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11/12/2014 | FRANCE | N°12MA04742

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 3ème chambre - formation à 3, 11 décembre 2014, 12MA04742


Vu la requête, enregistrée le 10 décembre 2012, présentée pour M. A...B..., demeurant..., par la SELARL Thema-Juris, agissant par Me C... ;

M. B...demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1005491 du 4 octobre 2012 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande tendant à la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée et des pénalités correspondantes qui lui ont été réclamés au titre de la période du 1er janvier 2004 au 31 décembre 2006 ;

2°) de prononcer la décharge de ces rappels et de ces pénalités ;
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Vu la requête, enregistrée le 10 décembre 2012, présentée pour M. A...B..., demeurant..., par la SELARL Thema-Juris, agissant par Me C... ;

M. B...demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1005491 du 4 octobre 2012 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande tendant à la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée et des pénalités correspondantes qui lui ont été réclamés au titre de la période du 1er janvier 2004 au 31 décembre 2006 ;

2°) de prononcer la décharge de ces rappels et de ces pénalités ;

3°) à titre subsidiaire, de réformer le jugement et de prononcer la réduction des rappels sur la période 2004-2005 ou la période 2006 ;

.......................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 20 novembre 2014 :

- le rapport de M. Sauveplane,

- les conclusions de M. Maury, rapporteur public ;

1. Considérant que M. B...exploite à titre individuel un fonds de commerce de restauration rapide à Sète ; que cette activité a fait l'objet d'une vérification de comptabilité portant sur les exercices 2004 et 2005 à l'issue de laquelle l'administration, après avoir écarté la comptabilité comme non probante, a reconstitué le chiffre d'affaires de l'activité ; que cette reconstitution a mis en évidence une insuffisance du chiffre d'affaires déclaré ; qu'en conséquence l'administration a rappelé la taxe sur la valeur ajoutée pour la période du 1er janvier 2004 au 31 décembre 2006 en suivant la procédure de redressement contradictoire prévue à l'article L. 55 du livre des procédures fiscales, rappel qu'elle a assorti de la majoration de 40 p. cent prévue à l'article 1729 du code général des impôts ; que M. B...relève appel du jugement du 4 octobre 2012 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande tendant à la décharge de ces rappels de taxe sur la valeur ajoutée ;

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

2. Considérant, en premier lieu, que M. B...soutient que l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales a été méconnu par l'administration qui n'a pas communiqué les factures d'achats obtenues auprès de l'un de ses fournisseurs, la SARL Hasbey, malgré la demande du contribuable ;

3. Considérant qu'aux termes de l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales : " L'administration est tenue d'informer le contribuable de la teneur et de l'origine des renseignements et documents obtenus de tiers sur lesquels elle s'est fondée pour établir l'imposition faisant l'objet de la proposition prévue au premier alinéa de l'article L. 57 ou de la notification prévue à l'article L. 76. Elle communique, avant la mise en recouvrement, une copie des documents susmentionnés au contribuable qui en fait la demande. " ;

4. Considérant qu'en l'espèce, les factures obtenues par l'administration dans le cadre de l'exercice de son droit de communication, auprès des fournisseurs Hasbey et Groupe Anakey ont été communiquées par l'administration au contribuable le 9 septembre 2008 ; que les rappels de taxe sur la valeur ajoutée en litige ont été mis en recouvrement le 27 octobre 2008 ; que M. B...en a accusé réception dans sa réclamation du 14 décembre 2008 ; que, dès lors, le moyen doit être écarté ;

5. Considérant, en second lieu, que M. B...soutient que le jugement du tribunal de grande instance de Montpellier ne pouvait lui être opposé lors du rejet de sa réclamation préalable en raison du principe d'indépendance des juridictions ;

6. Considérant toutefois que la décision de rejet d'une réclamation présentée par un contribuable en application de l'article R. 190-1 du livre des procédures fiscales est postérieure à l'établissement du supplément d'imposition en litige ; qu'en conséquence les vices qui peuvent, le cas échéant, entacher cette décision sont sans influence sur la régularité ou le bien-fondé de l'imposition ; que, dès lors, le moyen est inopérant et ne peut qu'être écarté ;

Sur le bien-fondé de l'imposition :

En ce qui concerne le rejet de la comptabilité :

7. Considérant qu'en vertu de l'article L. 192 du livre des procédures fiscales, la charge de la preuve des graves irrégularités qui entachent une comptabilité incombe toujours à l'administration lorsque le litige ou la rectification est soumis au juge ;

