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01/02/2016 | FRANCE | N°15MA01819

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 6ème chambre - formation à 3, 01 février 2016, 15MA01819


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Par une requête, enregistrée le 3 mars 2011, la société d'expansion touristique de Briançon (SETB), représentée par Me B..., a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler la décision implicite de rejet résultant, le 4 janvier 2011, du silence gardé par la commune de Briançon sur le recours gracieux qu'elle a formé le 2 novembre 2010, reçu le 4 novembre 2010, à titre principal, de condamner la commune de Briançon, sur le fondement de la responsabilité contractuelle, à lui verser la som

me de 9 330 000 euros sur le fondement de l'article 3.1 du protocole d'accord du...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Par une requête, enregistrée le 3 mars 2011, la société d'expansion touristique de Briançon (SETB), représentée par Me B..., a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler la décision implicite de rejet résultant, le 4 janvier 2011, du silence gardé par la commune de Briançon sur le recours gracieux qu'elle a formé le 2 novembre 2010, reçu le 4 novembre 2010, à titre principal, de condamner la commune de Briançon, sur le fondement de la responsabilité contractuelle, à lui verser la somme de 9 330 000 euros sur le fondement de l'article 3.1 du protocole d'accord du 9 septembre 2008 et d'assortir cette somme des intérêts moratoires à compter du 1er octobre 2010 capitalisés au 365ème jour de retard en application de l'article 3.2 du protocole d'accord, à titre subsidiaire, de condamner la commune de Briançon, sur le fondement de la responsabilité quasi-contractuelle, à lui verser la somme de 9 330 000 euros représentant la valeur nette comptable des biens ayant fait retour à la commune et le déficit utile subi par la société et d'assortir cette somme des intérêts au taux légal à compter du 4 novembre 2010, capitalisés chaque année, et de mettre la somme de 8 000 euros à la charge de la commune de Briançon au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 1101645 du 17 mars 2015, le tribunal administratif de Marseille a condamné la commune de Briançon à verser la somme de 4 517 080,46 euros à la société d'expansion touristique de Briançon (SETB) au titre de l'investissement non amorti qu'elle a réalisé lors de la construction du bâtiment, ainsi que la somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Procédure devant la cour administrative d'appel :

Par une requête, enregistrée le 30 avril 2015, et des mémoires des 19 octobre et 3 novembre 2015, la commune de Briançon, représentée par Me A..., demande à la Cour :

1°) d'ordonner qu'il soit sursis à l'exécution du jugement dont appel du tribunal administratif de Marseille n° 1101645 du 17 mars 2015, sur le fondement de l'article R. 811-17 du code de justice administrative ;

2°) de condamner la société d'expansion touristique de Briançon (SETB) à payer à la commune de Briançon la somme de 5 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- l'exécution du jugement contesté risque d'entrainer des conséquences difficilement réparables en raison de la situation d'endettement de la commune de Briançon ;

- les moyens invoqués à l'appui des conclusions d'appel sont sérieux, notamment sur l'insuffisance de motivation du choix de la date retenue comme date de remise des biens de retour à la commune ;

- le mémoire de la commune de Briançon du 17 février 2015 n'a pas été communiqué et n'est pas visé par le jugement du 17 mars 2015 ;

- le mémoire de la société d'expansion touristique de Briançon (SETB) du 20 février 2015 n'a pas été communiqué et n'est pas visé par le jugement du 17 mars 2015 ;

- le tribunal a fait une application automatique de la jurisprudence " commune de Nogent-sur-Marne " et n'a pas vérifié les conditions d'application de l'enrichissement sans cause. Elle invoque une absence de remise des biens de retour, une absence d'enrichissement de la commune et une absence d'appauvrissement de la SETB ;

Par un mémoire, enregistré le 30 juillet 2015, la société d'expansion touristique de Briançon (SETB), représentée par Me B..., demande à la cour :

A titre principal :

1°) de rejeter la requête de la commune de Briançon tendant à ce qu'il soit sursis à l'exécution du jugement n° 1101645 ;

2°) de dire que le protocole d'accord transactionnel a été régulièrement conclu ;

3°) de condamner la commune de Briançon à lui verser la somme de 9 330 000 euros en réparation du préjudice subi du fait de l'inexécution par la ville du protocole du 9 septembre 2008, majorée des intérêts moratoires, à compter du 1er octobre 2010 ;

A titre subsidiaire :

1°) de confirmer le jugement du tribunal administratif de Marseille n° 1101645 du 17 mars 2015 en ce qu'il a notamment condamné la commune de Briançon à verser la somme de 4 517 080,46 euros à la société d'expansion touristique de Briançon (SETB), majorée des intérêts au taux légal à compter du 4 novembre 2010, lesdits intérêts étant capitalisés pour produire eux mêmes intérêts à chaque échéance annuelle ultérieure, ainsi que la somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, et ordonné une mesure d'expertise ;

