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26/04/2016 | FRANCE | N°14MA01433

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 1ère chambre - formation à 3, 26 avril 2016, 14MA01433


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. E... F...a demandé au tribunal administratif de Nîmes, d'une part, d'annuler la délibération en date du 16 février 2012 par laquelle le conseil municipal de la commune de Mirabeau a approuvé la révision du plan local d'urbanisme de la commune, et, d'autre part, d'annuler la délibération en date du 25 avril 2012 par laquelle le conseil municipal de la commune de Mirabeau, après avoir retiré la délibération du 16 février 2012 portant approbation du plan local d'urbanisme de la commune, a approuvé à

nouveau ce plan..

Par un jugement n° 1201127, 1201739 du 24 janvier 2014, le...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. E... F...a demandé au tribunal administratif de Nîmes, d'une part, d'annuler la délibération en date du 16 février 2012 par laquelle le conseil municipal de la commune de Mirabeau a approuvé la révision du plan local d'urbanisme de la commune, et, d'autre part, d'annuler la délibération en date du 25 avril 2012 par laquelle le conseil municipal de la commune de Mirabeau, après avoir retiré la délibération du 16 février 2012 portant approbation du plan local d'urbanisme de la commune, a approuvé à nouveau ce plan..

Par un jugement n° 1201127, 1201739 du 24 janvier 2014, le tribunal administratif de Nîmes a annulé les deux délibérations précitées et mis à la charge de la commune de Mirabeau la somme de 1 200 euros à verser à M. F... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 28 mars 2014 et le 29 juillet 2015, la commune de Mirabeau, représentée par Me B..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nîmes du 24 janvier 2014 ;

2°) de rejeter la demande de première instance ;

3°) de mettre à la charge de M. F... la somme de 2 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le conseil municipal a délibéré sur les objectifs énoncés dans la délibération du 25 janvier 1992, conformément aux dispositions de l'article L. 300-2 du code de l'urbanisme ;

- c'est à tort que les premiers juges ont estimé que la délibération litigieuse ne pouvait pas être adoptée sans enquête publique préalable au regard des articles L. 123-12 et L. 123-13 du code de l'urbanisme, quelle que soit la nature des modifications apportées au plan mis en chantier en 1992, alors que M. F... soutenait seulement qu'une nouvelle enquête aurait dû précéder la délibération attaquée compte tenu du prétendu caractère substantiel des modifications apportées au projet après l'enquête publique ; à titre surabondant aucune modification ne présente de caractère substantiel ;

- les compléments apportés au rapport de présentation ne nécessitaient pas de consulter le préfet de Vaucluse au titre des articles R. 121-14 et R. 121-15 du code de l'urbanisme ;

- le rapport de présentation n'avait pas à être complété par une évaluation environnementale dès lors que les opérations autorisées n'affectent pas de matière significative un site " Natura 2000 " ; en tout état de cause le volet évaluation des incidences sur l'environnement du rapport de présentation a été complété ;

- les autres moyens de première instances sont mal-fondés.

Par un mémoire en défense, enregistré le 16 juillet 2015, M. F... conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de la commune de Mirabeau la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il fait valoir qu'aucun des moyens de la requête n'est fondé.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- le code de l'environnement ;

- le code général des collectivités territoriales ;

- le code de justice administrative.

Vu la décision de la présidente de la cour administrative d'appel de Marseille qui désigne Mme Muriel Josset, présidente-assesseure de la 1ère chambre, pour présider, en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative, la formation de jugement en cas d'absence ou d'empêchement de M. Jean-Louis d'Hervé, président de la 1ère chambre.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Gougot, 1ère conseillère,

- les conclusions de M. Salvage, rapporteur public,

- et les observations de Me C..., représentant la commune de Mirabeau, et de Me D... susbtituant MeA..., représentant M.F....

