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20/09/2016 | FRANCE | N°14MA03164

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 4ème chambre - formation à 3, 20 septembre 2016, 14MA03164


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société en nom collectif (SNC) Thalabanyuls a demandé au tribunal administratif de Montpellier de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos en 2007, 2008 et 2009, des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été assignés au titre de la période du 1er janvier au 31 décembre 2008, ainsi que des pénalités correspondantes.

Par un jugement n° 1204472 du 15 mai 2014, le tribunal administ

ratif de Montpellier a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société en nom collectif (SNC) Thalabanyuls a demandé au tribunal administratif de Montpellier de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos en 2007, 2008 et 2009, des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été assignés au titre de la période du 1er janvier au 31 décembre 2008, ainsi que des pénalités correspondantes.

Par un jugement n° 1204472 du 15 mai 2014, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire enregistrés le 16 juillet 2014 et le 1er septembre 2016, la SNC Thalabanyuls, représentée par Me A..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Montpellier du 15 mai 2014 ;

2°) de prononcer la décharge des impositions en litige ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le vérificateur ayant poursuivi le contrôle dans son bureau alors que les opérations de vérification sur place étaient terminées, elle n'a pu débattre contradictoirement des redressements relatifs aux abandons de créance et à la taxe sur la valeur ajoutée ;

- selon la doctrine administrative du 1er juillet 2002 référencée 13 L-1314, les opérations de vérification sur place se terminent le jour de la dernière intervention sur place précédant l'envoi de la notification de redressements ;

- les abandons de créances qu'elle a consentis à la société soeur Thalacap sont justifiés par la situation de cette dernière et par les liens juridiques les unissant ;

- le montant des impositions est erroné dès lors que l'administration a procédé à une compensation.

Par des mémoires enregistrés le 8 décembre 2014 et le 2 septembre 2016, le ministre des finances et des comptes publics conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par la société requérante ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus, au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Carotenuto,

- et les conclusions de M. Ringeval, rapporteur public.

1. Considérant qu'à l'issue d'une vérification de comptabilité, la SNC Thalabanyuls, qui exerce une activité de location de biens immobiliers, a fait l'objet, selon la procédure de rectification contradictoire, de rehaussements en matière d'impôt sur les sociétés au titre des exercices clos en 2007, 2008 et 2009, ainsi que de rappels de taxe sur la valeur ajoutée au titre de la période du 1er janvier au 31 décembre 2008 ; que la SNC Thalabanyuls relève appel du jugement en date du 15 mai 2014 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande tendant à la décharge, en droits et pénalités, des impositions supplémentaires d'impôts auxquelles elle a ainsi été assujettie ;

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

En ce qui concerne l'application de la loi fiscale :

2. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 52 du livre des procédures fiscales, dans sa rédaction applicable : " I. - Sous peine de nullité de l'imposition, la vérification sur place des livres ou documents comptables ne peut s'étendre sur une durée supérieure à trois mois en ce qui concerne : / 1° Les entreprises industrielles et commerciales ou les contribuables se livrant à une activité non commerciale dont le chiffre d'affaires ou le montant annuel des recettes brutes n'excède pas les limites prévues au I de l'article 302 septies A du code général des impôts ; (...) " ;

3. Considérant qu'il résulte de l'instruction que les opérations de contrôle de la société requérante ont commencé le 23 juin 2010 ; que les demandes de documents comptables formulées par le vérificateur les 30 août, 2 et 20 septembre 2010, soit avant la notification à l'intéressée, le 18 octobre suivant, de la proposition de rectification datée du 27 septembre 2010, doivent être rattachées aux opérations de vérification de la comptabilité de la SNC Thalabanyuls, qui contrairement à ce que soutient la requérante ne se sont pas achevées le 26 août 2010 lors de la dernière intervention du vérificateur dans ses locaux ; qu'ainsi, il ne résulte pas de l'instruction que le vérificateur aurait demandé des justifications à la SNC Thalabanyuls après l'expiration, le 22 septembre 2010, du délai de trois mois prévue par les dispositions précitées de l'article L. 52 du livre des procédures fiscales ; qu'il s'ensuit qu'en l'espèce la durée du contrôle n'a pas excédé ce délai ;

