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15/12/2015 | FRANCE | N°14MA02165

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 7ème chambre - formation à 3, 15 décembre 2015, 14MA02165


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme A...ont demandé au tribunal administratif de Lille de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre de l'année 2005.

Par une ordonnance du 24 juin 2011, le président du tribunal administratif de Lille a transmis leur demande au tribunal administratif de Toulon.

Par un jugement n° 1101961 du 20 mars 2014, le tribunal administratif de Toulon a rejeté cette

demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et des mémoires enregistrés les...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme A...ont demandé au tribunal administratif de Lille de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre de l'année 2005.

Par une ordonnance du 24 juin 2011, le président du tribunal administratif de Lille a transmis leur demande au tribunal administratif de Toulon.

Par un jugement n° 1101961 du 20 mars 2014, le tribunal administratif de Toulon a rejeté cette demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et des mémoires enregistrés les 21 mai 2014, 1er octobre 2015 et 5 octobre 2015, M. et MmeA..., représentés par MeB..., demandent à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Toulon du 20 mars 2014 ;

2°) de prononcer la décharge des impositions contestées et des pénalités y afférentes ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 10 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- le jugement a été rendu en méconnaissance du principe du contradictoire, le tribunal ne leur ayant pas transmis la copie de la lettre du 25 mars 2008 sollicitant l'assistance administrative des autorités lettones, qui avait été versée aux débats par l'administration ;

- le tribunal a rejeté leur demande en se fondant sur le mémoire en défense de l'administration fiscale enregistré le 4 février 2014 dont ils n'ont reçu communication qu'après la clôture de l'instruction et auquel ils n'ont pas pu répliquer ;

- le tribunal s'est abstenu de répondre au moyen tiré de l'inapplicabilité des dispositions de l'article 188 A du CGI aux opérations triangulaires, ainsi qu'à son argumentation tirée de l'absence injustifiée de demande d'assistance administrative aux autorités belges et au caractère falsifié des documents saisis ;

- l'administration ne peut se prévaloir de la prorogation du délai de reprise prévu à l'article 188 A du LPF dans la mesure où la demande d'assistance administrative qu'elle a adressée aux autorités lettonnes ne porte pas sur les biens ou avoirs dont M. A...a pu disposer dans ce pays et où la rectification litigieuse est sans rapport avec l'objet de la demande d'assistance, ceci en méconnaissance de la jurisprudence Technipex du 28 décembre 2012 du Conseil d'Etat ;

- l'administration s'est abstenue de leur communiquer la réponse des autorités lettonnes dans un délai raisonnable ;

- les informations transmises par les autorités lettones relatives à un compte bancaire prétendument détenu par M. A...chez ING Belgium concernent un tiers qui a usurpé son identité ;

- les documents recueillis lors de visites domiciliaires par l'administration et sur lesquels elle s'est fondée pour établir l'imposition sont dépourvus de caractère probant et ne permettent pas d'établir l'existence d'une dissimulation de revenus ;

Par des mémoires en défense, enregistrés les 9 octobre 2014 et 21 octobre 2015, le ministre des finances et des comptes publics conclut au rejet de la requête.

Il soutient qu'aucun des moyens soulevés par M. et Mme A...n'est fondé.

Par ordonnance du 9 octobre 2015, la clôture d'instruction a été fixée au 30 octobre 2015.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention fiscale du 14 avril 1997 signée entre la Lettonie et la France et notamment son article 26 ;

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Guidal, président ;

- les conclusions de M. Deliancourt, rapporteur public ;

- et les observations de MeB..., représentant M. et MmeA....

1. Considérant que M. et Mme A...ont fait l'objet au cours de l'année 2008 d'un examen contradictoire de leur situation fiscale personnelle portant sur les années 2004 à 2006 ; qu'en réponse à une demande de renseignements que leur a adressée l'administration fiscale à l'occasion de cet examen, les autorités lettonnes ont indiqué que la société seychelloise Olympic Star Invest SA détenait un compte dans un établissement bancaire en Lettonie, ouvert le 8 septembre 2004 et clos le 1er juin 2006, sur lequel M. A...disposait de la signature ; que l'examen de ce compte a mis en évidence que M. A...y avait viré au cours de l'année 2005 deux sommes, d'un montant respectif de 35 000 et 100 000 euros, en provenance d'un autre compte qui aurait été ouvert à son nom auprès de la banque belge ING belgium ; que les réponses apportées aux demandes de justifications qui leur ont été adressées au titre de l'année 2005, sur le fondement des articles L. 16 et L 16. A du livre des procédures fiscales, ayant été jugées insuffisantes, M. et Mme A... ont été taxés d'office, sur le fondement de l'article L. 69 du même livre, à raison des sommes provenant du compte bancaire belge de M.A..., dont l'origine a été regardée comme non justifiée ; que M. et Mme A...relèvent appel du jugement du 20 mars 2014 par lequel le tribunal administratif de Toulon sa rejeté leur demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales qui leur ont été assignées au titre de l'année 2005 et des pénalités correspondantes ;

Sur le quantum des impositions en litige :

