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11/01/2016 | FRANCE | N°14MA03420

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 5ème chambre - formation à 3, 11 janvier 2016, 14MA03420


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C...D...a demandé au tribunal administratif de Nîmes d'annuler la décision du 21 décembre 2012 du préfet de la Lozère en tant qu'elle n'a fait droit que partiellement à sa demande de délivrance d'autorisation d'exploiter et en tant qu'elle porte retrait partiel de l'autorisation totale tacite d'exploiter qui lui avait été accordée, et la mise à la charge de l'Etat de la somme de 1 600 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 1300564 du 26 mai

2014, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté la demande.

Procédure devant l...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C...D...a demandé au tribunal administratif de Nîmes d'annuler la décision du 21 décembre 2012 du préfet de la Lozère en tant qu'elle n'a fait droit que partiellement à sa demande de délivrance d'autorisation d'exploiter et en tant qu'elle porte retrait partiel de l'autorisation totale tacite d'exploiter qui lui avait été accordée, et la mise à la charge de l'Etat de la somme de 1 600 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 1300564 du 26 mai 2014, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté la demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, et des mémoires, enregistrés le 28 juillet 2014, et le 10 septembre 2015, M.D..., représenté par MeE..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nîmes en date du 26 mai 2014 ;

2°) d'annuler la décision du préfet de la Lozère en date du 21 décembre 2012 en tant qu'elle n'a fait droit que partiellement à sa demande d'autorisation d'exploiter et qu'elle porte retrait partiel tacite de l'autorisation totale d'exploiter qui lui avait été accordée ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat les dépens de première instance ainsi qu'une somme de 1 600 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le jugement attaqué ne respecte pas l'ensemble des exigences des articles R. 741-2 et suivants du code de justice administrative ;

- le tribunal a à tort estimé, en violation de l'article R. 331-6 du rural et de la pêche maritime, qu'aucune décision implicite d'autorisation n'était acquise ;

- le préfet de la Lozère a accusé réception de la demande d'autorisation d'exploiter le 7 septembre 2012 et l'a informé que si aucune décision ne lui était notifiée dans le délai de quatre mois, il bénéficierait d'une autorisation implicite d'exploiter ;

- le préfet a méconnu les articles 23 et 24 de la loi du 12 avril 2000, la décision de retrait de l'autorisation tacite impliquant au préalable l'organisation d'une procédure contradictoire ;

- à la suite de la décision implicite d'acceptation, le préfet était dessaisi et il ne lui était plus possible de revenir sur sa décision ;

- la décision est insuffisamment motivée ;

- le préfet n'a pas pris en compte sa situation personnelle ;

- sa demande d'autorisation d'exploiter tendait à permettre son installation sur 33 ha 55 de terres de la section de Noubloux et il relevait ainsi du premier rang de priorité défini par l'article 1 du schéma directeur départemental des structures agricoles de la Lozère ;

- le préfet n'a pas démontré que la perte de terres pour les preneurs en place aurait pour conséquence de fragiliser l'équilibre des structures et la viabilité des exploitations concernées ;

- le préfet ne pouvait légalement se fonder sur la circonstance que le plan de développement de l'exploitation de son dossier d'installation avait été validé sur la base d'une surface de terrains sectionnaux de 18,5 ha pour justifier la décision litigieuse en ce qu'elle a fait partiellement droit à sa demande ;

- le mémoire en défense du ministre de l'agriculture est signé par M.B..., qui ne justifie pas d'une délégation de signature en cas d'empêchement de la directrice des affaires juridiques.

Par des mémoires en défense, enregistrés le 30 mars 2015 et le 16 septembre 2015, le ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt conclut au rejet de la requête et à la mise à la charge de M. D...de la somme de 1 428 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- en application des articles 1er et 3 du décret n° 2005-850 du 27 juillet 2005, et de la décision en date du 13 octobre 2014, publiée au Journal officiel du 18 octobre suivant, M. A... B... était bien titulaire d'une délégation à effet de signer au nom du ministre de l'agriculture, le mémoire en défense du 30 mars 2015 ;

- les autres moyens soulevés par M. D...ne sont pas fondés.

