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17/03/2016 | FRANCE | N°14MA02943

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 2ème chambre - formation à 3, 17 mars 2016, 14MA02943


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme C... B...a demandé au tribunal administratif de Marseille de condamner l'office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (ONIAM) à lui verser la somme totale de 257 100 euros en réparation des préjudices qu'elle impute à sa vaccination obligatoire contre l'hépatite B.

Par un jugement n° 1004641 du 26 mai 2014, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête e

nregistrée le 3 juillet 2014, Mme B..., représentée par Me A..., demande à la Cour :

1°) d'...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme C... B...a demandé au tribunal administratif de Marseille de condamner l'office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (ONIAM) à lui verser la somme totale de 257 100 euros en réparation des préjudices qu'elle impute à sa vaccination obligatoire contre l'hépatite B.

Par un jugement n° 1004641 du 26 mai 2014, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 3 juillet 2014, Mme B..., représentée par Me A..., demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1004641 du 26 mai 2014 du tribunal administratif de Marseille ;

2°) de condamner l'ONIAM à lui verser la somme totale de 257 100 euros en réparation de ses préjudices ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, qui sera versée à Me A... en cas d'obtention de l'aide juridictionnelle en contrepartie de sa renonciation à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat à la mission d'aide juridictionnelle.

Elle soutient que :

- c'est à tort que les premiers juges n'ont pas retenu l'existence d'un lien de causalité entre la vaccination obligatoire contre l'hépatite B et l'apparition de la sclérose en plaques ;

- elle ne présentait pas d'antécédents cliniques ;

- les premiers symptômes sont apparus très peu de temps après la première injection du vaccin contre l'hépatite B ;

- les deux conditions étant remplies, le lien de causalité entre la vaccination en décembre 1993 et l'apparition de la sclérose en plaques est présumé établi et ouvre droit à indemnisation ;

- sur ses préjudices, il faut retenir l'évaluation plus haute du premier expert désigné par l'ONIAM dans son rapport du 26 novembre 2008 ;

- son déficit fonctionnel permanent de 30 % sera indemnisé par l'allocation d'une somme de 90 000 euros ;

- ses souffrances endurées seront réparées par la somme de 20 000 euros ;

- son préjudice d'agrément donnera lieu à l'allocation d'une somme de 15 000 euros ;

- son préjudice esthétique chiffré à 1/7 sera réparé par la somme de 5 500 euros ;

- son déficit fonctionnel temporaire total pendant les périodes d'hospitalisation et de 20 % en dehors de ces périodes sera réparé par la somme de 12 600 euros ;

- l'incidence professionnelle sera réparée par la somme totale de 114 000 euros.

Par un mémoire enregistré le 21 août 2014, l'ONIAM, représenté par l'association d'avocats Vatier et associés, conclut à titre principal au rejet de la requête et à la condamnation de la requérante aux dépens de la présente instance, à titre subsidiaire, à ramener l'indemnisation de chaque poste de préjudice invoqué à de plus justes proportions.

Il soutient que :

- la requérante n'établit pas le lien de causalité direct, exigé par l'article L. 3111-9 du code de la santé publique, entre la vaccination obligatoire contre l'hépatite B et sa sclérose en plaques ;

- d'abord, le lien entre le vaccin contre l'hépatite B et l'apparition d'une sclérose en plaques n'a jamais été scientifiquement prouvé ;

- de plus, le délai entre la vaccination litigieuse et les premiers symptômes cliniquement constatés de la sclérose en plaques est trop long en l'espèce ;

- à titre subsidiaire, le montant des indemnisations demandées est excessif ;

- la réparation de son déficit fonctionnel temporaire total ou partiel ne pourra excéder la somme totale de 13 475,20 euros ;

- ses souffrances endurées seront indemnisées par la somme maximale de 1 800 euros ;

- son préjudice esthétique sera réparé par la somme de 700 euros ;

- son déficit fonctionnel permanent de 25 % sera indemnisé par la somme de 36 700 euros ;

- l'incidence professionnelle sera indemnisée par la somme maximale de 8 000 euros.