2. Considérant qu'il résulte de l'instruction que, tant dans leur réclamation préalable que dans leur demande devant le tribunal administratif de Lille, M. et Mme A... n'ont contesté que la rectification susmentionnée opérée dans la catégorie des revenus d'origine indéterminée qui leur a été notifiée le 3 février 2009 ; qu'ils n'ont pas critiqué les impositions supplémentaires qui procédaient par ailleurs d'omissions de déclaration au titre de l'année 2005, notifiées par une proposition de rectification distincte du 30 juin 2008 ; que M. et Mme A... ne sont, par suite, fondés qu'à demander la décharge des impositions litigieuses en droits et pénalités à hauteur de 84 949 euros en ce qui concerne la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu qui leur a été assignée au titre de l'année 2005 et de 22 691 euros, s'agissant des différentes contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre de la même année ;

Sur les conclusions à fin de décharge :

Sans qu'il soit besoin de se prononcer sur la régularité du jugement attaqué et d'examiner les autres moyens invoqués :

3. Considérant qu'aux termes de l'article L. 169 du LPF, dans sa rédaction applicable à l'espèce : " Pour l'impôt sur le revenu et l'impôt sur les sociétés, le droit de reprise de l'administration des impôts s'exerce jusqu'à la fin de la troisième année qui suit celle au titre de laquelle l'imposition est due. (...) " ; qu'en vertu des dispositions de l'article 1600-0 C du code général des impôts, et des dispositions combinées des articles 1600-0 G du même code et de l'article L. 136-6 du code de la sécurité sociale, ces délais sont applicables à la contribution sociale généralisée et à la contribution au remboursement de la dette sociale appliquée aux sommes soumises à l'impôt sur le revenu en application de l'article L. 69 du livre des procédures fiscales ; qu'aux termes de l'article L. 188 A même livre, dans sa rédaction applicable à la procédure en litige : " Lorsque l'administration a, dans le délai initial de reprise, demandé à l'autorité compétente d'un autre Etat ou territoire des renseignements concernant (...) les biens, les avoirs ou les revenus dont un contribuable a pu disposer hors de France ou les activités qu'il a pu y exercer (...), les omissions ou insuffisances d'imposition y afférentes peuvent être réparées, même si le délai initial de reprise est écoulé, jusqu'à la fin de l'année qui suit celle de la réponse à la demande et au plus tard jusqu'à la fin de la cinquième année qui suit celle au titre de laquelle l'imposition est due (...) " ;

4. Considérant qu'il résulte de ces dernières dispositions que l'administration fiscale ne peut se prévaloir de la prorogation du délai de reprise qu'elles prévoient que si l'objet de la demande adressée à l'autorité compétente d'un Etat ou d'un territoire est de ceux qu'elles mentionnent et si les omissions ou insuffisances d'imposition notifiées dans le délai prorogé se rapportent à cet objet ;

5. Considérant qu'il résulte de l'instruction que la demande de renseignements adressée le 25 mars 2008 aux autorités lettones par l'administration fiscale, qui se bornait à évoquer les fonctions de M. A...au sein de la société Olympic Star Invest et dont le but était de savoir si l'intéressé détenait une procuration sur le compte bancaire de cette société ainsi qu'une carte bancaire à son nom, n'avait pas pour objet de rechercher s'il détenait un compte bancaire en Belgique ni de connaître le montant des crédits ou des débits sur ce compte, mais visait seulement à établir l'existence de commissions versées par les clients de M. A...à la société britannique GECIP, et leur reversement, sous déduction d'une quote-part, sur le compte bancaire de la société Olympic Star Invest en Lettonie ; que les omissions d'imposition notifiées à M. et Mme A..., qui résultent de la taxation d'office des sommes en provenance de ce compte belge, ne se rapportent pas à l'objet de la demande adressée aux autorités lettones, laquelle n'a pu légalement proroger le délai de reprise ; qu'en l'absence d'une telle prorogation, la proposition de rectification de redressement en date du 3 février 2009 est intervenue après l'expiration du délai de reprise prévu à l'article L. 169 du livre des procédures fiscales ;

6. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. et Mme A... sont fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulon a rejeté leur demande en décharge des suppléments d'impôt sur le revenu et de contributions sociales mise à leur charge au titre de l'année 2005 ainsi que des pénalités y afférentes trouvant leur origine dans l'imposition des sommes mentionnées au point 1 et taxées d'office ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

7. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, de mettre à la charge de l'État une somme de 2 000 euros au titre des frais exposés par M. et Mme A... et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement n° 1101961 du 20 mars 2014 du tribunal administratif de Toulon est annulé.

Article 2 : M. et Mme A...sont déchargés des suppléments d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre de l'année 2005 et des pénalités correspondantes, à hauteur respectivement de 84 949 euros et de 22 691 euros.

Article 3 : L'Etat versera à M. et Mme A...une somme de 2 000 (deux mille) euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme A...et au ministre des finances et des comptes publics.

Copie en sera adressée à la direction de contrôle fiscal sud-est.

Délibéré après l'audience du 24 novembre 2015, où siégeaient :

- M. Lascar, président de chambre,

- M. Guidal, président assesseur,

- MmeC..., première conseillère.

Lu en audience publique, le 15 décembre 2015.

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N° 14MA02165 4

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 7ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 14MA02165
Date de la décision : 15/12/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-01-03-04 Contributions et taxes. Généralités. Règles générales d'établissement de l'impôt. Prescription.


Composition du Tribunal
Président : M. LASCAR
Rapporteur ?: M. Georges GUIDAL
Rapporteur public ?: M. DELIANCOURT
Avocat(s) : SOYER

Origine de la décision
Date de l'import : 20/01/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2015-12-15;14ma02165 ?
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