La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

12/05/2014 | FRANCE | N°12MA02623

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 5ème chambre - formation à 3, 12 mai 2014, 12MA02623


Vu la requête, enregistrée le 28 juin 2012 au greffe de la cour administrative d'appel de Marseille, sous le n° 12MA02623, présentée pour Mme A...C..., demeurant..., par Me B...;

Mme C...demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1201009 du 13 juin 2012 par lequel le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté en date du 3 février 2012 par lequel le préfet des Alpes-Maritimes a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français et a fixé la Russie comme pays de desti

nation, à ce qu'il soit enjoint à cette même autorité de lui délivrer un titre...

Vu la requête, enregistrée le 28 juin 2012 au greffe de la cour administrative d'appel de Marseille, sous le n° 12MA02623, présentée pour Mme A...C..., demeurant..., par Me B...;

Mme C...demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1201009 du 13 juin 2012 par lequel le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté en date du 3 février 2012 par lequel le préfet des Alpes-Maritimes a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français et a fixé la Russie comme pays de destination, à ce qu'il soit enjoint à cette même autorité de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " à compter de la notification du jugement, subsidiairement de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour dans l'attente du réexamen de sa situation et de la détermination du pays à destination duquel elle est susceptible d'être reconduite d'office, et à la mise à la charge de l'Etat de la somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, ledit arrêté ;

3°) d'enjoindre au préfet des Alpes-Maritimes de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, subsidiairement de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour dans l'attente du réexamen de sa situation et de la détermination du pays à destination duquel elle est susceptible d'être reconduite d'office ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 000 euros à verser à Me B...au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridictionnelle ;

------------------------------------------------------------------------------------------------------

Vu la décision du président de la formation de jugement de dispenser le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention internationale relative aux droits de l'enfant signée à New-York le 26 janvier 1990 ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 modifiée ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 18 avril 2014 le rapport de M. Pocheron, président-assesseur ;

1. Considérant que MmeC..., de nationalité russe, relève appel du jugement en date du 13 juin 2012 par lequel le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande dirigée contre l'arrêté en date du 3 février 2012 par lequel le préfet des Alpes-Maritimes a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français et a fixé la Russie comme pays de destination ;

Sur les conclusions aux fins d'annulation de la décision préfectorale lui refusant un titre de séjour :

2. Considérant que l'arrêté litigieux énonce les éléments de fait et de droit qui en constituent le fondement ; que, notamment, il mentionne que Mme C..." a déclaré être mariée et mère de deux enfants dont un mineur" ; qu'ainsi la décision contestée, qui n'avait pas à peine d'irrégularité à viser l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant, est suffisamment motivée au regard des exigences de la loi susvisée du 11 juillet 1979 ;

3. Considérant que Mme C...soutient que le préfet a commis une erreur de fait en estimant que la décision du 24 février 2010 de l'office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) rejetant sa demande d'asile lui a été régulièrement notifiée ; que, toutefois, il ressort de la décision du 26 octobre 2011 de la cour nationale du droit d'asile (CNDA) ayant examiné le recours formé par l'intéressée contre ladite décision que celle-ci a été présentée, le 27 février 2010, sous pli recommandé, à la dernière adresse indiquée par la requérante puis a été renvoyée à l'office conformément à la réglementation postale, l'intéressée s'étant abstenue de retirer le pli dans le délai de mise en instance ; que Mme C...n'établit pas que l'absence de remise du pli recommandé résulterait d'une faute commise par les services de la poste, la seule production d'une attestation du directeur de l'établissement de Nice-Thiers du 7 juillet 2010 selon laquelle ses services recherchaient la lettre recommandée n° 2 c 035 736 4612 5 qui n'avait pu être remise à l'intéressée n'étant pas de nature par elle-même à démontrer qu'il s'agissait du pli contenant la décision du 24 février 2010 de l'OFPRA ;

qu'en outre, il ressort, d'une part, d'une télécopie du 19 avril 2010 transmise par l'association " ALC " à l'OFPRA en vue d'obtenir une copie de la décision de rejet du 24 février 2010, que Mme C..." n'a pu se rendre à temps à la poste pour retirer sa décision de rejet de l'OFPRA " et d'autre part, d'un courrier de l'OFPRA du 25 février 2011 que cet organisme a réexpédié ladite décision les 21 avril et 17 juin 2010 suite aux demandes formulées par l'association " ALC " les 22 mars et 19 avril 2010 et par l'intéressée le 20 mai 2010, mais que ces deux envois lui ont été retournés par les services postaux avec la mention " non réclamé, retour à l'envoyeur " ; que, dès lors, Mme C...n'est pas fondée à soutenir que la notification de la décision du 24 février 2010 de l'OFPRA rejetant sa demande d'asile ne pouvait pas être regardée par le préfet comme ayant été régulièrement effectuée ; qu'il suit de là que la requérante n'est en tout état de cause pas fondée à alléguer que le refus de délivrance de titre de séjour en cause aurait été pris sur le fondement d'une décision irrégulière de la CNDA méconnaissant les stipulations de l'article 6-1 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du fait que son recours a été rejeté comme irrecevable pour tardiveté sans préalablement procéder à son audition ;