Par décision du 26 août 2014, l'aide juridictionnelle totale a été accordée à Mme B....

Vu :

- les autres pièces du dossier ;

- le code de la santé publique ;

- la loi n° 91-73 du 18 janvier 1991 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Carassic, rapporteure ;

- les conclusions de Mme Chamot, rapporteure publique ;

- et les observations de Me A...pour Mme B....

1. Considérant que Mme B..., agent de service dans une maison de retraite médicalisée, a reçu le 13 décembre 1993 sa première et unique injection de vaccin Engerix B contre l'hépatite B ; qu'elle affirme avoir ressenti dès le début de l'année 1994 des troubles associés aux symptômes de la sclérose en plaques, dont le diagnostic a été posé, par la réalisation d'une imagerie par résonnance magnétique (IRM) cérébrale et médullaire de la ponction lombaire, le 13 août 1999 ; qu'imputant sa pathologie à l'injection vaccinale obligatoire qu'elle a reçue, elle a formé le 6 août 2008 une demande d'indemnisation de ses séquelles auprès de l'office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (ONIAM) ; que, le 5 mai 2009, l'ONIAM a rejeté la demande indemnitaire de la requérante ; que Mme B... a alors saisi le tribunal administratif de Marseille d'une demande tendant à obtenir l'indemnisation, pour un montant total estimé à 257 100 euros, de ses préjudices et la désignation d'un nouvel expert ; que par jugement avant dire droit du 16 décembre 2011, les premiers juges se sont estimés insuffisamment informés de l'imputabilité de la sclérose en plaques dont est atteinte Mme B... à l'injection vaccinale reçue le 13 décembre 1993 et ont ordonné une nouvelle expertise ; que le second expert a rendu son rapport le 24 mai 2012 ; que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a rejeté la demande indemnitaire de Mme B... et les conclusions de la caisse primaire d'assurance maladie des Bouches-du-Rhône tendant à la "réservation de ses droits" et a mis les frais d'expertise, d'un montant de 550 euros, à la charge du Trésor Public, la requérante bénéficiant de l'aide juridictionnelle ;

Sur la réparation par l'ONIAM au titre de la solidarité nationale :

2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 10 du code de la santé publique dans sa rédaction issue de l'article 1er de la loi susvisée du 18 janvier 1991, applicable à la date à laquelle Mme B... a reçu l'injection litigieuse, et dont les dispositions ont ultérieurement été reprises à l'article L. 3111-4 du même code : " Toute personne qui, dans un établissement ou organisme public ou privé de prévention ou de soins, exerce une activité professionnelle l'exposant à des risques de contamination doit être immunisée contre l'hépatite B, la diphtérie, le tétanos et la poliomyélite. (...) " ; que le caractère obligatoire de la vaccination de Mme B... en sa qualité d'agent de service dans une maison de retraite médicalisée n'est pas contesté par l'ONIAM ;

3. Considérant qu'aux termes de l'article L. 3111-9 du code de la santé publique : " Sans préjudice des actions qui pourraient être exercées conformément au droit commun, la réparation intégrale des préjudices directement imputables à une vaccination obligatoire pratiquée dans les conditions mentionnées au présent chapitre, est assurée par l'office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales institué à l'article L. 1142-22, au titre de la solidarité nationale." .

