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10/10/2016 | FRANCE | N°15MA00331

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 5ème chambre - formation à 3, 10 octobre 2016, 15MA00331


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. F...A...et M. E...G...ont demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler, à titre principal, la délibération n° DTUP 001-614/12/CC en date du 26 octobre 2012 par laquelle la communauté urbaine Marseille Provence Métropole a approuvé la déclaration de projet pour la réalisation d'une ligne de bus à haut niveau de service (BHNS) entre la station de métro Bougainville et Saint-Antoine (Vallon des Tuves) à Marseille et, subsidiairement, en tant qu'elle ne prévoit pas d'itinéraires cyclables

sur le tracé BHNS.

Par un jugement n° 1208520 du 20 octobre 2014, le tribuna...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. F...A...et M. E...G...ont demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler, à titre principal, la délibération n° DTUP 001-614/12/CC en date du 26 octobre 2012 par laquelle la communauté urbaine Marseille Provence Métropole a approuvé la déclaration de projet pour la réalisation d'une ligne de bus à haut niveau de service (BHNS) entre la station de métro Bougainville et Saint-Antoine (Vallon des Tuves) à Marseille et, subsidiairement, en tant qu'elle ne prévoit pas d'itinéraires cyclables sur le tracé BHNS.

Par un jugement n° 1208520 du 20 octobre 2014, le tribunal administratif de Marseille a annulé cette délibération.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et deux mémoires complémentaires, enregistrés les 21 janvier 2015, 10 mars et 14 avril 2016, sous le n° 15MA00331, la communauté urbaine Marseille Provence Métropole, représentée par MeB..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Marseille du 20 octobre 2014 ;

2°) de rejeter la requête de Messieurs A...etG... ;

3°) de mettre à leur charge la somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- les dispositions de l'article L. 228-2 du code de l'environnement qui n'imposent pas que des itinéraires soient créés sur toute la longueur des voies concernées sont respectées ;

- elle n'a pas pu prévoir une piste ou un couloir cyclable tout le long du tracé de la ligne BHNS pour des raisons de sécurité et de configuration des lieux ;

- le tribunal administratif a retenu à tort que la sécurité et la création de zones 30 étaient sans incidence sur le litige ;

- une étude confirme le besoin de stationnement et l'existence de stationnement sauvage rendant impossible et dangereux la mise en place d'aménagements cyclables au sens de l'article L. 228-2 du code de l'environnement ;

- ces zones 30 instituées par arrêtés dans les noyaux villageois doivent être considérées comme des itinéraires cyclables ; les cycles ont été intégrés dans le couloir de bus là où la largeur du site propre est de 4,50 m ;

- la contestation des arrêtés " zone 30 " n'ont aucune influence sur la légalité de la déclaration de projet ;

- elle reprend à son compte ses écritures de première instance concernant les autres moyens soulevés devant les premiers juges.

Par quatre mémoires en défense, enregistrés les 15 février 2016, 29 mars 2016 et 25 avril 2016, M. A...et M.G..., représentés par MeC..., concluent, à titre principal, au rejet de la requête de la communauté urbaine Marseille Provence Métropole et demandent à la Cour :

1°) subsidiairement, d'ordonner une expertise afin d'apprécier si et dans quelle mesure, les portions dépourvues d'itinéraires cyclables peuvent l'être ;

2°) de mettre à la charge de la communauté urbaine Marseille Provence Métropole la somme de 1 500 euros à verser à M.A..., en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- la communauté urbaine Marseille Provence Métropole est sans intérêt à interjeter appel à l'égard de M. G...ni à demander sa condamnation à lui payer des frais irrépétibles ;

- l'argument sur les zones 30 n'est valable que pour les zones villageoises et ne couvre donc qu'une partie réduite du tracé ;

- non seulement elles ne possèdent pas le même objet qu'un itinéraire cyclable, mais elles ne présentent pas les mêmes garanties de sécurité et de fluidité de déplacement ;

- les quatre zones 30 instituées sont postérieures à la décision attaquée et ne sont instituées qu'à titre d'essai ;

- elles ne remplissent pas les conditions de l'article R. 411-4 du code de la route et sont dépourvues de tout aménagement de sorte qu'elles ne répondent pas aux besoins des cyclistes et donc de dispenser de la création d'itinéraires cyclables ;

- la communauté urbaine Marseille Provence Métropole ne justifie pas de la particulière étroitesse des voies en cause ni de ce que l'intégralité du tracé du BHS serait en site propre ;

- les séparateurs ne sont pas prévus sur l'ensemble du tracé ;

- la largeur de 4,50 m pour que les vélos puissent circuler dans les voies de bus est très excessive car 3 m suffisent en dehors des voies propres au BHNS ;

- les voies en cause ne sont pas spécialement étroites et peuvent accueillir des itinéraires cyclables ; en dehors des voies propres, les cyclistes peuvent parfaitement utiliser des voies de bus ;

- le stationnement automobile ne relève pas des " besoins et contraintes de la circulation " au sens de l'article L. 228-2 du code de l'environnement ;

- à supposer l'argument opérant, il ne constitue qu'un élément d'appréciation parmi d'autres, et notamment de la nécessité d'un itinéraire cyclable ;

- la communauté urbaine Marseille Provence Métropole ne précise pas où sont situées les places de stationnement indispensables qu'elle invoque.

