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13/11/2015 | FRANCE | N°14MA01295

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 9ème chambre - formation à 3, 13 novembre 2015, 14MA01295


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... A...a demandé au tribunal administratif de Nîmes, d'une part, d'annuler la décision en date du 21 mai 2012 par laquelle le maire de la commune de Meynes a refusé de lui délivrer un permis de construire pour la réalisation d'un chenil sur un terrain situé route de Beaucaire, au lieu-dit Le Théron, ensemble la décision du 19 juin 2012 portant rejet de son recours gracieux formé contre ce refus et, d'autre part, de condamner la commune de Meynes à l'indemniser du préjudice qu'elle estimait avoir s

ubi du fait de cette décision de refus de permis de construire.

Par un j...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... A...a demandé au tribunal administratif de Nîmes, d'une part, d'annuler la décision en date du 21 mai 2012 par laquelle le maire de la commune de Meynes a refusé de lui délivrer un permis de construire pour la réalisation d'un chenil sur un terrain situé route de Beaucaire, au lieu-dit Le Théron, ensemble la décision du 19 juin 2012 portant rejet de son recours gracieux formé contre ce refus et, d'autre part, de condamner la commune de Meynes à l'indemniser du préjudice qu'elle estimait avoir subi du fait de cette décision de refus de permis de construire.

Par un jugement n° 1202263 du 24 janvier 2014, le tribunal administratif de Nîmes a, d'une part, annulé les décisions susvisées des 21 mai et 19 juin 2012 et, d'autre part, rejeté les conclusions indemnitaires de Mme A....

Procédure devant la Cour :

Par une requête et des mémoires complémentaires enregistrés les 21 mars 2014 et 9 février 2015, Mme A..., représentée par le cabinet d'avocats FLV et associés, demande à la Cour, dans le dernier état de ses écritures :

1°) d'annuler ce jugement du 24 janvier 2014 en ce qu'il a rejeté ses conclusions indemnitaires ;

2°) à titre principal, de condamner la commune de Meynes à lui verser la somme de 110 000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice résultant de la perte de chance de créer une activité d'éleveur canin et d'en tirer les bénéfices qu'elle pouvait raisonnablement en escompter entre mars 2008 et février 2014 ;

3°) à titre subsidiaire, de condamner la commune de Meynes à lui verser la somme de 73 200 euros à titre de dommages et intérêts en réparation des frais et dépenses engagés sans contreparties de mars 2008 à février 2014 ;

4°) de mettre à la charge de la commune de Meynes la somme de 5 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- depuis 2007, elle a entrepris des démarches pour pouvoir exercer l'activité d'éleveur de chiens au lieudit Le Théron, sur le territoire de la commune de Meynes ;

- après avoir effectué les démarches nécessaires, elle a déposé le 24 décembre 2007 une demande de permis de construire pour la réalisation d'un bâtiment à usage de chenil avec ses annexes ; le permis de construire a été refusé par le maire en raison de l'insuffisance des réseaux d'eau et de traitement des eaux usées ; ce refus a été annulé par un jugement du tribunal administratif de Nîmes du 26 février 2010, confirmé par la cour administrative d'appel de Marseille, qui a relevé que le pétitionnaire avait justifié dans sa demande de permis de construire de la création d'un point d'eau et d'une fosse septique ; le 21 mai 2012, le maire de la commune de Meynes a réitéré un refus de permis de construire au motif qu'il n'était pas justifié d'une activité agricole d'élevage ; le tribunal administratif de Nîmes a annulé cette décision mais a rejeté les conclusions aux fins d'indemnisation qu'elle avait présentées ;

- la commune de Meynes a commis des fautes en refusant illégalement à deux reprises le permis de construire demandé ;

- ces fautes lui ont causé un préjudice car le refus de lui délivrer un permis de construire a entraîné un retard de 6 ans et 2 mois dans l'édification du chenil et le début de l'exploitation envisagée, soit entre le 20 décembre 2007 et le 20 février 2014; depuis le dépôt de la demande de permis de construire le 24 décembre 2007, elle n'a pu exercer d'activité d'élevage de chiens, tout en assumant les charges liées aux cotisations obligatoires et à l'entretien des chiens ;

