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06/10/2016 | FRANCE | N°14MA04052

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 1ère chambre - formation à 3, 06 octobre 2016, 14MA04052


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Immodelta et M. D... B...ont demandé au tribunal administratif de Marseille de condamner l'Etat à leur verser une somme de 660 798,19 euros en réparation du préjudice causé par l'illégalité fautive des décisions prises par la commune, au nom de l'Etat, qui les ont empêchés, pendant huit ans, de réaliser une construction à usage commercial et d'exploiter ce local.

Par un jugement n° 1202231 du 4 juillet 2014, le tribunal administratif de Marseille a rejeté leur demande.

Pro

cédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 25 septembre 2014, la société Imm...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Immodelta et M. D... B...ont demandé au tribunal administratif de Marseille de condamner l'Etat à leur verser une somme de 660 798,19 euros en réparation du préjudice causé par l'illégalité fautive des décisions prises par la commune, au nom de l'Etat, qui les ont empêchés, pendant huit ans, de réaliser une construction à usage commercial et d'exploiter ce local.

Par un jugement n° 1202231 du 4 juillet 2014, le tribunal administratif de Marseille a rejeté leur demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 25 septembre 2014, la société Immodelta et M. B..., représentés par Me A..., demandent à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Marseille du 4 juillet 2014 ;

2°) de condamner l'Etat à leur verser cette somme de 660 798,19 euros ;

3°) de condamner l'Etat à leur verser une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- le classement sans suite de leur demande de permis de construire était illégal ;

- l'arrêté interruptif de travaux était illégal ;

- cet arrêté et le classement sans suite du 6 juillet 2001 de la demande de permis de construire leur ont causé divers préjudices d'exploitation et un préjudice moral dont ils demandent réparation.

Par un mémoire en défense, enregistré le 1er octobre 2015, la ministre du logement, de l'égalité des territoires et de la ruralité conclut au rejet de la requête.

Elle soutient que les moyens soulevés ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Josset,

- et les conclusions de Mme Giocanti.

1. Considérant qu'il résulte de l'instruction que la société Immodelta a déposé, le 13 décembre 2000, une demande de permis de construire pour le réaménagement et l'extension de locaux commerciaux situés sur le territoire de la commune de Verquières ; que la société Immodelta, après avoir constaté que la commune, qui lui avait remis le récépissé du dépôt de cette demande, ne l'avait, en revanche, pas informée de la date limite à laquelle elle devait lui notifier sa décision concernant ladite demande, a requis l'instruction de celle-ci par lettre adressée le 28 décembre 2000 au directeur départemental de l'équipement des Bouches-du-Rhône ; que postérieurement, la commune a adressé à plusieurs reprises, et notamment dans des courriers datés des 22 janvier et 19 mars 2001, des demandes de production de plusieurs pièces à la société pétitionnaire aux fins de voir compléter son dossier ; que, par une dernière correspondance adressée dans le cadre de l'instruction le 5 avril 2001, la commune a informé la société Immodelta que son dossier demeurait incomplet ; que par décision du 6 juillet 2001, le maire de la commune de Verquières a classé sans suite la demande en cause ; que, par arrêté en date du 17 janvier 2002, cette même autorité a mis en demeure la société Immodelta " de cesser immédiatement les travaux de construction de l'agrandissement d'un local commercial entrepris, sis route nationale 7 à Verquières " ; que, par jugement du 18 novembre 2004, le tribunal administratif de Marseille a annulé la décision du 6 juillet 2001 précitée ainsi que l'arrêté du 17 janvier 2002 ; que la cour administrative d'appel de Marseille, par arrêt du 27 novembre 2008, a confirmé, en procédant à une substitution de motif, l'annulation de la décision du 6 juillet 2001 et a rejeté les conclusions présentées par la commune de Verquières concernant l'arrêté du 17 janvier 2002 en relevant que celle-ci n'avait pas la qualité de partie à l'instance et n'était ainsi pas recevable à interjeter appel du jugement rendu le 18 novembre 2004 sur cette demande ; que la société Immodelta et M. B... relèvent appel du jugement du 4 juillet 2014 par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté leur demande tendant à la condamnation de l'Etat à leur verser la somme de 660 798,19 euros à titre de dommages-intérêts en réparation des préjudices résultant de l'illégalité fautive de la décision prise par la commune de Verquières au nom de l'Etat ;

2. Considérant qu'en principe, toute illégalité commise par l'administration constitue une faute susceptible d'engager sa responsabilité, pour autant qu'il en soit résulté un préjudice direct et certain ; que la responsabilité de l'administration ne saurait être engagée pour la réparation des dommages qui ne trouvent pas leur cause dans cette illégalité mais découlent directement et exclusivement de la situation irrégulière dans laquelle la victime s'est elle-même placée, indépendamment des faits commis par la puissance publique, et à laquelle l'administration aurait pu légalement mettre fin à tout moment ;