2°) de réformer le jugement en modifiant l'article 6, 2°) relatif à la mission d'expertise comme suit : " 2°) de calculer le déficit d'exploitation de la société d'expansion touristique de Briançon (SETB) depuis l'année 2002 jusqu'à l'année 2007, en précisant autant que possible si ce déficit était nécessaire à la bonne exécution du service et notamment aux contraintes d'exploitation imposées par la collectivité ou à la charge des amortissements compte tenu de l'importance de l'investissement " ;

3°) de condamner la commune de Briançon au paiement de la somme de 25 000 euros, sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- les moyens soulevés par la commune de Briançon ne sont pas de nature à justifier le sursis à exécution du jugement attaqué ;

- le jugement du tribunal administratif de Marseille n° 1101645 du 17 mars 2015 est régulier ;

- la date retenue de remise des biens retour à la commune du 1er novembre 2007 correspond à celle de la convention de gestion provisoire signée entre les deux parties ;

- la jurisprudence " commune de Nogent-sur-Marne " est applicable et les conditions de l'enrichissement sans cause sont réunies ;

- le tribunal administratif de Marseille n'en fait pas fait une application automatique ;

- les mémoires invoqués par la commune ne contiennent pas d'éléments nouveaux, et, par conséquent, l'absence de communication ne porte pas atteinte au principe du contradictoire ;

- il est suppléé par les motifs du jugement aux omissions qui affectent le visa des mémoires.

Par un mémoire en défense, du 9 novembre 2015, la société d'expansion touristique de Briançon (SETB), représentée par Me B... demande la jonction des deux instances, au fond et aux fins de sursis à exécution, et conclut aux mêmes fins.

Elle soutient que :

- le jugement du tribunal administratif de Marseille n° 1101645 du 17 mars 2015 est régulier ;

- la demande de sursis est inopérante en ce qu'elle est fondée à tort sur l'article R. 811-17, et non sur l'article R. 811-16 du code de justice administrative ;

- les conditions du R. 811-16 ne sont pas remplies ;

- la commune de Briançon n'est pas exposée à la perte définitive d'une somme ;

- les difficultés financières d'une commune ne sont pas susceptibles de fonder l'octroi d'un sursis à exécution d'un jugement ;

- la commune de Briançon dispose ou peut disposer des sommes nécessaires pour verser à la SETB la somme de 4 517 080,46 euros, majorée des intérêts moratoires dus.

Par un mémoire en défense, enregistré le 30 novembre 2015, la société d'expansion touristique de Briançon (SETB), représentée par Me B..., conclut aux mêmes fins par les mêmes moyens.

Elle soutient que :

- la commune et elle-même, ont établi un inventaire des biens mentionnant la date de sortie des biens de l'actif de la société, le 1er novembre 2007 ; ainsi, les biens ont été remis à la commune antérieurement aux différentes conventions postérieures.

Par un mémoire en défense, enregistré le 21 décembre 2015, la société d'expansion touristique de Briançon (SETB), représentée par Me B..., conclut aux mêmes fins par les mêmes moyens.

Elle demande en outre le maintien de l'instance n° 15MA01819 (sursis à exécution) et la réinscription de l'instance n° 15MA01775 au rôle de l'audience publique du 11 janvier 2016.

Vu :

- le jugement du tribunal administratif de Marseille n° 1101645 du 17 mars 2015 ;

- l'arrêt de la cour administrative d'appel de Marseille n°s 12MA04341, 12MA04342, 12MA04569 et 12MA04570 du 28 mars 2013 ;

- l'arrêt de la cour administrative d'appel de Marseille n° 13MA04734 du 10 juin 2014 ;

- l'arrêt de la cour administrative d'appel de Marseille n°s 04MA00412 et 04MA00413 du 26 mars 2007 ;

- le code de justice administrative ;

- les autres pièces du dossier.

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience.

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 11 janvier 2016 :

- le rapport de M. Marcovici,

- les conclusions de M. Thiele, rapporteur public,

- et les observations de Me A..., représentant la commune de Briançon, et de Me B..., représentant la société d'expansion touristique de Briançon (SETB).

Deux notes en délibéré, présentées par Me B... pour la société d'expansion touristique de Briançon (SETB), ont été enregistrées les 14 et 18 janvier 2016.

Une note en délibéré, présentée par Me A... pour la commune de Briançon, a été enregistrée le 15 janvier 2016.

1. Considérant que la commune de Briançon a confié la construction et la gestion du casino de Briançon, par une convention conclue le 21 février 2002, à la société d'exploitation du casino de Briançon ; qu'à la suite d'un recours engagé contre la délibération du 24 juillet 2001 déléguant le service public du casino de jeux, approuvant le cahier des charges de construction et d'exploitation et autorisant le maire à signer le contrat, la cour administrative d'appel de Marseille a, par un arrêt du 26 mars 2007, annulé ladite délibération et a enjoint à la commune de Briançon, à défaut d'avoir obtenu un accord de la société tendant à ce que les cocontractants renoncent à se prévaloir de l'existence et des clauses du contrat, de saisir le juge du contrat afin d'obtenir qu'il en déclare la nullité ; que les cocontractants ont conclu le 9 septembre 2008 un accord amiable de résolution de la délégation de service public prévoyant l'indemnisation de la société d'exploitation du casino de Briançon, devenue société d'expansion touristique de Briançon (SETB), à hauteur de 9 330 000 euros ; que plusieurs conventions provisoires à compter d'octobre 2007 ont été signées jusqu'à la signature d'une nouvelle convention de délégation de service public intervenue le 16 septembre 2010 avec la société d'expansion touristique de Briançon (SETB) ;