- à titre principal, elle a subi une perte de marge brute pour l'activité de pension et d'élevage de chiens de 167 384 euros ; ce préjudice est certain ; 8 chiens avaient été achetés et prêts à être élevés, les boxes pour l'installation des chiens et la salle de stockage de leur nourriture avaient été construits ; le préjudice qui résulte pour elle de la perte d'une chance de réaliser un bénéfice d'exploitation s'élève à 110 000 euros ;

- à titre subsidiaire, elle a droit à être indemnisée des dépenses engagées au titre de l'activité d'élevage de chiens avec prise en pension entre début 2008 et février 2014, soit 73 200 euros.

Par des mémoires en défense, enregistrés les 22 décembre 2014, 16 février 2015, et 6 mars 2015, la commune de Meynes, représentée par la SCP d'avocats Margall-D'Albenas, conclut au rejet de la requête et, dans le dernier état de ses écritures, à la mise à la charge de Mme A... de la somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la requérante ne justifie pas de la réalité du chiffre d'affaires dont elle soutient avoir été privée ;

- elle ne justifie pas avoir acquis les 8 chiens ;

- Mme A..., malgré les refus de permis de construire, a effectivement exploité son chenil depuis 2007 ;

- en tout état de cause, l'intéressée ne peut prétendre à l'indemnisation d'un préjudice avant la décision refusant le permis de construire, donc avant le 19 mars 2008 ;

- les cotisations à la mutuelle sociale agricole (MSA) résultent de l'inscription de l'intéressée en tant qu'exploitant agricole, sont sans lien avec le refus de délivrance du permis de construire ; il n'est pas justifié de toutes les façons des cotisations acquittées ;

- la requérante ne justifie pas des frais d'entretien des chiens ;

- la requérante ne peut prétendre à être indemnisée des frais d'entretien de locaux qu'elle a construits sans autorisation.

Une ordonnance du 16 septembre 2015 a fixé la clôture de l'instruction au 16 octobre 2015, en application de l'article R. 613-1 du code de justice administrative.

Un mémoire a été enregistré le 23 septembre 2015, présenté pour Mme A..., et non communiqué en application de l'article R. 611-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Portail,

- les conclusions de M. Roux, rapporteur public,

- et les observations de MeC..., représentant la commune de Meynes.

1. Considérant que Mme A... a déposé, le 27 décembre 2007, une demande de permis de construire pour la réalisation d'un chenil et ses annexes, de 150 mètres carrés, sur une parcelle située au lieu dit le Théron, à Meynes ; que le maire de la commune de Meynes a refusé le permis de construire ainsi sollicité, le 19 mars 2008, en se fondant sur les dispositions de l'article NC4 du règlement du plan d'occupation des sols, au motif que le terrain n'est pas desservi par les réseaux d'eau et d'assainissement publics et que le projet ne fait état d'aucun dispositif de traitement des eaux usées ; que le tribunal administratif de Nîmes a annulé cette décision, par un jugement du 26 février 2010, confirmé en appel, au motif que le plan de masse joint à la demande de permis de construire mentionnait l'existence de points d'eau, d'une fosse septique et d'un champ d'épandage ; que, demeurant... ; que le tribunal administratif de Nîmes a annulé cette décision par un jugement du 24 janvier 2014, au motif que la requérante justifie d'une activité d'élevage, après avoir rejeté la demande de substitution de motifs demandée par la commune, tirée de la méconnaissance des dispositions du plan d'occupation des sols relatives à la distance entre les élevages et les zones urbanisées ; que, par ce même jugement, le tribunal administratif de Nîmes a, par contre, rejeté les conclusions indemnitaires présentées par MmeA... au motif que le préjudice dont Mme A...entendait demander réparation n'était ni actuel, ni certain ; que Mme A... relève appel de ce jugement en ce qu'il a rejeté sa demande indemnitaire ;

