementaire contraire, le silence gardé pendant plus de deux mois sur une réclamation par l'autorité compétente vaut décision de rejet. " ; que la société ERDF, désormais en charge du service public de distribution d'électricité était à ce titre l'autorité compétente pour se prononcer sur une demande de démolition d'un ouvrage public directement affecté au service public dont elle a la charge ; qu'il en résulte que, contrairement à ce que soutient la commune d'Eyne, son silence a donné naissance à une décision implicite de rejet que la SARL BD immobilier était recevable à contester ;

En ce qui concerne l'exception de prescription acquisitive :

15. Considérant qu'aux termes de l'article 2265 du code civil dans sa rédaction en vigueur jusqu'au 19 juin 2008 : " Celui qui acquiert de bonne foi et par juste titre un immeuble en prescrit la propriété par dix ans si le véritable propriétaire habite dans le ressort de la cour d'appel dans l'étendue de laquelle l'immeuble est situé ; et par vingt ans, s'il est domicilié... " ; qu'aux termes de l'article 690 du même code : " Les servitudes continues et apparentes s'acquièrent par titre, ou par la possession de trente ans " ; qu'il résulte de l'article 690 précité que la seule prescription applicable aux servitudes continues et apparentes est la prescription trentenaire ; que moins de trente ans se sont écoulés depuis l'installation du transformateur litigieux sur son terrain d'assiette ; qu'ainsi la commune d'Eyne n'est, en tout état de cause, pas fondée à soutenir que les dispositions de l'article 2272 du code civil, qui, depuis 2008, a repris les dispositions relatives à l'usucapion abrégé autrefois posées par les dispositions de l'article 2265 du code civil, feraient obstacle à ce qu'il soit fait droit à la demande d'enlèvement du transformateur en cause présentée par le propriétaire de son terrain d'assiette ;

En ce qui concerne la légalité de ce refus :

16. Considérant qu'il résulte de ce qui a été indiqué au point 13 que la délibération du 4 août 1988 ne peut être regardée comme un titre par lequel aurait été régulièrement autorisée l'implantation du transformateur en cause sur la parcelle acquise par la société appelante ; qu'ainsi, cette dernière est fondée à soutenir que l'ouvrage litigieux a été implanté irrégulièrement sur la parcelle B n° 947 dont elle est aujourd'hui propriétaire ;

17. Considérant que, lorsque le juge administratif est saisi d'une demande tendant à l'annulation d'une décision rejetant une demande de démolition d'un ouvrage public édifié irrégulièrement et à ce que cette démolition soit ordonnée, il lui appartient, pour déterminer, en fonction de la situation de droit et de fait existant à la date à laquelle il statue, s'il convient de faire droit à cette demande, de rechercher, d'abord, si, eu égard notamment à la nature de l'irrégularité, une régularisation appropriée est possible ; que, dans la négative, il lui revient ensuite de prendre en considération, d'une part, les inconvénients que la présence de l'ouvrage entraîne pour les divers intérêts publics ou privés en présence et notamment, le cas échéant, pour le propriétaire du terrain d'assiette de l'ouvrage, d'autre part, les conséquences de la démolition pour l'intérêt général, et d'apprécier, en rapprochant ces éléments, si la démolition n'entraîne pas une atteinte excessive à l'intérêt général ;

18. Considérant, en premier lieu, que les premiers juges ont refusé de faire droit à la demande de la SARL BD immobilier au motif, notamment, qu'une régularisation était possible à travers l'attribution d'une indemnité d'expropriation, amiable ou forcée, tenant compte tant de la valeur du terrain d'assiette de cet ouvrage que des divers préjudices et inconvénients qui pourraient résulter, pour la SARL, de la perte de la maîtrise foncière de tout ou partie de la parcelle B n° 947 ; qu'il résulte toutefois de l'instruction que, se prévalant de la motivation du jugement du tribunal, la société a sollicité ERDF aux fins d'envisager une régularisation, et a obtenu pour tout résultat une réponse dilatoire ; qu'il résulte également de l'instruction, notamment d'un constat d'huissier du 18 avril 2013 que le transformateur en cause demeure irrégulièrement implanté sur la propriété de la société appelante ; que la société ERDF, qui n'a pas défendu dans le cadre de la présente instance, a reconnu devant les premiers juges le maintien d'une emprise irrégulière ; que dans ces circonstances, alors que la société a acquis la parcelle en cause depuis 2004, que l'irrégularité de l'implantation du transformateur est connue au moins depuis l'ordonnance rendue le 5 août 2008 par le juge des référés du tribunal de grande instance de Perpignan, et que le jugement du tribunal administratif a été rendu il y a plus de deux ans et demi, soit dans un délai largement suffisant pour procéder aux régularisations dont la société ERDF évoquait l'éventualité devant les premiers juges, il ne résulte pas de l'instruction qu'une régularisation de cette emprise soit sérieusement envisageable ;

19. Considérant, en deuxième lieu, que, indépendamment des mentions relatives à l'absence de servitude et d'occupation figurant sur l'acte de vente du 20 octobre 2004, la SARL BD immobilier a fait l'acquisition du terrain en cause en 2004, alors que l'ouvrage litigieux y était déjà implanté ; que le constat d'huissier du 18 avril 2013 qu'elle verse aux débats fait apparaître que le transformateur litigieux se situe sur la partie haute d'un talus abrupt sur une hauteur de deux mètres environ au-dessus de la surface du sol, présentant un enrochement assez ancien, que " cette construction repose sur un massif en béton extrêmement ancien, présentant de nombreuses fissurations et épaufrures de surface et se délitant en sable au simple passage de la main ", l'huissier indiquant par ailleurs avoir " constaté un espace vide d'une largeur d'une quinzaine de centimètres environ, entre la base du massif en béton et la terre du talus " ; que, devant les premiers juges, ERDF n'a pas contesté que le déplacement de l'ouvrage public en cause soit techniquement réalisable, mais a seulement fait valoir que ce transformateur alimente un lotissement comportant 21 lots, que la mesure sollicitée impliquerait la recherche d'un nouvel emplacement pour le poste et pour le réseau qui en est issu et l'accord des propriétaires susceptibles d'être sollicités pour la reconstruction de cet ouvrage ; qu'ERDF ne démontre pas l'impossibilité de maintenir la desserte en énergie électrique des usagers ;

