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01/12/2016 | FRANCE | N°15MA02301

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 3ème chambre - formation à 3, 01 décembre 2016, 15MA02301


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

I - M. C... A...a, par une requête enregistrée sous le n° 1305583, demandé au tribunal administratif de Marseille de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre des années 2008 et 2009.

II - M. A... a, par une requête enregistrée sous le n° 1305584, demandé au tribunal administratif de Marseille de prononcer la décharge des rappels de droit sur la taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés au titre de la pér

iode du 1er janvier 2008 au 31 décembre 2009.

Par un jugement n° 1305583, 1305584 du 24 ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

I - M. C... A...a, par une requête enregistrée sous le n° 1305583, demandé au tribunal administratif de Marseille de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre des années 2008 et 2009.

II - M. A... a, par une requête enregistrée sous le n° 1305584, demandé au tribunal administratif de Marseille de prononcer la décharge des rappels de droit sur la taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés au titre de la période du 1er janvier 2008 au 31 décembre 2009.

Par un jugement n° 1305583, 1305584 du 24 mars 2015, le tribunal administratif de Marseille a rejeté ces deux demandes.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 28 mai 2015 et un mémoire en réplique enregistré le 19 mai 216 M. A..., représenté par Me B..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Marseille du 24 mars 2015 ;

2°) de lui accorder la décharge des impositions litigieuses, et la restitution des sommes qui auraient été versées ;

3) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre de l'article L 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- l'irrégularité de l'avis de la commission départementale des impôts a pour effet de faire supporter la charge de la preuve par l'administration ;

- la comptabilité a été rejetée à tort pour défaut de caractère sincère et probant alors que rien ne s'opposait à ce que le service se livre à une analyse fine des données mises à sa disposition afin d'apprécier la cohérence entre les recettes enregistrées en fin de journée et les achats correspondants mis en oeuvre ;

- les autres anomalies constatées par le service ne sont pas pertinentes ;

- la méthode de reconstitution du chiffre d'affaires est sommaire et radicalement viciée dans son principe ;

- il est proposé une méthode alternative de reconstitution basée sur le nombre de serviettes en papier achetées en 2008 et 2009 ;

- le service n'apporte pas la preuve des manquements délibérés.

Par deux mémoires en défense enregistrés le 22 octobre 2015 et le 22 juin 2016, le ministre chargé du budget conclut au rejet de la requête et fait valoir qu'aucun des moyens de la requête n'est fondé.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Le président de la Cour a désigné Mme Evelyne Paix, président assesseur, pour présider la formation de jugement en cas d'absence ou d'empêchement de M. Bédier, président de la 3ème chambre, en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Haïli,

- et les conclusions de M. Maury, rapporteur public.

1. Considérant que M. A... demande à la Cour d'annuler le jugement du 24 mars 2015 par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté ses demandes tendant à la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre des années 2008 et 2009 et des rappels de droit sur la taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés, au titre de la période du 1er janvier 2008 au 31 décembre 2009 à la suite de la vérification de comptabilité de son entreprise individuelle de restauration-traiteur ;

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

2. Considérant qu'en vertu de l'article L. 59 du livre des procédures fiscales, l'administration peut saisir la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires prévue à l'article 1651 du code général des impôts lorsque le désaccord persiste sur les rectifications notifiées ; qu'une irrégularité entachant l'avis émis par ladite commission n'entraîne pas, par elle-même, la décharge des impositions sur lesquelles l'avis a été émis mais, en application des dispositions de l'article L. 192 du livre des procédures fiscales, a pour effet de faire reposer la charge de la preuve sur l'administration lorsque le litige est ensuite soumis au juge de l'impôt ;