1. Considérant que, par une délibération du 16 février 2012, le conseil municipal de Mirabeau a approuvé la révision de son plan d'occupation des sols ; que par délibération du 25 avril 2012, il a annulé la délibération du 16 février 2012 et l'a remplacée en approuvant à nouveau le plan local d'urbanisme ; que la commune de Mirabeau interjette appel du jugement en date du 24 janvier 2014 par lequel le tribunal administratif de Nîmes a annulé ces deux délibérations ;

Sur la régularité du jugement :

2. Considérant que si la commune de Mirabeau entend soutenir que le jugement est irrégulier en tant que le tribunal a d'office appliqué les articles L. 123-12 et L. 123-13 du code de l'urbanisme, les premiers juges se sont bornés à répondre au moyen invoqué par le demandeur tiré de l'absence de nouvelle enquête publique ;

Sur le bien-fondé du jugement en tant qu'il annule la délibération du 25 avril 2012 qui retire la délibération du 16 février 2012 :

3. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 300-2 du code de l'urbanisme alors en vigueur: " I - Le conseil municipal [...]délibère sur les objectifs poursuivis et sur les modalités d'une concertation associant, pendant toute la durée de l'élaboration du projet, les habitants, les associations locales et les autres personnes concernées dont les représentants de la profession agricole, avant :/a) Toute élaboration ou révision du schéma de cohérence territoriale ou du plan local d'urbanisme ;/[...] Les documents d'urbanisme et les opérations mentionnées aux a, b et c ne sont pas illégaux du seul fait des vices susceptibles d'entacher la concertation, dès lors que les modalités définies par la délibération prévue au premier alinéa ont été respectées.... " ; qu'il résulte de ces dispositions que le conseil municipal doit, avant que ne soit engagée la concertation avec les habitants, les associations locales et les autres personnes concernées, délibérer, d'une part, et au moins dans leurs grandes lignes, sur les objectifs poursuivis par la commune en projetant d'élaborer ou de réviser un document d'urbanisme, d'autre part, sur les modalités de la concertation ; que la méconnaissance de cette obligation est de nature à entraîner l'illégalité du document d'urbanisme approuvé ;

4. Considérant que la commune de Mirabeau produit pour la première fois en appel la délibération du 25 janvier 1992 par laquelle le conseil municipal a prescrit la révision de son document d'urbanisme afin d'inclure le projet d'intérêt général relatif à l'occupation des sols dans les zones soumises à risques de feux de forêt et de réexaminer la densité de l'occupation des sols dans les zones d'extension immédiate du village ; qu'elle soutient que la délibération du 10 avril 2003 se réfère expressément à cette délibération du 25 janvier 1992 qui aurait, selon elle, suffisamment délibéré sur les objectifs poursuivis par ladite révision ; que, toutefois, l'objectif visant à réexaminer la densité de l'occupation des sols dans les zones d'extension immédiate du village est imprécis et ne permettait pas aux conseillers municipaux de débattre utilement du projet d'urbanisme de la commune, même dans ses grandes lignes ; que par ailleurs, le projet d'aménagement et de développement durable (PADD) élaboré dans le cadre de cette révision a retenu deux axes, le premier consistant à " I Préserver le territoire " ; que l'objectif de prise en compte des risques de feu de forêt se retrouve seulement dans le quatrième sous-objectif du premier axe du PADD visant à " I.4 Prendre en compte les risques naturels ", après ceux tendant à " I.1 Mieux définir la protection des vues, des paysages et éviter le mitage, I.2 Maintenir et protéger les espaces agricoles " et " I.3 Protéger les espaces boisés " ; que le second axe du PADD tend à " II. Faire vivre la commune " et comprend quatre sous-objectifs visant à : " II.1 Maintenir le caractère groupé du village ; II.2. Maitriser l'urbanisation ; II.3. Accueillir une population diversifiée ; II.4 Favoriser un développement harmonisé de la commune " ; que les objectifs de la révision du plan local d'urbanisme sont, de fait, ceux ultérieurement révélés par le PADD et n'ont pas fait l'objet d'une délibération du conseil municipal, dès lors que le seul débat, qui s'est tenu sur les orientations du PADD, ne peut en tenir lieu ;

5. Considérant que si les actes administratifs doivent être pris selon les formes et conformément aux procédures prévues par les lois et règlements, un vice affectant le déroulement d'une procédure administrative préalable, suivie à titre obligatoire ou facultatif, n'est de nature à entacher d'illégalité la décision prise que s'il ressort des pièces du dossier qu'il a été susceptible d'exercer, en l'espèce, une influence sur le sens de la décision prise ou qu'il a privé les intéressés d'une garantie ;