Un courrier du 23 juillet 2015 adressé aux parties en application des dispositions de l'article R. 611-11-1 du code de justice administrative, les a informées de la période à laquelle il est envisagé d'appeler l'affaire à l'audience et a indiqué la date à partir de laquelle l'instruction pourra être close dans les conditions prévues par le dernier alinéa de l'article R. 613-1 et le dernier alinéa de l'article R. 613-2.

Vu :

- les autres pièces du dossier ;

- le code rural et de la pêche maritime ;

- la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 ;

- le décret n° 2005-850 du 27 juillet 2005 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience par un avis d'audience adressé le 27 octobre 2015 portant clôture d'instruction immédiate en application des dispositions de l'article R. 613-2 du code de justice administrative.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Pocheron,

- et les conclusions de M. Revert, rapporteur public.

1. Considérant que M. D...relève appel du jugement en date du 26 mai 2014 par lequel le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande dirigée contre la décision du 21 décembre 2012 du préfet de la Lozère en tant qu'elle n'a fait droit que partiellement à sa demande de délivrance d'autorisation d'exploiter et en tant qu'elle porte retrait partiel de l'autorisation totale tacite d'exploiter qui lui avait été accordée ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Considérant que le moyen tiré de la violation des dispositions de l'article R. 741-2 du code de justice administrative, qui n'est assorti d'aucune précision permettant d'en apprécier le bien-fondé, ne peut qu'être écarté ;

Sur le fond :

3. Considérant qu'aux termes du III de l'article R. 331-6 du code rural et de la pêche maritime dans ses dispositions en vigueur à la date de la décision litigieuse : " Le préfet notifie sa décision aux demandeurs, aux propriétaires et aux preneurs en place par lettre recommandée avec accusé de réception ou remise contre récépissé. Cette décision fait l'objet d'un affichage à la mairie de la commune sur le territoire de laquelle sont situés les biens. Elle est publiée au recueil des actes administratifs./ A défaut de notification d'une décision dans le délai de quatre mois à compter de la date d'enregistrement du dossier ou, en cas de prorogation de ce délai, dans les six mois à compter de cette date, l'autorisation est réputée accordée. En cas d'autorisation tacite, une copie de l'accusé de réception mentionné à l'article R. 331-4 est affichée et publiée dans les mêmes conditions que l'autorisation expresse " ; qu'en l'espèce, il ressort des pièces du dossier et il n'est d'ailleurs pas contesté par M. D...que le pli en recommandé avec accusé de réception contenant la décision litigieuse a été présenté pour la première fois au domicile du requérant le 28 décembre 2012, dans le délai de quatre mois à compter de la date de la réception de sa demande le 7 septembre précédent ; que la circonstance que M. D...n'a retiré le recommandé en cause que le 8 janvier 2013, un jour après l'expiration de ce délai de quatre mois, n'a eu pour seul effet que de faire courir le délai de recours contentieux à compter de cette date ; que, par suite, en l'absence de naissance d'une décision tacite d'autorisation d'exploiter, qui serait née le 7 janvier 2013 comme le soutient à tort le requérant, les moyens tirés de la violation des articles R. 331-6 du code rural et de la pêche maritime, et des articles 23 et 24 de la loi susvisée du 12 avril 2000, ainsi que de ce que le préfet de la Lozère n'avait plus compétence pour prononcer le retrait de cette supposée autorisation d'exploiter tacite, doivent en tout état de cause être écartés ;