2. Considérant que le tribunal administratif de Marseille, par un jugement n° 1101645 du 17 mars 2015, a jugé que l'accord conclu le 9 septembre 2008 était entaché de nullité ; qu'il a condamné la commune de Briançon à verser la somme de 4 517 080,46 euros à la société d'expansion touristique de Briançon (SETB) au titre de l'investissement non amorti qu'elle a réalisé lors de la construction du bâtiment ; qu'il a également condamné la commune de Briançon à verser à la société d'expansion touristique de Briançon (SETB) la somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; que la commune de Briançon demande qu'il soit sursis à l'exécution de ce jugement ;

3. Considérant qu'aux termes de l'article R. 811-17 du code de justice administrative, qui, contrairement aux affirmations de la société d'expansion touristique de Briançon, est invocable par la commune de Briançon : " (...) le sursis peut être ordonné à la demande du requérant si l'exécution de la décision de première instance attaquée risque d'entraîner des conséquences difficilement réparables et si les moyens énoncés dans la requête paraissent sérieux en l'état de l'instruction " ;

4. Considérant que, lorsqu'il se prononce sur une demande de sursis à exécution d'un tel jugement sur le fondement des dispositions de l'article R. 811-17 du code de justice administrative, le juge d'appel doit s'assurer que, dans les circonstances de l'espèce, compte tenu notamment du montant de la somme en cause et de la situation de son débiteur, les conséquences qui résulteraient, pour l'appelant, de l'impossibilité de percevoir les intérêts moratoires sur la somme qu'il a été condamné à payer dans le cas où ses conclusions tendant à être déchargé du paiement de cette somme seraient accueillies en appel, présentent un caractère difficilement réparable ;

5. Considérant que tribunal administratif de Marseille, par l'article 1er du jugement du 17 mars 215, a condamné la commune de Briançon à verser la somme de 4 517 080,46 euros à la société d'expansion touristique de Briançon (SETB) au titre de l'investissement non amorti qu'elle a réalisé lors de la construction du bâtiment ; que compte tenu du montant de la somme en cause et de la situation financière de la commune de Briançon, les conséquences qui résulteraient, pour elle, de l'impossibilité de percevoir les intérêts moratoires sur la somme qu'elle a été condamné à verser, présentent un caractère difficilement réparable ; qu'il résulte, dès lors, de l'instruction que l'exécution de la décision de première instance risque d'entraîner des conséquences difficilement réparables compte tenu de l'importance de la somme dont la commune de Briançon a été condamnée ; qu'en revanche, les autres dispositions du jugement ne risquent pas d'entraîner de conséquences difficilement réparables pour la commune ;

6. Considérant que la commune de Briançon soutient notamment que le jugement attaqué est insuffisamment motivé s'agissant de la date retenue pour la remise des biens de retour à la commune de Briançon ; que ce moyen paraît sérieux en l'état de l'instruction ;

7. Considérant qu'il résulte de ce qui précède, les deux conditions prévues à l'article R. 811-17 du code de justice administrative étant réunies, que la commune de Briançon est fondée à demander qu'il soit sursis à l'exécution de l'article 1er du jugement du tribunal administratif de Marseille en date du 17 mars 2015, cet article 1er étant divisible des autres dispositions du jugement ;

8. Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation " ;

9. Considérant qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la société d'expansion touristique de Briançon (SETB) une somme au titre des frais exposés par la commune de Briançon et non compris dans les dépens ; qu'il y a également lieu de rejeter la demande qu'a formulée la SETP à ce titre ;

D É C I D E :

Article 1er : Il est sursis à l'exécution de l'article 1er du jugement du tribunal administratif de Marseille du 17 mars 2015 jusqu'à ce qu'il ait été statué sur la requête d'appel de la commune de Briançon formée à l'encontre de ce jugement.

Article 2 : Le surplus des conclusions de la commune de Briançon et de la société d'expansion touristique de Briançon est rejeté.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la commune de Briançon et à la société d'expansion touristique de Briançon.

Délibéré après l'audience du 11 janvier 2016, où siégeaient :

- M. Moussaron, président,

- M. Marcovici, président assesseur,

- Mme Héry, premier conseiller,

Lu en audience publique, le 1er février 2016.

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N° 15MA01819


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 6ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 15MA01819
Date de la décision : 01/02/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

54-07-01-04-01-01 Procédure. Pouvoirs et devoirs du juge. Questions générales. Moyens. Moyens d'ordre public à soulever d'office. Absence.


Composition du Tribunal
Président : M. MOUSSARON
Rapporteur ?: M. Laurent MARCOVICI
Rapporteur public ?: M. THIELE
Avocat(s) : HOLLEAUX

Origine de la décision
Date de l'import : 12/02/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2016-02-01;15ma01819 ?
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