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21/02/2014 | FRANCE | N°12MA04477

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 5ème chambre - formation à 3, 21 février 2014, 12MA04477


Vu la requête, enregistrée au greffe de la cour administrative d'appel de Marseille le 23 novembre 2012, sous le numéro 12MA04477, présentée pour M. B...A..., demeurant..., par la SCP Belfiore Grebille-Romand ;

M. A...demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1102195 du 3 octobre 2012 par lequel le magistrat désigné du tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision référencée 48 SI du 30 décembre 2010 par laquelle le ministre de l'intérieur a retiré un point au capital de son permis de conduire suite à l'infrac

tion commise le 15 juin 2010 et l'a informé de la perte de validité dudit permi...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la cour administrative d'appel de Marseille le 23 novembre 2012, sous le numéro 12MA04477, présentée pour M. B...A..., demeurant..., par la SCP Belfiore Grebille-Romand ;

M. A...demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1102195 du 3 octobre 2012 par lequel le magistrat désigné du tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision référencée 48 SI du 30 décembre 2010 par laquelle le ministre de l'intérieur a retiré un point au capital de son permis de conduire suite à l'infraction commise le 15 juin 2010 et l'a informé de la perte de validité dudit permis pour solde de points nul, et des décisions par lesquelles cette même autorité a retiré deux, trois, deux, quatre, trois et un points au capital de son permis de conduire suite aux infractions commises respectivement les 6 juillet 2003, 12 janvier 2006, 21 juillet 2006, 19 mars 2007, 13 mai 2007 et 17 mai 2010, ensemble la décision implicite de rejet de son recours gracieux ;

2°) d'annuler lesdites décisions ;

3°) d'enjoindre au ministre de l'intérieur de lui restituer son permis de conduire assorti de l'intégralité de ses points sous astreinte de 100 euros par jour de retard, dans un délai de huit jours à compter de l'arrêt à intervenir ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

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Vu la décision du président de la formation de jugement de dispenser le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de procédure pénale ;

Vu le code de la route ;

Vu l'avis d'audience adressé le 15 janvier 2014 ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 31 janvier 2014 le rapport de Mme Pena, premier conseiller ;

1. Considérant que M. A...relève appel du jugement par lequel le magistrat désigné du tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision référencée 48 SI du 30 décembre 2010 par laquelle le ministre de l'intérieur a retiré un point au capital de son permis de conduire suite à l'infraction commise le 15 juin 2010 et l'a informé de la perte de validité dudit permis pour solde de points nul, et des décisions par lesquelles cette même autorité a retiré deux, trois, deux, quatre, trois et un points au capital de son permis de conduire suite aux infractions commises respectivement les 6 juillet 2003, 12 janvier 2006, 21 juillet 2006, 19 mars 2007, 13 mai 2009 et 17 mai 2010 ensemble la décision implicite de rejet de son recours gracieux ;

Sur les conclusions à fin d'annulation dirigées contre les décisions référencées 48 portant retrait de points :

En ce qui concerne le moyen tiré du défaut de notification de chacune des décisions de retraits de points :

2. Considérant que l'appelant soutient qu'il n'aurait jamais été destinataire des décisions de retrait de points relatives aux infractions précédemment commises et rappelées dans la décision référencée 48 SI en date du 5 novembre 2010 ; que, cependant, la formalité de la notification au conducteur des retraits de points de son permis de conduire, prévue par les articles L. 223-3 et R. 223-3 du code de la route, ne conditionne pas la régularité de la procédure suivie, et partant, la légalité de ces retraits ; qu'en effet, cette procédure a pour seul objet de rendre ceux-ci opposables à l'intéressé et de faire courir le délai dont dispose celui-ci pour en contester la légalité devant la juridiction administrative ; que, par suite, l'absence de notification de chacune des décisions de retrait de points suite aux infractions commises les 6 juillet 2003, 12 janvier 2006, 21 juillet 2006, 19 mars 2007, 13 mai 2009, 17 mai 2010 et 15 juin 2010 est sans influence sur la légalité des dites décisions ;