Par ordonnance du 25 avril 2016, la clôture d'instruction a été fixée au 10 mai 2016.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des collectivités territoriales ;

- le code de l'environnement ;

- le code de la route ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Marchessaux,

- les conclusions de M. Salvage, rapporteur public ;

- et les observations de MeD..., pour la communauté urbaine Marseille Provence Métropole et celles de M.A... ;

1. Considérant que la communauté urbaine Marseille Provence Métropole relève appel du jugement en date du 20 octobre 2014 du tribunal administratif de Marseille qui a annulé la délibération en date du 26 octobre 2012 par laquelle elle a approuvé la déclaration de projet pour la réalisation d'une ligne de bus à haut niveau de service (BHNS) entre la station de métro Bougainville et Saint-Antoine (Vallon des Tuves) à Marseille ;

Sur la recevabilité des conclusions incidentes de M.G... :

2. Considérant que le mémoire en défense tendant au rejet de la requête d'appel de la communauté urbaine Marseille Provence Métropole est présenté pour M. A...et M.G... ; que, toutefois, les intimés ne contestent pas l'irrecevabilité des demandes de M. G...opposée par les premiers juges qui ont estimé que celui-ci ne justifiait pas d'un intérêt lui donnant qualité pour agir ; que, par suite, les conclusions de M. G...ne sont pas recevables ; qu'elles doivent, dès lors, être rejetées ;

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

3. Considérant qu'aux termes de l'article L. 228-2 du code de l'environnement, issu de l'article 20 de la loi n° 96-1236 du 30 décembre 1996 sur l'air et l'utilisation rationnelle de l'énergie : " A l'occasion des réalisations ou des rénovations des voies urbaines, à l'exception des autoroutes et des voies rapides, doivent être mis au point des itinéraires cyclables pourvus d'aménagements sous forme de pistes, marquage au sol ou couloirs indépendants, en fonction des besoins et contraintes de la circulation. / L'aménagement de ces itinéraires cyclables doit tenir compte des orientations du plan de déplacements urbains, lorsqu'il existe " ; qu'il ressort de ces dispositions et de leur rapprochement avec les débats parlementaires ayant précédé leur adoption, que le législateur a entendu imposer aux collectivités concernées, à l'occasion des réalisations ou des rénovations des voies urbaines, une obligation de mise au point d'itinéraires cyclables pourvus d'aménagements adaptés ;

4. Considérant que la délibération contestée a pour objet d'approuver la déclaration de projet concernant la réalisation d'une ligne de bus à haut niveau de service (BHNS) entre la station de métro Bougainville et Saint-Antoine (Vallon des Tuves) dans les 15ème et 16ème arrondissements de Marseille ; qu'il ressort des pièces du dossier que le projet en litige prévoit des travaux de reconfiguration de la voirie sur le tracé de la ligne comprenant, notamment, la réorganisation du stationnement, la réalisation de cheminement piétons, le traitement qualitatif des revêtements de trottoirs, la mise en place d'un nouveau mobilier urbain et la mise en accessibilité des stations ; qu'ainsi, eu égard à leur nature, leur ampleur et leur localisation, ces travaux induits par le projet de BHNS doivent être regardés comme constituant des rénovations de voies urbaines au sens des dispositions précitées de l'article L. 228-2 du code de l'environnement ; que, par ailleurs, il ressort de l'annexe de la déclaration de projet que la communauté urbaine Marseille Provence Métropole s'est engagée à réaliser un itinéraire cyclable sur une portion de la voie et à rencontrer le collectif Vélos en Ville suite à une réserve et une recommandation du commissaire enquêteur ; que selon cette annexe, la communauté urbaine a proposé l'élargissement à 4,50 m du site propre BHNS entre l'avenue des Anciens Combattants et la rue de la Gavotte, ainsi que des aménagements spécifiques pour les cycles ; que le document mentionne également que des zones 30 seront créées dans les traversées des noyaux villageois de la Cabucelle, Saint-Louis, la Viste et Saint-Antoine ; que, dès lors, la requérante n'est pas fondée à soutenir que le projet portant avant tout sur l'amélioration des conditions de circulation d'une ligne de transport collectif, il ne saurait être critiqué sur le fondement du L. 228-2 précité du code de l'environnement ;