4. Considérant que le moyen tiré de la méconnaissance par le préfet des Alpes-Maritimes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales est inopérant à l'encontre de la décision par laquelle il a refusé de délivrer un titre de séjour à MmeC..., ladite décision n'emportant pas par elle-même éloignement de l'intéressée à destination du pays dans lequel elle soutient être exposée à des risques ;

5. Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, " Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. " ; qu'il ressort des pièces du dossier que Mme C...est entrée sur le territoire français le 18 juin 2009 sous couvert d'un visa d'une durée de trente jours ; que son époux, également de nationalité russe et débouté du droit d'asile, dont elle soutient sans l'établir qu'il aurait quitté les Alpes-Maritimes, voire la France, sans donner de nouvelles à sa famille, a fait le 3 février 2012 l'objet d'un refus de délivrance de titre de séjour et d'une obligation de quitter le territoire français ; que ses parents et son frère résident en Russie, où elle a elle-même vécu jusqu'à l'âge de quarante-deux ans ; qu'à la date de l'arrêté litigieux, la requérante ne résidait en France que depuis un peu plus de deux ans et demi, soit une durée insuffisante pour établir que ce pays était l'unique centre de ses intérêts privés et familiaux alors qu'elle a passé l'essentiel de sa vie dans son pays d'origine ; que les circonstances, à les supposer même établies, que son premier enfant résiderait et travaillerait régulièrement sur le territoire national et que son deuxième enfant mineur y était scolarisé sont également insuffisantes pour considérer que la décision contestée a porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des buts poursuivis ; que, par suite, les moyens tirés de la méconnaissance des stipulations précitées de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'erreur manifeste d'appréciation de la situation personnelle et familiale de Mme C...doivent être écartés ;

Sur les conclusions à fin d'annulation de la décision fixant le pays de destination :

6. Considérant qu'aux termes de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger qui fait l'objet d'une mesure d'éloignement est éloigné : 1° A destination du pays dont il a la nationalité, sauf si l'Office français de protection des réfugiés et apatrides ou la Cour nationale du droit d'asile lui a reconnu le statut de réfugié ou lui a accordé le bénéfice de la protection subsidiaire ou s'il n'a pas encore été statué sur sa demande d'asile ; 2° Ou à destination du pays qui lui a délivré un document de voyage en cours de validité ; 3° Ou à destination d'un autre pays dans lequel il est légalement admissible. Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950. " ; qu'aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants. " ; qu'en application de ces dispositions et stipulations, il appartient à l'autorité administrative de s'assurer, sous le contrôle du juge que les mesures qu'elle prend n'exposent pas l'étranger à des risques sérieux pour sa liberté ou son intégrité physique, non plus qu'à des traitements contraires à l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que si l'autorité administrative est en droit de prendre en considération, à cet effet, les décisions qu'ont prises, le cas échéant, l'OFPRA ou la CNDA saisis par l'étranger de demandes de titre de réfugié, l'examen et l'appréciation, par ces dernières instances, des faits allégués par le demandeur d'un tel statut et des craintes qu'il énonce au regard des conditions émises par la convention de Genève du 28 juillet 1951 et le protocole signé à New York le 31 janvier 1967, ne lient pas l'autorité administrative et sont sans influence sur l'obligation qui est la sienne de vérifier, au vu des éléments du dossier dont elle dispose, que les mesures qu'elle prend ne méconnaissent pas les dispositions précitées de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

7. Considérant qu'il ressort des motifs de l'arrêté litigieux que le préfet des Alpes-Maritimes, qui ne s'est pas senti lié par les décisions de l'OFPRA et de la CNDA, a procédé à un examen particulier de la situation de Mme C...au regard des risques qu'elle aurait encourus en cas de retour en Russie ; qu'ainsi le moyen tiré de la violation de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté ; qu'ainsi qu'il a été dit plus haut, la circonstance que la CNDA a rejeté son recours comme irrecevable est sans incidence sur la légalité de la décision querellée ;

8. Considérant que si Mme C...soutient qu'elle ne peut être éloignée à destination de la Russie, sa vie et sa liberté y étant menacées, elle n'établit aucunement les risques allégués, ni qu'elle serait exposée à des traitements contraires aux stipulations l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales dans son pays d'origine ; que, par suite, les moyens tirés de la violation des stipulations précitées de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'erreur d'appréciation commise par le préfet des Alpes-Maritimes doivent être écartés ;

9. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme C...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande ; que ses conclusions aux fins d'injonction ne peuvent par voie de conséquence qu'être rejetées ;

Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

10. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, verse à Mme C...la somme que celle-ci réclame au titre des frais qu'elle a exposés et qui ne sont pas compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme C...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A...C...et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet des Alpes-Maritimes.

''

''

''

''

2

N° 12MA02623


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 5ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 12MA02623
Date de la décision : 12/05/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : M. BOCQUET
Rapporteur ?: M. Michel POCHERON
Rapporteur public ?: Mme MARZOUG
Avocat(s) : ROSSLER

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2014-05-12;12ma02623 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award