En ce qui concerne le moyen tiré de l'absence d'imputabilité à l'intéressé des différentes infractions commises :

3. Considérant que M. A...ne saurait utilement contester devant la juridiction administrative l'imputabilité des infractions relevées à son encontre les 6 juillet 2003, 12 janvier 2006, 21 juillet 2006, 19 mars 2007, 13 mai 2009, 17 mai 2010 et 15 juin 2010 dès lors qu'il n'appartient qu'à l'autorité judiciaire, dans le cadre de la procédure pénale, de se prononcer sur les conditions dans lesquelles a été constatée par les services de police une infraction au code de la route ; que, par suite, faute d'avoir été invoquée en temps utile devant le juge judiciaire, la contestation de cette imputabilité ne constitue pas un moyen susceptible d'être soulevé devant le juge administratif à l'encontre des décisions portant retrait de points prises par le ministre de l'intérieur ; que, dès lors, le moyen susmentionné soulevé par M. A...doit être écarté ;

En ce qui concerne le moyen tiré de l'absence d'information préalable sur les retraits de points encourus :

4. Considérant que la délivrance, au titulaire du permis de conduire à l'encontre duquel est relevée une infraction donnant lieu à retrait de points, de l'information prévue aux articles L. 223-3 et R. 223-3 du code de la route constitue une garantie essentielle donnée à l'auteur de l'infraction pour lui permettre, avant d'en reconnaître la réalité par le paiement d'une amende forfaitaire ou l'exécution d'une composition pénale, d'en mesurer les conséquences sur la validité de son permis et éventuellement d'en contester la réalité devant le juge pénal ; qu'elle revêt le caractère d'une formalité substantielle et conditionne la régularité de la procédure au terme de laquelle le retrait de points est décidé ; qu'il appartient à l'administration d'apporter la preuve, par tous moyens, qu'elle a satisfait à l'obligation d'information préalable ;

Quant aux infractions relevées les 6 juillet 2003, 12 janvier 2006 et 19 mars 2007 :

5. Considérant qu'aux termes des articles R. 49-1 et R. 49-10 du code de procédure pénale, quand est constatée une infraction au code de la route à laquelle est applicable la procédure d'amende forfaitaire, un avis de contravention et une carte de paiement dont le modèle est fixé par arrêté du garde des sceaux, ministre de la justice, sont remis immédiatement au conducteur ou adressés postérieurement au titulaire du certificat d'immatriculation ; que si les procès-verbaux établis par les officiers ou agents de police judiciaire pour constater des infractions au code de la route font foi jusqu'à preuve contraire en ce qui concerne la constatation des faits constitutifs des infractions, il appartient au juge d'apprécier, au vu des divers éléments de l'instruction, et notamment des mentions du procès-verbal, si le contrevenant a reçu l'information prévue par l'article L. 223-3 du code de la route la réalité de l'infraction et d'en mesurer les conséquences sur la validité de son permis : que si l'intervention de l'arrêté du 5 octobre 1999, dont les dispositions pertinentes ont été codifiées aux articles A. 37 à 37-4 du code de procédure pénale, ne garantit pas que des formulaires établis selon un modèle antérieur, où le document comportant les informations requises et celui nécessaire au paiement étaient entièrement distincts, n'aient pas continué à être utilisés pour la constatation des infractions, il résulte tant du règlement du Conseil du 3 mai 1998 concernant l'introduction de l'euro que des mesures législatives et réglementaires prises pour sa mise en oeuvre, s'agissant notamment du montant des amendes, que de tels formulaires, libellés en francs, n'ont ou être employés après le 1er janvier 2002 ; que, pour les infractions relevées avec interception du véhicule à compter de cette date, la mention au système national des permis de conduire du paiement ultérieur de l'amende forfaitaire permet donc au juge d'estimer que le titulaire du permis s'est vu remettre un avis de contravention comportant les informations requises ;