4. Considérant, en second lieu, que le caractère contradictoire que doit revêtir la vérification de comptabilité en vertu des articles L. 47 à L. 49 du livre des procédures fiscales et de la charte des droits et obligations du contribuable vérifié rendue opposable à l'administration par l'article L. 10 du même livre, interdit au vérificateur d'adresser la proposition de rectification qui, selon l'article L. 48 du même livre, marquera au plus tard l'achèvement de son examen, sans avoir, au préalable, engagé un dialogue contradictoire avec le contribuable sur les éléments qu'il envisage de retenir ; que, lorsque, comme en l'espèce, la vérification de la comptabilité a été effectuée dans les propres locaux de l'entreprise, si celle-ci allègue que les opérations de vérification ont été conduites sans qu'elle ait eu la possibilité d'avoir un débat oral et contradictoire avec le vérificateur, il lui appartient de justifier que ce dernier se serait refusé à un tel débat ; que, lorsqu'après la fin des opérations de contrôle sur place, le vérificateur obtient des pièces nouvelles, celles-ci sont présumées ne pas avoir fait l'objet d'un débat oral et contradictoire, sauf preuve contraire rapportée par l'administration ; que l'absence de débat, dans une telle hypothèse, n'est en principe pas de nature à affecter la régularité de la procédure d'imposition, sauf s'il apparaît que les pièces recueillies après la fin des opérations de vérification, en raison de leur teneur, de leur portée et de l'usage qui en a été fait par l'administration, impliquaient la réouverture du débat oral et contradictoire sur la comptabilité de l'entreprise ; qu'aucune disposition législative ou réglementaire n'impose au vérificateur de donner au contribuable, avant l'envoi de la proposition de rectification, une information sur les redressements qu'il pourrait envisager ;

5. Considérant que la SNC Thalabanyuls ne conteste pas avoir eu plusieurs entretiens avec le vérificateur pendant la vérification de comptabilité dont elle a fait l'objet ; que si elle soutient n'avoir pu débattre contradictoirement des redressements relatifs à la taxe sur la valeur ajoutée et aux abandons de créances qu'elle avait consenties à la SA Thalacap, fondés sur l'examen de documents produits à la suite des demandes formulées les 30 août, 2 et 20 septembre 2010 par le vérificateur, postérieurement au dernier entretien du 26 août 2010, il résulte de l'instruction que c'est du fait de la société requérante que la réunion de synthèse fixée au 18 octobre 2010 n'a pu avoir lieu ; qu'ainsi, il ne résulte pas de l'instruction que le vérificateur ne se serait pas prêté au débat oral et contradictoire auquel il était tenu ;

En ce qui concerne l'opposabilité de la doctrine administrative :

6. Considérant que la requérante ne peut utilement invoquer les énonciations du paragraphe n° 8 de la documentation de base du 1er juillet 2002 référencée 13 L-1314 selon lesquelles les opérations de vérification sur place se terminent le jour de la dernière intervention sur place précédant l'envoi de la notification de redressements, dès lors que ces énonciations, qui traitent de questions touchant à la procédure d'imposition, ne peuvent être regardées comme comportant une interprétation de la loi fiscale au sens de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales ;

Sur le bien-fondé des impositions :

7. Considérant, d'une part, qu'il résulte des articles 38 et 39 du code général des impôts, dont les dispositions sont applicables à l'impôt sur les sociétés en vertu de l'article 209 du code général des impôts, que le bénéfice imposable à l'impôt sur les sociétés est celui qui provient des opérations de toute nature faites par l'entreprise, à l'exception de celles qui, en raison de leur objet ou de leurs modalités, sont étrangères à une gestion commerciale normale ; que les prêts sans intérêts ou les abandons de créances accordés par une entreprise au profit d'un tiers ne relèvent pas, en général, d'une gestion commerciale normale, sauf s'il apparaît qu'en consentant de tels avantages, l'entreprise a agi dans son propre intérêt ; que s'il appartient à l'administration d'apporter la preuve des faits sur lesquels elle se fonde pour estimer qu'un abandon de créances ou d'intérêts consenti par une entreprise à un tiers constitue un acte anormal de gestion, elle est réputée apporter cette preuve dès lors que cette entreprise n'est pas en mesure de justifier qu'elle a bénéficié, en retour, de contreparties ; que, dans l'hypothèse où l'entreprise apporte une telle justification, il incombe ensuite à l'administration, si elle s'y croit fondée, d'apporter la preuve de ce que cette contrepartie est dépourvue d'intérêt pour l'entreprise ou que sa rémunération est excessive ;