4. Considérant qu'alors même qu'un rapport d'expertise, sans l'exclure, n'établirait pas de lien de causalité entre la vaccination et l'affection, l'indemnisation par l'ONIAM peut être assurée, au titre de la solidarité nationale, en raison des conséquences dommageables d'injections vaccinales contre l'hépatite B réalisées dans le cadre d'une activité professionnelle eu égard, d'une part, au bref délai ayant séparé l'injection des premiers symptômes d'une sclérose en plaques, éprouvés par la personne concernée et établis par les constatations de l'expertise médicale, et, d'autre part, à la bonne santé de cette personne et à l'absence, chez elle, de tous antécédents à cette pathologie antérieurement à sa vaccination ; que la preuve des différentes circonstances à prendre ainsi en compte, notamment celle de la date d'apparition des premiers symptômes d'une sclérose en plaques, peut être apportée par tout moyen ;

5. Considérant que Mme B... a reçu le 13 décembre 1993 sa première et unique injection de vaccin Engerix B contre l'hépatite B ; qu'il résulte du rapport de l'expert désigné par le jugement avant dire droit du 16 décembre 2011 que la requérante s'est plainte en mars 1994 de paresthésies de l'hémiface gauche et du bras gauche, d'augmentation progressive intéressant ensuite la jambe gauche associée à une lourdeur et de troubles urinaires, que Mme B... associe aux premiers symptômes de la sclérose en plaques dont le diagnostic a été définitivement posé le 25 juillet 1999 après la réalisation d'IRM médullaire et cérébrale ; que toutefois, l'expert professeur des universités neurologue affirme sans aucune ambigüité qu'il n'existe aucun document objectif permettant de démontrer l'origine neurologique des troubles décrits ci-dessus ressentis par la requérante en mars 1994 et par suite, pas de symptômes cliniques de la sclérose en plaques à cette date ; que l'homme de l'art estime que le premier symptôme objectif permettant de retenir le diagnostic de la maladie est l'apparition d'une névrite optique rétrobulbaire droite à l'été 1999 ; que Mme B..., qui ne produit notamment aucune littérature médicale permettant de mettre en cause les dires circonstanciés de l'expert et qui se borne à soutenir que la circonstance que son médecin de famille n'aurait pas su diagnostiquer dès mars 1994 sa sclérose en plaques à partir de ces signes ne saurait lui être préjudiciable, n'établit pas que les troubles apparus dès l'hiver 1994 constitueraient des symptômes spécifiques de la sclérose en plaques dont elle est atteinte ; que, dans ces conditions, eu égard au délai de 5 ans et demi qui s'est écoulé entre l'injection de vaccin et l'apparition des symptômes de la maladie cliniquement constatés, son imputation à la vaccination ne peut être regardée comme établie, alors même que l'expert a noté l'absence, chez la requérante, de tous antécédents à cette pathologie antérieurement à sa vaccination ; que, dès lors c'est à bon droit que les premiers juges ont estimé que les conditions exigées par l'article L. 3111-9 du code de la santé publique n'étaient pas remplies et qu'ils ont rejeté la demande de Mme B... ;

6. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme B... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que les premiers juges ont rejeté sa demande indemnitaire ;

Sur l'application des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 :

7. Considérant que les dispositions de cet article font obstacle à ce que l'ONIAM, qui n'est pas la partie perdante au litige, soit condamné à verser à Mme B... quelque somme que ce soit au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

D É C I D E :

Article 1er : La requête de Mme B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C...B..., à l'office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales et à la caisse primaire d'assurance maladie des Bouches-du-Rhône.

Copie pour information sera adressée à l'expert.

Délibéré après l'audience du 25 février 2016, où siégeaient :

- M. Laso, président assesseur, présidant la formation du jugement en application de l'article R. 222.26 du code de justice administrative,

- Mme Carassic, première conseillère,

- Mme D..., première conseillère.

Lu en audience publique, le 17 mars 2016.

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N° 14MA029432

RPTR


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 2ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 14MA02943
Date de la décision : 17/03/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

60-02-01-01 Responsabilité de la puissance publique. Responsabilité en raison des différentes activités des services publics. Service public de santé. Établissements publics d'hospitalisation.


Composition du Tribunal
Président : M. LASO
Rapporteur ?: Mme Marie-Claude CARASSIC
Rapporteur public ?: Mme CHAMOT
Avocat(s) : PRIMA

Origine de la décision
Date de l'import : 05/04/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2016-03-17;14ma02943 ?
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