3. Considérant, en premier lieu, que si le tribunal administratif de Marseille, dans son jugement déjà évoqué du 18 novembre 2004 a estimé que la société Immodelta était titulaire d'un permis de construire tacite à la date du 6 juillet 2001 et a annulé, pour ce motif, la décision du 6 juillet 2001 classant sans suite sa demande de permis de construire, il est constant que la Cour, pour confirmer cette annulation, a censuré expressément ce motif d'annulation pour en substituer un nouveau tiré de ce que la commune, au vu des éléments qu'elle possédait, ne pouvait pas classer sans suite la demande de la société ; que, dans ces conditions, la société Immodelta ne peut utilement soutenir que la Cour, dans son arrêt, aurait confirmé son droit à se prévaloir d'un permis de construire tacite ; que les requérants ne produisent, par ailleurs, aucun élément susceptible de justifier qu'ils seraient titulaires d'un permis tacite ;

4. Considérant, en deuxième lieu, que le tribunal administratif, dans ce même jugement du 18 novembre 2004, a annulé l'arrêté du 17 janvier 2002 mettant en demeure la société d'interrompre les travaux de construction qu'elle avait entrepris, par voie de conséquence de l'annulation de l'arrêté de 6 juillet 2001 classant sans suite la demande de la société pétitionnaire ; que si ce jugement est devenu définitif sur ce point, dès lors que l'appel de la commune contre ce jugement a été rejeté pour irrecevabilité, il résulte de ce qui a été dit précédemment que la société, qui n'était pas titulaire d'un permis de construire, ne pouvait, en tout état de cause, entreprendre des travaux ; que, dans ces conditions, ainsi que l'a jugé à bon droit le tribunal, en débutant les travaux projetés alors qu'elle ne justifiait d'aucune autorisation de construire, la société Immodelta s'est placée, elle-même, dans une situation irrégulière ; que, d'autre part, le maire de la commune de Verquières, au vu du procès-verbal de constat d'infraction aux règles d'urbanisme dressé le 18 décembre 2000, se trouvait en situation de compétence liée pour prendre un arrêté interruptif de travaux ; qu'en conséquence, et alors même que le tribunal administratif de Marseille a annulé, le 18 novembre 2004, l'arrêté interruptif de travaux du 17 janvier 2002, le maire était tenu de prendre une telle décision ; que cette circonstance est de nature à écarter l'engagement de la responsabilité de l'Etat, dès lors que l'illégalité fautive de l'arrêté du 17 janvier 2002 ne peut être regardée comme étant à l'origine des préjudices subis par la société Immodelta relatifs au coût des travaux de construction et des intérêts des prêts pour les financer jusqu'à ce leur interruption le 17 janvier 2002, et à un prétendu préjudice moral subi par le gérant résultant de cette interruption ; que, par ailleurs, la société Immodelta ne pouvait légitimement se prévaloir, dans les contrats de bail qu'elle dit avoir conclus le 4 septembre 2001 et le 10 novembre 2001, respectivement avec la société Trading et Marketing et la société AJ Services, être titulaire du permis de construire l'autorisant à réaliser les travaux sur lesquels elle s'engageait à défaut de quoi ces contrats pouvaient être résiliés de plein droit ; que la société pétitionnaire ne saurait, dès lors, être indemnisée des sommes versées à ces sociétés en raison de l'abandon du projet de construction des locaux qui devaient être pris en location par ces sociétés ;

5. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la société Immodelta et M. B... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par jugement du 4 juillet 2014, le tribunal administratif de Marseille a rejeté leur demande tendant à la condamnation de l'Etat à leur verser des dommages et intérêts ; que, par voie de conséquence, doivent être également rejetées leurs conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

D É C I D E :

Article 1er : La requête de la société Immodelta et de M. B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la société Immodelta, à M. D... B...et à la ministre du logement et de l'habitat durable.

Copie en sera adressée à la commune de Verquières.

Délibéré après l'audience du 22 septembre 2016, où siégeaient :

- M. Pocheron, président de chambre,

- Mme Josset, présidente assesseure,

- Mme C..., première conseillère.

Lu en audience publique, le 6 octobre 2016.

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N° 14MA04052

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 14MA04052
Date de la décision : 06/10/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

68-03-06 Urbanisme et aménagement du territoire. Permis de construire. Contentieux de la responsabilité (voir : Responsabilité de la puissance publique).


Composition du Tribunal
Président : M. POCHERON
Rapporteur ?: Mme Muriel JOSSET
Rapporteur public ?: Mme GIOCANTI
Avocat(s) : JUAN

Origine de la décision
Date de l'import : 18/10/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2016-10-06;14ma04052 ?
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