8. Considérant qu'il résulte de l'instruction que la SNC Thalabanyuls, qui a pour objet la location de terrains et autres biens immobiliers, a conclu un bail commercial avec la SA Thalacap, membre comme la société requérante du groupe Symbiose, pour la location des bâtiments du centre de thalassothérapie situé sur le territoire de la commune de Banyuls-sur-Mer ; que, par procès-verbaux d'assemblée générale extraordinaire des 21 décembre 2007, 1er décembre 2008 et 30 décembre 2009, la SNC Thalabanyuls a consenti des abandons de loyers et charges au profit de la société Thalacap ; qu'elle a déduit des résultats des exercices clos en 2007, 2008 et 2009 les abandons de créance ainsi accordés à hauteur des sommes respectives de 500 000 euros, 223 769,33 euros et 44 201 euros ; que si la société requérante se prévaut des difficultés économiques rencontrées par la SA Thalacap et de ce qu'elle était liée à cette dernière par un jugement du 21 décembre 1994 du tribunal de commerce de Montpellier prononçant la confusion des patrimoines entre les différentes procédures collectives ouvertes à l'égard de douze sociétés du groupe Symbiose, il ressort du rapport établi en septembre 2010 à la demande du comité d'entreprise de la société Thalacap que la politique de non facturation des loyers à cette société a dégradé la propre situation financière de la SNC Thalabanyuls, qui se trouvait en 2008 et 2009 dans une situation d'endettement alarmante ; que l'administration fait valoir, sans être sérieusement contredite, que l'absence de perception de loyers par la société requérante était de nature à conduire, à défaut de réalisation de chiffre d'affaires, à la cessation de son activité de location des locaux commerciaux situés à Banyuls-sur-Mer ; qu'il n'est pas démontré, alors notamment que la société Thalacap a dégagé des résultats bénéficiaires au titre des exercices 2007 et 2008, que les abandons de créance consentis par la SNC Thalabanyuls auraient permis à la société Thalacap d'échapper à une cessation de paiements ni qu'ils auraient permis d'assurer la survie du groupe Symbiose ; que, dans ces conditions, faute pour la SNC Thalabanyuls de justifier qu'elle a bénéficié de contreparties à raison des avantages consentis à la société Thalacap, l'administration doit être regardée comme établissant que les opérations en litige constituaient des actes anormaux de gestion ; qu'il s'ensuit que c'est à bon droit que le service a réintégré les montants des loyers dus par la société Thalacap dans les résultats imposables de la société requérante ;

9. Considérant, d'autre part, que si la SNC Thalabanyuls se prévaut de ce que l'administration a procédé à une compensation par imputation sur les impositions en litige d'une créance correspondant à un remboursement de crédit de taxe sur la valeur ajoutée, cette circonstance, qui n'est pas relative à l'assiette de l'impôt mais à son recouvrement, est sans incidence, contrairement à ce qui est soutenu, sur le quantum des impositions qui lui sont réclamées ;

10. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la SNC Thalabanyuls n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

11. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, soit condamné à payer à la SNC Thalabanyuls la somme qu'elle demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

D É C I D E :

Article 1er : La requête de la SNC Thalabanyuls est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la SNC Thalabanyuls et au ministre de l'économie et des finances.

Copie en sera adressée à la direction de contrôle fiscal sud-est.

Délibéré après l'audience du 6 septembre 2016, où siégeaient :

- M. Cherrier, président,

- Mme Carotenuto, premier conseiller,

- Mme Mastrantuono, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 20 septembre 2016.

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N° 14MA03164

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 4ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 14MA03164
Date de la décision : 20/09/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-04-02-01-04-082 Contributions et taxes. Impôts sur les revenus et bénéfices. Revenus et bénéfices imposables - règles particulières. Bénéfices industriels et commerciaux. Détermination du bénéfice net. Acte anormal de gestion.


Composition du Tribunal
Président : M. CHERRIER
Rapporteur ?: Mme Sylvie CAROTENUTO
Rapporteur public ?: M. RINGEVAL
Avocat(s) : ARDITI

Origine de la décision
Date de l'import : 28/09/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2016-09-20;14ma03164 ?
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