2. Considérant qu'en refusant à deux reprises à Mme A...la délivrance d'un permis de construire par des décisions illégales, le maire de la commune de Meynes a commis des fautes de nature à engager la responsabilité de la commune ; qu'il ne résulte pas de l'instruction que d'autres motifs auraient pu légalement justifier les refus du permis de construire demandé ; que Mme A... est fondée dès lors à demander réparation des préjudices directs et certains que ces décisions lui ont occasionnées ;

3. Considérant que Mme A... fait valoir que les refus de permis de construire illégaux qui lui ont été opposés l'ont empêchée d'exercer une activité d'élevage canin et de pension pour chiens, alors qu'elle est affiliée à la mutualité sociale agricole (MSA), qu'elle a suivi une formation dans ce domaine, et qu'elle a effectué le 10 octobre 2007 une déclaration au titre de la législation sur les installations classées pour la création d'un élevage de chiens d'une capacité maximale de 49 animaux, déclaration qui a donné lieu à la délivrance d'un récépissé le 23 octobre 2007 ; qu'elle soutient avoir été ainsi privée d'une chance de tirer un bénéfice de l'exercice de cette activité ;

4. Considérant, toutefois, que Mme A... se borne à produire une attestation d'un expert comptable qui récapitule les dépenses et recettes qu'aurait pu générer cette activité au titre des exercices 2008 à 2013, pour conclure que le manque à gagner peut être évalué à 137 900 euros sur l'ensemble de la période ; qu'elle ne produit aucun élément, notamment sous forme d'étude de marché ou de prospection de personnes intéressées, de nature à justifier des chances de développement de son activité, qu'il s'agisse de l'élevage ou de l'accueil de chiens en pension ; qu'elle ne justifie pas, dans ces conditions, de la perte de chance de générer un bénéfice dont elle demande réparation ; qu'à titre subsidiaire, Mme A... demande réparation des frais inhérents à l'élevage de ses chiens, supportés alors qu'elle n'aurait pas pu exercer son activité d'éleveur du fait des refus de permis de construire ; que toutefois, ces frais trouvent leur origine dans la décision de l'intéressée d'acquérir ces animaux alors qu'elle ne disposait pas des locaux nécessaires à son activité ; qu'ils ne présentent pas, en conséquence, de lien de causalité direct avec les fautes commises par la commune de Meynes ;

5. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme A... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande indemnitaire ;

Sur les frais non compris dans les dépens :

6. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la somme que la requérante demande au titre de ses frais non compris dans les dépens, soit mise à la charge de la commune de Meynes, qui n'est pas, dans la présente instance la partie perdante ; que, par ailleurs, dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit à la demande de la commune de Meynes fondée sur ces dispositions ;

D E C I D E :

Article 1er : La requête de Mme A...est rejetée.

Article 2 : Les conclusions de la commune de Meynes présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... A...et à la commune de Meynes.

Délibéré après l'audience du 23 octobre 2015, à laquelle siégeaient :

Mme Buccafurri, présidente,

M. Portail, président-assesseur,

Mme Giocanti, conseiller,

Lu en audience publique, le 13 novembre 2015.

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N° 14MA01295


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 9ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 14MA01295
Date de la décision : 13/11/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Responsabilité de la puissance publique - Responsabilité en raison des différentes activités des services publics - Services de l'urbanisme - Permis de construire - Préjudice.

Urbanisme et aménagement du territoire - Permis de construire - Contentieux de la responsabilité (voir : Responsabilité de la puissance publique).


Composition du Tribunal
Président : Mme BUCCAFURRI
Rapporteur ?: M. Philippe PORTAIL
Rapporteur public ?: M. ROUX
Avocat(s) : ASSOCIATION FLV (FOURMENTIN - LE QUINTREC - VEERASAMY) ET ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 25/11/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2015-11-13;14ma01295 ?
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