4. Considérant qu'aux termes du II de l'article R. 331-6 du code rural et de la pêche maritime, dans ses dispositions en vigueur à la date de la décision litigieuse : " La décision d'autorisation ou de refus d'exploiter prise par le préfet doit être motivée au regard des critères énumérés à l'article L. 331-3. /Lorsque l'autorisation n'est que partielle, la décision précise les références cadastrales des surfaces dont l'exploitation est autorisée et celles des surfaces pour lesquelles cette autorisation n'est pas accordée. " ; qu'aux termes de l'article L. 331-1 de ce code : " Le contrôle des structures des exploitations agricoles s'applique à la mise en valeur des terres agricoles ou des ateliers de production hors sol au sein d'une exploitation agricole, quels que soient la forme ou le mode d'organisation juridique de celle-ci, et le titre en vertu duquel la mise en valeur est assurée. /Est qualifié d'exploitation agricole, au sens du présent chapitre, l'ensemble des unités de production mises en valeur directement ou indirectement par la même personne, quels qu'en soient le statut, la forme ou le mode d'organisation juridique, dont les activités sont mentionnées à l'article L. 311-1. /L'objectif prioritaire du contrôle des structures est de favoriser l'installation d'agriculteurs, y compris ceux engagés dans une démarche d'installation progressive. /En outre, il vise : - soit à empêcher le démembrement d'exploitations agricoles viables pouvant permettre l'installation d'un ou plusieurs agriculteurs ; - soit à favoriser l'agrandissement des exploitations agricoles dont les dimensions, les références de production ou les droits à aide sont insuffisants au regard des critères arrêtés dans le schéma directeur départemental des structures ; - soit à permettre l'installation ou conforter l'exploitation d'agriculteurs pluriactifs partout où l'évolution démographique et les perspectives économiques le justifient. " ; qu'aux termes de l'article L. 331-3 du même code : " L'autorité administrative se prononce sur la demande d'autorisation en se conformant aux orientations définies par le schéma directeur départemental des structures agricoles applicable dans le département dans lequel se situe le fonds faisant l'objet de la demande. Elle doit notamment : (...) 3° Prendre en compte les biens corporels ou incorporels attachés au fonds dont disposent déjà le ou les demandeurs ainsi que ceux attachés aux biens objets de la demande en appréciant les conséquences économiques de la reprise envisagée ; 4° Prendre en compte la situation personnelle du ou des demandeurs, notamment en ce qui concerne l'âge et la situation familiale ou professionnelle et, le cas échéant, celle du preneur en place ; (...) L'autorisation peut n'être délivrée que pour une partie de la demande, notamment si certaines des parcelles sur lesquelles elle porte font l'objet d'autres candidatures prioritaires. Elle peut également être conditionnelle ou temporaire. " ; que ces dispositions impliquent que le pétitionnaire doit être en mesure de connaître avec précision les motifs du refus, y compris partiel, opposé par l'autorité administrative à sa demande d'autorisation d'exploiter ; qu'en l'espèce la décision litigieuse est motivée d'une part par les conséquences de la perte de terre, en cas d'attribution à M. D...de parcelles mises en valeur par les GAEC L'Ecureuil et Rodier preneurs en place, sur l'équilibre de ces structures et leur viabilité, et d'autre part, par la circonstance que le plan de développement de l'exploitation du dossier d'installation de M. D...a été validé sur la base d'une surface de terrains sectionnaux de 18,5 ha ; que ces motifs, dont le requérant ne conteste pas la précision, relèvent des dispositions des 3° et 4° des dispositions précitées de l'article L. 331-3 du code rural et de la pêche maritime ; que, par suite, M. D...n'est pas fondé à soutenir que la décision contestée ne serait pas motivée au regard des dispositions des articles L. 331-1, L. 331-3 et R. 331-6 du code rural et de la pêche maritime ;

5. Considérant qu'eu égard aux motifs sus-rappelés de la décision querellée et des autres pièces du dossier, M. D...n'est pas davantage fondé à soutenir que le préfet de la Lozère n'aurait pas procédé à un examen particulier de sa situation personnelle ;

6. Considérant qu'il résulte des dispositions précitées de l'article L. 331-3 du code rural et de la pêche maritime que l'ordre des priorités selon lequel sont accordées les autorisations d'exploiter, figurant dans un schéma directeur départemental des structures agricoles, n'est applicable que lorsque le bien, objet de la reprise, fait l'objet de plusieurs demandes concurrentes d'autorisation d'exploiter ; que, par suite, le moyen tiré de ce que la décision litigieuse aurait méconnu l'ordre de priorité défini par l'article 1 du schéma directeur départemental des structures agricoles de la Lozère ne peut qu'être écarté ;

