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26/06/2015 | FRANCE | N°14MA01912

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 5ème chambre - formation à 3, 26 juin 2015, 14MA01912


Vu la requête, enregistrée le 30 avril 2014 au greffe de la Cour, sous le n° 14MA01912, présentée pour Mme B...D...demeurant..., par MeA... ;

Mme D...demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1305154 du 1er avril 2014 par lequel le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté en date du 18 octobre 2013 par lequel le préfet des Alpes-Maritimes a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français et a fixé la Tunisie comme pays de destination, à ce qu'il soit enjoint

cette même autorité de lui délivrer un titre de séjour temporaire, subsidiair...

Vu la requête, enregistrée le 30 avril 2014 au greffe de la Cour, sous le n° 14MA01912, présentée pour Mme B...D...demeurant..., par MeA... ;

Mme D...demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1305154 du 1er avril 2014 par lequel le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté en date du 18 octobre 2013 par lequel le préfet des Alpes-Maritimes a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français et a fixé la Tunisie comme pays de destination, à ce qu'il soit enjoint à cette même autorité de lui délivrer un titre de séjour temporaire, subsidiairement de procéder au réexamen de sa demande de titre de séjour et de lui délivrer dans l'attente une autorisation provisoire de séjour, dans le délai de quinze jours à compter de la notification du jugement sous astreinte de 50 euros par jour de retard, et à la mise à la charge de l'Etat de la somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, ledit arrêté ;

3°) d'enjoindre au préfet des Alpes-Maritimes de lui délivrer une carte de séjour temporaire, subsidiairement de procéder au réexamen de sa situation administrative et dans l'attente de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour, dans le délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 50 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que :

- l'arrêté litigieux méconnaît les articles L. 313-11 7° et L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, l'article 13 du préambule de la Constitution de 1946, l'article L. 111-1 du code de l'éducation, l'article 26 de la déclaration universelle des droits de l'homme, et l'article 13-1 du pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels, et est entaché d'erreur manifeste d'appréciation ;

- les normes constitutionnelles prévalent sur toutes les autres ;

- elle vit en France avec ses parents, hébergés par ses grands-parents, et est enfant unique ;

- elle est scolarisée en classe terminale et doit passer son baccalauréat, est inscrite à des concours, n'a aucune attache dans son pays d'origine lui permettant d'y poursuivre ses études, ne peut plus réintégrer le système scolaire public tunisien en langue arabe, et sa sécurité, en tant que fille de fonctionnaire sous l'ancien régime tunisien, n'est pas assurée dans son pays d'origine ;

- son droit constitutionnel à l'éducation n'est effectif qu'en France ;

- elle justifie de motifs exceptionnels à l'appui de sa demande de titre de séjour ;

Vu le jugement attaqué

Vu la décision du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal de grande instance Marseille en date du 18 juin 2014 admettant Mme D...au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale ;

Vu le courrier du 27 mars 2015 adressé aux parties en application des dispositions de l'article R. 611-11-1 du code de justice administrative, les informant de la date ou de la période à laquelle il est envisagé d'appeler l'affaire à l'audience et précisant la date à partir de laquelle l'instruction pourra être close dans les conditions prévues par le dernier alinéa de l'article R. 613-1 et le dernier alinéa de l'article R. 613-2 ;

Vu l'avis d'audience adressé le 4 mai 2015 portant clôture d'instruction en application des dispositions de l'article R. 613-2 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la Constitution du 4 octobre 1958, notamment le préambule de la Constitution de 1946 ;

Vu la déclaration universelle des droits de l'homme du 10 décembre 1948 ;

Vu le pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu l'accord franco-tunisien en matière de séjour et de travail du 17 mars 1988 modifié ;

Vu le code de l'éducation ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 modifiée ;

Vu le code de justice administrative ;

Vu la décision du président de la formation de jugement de dispenser le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience, en application de l'article R. 732-1-1 du code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 5 juin 2015 :

- le rapport de M. Pocheron, président-assesseur ;

- et les observations de MeA..., pour Mme D...;