6. Considérant qu'en l'espèce, s'agissant des infractions relevées avec interception du véhicule les 6 juillet 2003 et 12 janvier 2006, il résulte du relevé d'information intégral que M. A... s'est acquitté ultérieurement du paiement de l'amende forfaitaire correspondant à ces deux infractions ; que par suite, faute pour l'appelant de démontrer avoir été destinataire d'avis de contravention inexacts ou incomplets, il doit être regardé comme établi que l'administration s'est acquittée envers lui de son obligation d'information préalable ;

7. Considérant que s'agissant de l'infraction relevée le 19 mars 2007, l'administration produit le procès-verbal de contravention comportant les informations requises ; que nonobstant l'absence de signature du contrevenant sur ledit procès-verbal, l'administration doit être regardée comme ayant apporté la preuve qu'elle a satisfait à son obligation d'information en ce qui concerne cette infraction qui, ainsi qu'il ressort des mentions portées sur le relevé d'information intégral du contrevenant, a donné lieu au paiement de l'amende forfaitaire ;

Quant à l'infraction relevée le 21 juillet 2006 :

8. Considérant qu'il résulte de l'instruction et, notamment, des mentions figurant dans le relevé d'information intégral relatif à la situation du permis de conduire de M.A..., produit par le ministre de l'intérieur, que l'infraction commise le 21 juillet 2006 a été enregistrée comme devenue " définitive " le jour même ; que ces mentions ne suffisent, à elles seules, à établir les modalités de paiement de l'amende forfaitaire ; que faute de produire, pour ladite infraction, la souche de quittance dépourvue de réserve ou le procès-verbal de l'infraction, le ministre de l'intérieur n'apporte pas la preuve qu'il a, en l'espèce, satisfait à son obligation d'information ; que, dès lors, la décision retirant deux points sur le capital affecté au permis de conduire de M. A... à la suite de l'infraction susmentionnée est entachée d'illégalité ;

Quant à l'infraction relevée le 13 mai 2009 :

9. Considérant que s'agissant de l'infraction du 13 mai 2009 relevée avec interception du véhicule, le ministre de l'intérieur produit une copie du procès-verbal de contravention qui mentionne la qualification de l'infraction en cause et l'information suivant laquelle un retrait de points est encouru ; qu'il porte également, sous la mention " le contrevenant reconnaît avoir reçu la carte de paiement et l'avis de contravention ", la signature de M. A...; qu'il doit en être déduit que l'appelant a nécessairement pris connaissance au préalable du contenu des documents qu'il a signés, et, notamment de la mention relative à la délivrance de la carte de paiement et de l'avis de contravention, ces derniers documents étant établis sur les modèles du centre d'enregistrement et de révision des formulaires administratifs (CERFA) qui comportent les mentions exigées par les articles L. 223-3 et R. 223-3 du code de la route ; que, par suite, l'administration doit être regardée comme s'étant acquittée de l'obligation qui lui incombe en vertu des articles L. 223-3 et R. 223-3 du code de la route ;

Quant aux infractions relevées les 17 mai 2010 et 15 juin 2010 :

10. Considérant que s'agissant des infractions constatées par radar automatique les 17 mai 2010 et 15 juin 2010, M. A...n'a pas payé les amendes forfaitaires correspondantes, et des titres exécutoires de l'amende forfaitaire majorée ont été émis ; que, dans ces conditions, il ne peut être tenu pour établi que l'intéressé a bien reçu les avis de contravention correspondants avec les informations prévues par les dispositions précitées du code de la route ; qu'il y a lieu, pour ce motif, d'annuler les décisions de retrait de un et un points consécutives aux infractions sus-énumérées ;

Sur les conclusions à fin d'annulation dirigées contre la décision référencée 48 SI :