6. Considérant que les objectifs de la révision du plan local d'urbanisme n'ont, d'une part, pas été présentés et soumis comme tels à la concertation publique et n'ont, d'autre part, par voie de conséquence, pas été notifiés aux personnes publiques associées à la procédure ; que l'irrégularité analysée au point 4 a dès lors privé tant le public que les personnes publiques associées d'une garantie, et entache par suite d'illégalité la procédure d'élaboration du plan local d'urbanisme ; que, par suite, la commune de Mirabeau n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Nîmes a accueilli le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 300-2 du code de l'urbanisme ;

7. Considérant, en deuxième lieu, qu'une autorité administrative peut légalement retirer un texte réglementaire illégal si le délai de recours contentieux n'est pas expiré au moment où elle édicte le retrait, ou si celui-ci a fait l'objet d'un recours gracieux ou contentieux formé dans ce délai ; que par suite, le conseil municipal de Mirabeau a pu légalement, suite aux observations formulées par le sous-préfet d'Apt dans le cadre du contrôle de légalité le 12 avril 2012, soit dans le délai de recours contentieux, procéder au retrait de la délibération du 16 février 2012 afin de corriger les illégalités relevées par le représentant de l'Etat, qui ne sont pas contestées par les parties ;

8. Considérant, qu'aux termes de l'article L. 123-12 du code de l'urbanisme : " Dans les communes non couvertes par un schéma de cohérence territoriale, l'acte publié approuvant le plan local d'urbanisme devient exécutoire un mois suivant sa transmission au préfet. " ; " que selon l'article L. 123-13 du même code : " Dans les autres cas que ceux visés aux a, b et c, le plan local d'urbanisme peut faire l'objet d'une révision selon les modalités définies aux articles L. 123-6 à L. 123-12 " que l'article L.123-10 du code de l'urbanisme, dans sa version alors en vigueur, dispose : " Le projet de plan local d'urbanisme est soumis à enquête publique réalisée conformément au chapitre III du titre II du livre Ier du code de l'environnement par [...] le maire. Le dossier soumis à l'enquête comprend, en annexe, les avis des personnes publiques consultées./ Après l'enquête publique réalisée conformément au chapitre III du titre II du livre Ier du code de l'environnement, le plan local d'urbanisme, éventuellement modifié, est approuvé par délibération [...] du conseil municipal... " ;

9. Considérant que s'il est loisible à l'autorité compétente de modifier le plan local d'urbanisme après l'enquête publique, c'est sous réserve, d'une part, que ne soit pas remise en cause l'économie générale du projet et, d'autre part, que cette modification procède de l'enquête ; qu'en l'espèce, il ne ressort pas des pièces du dossier que les modifications apportées au plan local d'urbanisme suite aux observations du représentant de l'Etat formulées le 12 avril 2012, après que le plan local d'urbanisme soit devenu exécutoire, un mois après sa transmission au préfet en application de l'article L. 123-12 du code de l'urbanisme précité, procédaient de l'enquête publique ; que, par suite, le moyen tiré de l'absence de nouvelle enquête publique suite aux modifications précitées doit être accueilli ;