5. Considérant qu'aux termes de l'article R. 110-2 du code de la route : " Pour l'application du présent code, les termes ci-après ont le sens qui leur est donné dans le présent article : (...) / zone 30 : section ou ensemble de sections de voies constituant une zone affectée à la circulation de tous les usagers. Dans cette zone, la vitesse des véhicules est limitée à 30 km/ h. Toutes les chaussées sont à double sens pour les cyclistes, sauf dispositions différentes prises par l'autorité investie du pouvoir de police. Les entrées et sorties de cette zone sont annoncées par une signalisation et l'ensemble de la zone est aménagé de façon cohérente avec la limitation de vitesse applicable. " ;

6. Considérant qu'il ressort de l'annexe à la déclaration de projet critiquée que la communauté urbaine Marseille Provence Métropole a décidé la création de zones 30 dans les traversées des noyaux villageois de la Cabucelle, Saint-Louis, la Viste et Saint-Antoine ; que ces zones qui sont affectées à la circulation de tous les usagers doivent comprendre des chaussées à double sens pour les cyclistes au sens des dispositions précitées de l'article R. 110-2 du code de la route ; que, dans ces conditions, comme le soutient la requérante, elles peuvent être prises en compte au titre des aménagements d'itinéraires cyclables tels que prévus par l'article L. 228-2 du code de l'environnement ; que M. A...ne peut utilement contester la légalité des arrêtés portant création de ces zones 30, ainsi que leurs modalités de réalisation, ces circonstances étant postérieures à la délibération contestée ;

7. Considérant, en revanche, qu'il ressort des pièces du dossier et n'est pas contesté par la communauté urbaine Marseille Provence Métropole que le projet en litige ne prévoit pas de créer des bandes cyclables dans les sections interurbaines au motif qu'elles seraient occupées par les véhicules en raison de la demande en stationnement ; qu'en outre, la requérante fait état d'un linéaire d'aménagements cyclables de 1,4 kilomètre sur un total de 8 kilomètres ; que pour justifier l'impossibilité de réaliser ces aménagements sur le reste de la voie urbaine rénovée, la communauté se prévaut de contraintes de sécurité et de configuration des lieux tenant à l'étroitesse des rues, de la suppression du séparateur TCSP dans les secteurs à grande circulation qui remettrait en cause la création d'un site propre, de la forte demande de stationnement dans le secteur des avenues Saint-Louis et La Viste, et d'un risque de stationnement sauvage ; que, toutefois, ces motifs au demeurant non établis ne sauraient exonérer la communauté urbaine Marseille Provence Métropole de son obligation de prévoir un aménagement d'itinéraires cyclables le long de la ligne BHSN au sens de l'article L. 228-2 précité du code de l'environnement ; que, dès lors, la communauté urbaine Marseille Provence Métropole n'est pas fondée à soutenir que ces besoins et contraintes ne lui permettaient pas d'aller au-delà de ce qu'elle a prévu ; qu'il suit de là que les premiers juges ont estimé à juste titre que la collectivité a méconnu les dispositions susvisées ;

8. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir opposée par M. A...et d'ordonner une expertise sur les possibilités de réaliser des itinéraires cyclables que la communauté urbaine Marseille Provence Métropole n'est pas fondée à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a annulé la délibération en date du 26 octobre 2012 ;

Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

9. Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation. " ;

10. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que M.A..., qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, verse à la communauté urbaine Marseille Provence Métropole quelque somme que ce soit au titre des frais que celle-ci a exposés et non compris dans les dépens ; qu'en revanche, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la communauté urbaine Marseille Provence Métropole la somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par M. A...et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

Article 1er : La requête de la communauté urbaine Marseille Provence Métropole est rejetée.

Article 2 : Les conclusions de M. G...sont rejetées.

Article 3 : La communauté urbaine Marseille Provence Métropole versera à M. A...la somme de 1 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la communauté urbaine Marseille Provence Métropole, à M. F...A...et à M. E...G....

Délibéré après l'audience du 26 septembre 2016, où siégeaient :

- M. Bocquet, président,

- M. Marcovici, président assesseur,

- Mme Marchessaux, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 10 octobre 2016.

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N° 15MA00331


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 5ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 15MA00331
Date de la décision : 10/10/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Actes législatifs et administratifs - Validité des actes administratifs - violation directe de la règle de droit - Loi - Violation.

Voirie - Composition et consistance - Pistes cyclables.

Voirie - Régime juridique de la voirie - Entretien de la voirie.


Composition du Tribunal
Président : M. BOCQUET
Rapporteur ?: Mme Jacqueline MARCHESSAUX
Rapporteur public ?: M. SALVAGE
Avocat(s) : ADAMAS - AVOCATS ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 22/11/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2016-10-10;15ma00331 ?
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