7. Considérant qu'il résulte des dispositions précitées du 4° de l'article L. 331-3 du code rural et de la pêche maritime, qui prescrivent notamment une prise en compte par l'autorité administrative de la situation professionnelle du pétitionnaire, que M. D...n'est pas fondé à soutenir que le préfet de la Lozère ne pouvait légalement lui opposer que le plan de développement d'exploitation de son dossier d'installation n'avait été validé que sur la base d'une surface de terrains sectionnaux de 18 ha 50 a ;

8. Considérant en tout état de cause qu'il ressort de la lecture de la décision contestée elle-même et des motifs exposés en défense par l'administration notamment en première instance que celle-ci repose à titre essentiel sur les conséquences économiques d'une autorisation délivrée à M. D...d'exploiter certains terrains sectionnaux, alors mis en valeur par les GAEC L'Ecureuil et Rodier, sur l'équilibre de ces structures et leur viabilité ; qu'il ressort des pièces du dossier que le GAEC Rodier exploitait 174 ha pour deux associés, soit 87 ha par part économique, et que le GAEC l'Ecureuil exploitait 112 ha pour deux associés, soit 56 ha par part économique, alors que M. D...exploitait 65,98 ha, auxquels se sont ajoutés les 18,5 ha issus de l'autorisation d'exploiter partielle en litige, soit 84,48 ha pour une part économique ; qu'ainsi, en se bornant à invoquer la modestie des superficies respectives de 6 ha 83 a 28 ca mis en valeur par le GAEC l'Ecureuil et 8 ha 19 a et 65 ca mis en valeur par le GAEC Rodier, dont la décision en cause ne lui a pas autorisé l'exploitation, et alors qu'il n'est pas établi ni même allégué que les terres des trois exploitations concernées présenteraient des caractéristiques particulières, M. D... n'établit pas en quoi le refus d'attribution des parcelles concernées serait entaché d'erreur d'appréciation quant aux conséquences économiques de la reprise sollicitée sur les GAEC L'Ecureuil et Rodier ;

9. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. D...n'est pas fondé à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande ;

Sur les dépens de première instance :

10. Considérant qu'aux termes de l'article R. 761-1 du code de justice administrative : " Les dépens comprennent la contribution pour l'aide juridique prévue à l'article 1635 bis Q du code général des impôts, ainsi que les frais d'expertise, d'enquête et de toute autre mesure d'instruction dont les frais ne sont pas à la charge de l'Etat. Sous réserve de dispositions particulières, ils sont mis à la charge de toute partie perdante sauf si les circonstances particulières de l'affaire justifient qu'ils soient mis à la charge d'une autre partie ou partagés entre les parties. " ; qu'il y a lieu, en application de ces dispositions, de laisser la contribution pour l'aide juridique de 35 euros acquittée en première instance à la charge du requérant ;

Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

11. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de mettre à la charge de M. D...le versement de la somme de 1 428 euros au titre des frais exposés par l'Etat et non compris dans les dépens ;

12. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, verse à M. D...la somme que celui-ci réclame au titre des frais qu'il a exposés et qui ne sont pas compris dans les dépens ;

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. D...est rejetée.

Article 2 : M. D...versera à l'Etat une somme de 1 428 (mille quatre cent vingt-huit) euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... D...et au ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt.

Copie en sera adressée au préfet de la Lozère.

Délibéré après l'audience du 14 décembre 2015, où siégeaient :

- M. Bocquet, président,

- M. Pocheron, président-assesseur,

- Mme Hameline, premier conseiller.

Lu en audience publique du 11 janvier 2016.

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N° 14MA03420


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 5ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 14MA03420
Date de la décision : 11/01/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

03-03 Agriculture et forêts. Exploitations agricoles.


Composition du Tribunal
Président : M. BOCQUET
Rapporteur ?: M. Michel POCHERON
Rapporteur public ?: M. REVERT
Avocat(s) : DESCRIAUX

Origine de la décision
Date de l'import : 30/01/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2016-01-11;14ma03420 ?
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