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29/10/2013 | FRANCE | N°11MA00425

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 6ème chambre - formation à 3, 29 octobre 2013, 11MA00425


Vu la requête, enregistrée au greffe de la cour administrative d'appel de Marseille le 2 février 2011, sous le n° 11MA00425, présentée pour la société par actions simplifiée Leasys, dont le siège social est sis 60 boulevard du Point du Jour à Saint-Laurent-du-Var (06700), représentée par son président-directeur général, par MeC... ;

La société Leasys demande à la Cour :

1°) de réformer le jugement n° 0806340 du tribunal de Nice en date du 3 décembre 2010 ;

2°) de valider la clause pénale insérée dans le marché de prestations qu'elle a conclu a

vec le collège Port Lympia ;

3°) de condamner le collège Port Lympia à lui payer la somme d...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la cour administrative d'appel de Marseille le 2 février 2011, sous le n° 11MA00425, présentée pour la société par actions simplifiée Leasys, dont le siège social est sis 60 boulevard du Point du Jour à Saint-Laurent-du-Var (06700), représentée par son président-directeur général, par MeC... ;

La société Leasys demande à la Cour :

1°) de réformer le jugement n° 0806340 du tribunal de Nice en date du 3 décembre 2010 ;

2°) de valider la clause pénale insérée dans le marché de prestations qu'elle a conclu avec le collège Port Lympia ;

3°) de condamner le collège Port Lympia à lui payer la somme de 18 943,29 euros ;

4°) à titre subsidiaire, de condamner le collège Port Lympia à lui payer la somme de 31 292 euros hors taxes ;

5°) de condamner le collège Fort Lympia à lui payer 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

............................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la décision en date du 1er septembre 2013 du président de la cour administrative d'appel de Marseille portant désignation, en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative, de M. Laurent Marcovici, président assesseur, pour présider les formations de jugement en cas d'absence ou d'empêchement de M. Guerrive, président de la 6e chambre ;

Vu le code des marchés publics ;

Vu le code de l'éducation ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 7 octobre 2013 :

- le rapport de M. Thiele, rapporteur,

- les conclusions de Mme Felmy, rapporteur public,

- les observations de Me C...pour la société Leasys,

- et les observations de Me A...B...pour le collège Port Lympia ;

1. Considérant que, le 27 avril 2004, la société Leasys a conclu avec le collège Port Lympia plusieurs contrats portant sur l'entretien de photocopieurs pour une durée de 60 mois ; que, par courrier du 28 février 2006, le collège a décidé de résilier les contrats qui le liaient à la société Leasys ; que la société Leasys a alors demandé au collège de lui verser les pénalités dues en cas de résiliation en vertu de l'article 8 des contrats et s'élevant à un montant de 18 943,29 euros ; que, par lettre du 5 novembre 2007, la société Leasys a adressé une demande indemnitaire à laquelle il n'a pas été répondu ; que, par jugement n° 0806340 du 3 décembre 2010, le tribunal administratif de Nice a rejeté la requête de la société Leasys en estimant que la clause invoquée par la société Leasys, " qui revient à allouer au cocontractant la même somme à laquelle il aurait pu prétendre en cas d'exécution du marché, porte atteinte au pouvoir de la personne publique de résilier unilatéralement le marché pour un motif d'intérêt général " et en en déduisant que ladite clause était illégale et qu'il ne pouvait en être fait application ; que la société Leasys demande l'annulation de ce jugement ;

Sur la demande indemnitaire présentée à titre principal par la société Leasys :

En ce qui concerne le moyen tiré de l'inapplicabilité des contrats :

2. Considérant que le collège Port Lympia soutient qu'il ne peut être fait application des contrats dès lors que ceux-ci n'ont pas été transmis au préfet, en méconnaissance des dispositions des articles L. 2131-2, L. 3131-2 et L. 4131-2 du code général des collectivités territoriales ; qu'eu égard à la teneur de son argumentation, le collège Port Lympia doit être regardé comme invoquant la méconnaissance de l'obligation résultant non pas de ces dispositions, qui sont relatives à la transmission des actes des communes, des départements et des régions au représentant de l'Etat, mais de l'article L. 421-14 du code de l'éducation régissant la transmission des actes des collèges ;