10. Considérant, en troisième lieu, que selon l'article R. 121-14 du code de l'environnement dans sa version alors en vigueur : " ...II.- Font également l'objet d'une évaluation environnementale : 1° Les plans locaux d'urbanisme qui permettent la réalisation de travaux, ouvrages ou aménagements mentionnés à l'article L. 414-4 du code de l'environnement ; 2° Lorsque les territoires concernés ne sont pas couverts par un schéma de cohérence territoriale ayant fait l'objet d'une évaluation environnementale dans les conditions de la présente section : a) Les plans locaux d'urbanisme relatifs à un territoire d'une superficie supérieure ou égale à 5 000 hectares et comprenant une population supérieure ou égale à 10 000 habitants ; b) Les plans locaux d'urbanisme qui prévoient la création, dans des secteurs agricoles ou naturels, de zones U ou AU d'une superficie totale supérieure à 200 hectares... " ; que selon l'article L. 414-4 du code de l'environnement alors en vigueur :" I. - Lorsqu'ils sont susceptibles d'affecter de manière significative un site Natura 2000, individuellement ou en raison de leurs effets cumulés, doivent faire l'objet d'une évaluation de leurs incidences au regard des objectifs de conservation du site, dénommée ci-après " Evaluation des incidences Natura 2000 " : /1° Les documents de planification qui, sans autoriser par eux-mêmes la réalisation d'activités, de travaux, d'aménagements, d'ouvrages ou d'installations, sont applicables à leur réalisation ... " ; que selon l'article R. 121-15 du code de l'urbanisme alors en vigueur : " ...le préfet de département pour [...] les plans locaux d'urbanisme mentionnés au II [de l'article R. 121-14], sont consultés sur l'évaluation environnementale contenue dans le rapport de présentation et sur la prise en compte de l'environnement par le projet de document d'urbanisme, trois mois au plus tard avant l'ouverture de l'enquête publique ou de la consultation du public prévue par des textes particuliers. L'avis est réputé favorable s'il n'intervient pas dans un délai de trois mois. Il est, s'il y a lieu, joint au dossier d'enquête publique ou mis à la disposition du public. " ;

11. Considérant toutefois que pour répondre notamment aux préconisations émises par l'Etat dans un avis du 27 avril 2011, le rapport de présentation annexé au plan local d'urbanisme approuvé par la délibération du 25 avril 2012 a été complété afin de démontrer avec plus de précisions que les orientations du plan local d'urbanisme n'avaient pas d'incidences notables au regard des objectifs de conservation des sites Natura 2000 de la commune ; que, dès lors, le préfet n'avait pas à être consulté sur ce complément d'enquête sur le fondement des dispositions précitées de l'article R. 121-15 du code de l'urbanisme ; que la commune de Mirabeau est, par suite, fondée à soutenir que c'est à tort que les premiers juges se sont fondés sur le défaut de nouvelle consultation du préfet de Vaucluse, en application de l'article R. 121-15 du code de l'urbanisme pour annuler la délibération litigieuse ;

12. Considérant toutefois que les deux premiers motifs du jugement suffisent à justifier l'annulation de la délibération du 25 avril 2012 ;

13. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la commune de Mirabeau n'est pas fondée à se plaindre de ce que le tribunal administratif de Nîmes a annulé la délibération du 25 avril 2012 ;

Sur le bien-fondé du jugement en tant qu'il annule la délibération du 16 février 2012 :

14. Considérant que si la commune de Mirabeau demande l'annulation du jugement du tribunal administratif de Nîmes dans son intégralité, et donc également en tant qu'il annule la délibération du 16 février 2012, elle n'invoque toutefois aucun moyen au soutien de ces conclusions ; que lesdites conclusions ne peuvent, par suite, qu'être rejetées ;

Sur les conclusions au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

15. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle aux conclusions de la commune de Mirabeau dirigées contre M. F... qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante ; qu'il y a lieu, en revanche, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la commune de Mirabeau la somme de 1 000 euros, à verser à M. F... en application de ces dispositions ;

D É C I D E :

Article 1er : La requête de la commune de Mirabeau est rejetée.

Article 2 : La commune de Mirabeau versera la somme de 1 000 (mille) euros à M. F... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. E... F...et à la commune de Mirabeau.

Délibéré après l'audience du 18 février 2016, où siégeaient :

- Mme Josset, présidente-assesseure, présidant la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative,

- Mme G..., première conseillère,

- Mme Gougot, première conseillère.

Lu en audience publique, le 26 avril 2016.

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N° 14MA01433


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 14MA01433
Date de la décision : 26/04/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

68-01-01-02-01 Urbanisme et aménagement du territoire. Plans d'aménagement et d'urbanisme. Plans d`occupation des sols (POS) et plans locaux d'urbanisme (PLU). Application des règles fixées par les POS ou les PLU. Application dans le temps.


Composition du Tribunal
Président : Mme JOSSET
Rapporteur ?: Mme Isabelle GOUGOT
Rapporteur public ?: M. SALVAGE
Avocat(s) : ADAMAS - AVOCATS ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 12/11/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2016-04-26;14ma01433 ?
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