8. Considérant que l'administration fait valoir que la comptabilité présentée par M. B...pour son activité n'enregistrait pas de manière détaillée les recettes ; qu'il n'a produit ni bandes de caisse, ni notes de tables ni justificatifs du détail des recettes comptabilisées ; que ce dernier a d'ailleurs admis au cours de la vérification de comptabilité ne pas utiliser systématiquement la caisse enregistreuse ; que, s'agissant de la répartition entre ventes à emporter et celles à consommer sur place, elle faisait l'objet d'une simple estimation par M.B... ; que l'état d'inventaire du stock en début de période vérifiée n'a pas été produit ; que ces seules irrégularités étaient à même d'entraîner le rejet de la comptabilité présentée par M.B... ; qu'en outre, à la suite de l'exercice du droit de communication auprès d'un fournisseur, la SARL Hasbey, l'administration a constaté que seule une partie des factures délivrées par ce fournisseur avaient été régulièrement comptabilisées par M.B... ; que l'administration a également constaté que des achats non comptabilisés avaient été effectués par M.B..., sous un nom d'emprunt, auprès d'un autre fournisseur, le Groupe Anakey Ltd Cash import France ; que, dès lors, c'est à bon droit que l'administration a rejeté la comptabilité comme non probante et a reconstitué le chiffre d'affaires du fonds de commerce exploité par M.B... ;

En ce qui concerne la charge de la preuve :

9. Considérant qu'aux termes de l'article L. 192 du livre des procédures fiscales : " Lorsque l'une des commissions visées à l'article L. 59 est saisie d'un litige ou d'une rectification, l'administration supporte la charge de la preuve en cas de réclamation, quel que soit l'avis rendu par la commission. / Toutefois, la charge de la preuve incombe au contribuable lorsque la comptabilité comporte de graves irrégularités et que l'imposition a été établie conformément à l'avis de la commission. La charge de la preuve des graves irrégularités invoquées par l'administration incombe, en tout état de cause, à cette dernière lorsque le litige ou la rectification est soumis au juge... " ;

10. Considérant qu'en l'espèce, l'administration a suivi la procédure de redressement contradictoire prévue à l'article L. 55 du livre des procédures fiscales et le litige n'a pas été soumis à la commission départementale des impôts et des taxes sur le chiffre d'affaire ; que, dès lors, l'administration supporte la charge de la preuve ;

En ce qui concerne la reconstitution du chiffre d'affaires :

11. Considérant que, pour reconstituer ce chiffre d'affaires pour la période du 1er janvier 2004 au 31 décembre 2005, l'administration a reconstitué les seules ventes de sandwichs " kebab " à partir des achats de viandes, compte tenu d'une quantité de 220 grammes utilisée par portion, avant la prise en compte d'une réfaction de 20 p. cent pour pertes, et de 2 p. cent pour offerts et consommations personnelles ; que M. B...n'ayant pas présenté la carte des tarifs de l'établissement pour les exercices passés, l'administration a retenu pour la période du 1er janvier 2004 au 31 décembre 2005 les tarifs affichés au moment du contrôle ; que, pour la période du 1er janvier au 31 décembre 2006, l'administration a appliqué le taux de marge constaté pour la période antérieure, soit 3,55, qu'elle a appliqué au montant des achats de viande de l'exercice 2006 ;

12. Considérant que M. B...soutient, en premier lieu, que l'administration ne pouvait opposer au contribuable dans le rejet de sa réclamation préalable les factures communiquées par le fournisseur Hasbey sans opérer de constatation propre au sein de l'entreprise ;

13. Considérant que l'administration ne peut opposer à un contribuable, en vue de déterminer les bases de son imposition, les informations qu'elle a recueillies auprès d'un tiers en usant régulièrement de son droit de communication, sans que ces informations soient corroborées en outre par des constatations propres à l'entreprise, ses activités ou sa situation ; qu'en l'espèce, l'administration a, avant d'opposer au contribuable les informations recueillies auprès d'un tiers, recueilli suffisamment d'éléments permettant de regarder la comptabilité présentée comme non probante, en particulier l'absence de présentation de bandes de caisse, de détail des recettes enregistrées et de l'état d'inventaire du stock en début de période vérifiée ; que cette absence de caractère probant de la comptabilité permettait de corroborer par des constatations propres à l'entreprise, l'existence de factures d'achats payées en espèces et non comptabilisées ;

14. Considérant que M. B...conteste, en deuxième lieu, avoir eu recours à des achats dissimulés et fait valoir à cet égard le caractère douteux de la comptabilité du fournisseur SARL Hasbey ;

15. Considérant toutefois que la SARL Hasbey était un fournisseur régulier de M. B...pendant les années vérifiées ; que les factures non comptabilisées obtenues par l'administration auprès de ce fournisseur, étaient systématiquement payées en espèces alors que les factures de ce même fournisseur régulièrement comptabilisées étaient réglées par chèques ; que l'administration fait valoir, en outre, que les factures non comptabilisées étaient régulières en la forme, comportaient une numérotation chronologique cohérente avec les autres factures et étaient toutes comptabilisées chez le fournisseur au compte client ouvert au nom de M.B... ; que M. B...n'a pas intenté d'action contre son fournisseur ni n'a recouru à la procédure prévue à l'article R. 633-1 du code de justice administrative relative à l'inscription de faux contre une pièce produite ; que le caractère " douteux " de la comptabilité du fournisseur résulte d'une simple allégation du requérant ; que, par suite, c'est à bon droit que l'administration a utilisé les factures litigieuses, corroborées par des constatations propres à l'entreprise de M.B..., pour la reconstitution du chiffre d'affaires de l'activité ;