3. Considérant, toutefois, que, lorsque les parties soumettent au juge un litige relatif à l'exécution du contrat qui les lie, il incombe en principe à celui-ci, eu égard à l'exigence de loyauté des relations contractuelles, de faire application du contrat ; que, dans le cas seulement où il constate une irrégularité invoquée par une partie ou relevée d'office par lui, tenant au caractère illicite du contenu du contrat ou à un vice d'une particulière gravité relatif notamment aux conditions dans lesquelles les parties ont donné leur consentement, il doit écarter le contrat et ne peut régler le litige sur le terrain contractuel ;

4. Considérant qu'eu égard à l'exigence de loyauté des relations contractuelles, le seul défaut de transmission du contrat en litige au service chargé du contrôle de légalité ne saurait être regardé comme d'une gravité telle que le juge doive écarter le contrat et que le litige qui oppose les parties ne doive pas être tranché sur le terrain contractuel ;

En ce qui concerne le bien-fondé de la demande :

5. Considérant qu'aux termes de l'article 8 des contrats liant la société Leasys au collège : " en cas de résiliation anticipée, le client reste redevable soit d'une indemnité de résiliation égale à cent pour cent (100 %) du montant des prestations engagées restant dues jusqu'au terme du contrat, soit d'une indemnité égale à cent pour cent (100 %) du volume des copies le séparant de l'échéance normale du contrat, laquelle indemnité est calculée sur la base du nombre de copies réalisées mensuellement au cours des 24 derniers mois précédant la lettre de résiliation du client (...) " ;

6. Considérant qu'en vertu des règles générales applicables aux contrats administratifs, l'autorité administrative peut toujours, pour un motif d'intérêt général, résilier un contrat, sous réserve des droits à indemnité du cocontractant ; que l'étendue et les modalités de cette indemnisation peuvent être déterminées par les stipulations du contrat, sous réserve qu'il n'en résulte pas, au détriment d'une personne publique, une disproportion manifeste entre l'indemnité ainsi fixée et le montant du préjudice résultant, pour le cocontractant, des dépenses qu'il a exposées et du gain dont il a été privé ;

7. Considérant que l'article 8 des contrats liant la société Leasys au collège a pour effet d'assurer à la société, jusqu'au terme du contrat, une rémunération correspondant à celle qu'elle aurait reçue, de manière prévisible, si elle avait continué à remplir ses obligations contractuelles ; qu'il existe une disproportion manifeste entre l'indemnité ainsi fixée et le montant du préjudice résultant, pour le cocontractant, des dépenses qu'il a exposées et du gain dont il a été privé ; qu'ainsi, c'est à bon droit que le tribunal administratif de Nice a écarté l'application de l'article 8 du contrat et en a écarté l'application ;

8. Considérant, par suite, que les conclusions présentées à titre principal par la société Leasys doivent être rejetées ;

Sur les conclusions présentées à titre subsidiaire par la société Leasys :

9. Considérant qu'en l'absence de toute faute de sa part, et même en l'absence de manquement de l'administration, la résiliation unilatérale d'une convention peut ouvrir, au profit de la société, droit à la réparation intégrale du préjudice subi ;

10. Considérant, en premier lieu, que la société Leasys soutient avoir mis à la disposition du collège un stock d'avance de toner, dont la valeur, à la date de la résiliation, s'élevait à 790,20 euros hors taxes ; qu'à cet égard, il résulte de l'article 5 du contrat, d'une part, que les produits consommables, tels que le toner, " donnent lieu à une facturation séparée, leur valeur n'étant pas comprise dans les prix indiqués au contrat de prestation " et, d'autre part, que le client prend l'engagement de rendre en fin de contrat à Leasys les produits consommables fournis et non encore utilisés ; que, si la société Leasys ne soutient pas que le stock d'avance de toner n'aurait pas fait l'objet de la facturation prévue par les stipulations précitées de l'article 5 du contrat, le collège ne conteste pas ne pas avoir restitué les produits consommables fournis et non encore utilisés après la résiliation du contrat ; que la société Leasys a donc subi un préjudice correspondant à la valeur de ce stock d'avance, pour un montant non contesté de 790,20 euros ;