En ce qui concerne le moyen tiré de ce qu'il était en droit de bénéficier d'un crédit de quatre points à la suite du stage de sensibilisation à la sécurité routière :

11. Considérant que M. A...ayant achevé son stage de sensibilisation le 8 janvier 2011, soit postérieurement à la décision 48 SI contestée, le moyen tiré de ce que son permis de conduire aurait dû être crédité de quatre points supplémentaires dès le 9 janvier 2011 et la décision référencée 48 SI n'aurait jamais dû intervenir, est inopérant ;

En ce qui concerne le moyen tiré de l'insuffisance de la motivation :

12. Considérant qu'après avoir constaté que l'information requise par le code de la route a été délivrée au contrevenant et que la réalité de l'infraction est établie, le ministre de l'intérieur se trouve en situation de compétence liée lorsqu'il procède au retrait de points prévu par l'article R. 223-3 du code de la route et constate que ce retrait aboutit à un nombre nul de points affectés au permis de conduire ; que, dès lors, M. A...ne peut, en tout état de cause, utilement soutenir que la décision référencée 48 SI du 30 décembre 2010 serait entachée d'une motivation insuffisante ;

13. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que les quatre points susmentionnés ont été irrégulièrement retirés au permis de conduire de M. A...; qu'ainsi, à la date du 30 décembre 2010, le solde de points du permis de conduire du requérant n'était pas nul ; que, par suite, il est également fondé à demander l'annulation de la décision référencée 48 SI en date du 30 décembre 2010 en tant qu'elle prononce l'invalidation de son permis de conduire ;

14. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. A...est fondé à demander l'annulation du jugement attaqué en tant qu'il a rejeté sa demande tendant à l'annulation des trois décisions par lesquelles le ministre de l'intérieur a retiré deux, un et un points du capital affecté à son permis de conduire suite aux infractions relevées à son encontre les 21 juillet 2006, 17 mai 2010 et 15 juin 2010 et de la décision référencée 48 SI en date du 30 décembre 2010 en tant qu'elle prononce l'invalidation de son permis de conduire ;

Sur les conclusions aux fins d'injonction :

15. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède qu'il y a lieu d'enjoindre au ministre de l'intérieur de restituer à M. A...les quatre points illégalement retirés au capital de son permis de conduire et d'en tirer toutes les conséquences à la date de la nouvelle décision sur le capital de points et le droit de conduire de M. A...;

Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

16. Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation. " ; que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de laisser à chacune des parties la charge des frais qu'elle a engagés pour l'instance ;

DÉCIDE :

Article 1er : La décision 48 SI en date du 30 décembre 2010 du ministre de l'intérieur, en tant qu'elle a invalidé le permis de conduire de M. A...pour solde de points nul et lui a opposé les retraits de deux, un et un points suite aux infractions respectivement constatées les 21 juillet 2006, 17 mai 2010 et 15 juin 2010, est annulée.

Article 2 : Il est enjoint au ministre de l'intérieur de restituer à M. A...les quatre points illégalement retirés au capital de son permis de conduire et d'en tirer toutes les conséquences à la date de sa nouvelle décision sur le capital de points et le droit de conduire de M.A....

Article 3 : Le jugement du tribunal administratif de Nice du 3 octobre 2012 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de M. A...est rejeté.

Article 5 : Les conclusions du ministre de l'intérieur présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à M. B...A...et au ministre de l'intérieur.

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N° 12MA04477

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 5ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 12MA04477
Date de la décision : 21/02/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

49-04-01-04 Police. Police générale. Circulation et stationnement. Permis de conduire.


Composition du Tribunal
Président : M. BOCQUET
Rapporteur ?: Mme Eleonore PENA
Rapporteur public ?: Mme MARZOUG
Avocat(s) : SCP ARTAUD BELFIORE CASTILLON GREBILLE-ROMAND

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2014-02-21;12ma04477 ?
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