16. Considérant, en troisième lieu, que M. B...conteste les paramètres retenus par l'administration lors de la reconstitution du chiffre d'affaires ; qu'il fait valoir, à cet égard, que le prix du " kebab " à emporter est de 3,80 euros en 2004 et de 4 euros en 2005 au lieu du prix de 4,30 euros retenu par l'administration ; que selon le requérant, il en va de même pour les " kebab " sur place pour lesquels il convient de retenir un prix de 8 euros en 2005 au lieu de 7 euros retenu par l'administration ; que M. B...ajoute que, s'agissant de la portion de viande, elle était de 250 grammes et non 220 grammes, comme retenu par l'administration et que le taux de perte sur " kebab " est de 25 p. cent et non 20 p. cent et le taux d'offerts et de prélèvements personnels doit être fixé à 5 p. cent et non 2 p. cent ;

17. Considérant que l'administration fait valoir que les tarifs des années antérieures n'ayant pas été conservés, le prix du sandwich " Kebab " a été déterminé par référence aux prix constatés lors de la vérification de comptabilité, soit 5,5 euros pour la formule comprenant la boisson au prix de 1,20 euros ; que l'administration a ainsi déterminé un prix de 4,30 euros ; que si M. B...soutient que le prix du " kebab " à emporter était de 3,80 euros en 2004 et de 4 euros en 2005, il se borne à de simples allégations ; qu'il en va de même s'agissant du prix du sandwich " kebab " sur place ; que, s'agissant du poids de la portion de viande, l'administration avait initialement retenu un poids de 200 grammes par portion en référence aux usages de la profession ; qu'elle a admis, après exercice d'un recours hiérarchique, de prendre en compte un poids de 220 grammes par portion ; que si M. B...soutient que la portion servie dans le restaurant est " généreuse " et comprend une portion de viande de 250 grammes, il se borne également à de simples allégations ; que, de même, le pourcentage de pertes de 20 p. cent a été retenu par l'administration après discussion avec M. B...dans le cadre du débat oral et contradictoire ; qu'il en va de même du pourcentage de réfaction relatif à la consommation personnelle, que l'administration a admis à hauteur de 3 p. cent ;

18. Considérant que M. B...soutient, en dernier lieu, que, s'agissant de la reconstitution de l'année 2006, la méthode par extrapolation est critiquable dès lors qu'aucun élément nouveau ne permettait à l'administration de changer de méthode ;

19. Considérant que, contrairement à ce que soutient le requérant, l'administration n'a pas changé de méthode ; qu'elle a procédé à la reconstitution du chiffre d'affaires pour la période du 1er janvier au 31 décembre 2006, en appliquant le taux de marge moyen constaté pour la période antérieure, soit 3,55, aux achats de viande de l'exercice 2006, augmenté des achats dissimulés et de la variation du stock à l'ouverture de la période, après avoir constaté que la comptabilité de l'exercice 2006 était également entachée de graves irrégularités et que les conditions d'exploitation du restaurant étaient demeurées inchangées ; qu'une telle méthode n'était ni radicalement viciée, ni excessivement sommaire ;

20. Considérant que l'administration doit être regardée comme apportant la preuve de la minoration du chiffre d'affaires du fonds de commerce exploité par M. B...pour les exercices 2004 à 2006 ; que, dès lors, c'est à bon droit qu'elle a rappelé la taxe sur la valeur ajoutée pour la période du 1er janvier 2004 au 31 décembre 2006 ;

Sur les conclusions subsidiaires :

21. Considérant que M. B...demande à la Cour, à titre subsidiaire, de réformer le jugement et de prononcer la réduction des rappels sur la période 2004-2005 ou la période 2006 ; qu'il ne formule toutefois aucun moyen différent ; qu'il a donc lieu de rejeter également leurs conclusions subsidiaires ;

22. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. B...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. B...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A...B...et au ministre des finances et des comptes publics.

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N° 12MA04742 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 12MA04742
Date de la décision : 11/12/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Contributions et taxes - Taxes sur le chiffre d'affaires et assimilées - Taxe sur la valeur ajoutée - Procédure de taxation - Procédure de rectification (ou redressement).

Contributions et taxes - Taxes sur le chiffre d'affaires et assimilées - Taxe sur la valeur ajoutée - Liquidation de la taxe - Base d'imposition.


Composition du Tribunal
Président : Mme LASTIER
Rapporteur ?: M. Mathieu SAUVEPLANE
Rapporteur public ?: M. MAURY
Avocat(s) : SELARL THEMA-JURIS

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2014-12-11;12ma04742 ?
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