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22/06/2015 | FRANCE | N°14MA04604

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 6ème chambre - formation à 3, 22 juin 2015, 14MA04604


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société par actions simplifiée Bancillon BTP a notamment demandé au tribunal administratif de Nîmes, dans le cadre du règlement du lot n° 1 d'un marché public portant sur la réhabilitation du bâtiment 23 de la caserne Colonel de Chabrières à Nîmes, de condamner l'Etat à lui payer les intérêts contractuels de retard dus sur le montant des états nos 7 et 8.

Par jugement n° 0901080-1000323 du 31 mars 2011, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté cette demande particulière.

Procédure devant la cour et devant le Conseil d'Etat :

Par requête, enregistrée le 9 juin 201...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société par actions simplifiée Bancillon BTP a notamment demandé au tribunal administratif de Nîmes, dans le cadre du règlement du lot n° 1 d'un marché public portant sur la réhabilitation du bâtiment 23 de la caserne Colonel de Chabrières à Nîmes, de condamner l'Etat à lui payer les intérêts contractuels de retard dus sur le montant des états nos 7 et 8.

Par jugement n° 0901080-1000323 du 31 mars 2011, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté cette demande particulière.

Procédure devant la cour et devant le Conseil d'Etat :

Par requête, enregistrée le 9 juin 2011, la société Bancillon BTP a demandé à la cour d'annuler le jugement en tant qu'il rejetait certaines de ses demandes, et notamment la demande relative aux intérêts dus sur les états nos 7 et 8, en soutenant que ces intérêts, qui n'avaient pas été inclus dans le décompte général, étaient contractuellement dus.

Par arrêt n° 11MA02221 du 8 juillet 2013, la cour a, notamment, rejeté cette demande.

Par décision du 3 novembre 2014, le Conseil d'Etat a annulé cet arrêt sur ce seul point.

Par un mémoire, enregistré le 22 décembre 2014, la société Bancillon BTP a indiqué maintenir ses conclusions par les mêmes moyens.

Par un mémoire, enregistré le 14 janvier 2015, le ministre de la défense indique également maintenir ses conclusions par les mêmes moyens.

Vu :

- l'arrêt n° 11MA02221, ainsi que tous les mémoires et pièces qui y sont visés ;

- les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code des marchés publics ;

- le décret n° 2002-232 du 21 février 2002 relatif à la mise en oeuvre du délai maximum de paiement dans les marchés publics ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Thiele,

- les conclusions de Mme Felmy, rapporteur public,

- et les observations de MeA..., représentant la société Bancillon BTP.

1. Considérant que par marché passé par appel d'offres ouvert notifié le 20 avril 2006, le ministère de la défense a engagé la réhabilitation du centre de restauration, bâtiment 23, de la caserne Colonel de Chabrières, à Nîmes ; que la société Bancillon BTP a été attributaire du lot n° 1 " démolition - gros oeuvre " ; que par courrier du 7 août 2008, le maître d'ouvrage a notifié à la société requérante le décompte général définitif, dont le solde s'établissait à 349 970,12 euros hors taxes ; que par un mémoire en date du 18 septembre 2008, puis un mémoire complémentaire du 2 décembre 2008, la société Bancillon BTP a contesté ce décompte général ; que la société Bancillon BTP a saisi le tribunal administratif de Nîmes d'une demande tendant, notamment, à la condamnation de l'Etat à lui payer les intérêts moratoires dus à raison des retards de paiement des acomptes nos 7 et 8 ; que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sur ce point la demande de la société ;

2. Considérant, d'une part, que si les parties à un marché public de travaux peuvent convenir que l'ensemble des opérations auxquelles donne lieu l'exécution de ce marché est compris dans un compte dont aucun élément ne peut être isolé et dont seul le solde, arrêté lors de l'établissement du décompte définitif, détermine leurs droits et obligations définitifs, elles n'y sont pas tenues ; que, dès lors, ni le caractère unique et exhaustif d'un tel compte ni son caractère définitif, qui ne sont pas d'ordre public, ne peuvent être opposés d'office par le juge aux prétentions d'une partie ; que, dès lors, le moyen relevé d'office par la cour, et que le ministre de la défense n'a pas repris à son propre compte, ne peut être retenu ;

3. Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'article 96 du code des marchés publics, dans sa rédaction applicable : " (...) Le dépassement du délai de paiement ouvre de plein droit et sans autre formalité, pour le titulaire du marché (...), le bénéfice d'intérêts moratoires, à compter du jour suivant l'expiration du délai. " ; qu'aux termes de l'article 5 du décret n° 2002-232 du 21 février 2002 susvisé, pris pour l'application de cette disposition : " I. - Le défaut de paiement dans les délais prévus par le décret du 7 mars 2001 susvisé fait courir de plein droit, et sans autre formalité, des intérêts moratoires au bénéfice du titulaire ou du sous-traitant payé directement. / Les intérêts moratoires courent à partir du jour suivant l'expiration du délai global jusqu'à la date de mise en paiement du principal incluse. / Les intérêts moratoires appliqués aux acomptes ou au solde sont calculés sur le montant total de l'acompte ou du solde toutes taxes comprises (...) / II. - Le taux des intérêts moratoires est référencé dans le marché. Ce taux est celui de l'intérêt légal en vigueur à la date à laquelle les intérêts moratoires ont commencé à courir, augmenté de deux points. / (...) " ; qu'aux termes de l'article 1er du même décret : " I.-Le point de départ du délai global de paiement prévu (...) à l'article 98 du code des marchés publics est la date de réception de la demande de paiement par les services de la personne publique contractante (...) " ; qu'aux termes de l'article 13.231 du cahier des clauses administratives générales applicables aux marchés publics de travaux, qui figure au nombre des pièces contractuelles : " (...) Le mandatement de l'acompte intervient dans un délai fixé par le marché et courant à compter de la date de remise du projet de décompte par l'entrepreneur au maître d'oeuvre. Ce délai ne peut excéder quarante-cinq jours. (...) " ;

4. Considérant qu'il résulte de la combinaison de ces dispositions et stipulations que, dans le cas où il tarde à payer le montant d'un acompte dû, le maître d'ouvrage est redevable à l'entrepreneur d'intérêts moratoires, qui courent à compter de l'expiration d'un délai de 45 jours à compter de la réception de la demande d'acompte, et dont le taux correspond au taux de l'intérêt légal en vigueur à la date de réception de la demande majoré de deux points ; que, contrairement à ce qu'ont estimé les premiers juges, ces intérêts n'ont pas été ajoutés aux sommes dues par le maître de l'ouvrage au moment de l'établissement du décompte général, et restent donc dues ;

5. Considérant que la société Bancillon BTP produit un tableau de calcul, faisant état des intérêts moratoires dus au 6 novembre 2013 sur les situations nos 7 et 8, qui auraient respectivement dû être payées avant le 14 mai 2007 et le 11 juin 2007 ; que le ministre de la défense, qui ne conteste pas le montant des acomptes, se borne à soutenir que le montant des intérêts réclamé est " contestable " et que les intérêts moratoires ne couraient qu'à compter du 7 octobre 2008 ; que, toutefois, cette dernière date, retenue par le ministre, correspond à la date à compter de laquelle courent les intérêts moratoires dus sur le solde du décompte général ; que le ministre ne conteste pas avoir reçu les demandes de paiement des acomptes sur les situations nos 7 et 8 aux dates indiquées par la société ; qu'il y a donc lieu de retenir les montants de 19 154 et de 449,62 euros calculés par la société Bancillon BTP ; que l'Etat doit donc à la société Bancillon BTP la somme de 19 603,69 euros ;

6. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la société Bancillon BTP est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande tendant au paiement des intérêts moratoires sur les situations nos 7 et 8 ;

Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

7. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce qu'une somme quelconque soit mise à la charge de la société Bancillon BTP, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance ; que, si la société Bancillon BTP fait valoir l'importance des frais que lui a occasionnés la présente procédure, la cour, ayant partiellement fait droit à ses conclusions d'appel dans l'instance n° 11MA02221, a déjà mis à la charge de l'Etat une somme de 2 500 euros à verser à la société en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; que, dans les circonstances de l'espèce et eu égard à l'objet limité du litige, qui concerne les seuls intérêts des acomptes versés avec retard, il y a lieu de mettre à la charge de l'Etat une somme complémentaire de 1 500 euros à verser à la société Bancillon BTP en remboursement des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement n° 0901080-1000323 du 31 mars 2011 du tribunal administratif de Nîmes est annulé en ce qu'il rejette la demande de la société Bancillon BTP tendant au paiement d'intérêts moratoires sur les situations nos 7 et 8.

Article 2 : L'Etat (ministère de la défense) est condamné à payer à la société Bancillon BTP la somme de 19 603,69 euros (dix-neuf mille six cent trois euros et soixante-neuf centimes) au titre des intérêts moratoires dus sur ces situations.

Article 3 : L'Etat (ministère de la défense) versera à la société Bancillon BTP une somme de 1 500 euros (mille cinq cents euros) en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la société Bancillon BTP tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à la société par actions simplifiée Bancillon BTP et au ministre de la défense.

Délibéré après l'audience du 1er juin 2015, à laquelle siégeaient :

M. Guerrive, président,

M. Thiele, premier conseiller,

Mme Héry, premier conseiller.

Lu en audience publique le 22 juin 2015.

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N° 14MA04604

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 6ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 14MA04604
Date de la décision : 22/06/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

39-05-05 Marchés et contrats administratifs. Exécution financière du contrat. Intérêts.


Composition du Tribunal
Président : M. GUERRIVE
Rapporteur ?: M. Renaud THIELE
Rapporteur public ?: Mme FELMY
Avocat(s) : ALBISSON

Origine de la décision
Date de l'import : 06/08/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2015-06-22;14ma04604 ?
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