11. Considérant, en deuxième lieu, que les autres dépenses liées à la maintenance des photocopieurs, et correspondant à la valeur des pièces de rechange et à la formation d'un technicien de la société, ont été exposées par la société Leasys avant la résiliation du contrat ; que la société Leasys n'établit pas que certaines de ces dépenses, qui visaient à assurer l'entretien du matériel, n'auraient pas été amorties à la date de la résiliation ; qu'ainsi, ces dépenses, qui trouvaient leur contrepartie dans la rémunération qui a été versée par le collège à la société, ne constituent ainsi pas des dépenses exposées à perte et susceptibles d'être indemnisées ;

12. Considérant, en troisième lieu, que la société invoque le préjudice qui résulterait pour elle de la non-restitution, par le collège, des photocopieurs, et évalue ce préjudice à la moitié du prix d'achat initial des photocopieurs qui s'élève selon elle à 53 866 euros ; qu'en effet, les conditions générales de vente et de service stipulaient, dans leur article 1er, " A la fin du présent contrat, le matériel sera restitué aux frais du client du fournisseur, du prestataire ou toute personne qu'elles auront désignée " ; que le collège ne conteste pas ne pas avoir restitué les photocopieurs ; que s'il a, par lettre du 15 mai 2006, indiqué à la société Leasys qu'il attendait le technicien envoyé par la société Leasys pour préparer les photocopieurs au transport afin de pouvoir les restituer, il n'invoque aucune circonstance, indépendante de sa volonté, qui aurait fait obstacle à cette démarche ; que, dès lors, la société Leasys est fondée à demander l'indemnisation du préjudice résultant pour elle de la non-restitution des photocopieurs ; que toutefois, d'une part, il ressort de la comparaison des factures produites par la société Leasys que le prix d'achat total des photocopieurs s'élevait à un montant total de 38 130 euros hors taxes, et non, comme la société le soutient, de 53 866 euros, cette dernière somme incluant deux fois une même facture de 15 736 euros ; que, d'autre part, il ressort des mentions portées sur les contrats que quatre des six photocopieurs en cause avaient déjà été utilisés et que leurs compteurs indiquaient déjà un nombre de copies important ; que, pour tenir compte de cet usage préalable, et en retenant une durée d'amortissement de cinq ans, correspondant aux usages de la profession, il sera fait une juste appréciation du prix de revente de l'ensemble des photocopieurs au moment de la résiliation du contrat en l'estimant à 7 500 euros ;

13. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de statuer sur la recevabilité des conclusions subsidiaires en tant que celles-ci tendent au versement d'une somme d'un montant supérieur au montant demandé en première instance, que la société Leasys est seulement fondée d'une part à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande, et d'autre part à demander l'indemnisation du préjudice subi à hauteur de 8 290,20 euros ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

14. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce qu'une somme quelconque soit mise à la charge de la société Leasys, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance ; qu'en revanche, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge du collège Port Lympia une somme de 2 000 euros à verser à la société Leasys en remboursement des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

Article 1er : L'article 1er du jugement n° 0806340 du 3 décembre 2010 du tribunal administratif de Nice est annulé.

Article 2 : Le collège Port Lympia est condamné à verser une somme de 8 290,20 euros (huit mille deux cent quatre-vingt-dix euros et vingt centimes) à la société Leasys en réparation du préjudice subi.

Article 3 : Le collège Port Lympia versera à la société Leasys une somme de 2 000 (deux mille) euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la société Leasys est rejeté.

Article 5 : Les conclusions du collège Port Lympia tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à la société par actions simplifiées Leasys et au collège Port Lympia.

Copie en sera adressée au ministre de l'éducation nationale.

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 6ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 11MA00425
Date de la décision : 29/10/2013
Type d'affaire : Administrative

Analyses

39-04-02-03 Marchés et contrats administratifs. Fin des contrats. Résiliation. Droit à indemnité.


Composition du Tribunal
Président : M. MARCOVICI
Rapporteur ?: M. Renaud THIELE
Rapporteur public ?: Mme FELMY
Avocat(s) : GIACOMONI - MAIGNE - PONT DENIS-REMIS - MILLEMANN AVOCATS ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2013-10-29;11ma00425 ?
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