3. Considérant que, dans son avis du 12 janvier 2012, la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaire a estimé " qu'à défaut de justificatifs de recettes suffisamment détaillés sur la période vérifiée, la méthode de l'administration qui s'appuie après dépouillement des notes client, sur une extrapolation des bières revendues apparaît cohérente et pertinente " et " que si aux dires du contribuable sa mise en oeuvre aboutit à des résultats sensiblement différents d'un exercice à l'autre, cette situation, outre qu'elle résulte des données intrinsèques à l'entreprise, elles-mêmes marquées par de fortes disparités, n'est combattue par aucun élément probant et circonstancié de nature à remettre en cause ses résultats " ; que ce faisant, la commission s'est bornée à comparer les éléments qui lui étaient soumis par les deux parties en présence et n'a pas inversé la charge de la preuve ; que cet avis qui est, contrairement à ce que soutient M. A..., suffisamment circonstancié, n'est pas irrégulier ;

Sur le bien fondé des impositions :

En ce qui concerne le rejet de la comptabilité et la charge de la preuve :

4. Considérant, qu'aux termes de l'article L. 192 du livre des procédures fiscales : " Lorsque l'une des commissions visées à l'article L. 59 est saisie d'un litige ou d'un redressement, l'administration supporte la charge de la preuve en cas de réclamation, quel que soit l'avis rendu par la commission. Toutefois, la charge de la preuve incombe au contribuable lorsque la comptabilité comporte de graves irrégularités et que l'imposition a été établie conformément à l'avis de la commission. La charge de la preuve des graves irrégularités invoquées par l'administration incombe, en tout état de cause, à cette dernière lorsque le litige ou le redressement est soumis au juge " ; qu'aux termes de l'article 54 du code général des impôts : " Les contribuables mentionnés à l'article 53 A sont tenus de représenter à toute réquisition de l'administration tous documents comptables, inventaires, copies de lettres, pièces de recettes et de dépenses de nature à justifier l'exactitude des résultats indiqués dans leur déclaration " ;

5. Considérant qu'il résulte de l'instruction que l'établissement " Le Tokyo " qui exploitait une double activité de restauration et de vente à emporter à Aubagne, n'était pas doté d'une caisse enregistreuse sur la période vérifiée ; que s'agissant de la restauration, la comptabilisation des recettes n'est justifiée que par des notes non exhaustives, détachées d'un carnet de souche dont les talons n'ont pas été conservés, ne comportant ni mention des desserts, ni mention de la taxe sur la valeur ajoutée et ne présentant aucune continuité de numérotation ; que les recettes de ventes à emporter ont été justifiées de même pour la période du 20 mars 2008 au 18 mai 2008 puis, à compter du 18 mai 2008, par des post-it sans date ni mention de la taxe sur la valeur ajoutée ; que, de plus, les recettes étaient enregistrées globalement en fin de journée ; qu'un procès-verbal de défaut de présentation de comptabilité a d'ailleurs été signé par M. A... le 19 novembre 2010 ; que si le contribuable fait valoir que certains documents retraçant son activité commerciale ont été transmis, que les autres anomalies relevées par l'administration fiscale sont contestables et représentent un pourcentage faible de son chiffre d'affaire, les graves irrégularités constituées par la globalisation des recettes et le défaut de pièces justificatives suffisaient, à elles seules, à écarter la comptabilité de l'entreprise ;

6. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le vérificateur a pu à bon droit écarter la comptabilité de l'établissement de M. A..., et procéder à la reconstitution des recettes de l'établissement " Le Tokyo " ; que dès lors que l'administration établit l'existence de graves irrégularités entachant la comptabilité et que les impositions en litige ont été établies conformément à l'avis émis par la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires, il appartient au contribuable d'établir l'exagération des bases d'imposition retenues par l'administration fiscale ;

En ce qui concerne la méthode de reconstitution des recettes :

7. Considérant que pour reconstituer le chiffre d'affaires de l'établissement vérifié, le vérificateur a dépouillé l'ensemble des notes clients produites pour les deux années vérifiées en distinguant l'activité de restaurant et l'activité de ventes à emporter ; qu'ayant constaté un écart entre le nombre de bouteilles de vins achetées et le nombre de bouteilles vendues, et la quantité négligeable de desserts, de saké et de café sur ces notes, le vérificateur a basé sa méthode de reconstitution sur la bière, produit retrouvé le plus souvent vendu sur celles-ci ; qu'il a ainsi déterminé un ratio de vente de bière par menu ; qu'à partir de celui-ci et des achats de bières, le vérificateur a déterminé le nombre de bières qui auraient dû être revendues, a calculé le nombre de couverts manquants, a recalculé le chiffre d'affaires et, enfin, déterminé les rectifications correspondantes ; qu'a été rajouté le chiffre d'affaire des desserts et du saké, reconstitué à partir des achats déclarés ;