20. Considérant que la SARL ne saurait être tenue de supporter l'occupation sans droit ni titre ni contrepartie d'une partie du terrain dont elle est propriétaire ; qu'elle a tenté vainement d'obtenir la régularisation amiable de cette emprise, alors que la présence de l'ouvrage en cause et son instabilité apparente la privent de la possibilité de jouir pleinement de son bien et notamment d'y édifier la totalité des garages qu'elle avait initialement envisagé de construire sur cette parcelle ; que dans ces conditions, alors qu'ERDF a seulement fait état des inconvénients qui pourraient résulter de façon générale du déplacement du transformateur, sans justifier ni même invoquer un risque d'interruption du service public ou tout autre motif d'intérêt général susceptible de faire obstacle à une modification de l'implantation de cet ouvrage, le déplacement de cet ouvrage ne saurait être regardé comme portant une atteinte excessive à l'intérêt général, eu égard aux inconvénients de sa présence pour la SARL BD immobilier ; que, par suite, le refus implicitement opposé par ERDF à la demande de la société tendant à ce que le transformateur irrégulièrement implanté sur sa parcelle en soit retiré doit être annulé ;

Sur les conclusions à fin d'injonction et d'astreinte :

21. Considérant qu'aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution " ; qu'aux termes de l'article L. 911-3 du même code : " Saisie de conclusions en ce sens, la juridiction peut assortir, dans la même décision, l'injonction prescrite en application des articles L. 911-1 et L. 911-2 d'une astreinte qu'elle prononce dans les conditions prévues au présent livre et dont elle fixe la date d'effet "

22. Considérant qu'il y a lieu d'enjoindre à ERDF de procéder à l'enlèvement du transformateur litigieux dans un délai de six mois à compter de la notification de la présente décision, la SARL BD immobilier devant laisser la société pénétrer à cette fin sur sa propriété, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, sauf pour ERDF à avoir, dans ce délai, procédé à la régularisation de cette emprise ;

Sur les conclusions en garantie :

23. Considérant que les conclusions dirigées contre le refus de démolir un ouvrage public irrégulièrement édifié sont absorbées par celles qui tendent à ce qu'il soit enjoint de le démolir ; que la demande de la SARL BD immobilier dirigée contre le refus litigieux relève donc du plein contentieux ; qu'il appartient dès lors à la Cour, saisie par l'effet dévolutif de l'appel, de statuer sur les conclusions subsidiaires présentées en première instance par ERDF et de se prononcer ainsi sur l'appel en garantie que celle-ci avait formé à l'encontre de la commune d'Eyne ; qu'il résulte de ce qui a été dit au point 13 que l'illégalité de la délibération du 4 août 1988 autorisant EDF à implanter un transformateur sur la parcelle B n° 947 est à l'origine de l'irrégularité de l'implantation de l'ouvrage ; que par suite, ERDF est fondée à demander à être garantie des frais qui devront être engagés pour le retrait de l'ouvrage public de ladite parcelle ;

24. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la SARL BD immobilier est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté ses demandes ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

25. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la SARL BD immobilier qui n'a pas, dans la présente instance, la qualité de partie perdante, verse à la commune d'Eyne une quelconque somme au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ; que la société ERDF n'ayant pas non plus vis-à-vis de la commune la qualité de partie perdante, il ne saurait davantage être fait droit aux conclusions présentées au même titre par la commune et dirigées contre cette société ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, de mettre à la charge d'ERDF une somme de 2 000 euros à verser à la SARL BD immobilier au titre de ces dispositions ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Montpellier du 3 décembre 2010 est annulé.

Article 2 : La délibération du conseil municipal de la commune d'Eyne en date du 4 août 1988 autorisant EDF à installer un transformateur sur la parcelle B n° 947 est annulée.

Article 3 : Le refus implicite opposé par la société ERDF à la demande de la SARL BD immobilier tendant au retrait du transformateur installé sur sa parcelle est annulé.

Article 4 : Il est enjoint à la société ERDF d'enlever, dans un délai de six mois à compter de la notification de la présente décision et sous astreinte de 100 euros par jour de retard, le transformateur situé sur la propriété de la SARL BD immobilier, cette dernière devant laisser la société pénétrer à cette fin sur sa propriété, sauf pour la société ERDF à avoir, dans ce délai, procédé à la régularisation de cette emprise.

Article 5 : La société ERDF versera à la SARL BD immobilier une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 6 : La commune d'Eyne garantira la société ERDF d'une part des frais nécessités par l'enlèvement du transformateur et d'autre part de la condamnation prononcée à l'article 5.

Article 7 : Le surplus des conclusions de l'ensemble des parties est rejeté.

Article 8 : La société ERDF communiquera au greffe de la cour administrative d'appel de Marseille (2ème chambre) copie des actes justifiant des mesures prises pour exécuter l'article 4 du présent arrêt.

Article 9 : Le présent arrêt sera notifié à la SARL BD immobilier, à la société ERDF et à la commune d'Eyne.

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