1. Considérant que MmeD..., de nationalité tunisienne, relève appel du jugement en date du 1er avril 2014 par lequel le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande dirigée contre l'arrêté en date du 18 octobre 2013 par lequel le préfet des Alpes-Maritimes a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français et a fixé la Tunisie comme pays de destination ;

2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République (...) " ; qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " -1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. " ;

3. Considérant que MmeD..., célibataire, sans charge de famille, soutient être entrée en France le 23 août 2012, alors qu'elle était âgée de seize ans et demi, munie d'un visa valable du 28 juin 2012 au 24 décembre 2012, avec sa mère, pour rejoindre son père qui y résidait depuis 2008, et que la famille serait hébergée par les grands-parents ; que ces éléments de fait ne sont pas établis par la production au dossier de documents de valeur suffisamment probante, notamment en ce qui concerne les liens de filiation, alors qu'en outre la requérante a communiqué la copie d'une pièce présentée comme un ancien passeport mais portant le nom de " C... " ; que si l'intéressée soutient qu'elle et sa mère ont fui la Tunisie du fait des troubles que connaissait ce pays, elle ne l'établit pas par le moindre commencement de preuve ; que ses parents résideraient en tout état de cause également irrégulièrement sur le territoire français ; que, faute de démontrer qu'elle serait fille unique comme elle le prétend, Mme D...n'établit pas davantage être dépourvue de toute attache familiale dans son pays d'origine ; qu'il ne ressort pas, par ailleurs, des pièces du dossier qu'elle ne pourrait pas poursuivre ses études dans son pays d'origine, qu'elle n'avait quitté que depuis un peu plus d'un an à la date de l'arrêté litigieux ; qu'ainsi, compte tenu de la durée et des conditions du séjour en France de Mme D..., l'arrêté contesté, qui n'a pas porté au droit de l'intéressée au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris, n'a pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ni les dispositions de l'article L. 313-11-7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, et n'est pas entaché d'erreur manifeste d'appréciation de sa situation personnelle et familiale ;

4. Considérant que, ainsi qu'il a été dit, Mme D...n'établit pas, par les documents qu'elle produit, avoir été dans l'impossibilité de poursuivre sa scolarité dans son pays d'origine, qu'elle avait quitté depuis un peu plus d'un an, à la date de l'arrêté querellé ; que, par suite, les moyens tirés de la violation l'article 13 du préambule de la Constitution de 1946, de l'article 111-1 du code de l'éducation, de l'article 26 de la déclaration universelle des droits de l'homme et de l'article 13-1 du pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels ne peuvent en tout état de cause qu'être écartés ;

5. Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-14 code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11, ou la carte de séjour temporaire mentionnée au 1° de l'article L. 313-10 sur le fondement du troisième alinéa de cet article, peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 311-7 (...). L'autorité administrative est tenue de soumettre pour avis à la commission mentionnée à l'article L. 312-1 la demande d'admission exceptionnelle au séjour formée par l'étranger qui justifie par tout moyen résider en France habituellement depuis plus de dix ans (...) " ;

6. Considérant que Mme D...ne justifie d'aucun motif exceptionnel et d'aucune considération humanitaire au sens des dispositions sus-rappelées de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, par suite, le moyen tiré de la violation de ces dispositions doit être écarté ;

7. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme D...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande ; que ses conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte ne peuvent, par voie de conséquence, qu'être rejetées ;

Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

8. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, verse à Mme D...la somme que celle-ci réclame au titre des frais qu'elle a exposés et qui ne sont pas compris dans les dépens ;

D E C I D E :

Article 1er : La requête de Mme D...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B...D...et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet des Alpes-Maritimes.

Délibéré après l'audience du 5 juin 2015, à laquelle siégeaient :

- M. Bocquet, président de chambre,

- M. Pocheron, président-assesseur,

- Mme Hameline, premier conseiller ;

Lu en audience publique, le 26 juin 2015.

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N° 14MA01912


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 5ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 14MA01912
Date de la décision : 26/06/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : M. BOCQUET
Rapporteur ?: M. Michel POCHERON
Rapporteur public ?: M. REVERT
Avocat(s) : ABID

Origine de la décision
Date de l'import : 08/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2015-06-26;14ma01912 ?
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