8. Considérant que pour contester ladite méthode, M. A... relève que la variation du ratio retenu par le vérificateur qui s'établit à 14,27 pour 2008, et à 7,13 pour 2009 prouve l'incohérence de la méthode, que celle-ci ne distingue pas entre les deux secteurs d'activité alors que la consommation de bière est plus importante dans la restauration que dans la vente à emporter, et qu'elle ne prend pas en compte la consommation du personnel, les offerts, et la consommation de bière en cuisine ; que, toutefois, le requérant ne produit aucun élément justificatif à l'appui de ce chef de contestation, alors que la reconstitution a été opérée à partir des notes fournies par l'entreprise ; que le constat d'huissier en date du 1er août 2013, bien que postérieur à la période contrôlée, est sans incidence sur la reconstitution opérée par le service dès lors que celle-ci est fondée sur le nombre de couverts manquants ; qu'enfin, M. A... ne conteste pas avoir précisé lui-même au vérificateur que le nombre d'offerts était insignifiant et que les achats de denrées spécifiques au personnel d'origine chinois ont été admis en déduction ;

9. Considérant que le requérant propose la méthode alternative dite " des serviettes en papier " en 2008 et 2009 consistant à évaluer le nombre de clients à partir de celui des serviettes en papier achetées ; que, toutefois, en présence d'une activité partielle de vente à emporter et alors que la mise à disposition des serviettes en papier n'est pas systématique, cette méthode ne permet pas de déterminer le chiffre d'affaires de la période en litige avec une meilleure approximation que celle de l'administration ;

10. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le requérant n'apporte pas la preuve, qui lui incombe, du caractère excessivement sommaire, ou radicalement vicié de la méthode suivie par le vérificateur, ni, par suite, de l'exagération des rehaussements en matière d'impôt sur le revenu et des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été notifiés à raison de la reconstitution de son chiffre d'affaires ; que, dès lors, il n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande ;

Sur l'application des pénalités :

11. Considérant qu'aux termes de l'article 1729 du code général des impôts : " Les inexactitudes ou les omissions relevées dans une déclaration ou un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt ainsi que la restitution d'une créance de nature fiscale dont le versement a été indûment obtenu de l'Etat entraînent l'application d'une majoration de : a. 40 % en cas de manquement délibéré (...) " ;

12. Considérant qu'il incombe à l'administration, en application des dispositions de l'article L. 195 A du livre des procédures fiscales, d'établir l'intention du contribuable d'éluder l'impôt pour justifier de l'application de la majoration de 40 % en cas de manquement délibéré prévue à l'article 1729 du code général des impôts ; qu'eu égard à la minoration systématique du chiffre d'affaires de façon significative au cours des deux exercices vérifiés, et aux pratiques comptables irrégulières et répétées, l'administration doit être regardée comme apportant la preuve de l'intention délibérée d'éluder l'impôt ;

13. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande ; qu'il y a lieu, par voie de conséquence, de rejeter ses conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

D É C I D E :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... A...et au ministre de l'économie et des finances.

Copie en sera adressée à la direction de contrôle fiscal Sud-Est.

Délibéré après l'audience du 17 novembre 2016, à laquelle siégeaient :

- Mme Paix, président-assesseur, président de la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative,

- M. Haïli, premier conseiller,

- M. Ouillon, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 1er décembre 2016.

2

N° 15MA02301


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 15MA02301
Date de la décision : 01/12/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-04-01-02 Contributions et taxes. Impôts sur les revenus et bénéfices. Règles générales. Impôt sur le revenu.


Composition du Tribunal
Président : Mme PAIX
Rapporteur ?: M. Xavier HAILI
Rapporteur public ?: M. MAURY
Avocat(s) : MONDINI

Origine de la décision
Date de l'import : 27/12/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2016-12-01;15ma02301 ?
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